21.2⭐Je vais le détruire
Je n'ai aucune idée de l'heure qu'il est. Je me suis endormie en pleurant et je me réveille le cerveau en compote. Et le cœur en charpie.
Mes doigts glissent dans le dossier « T<3 » de ma galerie d'image, analysant chaque image de notre couple gardé en mémoire pendant dix ans.
Je retombe sur celle où nous sommes tous les trois, Tom, Tatiana et moi, datant d'il y a quelques années.
Mon ex est au milieu, sa main sur ma taille... et sur celle de Tatiana. C'est si anodin, mais maintenant, ça me fait si mal.
Cette photo me dégoûte. Sans même me rabaisser, ça me donne envie de vomir.
Peut-être qu'au fond de moi, je m'y attendais. Je le savais et cela explique pour la douleur est moins...
Non. J'ai tout de même envie de casser la gueule à Tom.
Soudain, j'entends la porte de la chambre s'ouvrir doucement lorsque Bennett entre, la pointe sur les pieds et la referme sans la faire claquer.
« Putain ! » s'exclame-t-il en croisant mon regard, la main sur le cœur.
Sa réaction me provoque un petit sourire et je me décale légèrement afin qu'il s'assoie sur le lit devant moi.
Il me tend une tasse de café chaud avant de dégager une de mes mèches sur mon front. « Comment tu te sens ? » me demande-t-il en me fixant droit dans les yeux.
Sa main tremble.
« Ça va. » réponds-je d'une voix enrouée avant de prendre une gorgée.
Il m'observe attentivement et ne commente pas mon mensonge avant de se mordiller les lèvres.
Il le savait.
Ce n'était peut-être pas confirmé pour Tatiana, mais il se doutait très bien que Tom m'avait trompé ce soir-là. S'il enquête depuis si longtemps, il a dû découvrir des choses qu'il ne voulait pas faire figurer sur le tableau en liège hier soir.
Ben tente de me prendre la main, geste que j'accepte, pour me serrer doucement les doigts comme pour me faire comprendre qu'il est là pour moi.
Je me sens en sécurité à ses côtés, même si tout le reste s'effondre.
« Tu mérites que l'on te traite comme une reine. »
Je cligne plusieurs fois des paupières alors que ses joues rougissent et qu'il est obligé de détourner le regard tant il est gêné.
— Pardon ? D'où vient cette phrase ?
— De Park... merde, je savais que c'était cucul.
— Un vrai romantique.
— J-je voulais dire que... enfin... pour tu sais quoi...
— Le fait que Tom m'ait trompé ?
— Ton ex est un con qui ne te mérite pas. Tu es une femme incroyable et ce qu'il a fait doit être la pire erreur de sa vie. J'ai totalement merdé en ne t'en parlant pas, mais je n'étais pas totalement sûr et... Je ne voulais pas te faire souffrir. C'est stupide parce que je suis le premier à me battre pour la quête de la vérité... et je ne t'ai rien dit.
— Merci, Ben.
— Je sais que tu ne-... Merci ?
— De m'avoir épargné ça le plus longtemps possible. Je crois sincèrement que si tu me l'avais dit au tout début, après notre rencontre, j'aurais fini en miette. Là, je suis certes un peu ravagé, mais surtout en colère et soulagé de ne pas être retourné dans les bras de Tom.
— Qu'est-ce qui a changé ?
— Tout. Asheville, Park, Nathan... Toi. Surtout toi. Il y a quelque temps, j'aurais pensé ne rien valoir, mais ma mère avait raison : être avec vous me donne plus confiance en moi. Je n'ai plus à me comparer aux autres et surtout pas à Tatiana.
Ben reste silencieux quelques secondes avant de froncer les sourcils et de murmurer avec une pointe d'émotion dans la voix :
« Tu as parlé de moi à ta mère ? »
Je ne peux retenir un petit rire et secoue la tête alors qu'il semble perturbé.
— Pas vraiment, c'est Viviane. Mais ma mère a bien remarqué que j'avais l'air plus heureuse depuis que je passais plus de temps avec mes amis.
— La pression.
Il esquisse un sourire après avoir soupiré de soulagement et nous restons un moment en silence, ses doigts entrelacés aux miens.
Finalement, après avoir terminé mon café, je le brise alors qu'un nœud s'est formé dans ma gorge depuis hier soir :
« Je sais qui a fait du mal à ta sœur. C'est Isaac. J'en suis certaine. »
Son visage se fige. Il prend une profonde inspiration avant de me lâcher la main et de se lever brusquement.
« Tu en es certaine ? »
Je hoche la tête, mes yeux fixés aux siens.
— J'y ai repensé et c'est évident. Tom est un con, mais s'il était en compagnie de Tatiana ce soir-là, jamais il ne se serait intéressé à ta sœur. Si c'est bien Isaac qui a signé l'autographe à sa place...
— Putain, je savais bien que quelque chose clochait avec lui. C'était mon deuxième suspect, mais je m'étais dit qu'avec sa carrière, il n'aurait pas fait ça. Prendre le risque que ma sœur le balance aurait pu détruire sa réputation.
— Excuse-moi, mais je le connais bien et il s'en fiche des gens « normaux ». Ceux qui ne sont pas du milieu. La parole d'une femme, avec les antécédents de ta sœur, n'aurait jamais pesé contre lui. Il se croit intouchable.
— L'enculé... Mais est-ce que toi... Il t'a... ?
— Il a essayé. Même quand je suis arrivée ici.
Bennett passe une main dans ses cheveux et je constate que les jointures de ses poings sont devenues blanches tant il les contracte.
— Je vais le détruire.
— Attends, nous n'avons pas de preuve concrète pour l'accuser.
— « Physiquement » le détruire.
— Ça pourrait nous desservir. Il est malin et je suis certaine qu'il a le bras assez long pour se tirer d'affaire. Prouver un viol, c'est déjà compliqué...
— Alors quand la victime n'est plus en vie... Je sais. Mais je ne peux pas rester les bras croisés !
— Quel était ton plan ? Quand tu pensais que c'était Tom, le coupable ?
— Moi aussi, j'ai le bras long. J'ai fait mes études avec des camarades de promo qui sont maintenant à des postes clés des réseaux d'informations. Autant dans des journaux télévisés que sur internet. J'avais déjà préparé un article extrêmement documenté, mais maintenant...
Je fixe l'écran de mon portable, l'air songeur, avant d'essayer de me mettre dans la tête d'Isaac.
S'il a bien abusé d'une femme pendant une soirée, Tom a dû voir quelque chose. Ou il peut témoigner. Il me doit bien ça. La story de Tatiana confirme la présence de Savannah sur les lieux et avec eux.
Isaac... Isaac...
Isaac est un type malsain. Les gens comme lui sont méticuleux, mais aussi...
— Pervers. Isaac est un pervers.
— Je m'en doute bien.
— Ce que je veux dire, c'est qu'il serait peut-être le genre à garder un « souvenir » de ce qu'il fait. C'est tordu, mais il faut l'envisager.
— Admettons. Comment est-ce que l'on peut s'en assurer. Il ne va pas te livrer son ordinateur sur un plateau d'argent.
— Il... pourrait le faire.
— Quoi ?
— Il pense encore que je t'ai « rayé » de ma vie. Si... Imaginons... Si je lui dis que je compte partir d'Asheville, définitivement ?
— Hors de question.
Ben est à deux doigts de sortir dans la rue pour tabasser quelqu'un tant il est furax. J'ai conscience que mon plan n'est pas du tout à son goût, mais c'est le seul moyen que l'on peut avoir.
— Tu vas te laisser te faire tripoter par ce potentiel violeur ?! s'exclame-t-il. Je refuse. Ça me...
— Tu as un meilleur plan ?
— Et s'il n'y a rien sur son ordinateur, hein ? Tu fais quoi ?
— Tu auras une raison valable de lui péter la gueule.
— Je n'aime définitivement pas ce plan. C'est trop risqué.
Il a totalement raison, mais je n'ai pas mieux pour attirer Isaac et détourner son attention. C'est dégradant et dégoûtant, mais je-
— Tom.
— Quoi ?
— S'ils restent « amis », c'est que ton ex a un moyen de le faire plonger. Au cas où, pour éviter qu'Isaac ne te parle de son infidélité. Je suis certain que c'est ce que l'on cherche.
— Et si ce n'est pas ça ?
— On reconsidèrera ton premier plan.
⭐⭐⭐
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