2.3⭐Parker Nabi Flynn
Ce samedi avec Viviane m'a beaucoup apporté et pour une fois, je ne me sentais plus seule avec mes démons.
L'aménagement de la boutique est terminé, mais il me reste encore la décoration à faire, préparer l'espace « détente » et surtout, mettre au point la communication pour l'ouverture.
— Fais attention avec ta camionnette.
— Pas de soucis, ma belle. Ah, j'y pense ! J'ai prévenu la nièce d'un de mes anciens camarades de classe. Elle devrait bientôt arriver et va pouvoir t'aider pour à décorer.
— Je t'ai dit que j'avais besoin de temps pour créer de nouvelles relations avec les gens... Et si elle n'est pas fiable ? Si elle se sert de moi pour t-
Mon amie m'interrompt en sortant de sa camionnette pour venir m'enlacer jusqu'à l'étouffement. Je comprends son intention, mais j'aimerais bien pouvoir respirer.
« Tu dois apprendre à faire de nouveau confiance aux gens, Alix. »
Ses mots me font à la fois peur, et me rassurent.
L'ancienne moi se serait moqué de mes faiblesses actuelles. J'ai subi beaucoup en dix ans et maintenant que je suis sortie de la tempête, je dois avancer et ne plus être prisonnière de mon passé.
Nous nous échangeons encore quelques paroles avant qu'elle ne reparte. Retourner dans la boutique silencieuse, après nos éclats de rire pendant l'installation, accentue mon mal-être sur le moment...
Lorsqu'une quinzaine de minutes plus tard, un immense bouquet de fleurs tente de passer la porte.
Je cours aider la personne souhaitant entrer, compressant malheureusement les fleurs pour les faire entrer, lorsque je croise le regard de la femme me l'ayant apporté.
Celle de je devine sans présentation, être celle dont Viviane m'a parlé plus tôt.
« Pouah ! J'aurais dû activer mes neurones avant de tout ramener d'un coup, mais au moins, c'est fait ! »
La première remarque que je me fais en la voyant, c'est qu'elle est si petite et fine qu'on pourrait la briser comme une brindille.
Elle a l'air fragile et pourtant, ses bras et ses jambes musclés sont couverts de tatouages de toutes les couleurs. Elle porte un corset rouge à pois assortis au ruban dans ses courts cheveux noirs, un pantalon en cuir et des Dr. Martens.
Accroché à son avant-bras, le casque d'une belle moto garé devant ma boutique, alors que le stationnement devrait être interdit.
Comment est-ce qu'elle a fait pour conduire avec cet immense bouquet ?
Sa langue lèche le piercing qu'elle a au coin de la lèvre alors que ses yeux noisette détaillent tout le magasin avant de s'attarder sur mon visage... jusqu'à ce qu'elle me tende la main.
« Salut ! Moi, c'est Parker Flynn. Mon oncle m'a dit que je devais t'aider. Mon prénom coréen c'est Nabi, ça veut dire papillon. Du coup, je me le suis tatoué sur l'épaule qui se fait manger par un dragon. Le tatoueur est un ami. Je l'aide parfois pour les gens qui souhaitent être percer. Et puis... »
Elle interrompt son monologue en sortant son portable avant de jurer et de me reprendre le bouquet des mains pour l'amener à mon comptoir.
— C'est chiant, Nate va avoir du retard. C'est mon fiancé. Nathan. On est ensemble depuis que je suis majeure. Je précise, car qu'il a neuf ans de plus que moi. Et on ne veut pas se marier. On s'est fiancé parce que dire « c'est mon/ma fiancé », c'est romantique.
— OK, euh... Moi c'est Alix.
— Ouais, je sais. Une Française. C'est un sexshop ici, c'est ça ? J'aime le concept. Ça manquait à cette ville de pervers. Mais ta boutique manque de « punch », tu vois ? Tu es localisé pas loin d'un lycée. Les ados sont en chaleur. Il faudrait aussi que tu vendes des bonbons en forme d'emojis suggestifs. Ça cartonnerait.
Quand est-ce qu'elle respire ?
Je pense que Viviane savait ce qu'elle faisait en parlant à son ami. Une femme comme elle est capable de briser ma carapace à l'usure.
— Les fleurs, c'est pour moi ?
— Oui ! Tu as des vases ? J'ai ouvert ma boutique il y a quatre ans maintenant. Quand on m'a annoncé que Viviane avait racheté l'ancienne papeterie pour en faire un sexshop, ça m'a tout de suite emballée ! La façade en brique rouge délavé, tout le charme du bâtiment et tout ce lierre qui a envahi les murs... j'adore !
— Euh... OK ?
— Est-ce que tu as du mal avec tout ce que je dis ? s'inquiète-t-elle soudain. J'ai un débit de parole assez rapide donc tu me préviens si tu ne me comprends pas.
— Globalement, j'ai saisi. Ça fait un moment que je vis sur le sol américain.
— Ok ! Très cool. Bon... en attendant les mecs, on va parler de décoration. Tu as des idées ?
Dans une vie fantasmée telle une série américaine, elle pourrait être ma future meilleure amie extravertie.
Dans la réalité, elle commence déjà à me fatiguer.
— Je suis arrivée il y a une semaine et je n'ai même pas fini mon déménagement à l'étage, donc les plans sont encore très vagues dans ma tête. J'ai des concepts, mais ils sont flous.
— Je vois...
Tout en bavardant, Parker a préparé six bouquets différents avec les fleurs qu'elle m'a ramenées. Cette fille est une vraie pile électrique.
Je nettoie les étagères en lui parlant de mes idées, des couleurs et de l'agencement que je désire pendant qu'elle me soumet des propositions pas si inintéressantes que ça.
Même si elle m'épuise déjà, elle a beaucoup d'imagination.
Et alors que nous sommes en train d'installer la machine à café dans le modeste espace vitré et insonorisé de la boutique, nous sursautons en entendant toquer sur la vitrine.
Devant moi, un ours. Enfin non, un chauve immense, une armoire à glace à la peau noire avec une énorme barbe taillée à la perfection. L'archétype du bucheron avec sa chemise à carreaux jaune et un petit bide.
— Enfin ! s'exclame Parker en embrassant la joue de son copain. Alix, voici Nate, mon fiancé. Chou, c'est ma nouvelle pote !
— Bonjour, et désolé du retard.
Je cligne plusieurs fois des yeux en observant le couple partir en direction de la sortie pour ramener une grande boîte remplie de vase en verre de toutes les couleurs.
Nathan, en quelques mots, m'a démontré que « les contraires s'attirent ». Il dégage une aura de tranquillité si puissante, à l'inverse de Parker, que ça en est troublant. Physiquement, ils n'ont rien à voir.
« Il est où l'autre carton ? » demande-t-elle avant qu'il ne lui désigne l'extérieur.
J'entends le bruit d'un coffre que l'on claque alors que Parker me montre avec intérêt les vases qui matcheraient le plus avec mes idées de décorations et ses fleurs.
Lorsqu'un homme rentre dans la papeterie :
— Mec, tu as oublié un des cartons à l'atelier.
— Merde, désolé Park. Ben me parlait en même temps que je chargeais la voiture donc si tu dois engueuler quelqu'un, c'est lui.
— Eh ! Ce n'est pas just-
Nos regards se croisent lorsqu'il passe la porte et à cet instant, je comprends pourquoi Nathan et Parker me semblaient visuellement familiers. Je l'ai vaguement vu hier soir, sur la table de pique-nique...
Avec le journaliste. Bennett.
⭐⭐⭐
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