XXI. 6 août 1940 - l'annonce

Désolée du retard, demain le prochain chapitre sera publié pour ne pas casser le rythme. Merci pour votre lecture ❤️

Le monde se réveillait peu à peu alors que les jumelles Duchesses prenaient leur petit-déjeuner. Eugène lisait le journal, ayant fini sa tasse de café. Hyades se servait des madelaines, se montrant très gourmande sur les sucreries. C'était peut-être son défaut.

Son mari apparut par derrière et déposa un baiser furtif dans son cou. Un sourire étira ses lèvres.

-Les enfants vont bientôt se réveiller, je m'occupe d'eux si tu veux.

-Non, attends, s'exclama-t-elle en lui attrapant sa main alors qu'il s'apprêtait à partir.

Il lui renvoya un regard curieux, de même que pour sa soeur et son beau-frère. Toute la tablée semblait attendre d'elle une explication.

-Assis-toi, commanda-t-elle.

Surpris, il obéit tout de même. Alexeï Dolonov n'aimait pas beaucoup recevoir des ordres, mais il avait du s'habituer au caractère impétueux de sa femme. Les débuts avaient été difficile, mais ils avaient réussi à trouver un juste milieu. L'amour n'était peut-être pas le mot qu'elle utiliserait pour décrire leur relation, mais le respect était bel et bien présent. Et c'était la seule chose qu'elle attendait de lui.

-Tu fais quoi là ? questionna Doliona.

-Attendons David. Nous avons quelque chose à annoncer.

La blonde faillit s'étouffer avec son café. Ses yeux s'arrondirent et Hyades ressentit sa panique soudaine. Elle tenta de lui transférer son calme, mais les fortes émotions étaient les plus difficiles à gérer. Tout ce qu'elle put faire fut la rassurer du regard et finir sa madelaine. Alexeï continuait de la dévisager mais elle l'ignora.

Par chance, leur frère arriva deux minutes plus tard, les cheveux ébourriffés par le sommeil. Depuis son élection au Conseil, il n'avait pas l'air de beaucoup dormir, aussi, voir ses yeux somnolents la rassura. Malheureusement, elle allait devoir mettre fin à sa paix spirituelle.

-David, j'espère que tu es bien réveillé.

Un sourcil tressauta, il resta immobile sur la terrasse, ne sachant quoi faire avec les mots qu'elle venait de lui jeter au visage.

-Pourquoi ?

-Doliona et moi avons quelque chose à dire.

Sa soeur aurait préféré se fondre dans sa chaise mais Hyades prit son courage à deux mains et se tint droite, le menton relevé. L'insistance visuel de son mari la mettait cependant très mal à l'aise. Si elle ne le connaissait pas assez bien, elle aurait cru qu'il lisait dans son esprit.

David finit par s'asseoir face à ses soeurs, l'air intrigué. Il jeta un coup d'oeil vers ses beaux-frères comme pour savoir s'ils étaient au courant de quelque chose, mais la réponse fut claire. Personne ne savait rien.

-Eh bien, dites.

-Nous voulons partir à la guerre.

Autant directement cracher le morceau. Et contrairement à ce qu'elle s'était attendu, elle n'eut aucun réaction. Ou du moins, rien d'apparent. Ils étaient peut-être trop choqués pour parler.

À en voir les expressions, c'était certainement cela.

Doliona sembla maudire le monde entier pour avoir une soeur si directe. Mais pourtant, Hyades avait la sensation d'avoir fait les choses bien. Passer par quatre chemins l'aurait épuisée. Telle était leur décision, alors plus vite ils se feraient une raison, et mieux ce serait.

-Tu rigoles j'espère ?

Ce n'était pas David qui avait parlé, mais Alexeï. Évidemment, elle s'était doutée que cela n'allait pas lui plaire. Mais sa décision était faite, elle n'allait pas changer d'avis juste parce que son mari était contre.

-J'ai l'air de rigoler ?

Son frère avait l'air totalement déboussolé. Avec les élections, peut-êre cela faisait trop à encaisser. Elle aurait du attendre.

-Quelle idée, échappa Alexeï dans un petit rire.

Doliona, qui avait repris contenance, le fusilla du regard.

-Nous sommes très sérieuses. Cette guerre ne se gagnera que s'il y a des sorciers prêts à se battre. Plus le nombre de partisans sera nombreux, et plus nous aurons de chance de remporter cette victoire.

-Mais vous ne savez pas ce qu'est une guerre, souffla David qui semblait horrifié à l'idée de les savoir sur un champ de bataille.

-Personne ne sait ce qu'est la guerre, rétorqua Hyades. Mais ce n'est pas en restant ici que l'on va savoir.

-Il est hors de question que tu partes.

Les propos d'Alexeï glaça Hyades. Qui pensait-il être pour lui imposer son choix ? Elle n'était pas là pour lui demander son avis. Elle était là pour lui annoncer la nouvelle.

-Je partirai, trancha-t-elle avec froideur.

-Et que ce passera-t-il si tu meurs là-bas ? Qu'adviendra-t-il des enfants ?

-Les enfants ont un père, que je sache, claqua-t-elle avec sa langue. Et si je meurs, ils sauront que je suis morte en défendant la France. C'est une valeurs qu'ils doivent apprendre.

-Hyades, ne fais pas ça.

-Pourquoi cela te dérange autant ?

-Parce que...

Il se pinça l'arrête du nez, les mots soudainement envolés. Elle ne comprenait plus rien. Qu'il n'aille pas lui sortir qu'il l'aimait parce qu'elle ne le...

-Je tiens à toi.

Doliona faillit s'étrangler une deuxième fois avec sa salive. Sa toux fut la seule chose qui permit de briser le silence de pierre. Hyades se retrouvait sans mot. Elle ne s'était pas attendue à ça. Malgré les mots qu'il venait de dire, le visage d'Alexeï demeura aussi froid que du marbre. Après tout, il ne changerait jamais, peu importe ce qui sortait de sa bouche.

-Personne ne me retiendra, déclara-t-elle après quelques minutes de réflexion.

-Les filles, intervint David d'une voix fébrile. Cette guerre s'annonce sanglante.

-Tu ne sais même pas qui sera notre ennemi, rétorqua Doliona.

-Les pays de l'Est ne semble pas très contents de l'ascension de Grindelwald. La Confédération Internationale a été convoquée pour dans une semaine, mais nous pouvons déjà deviner qui affrontera qui.

-Je pensais que Grindelwald voulait s'attaquer aux moldus, parla pour la première fois Eugène.

-Mais avant ça, il veut unifier l'idéologie magique. La première guerre sera une guerre entre sorciers.

Hyades savait déjà tout cela. Si elle voulait se ranger aux côtés de Grindelwald, c'était parce qu'elle croyait en leur suprématie. Les sang-purs se cachaient depuis trop longtemps. Il était temps pour eux de se dévoiler au monde et de prouver leurs droits légitimes. Seule la magie pouvait doter un homme d'un caractère divin. Le reste n'était que banalité.

-Nous nous battrons, insista Hyades. J'accepte de donner mon âme à la France, si cela signifie offrir un futur meilleur pour mes enfants.

-Tu penses comme elle ?

Doliona se tourna vers son mari, un "pardon" silencieux agitant ses iris.

-Oui, bien sûr.

Eugène ne s'opposa pas. Il accepta juste, parce qu'il savait qu'elle ne changerait pas d'avis. Cette décision ne l'enchantait guère, mais il la respectait.

Ce que Alexeï ne savait évidemment pas faire.

-Alors c'est tout ? Tu annonces que tu vas partir te battre sans savoir si tu va revenir ou non ?

-C'est tout le concept d'une guerre, grimaça-t-elle.

-Je pense que c'est totalement irresponsable.

-Sais-tu ce que j'en pense, moi ? craqua-t-elle en l'affrontant yeux dans les yeux. Je pense que ton égo a été blessé. Parce que ce n'est pas toi qui part te battre, mais ta femme. Tu n'acceptes pas l'idée que les rôles soient inversés.

-Tu penses changer l'histoire mais tout ce que tu vas devenir va être un cadavre au milieu d'un cimetière vivant, siffla-t-il. Ton sacrifice sera inutile.

-Tous les sacrifices servent à quelque chose. Mais ce n'est pas le tiens, et ce n'est pas toi qui va recevoir la gloire après la victoire, et cette perspective te blesse.

-Pour qui me prends-tu ? Pour un de ces mysogines égoïstes qui considèrent leur femme comme des idiotes incapables, c'est ça ? Sache que je te respecte beaucoup, Hyades, mais je pense à notre famille. Aux enfants, à notre couple.

-Notre couple était perdu d'avance.

-Tu abandonnes si facilement, cracha-t-il avec amertume.

-Désolée de briser tes illusions, dans ce cas.

Elle se leva, épuisée par cette conversation. L'objectif était atteint. Ils savaient, et sa soeur et elle allaient pouvoir partir le plus tôt possible. Elle n'avait plus rien à faire à cette table. Mais quand elle tourna les talons, ce fut la voix de son frère qui la retint.

-Les deux frères Devigne ont été assassinés. J'ai été fait président le lendemain.

Son menton se tourna très légèrement et une mèche lui tomba devant les yeux. Elle n'apperçut pas l'intégralité du visage de David, mais elle put le deviner. Soupçon. Douleur.

-Je ne crois pas aux coïncidences, ajouta-t-il.

Elle se tourna complètement et pointa son regard sur lui. Il attendait une révélation.

-Nous sommes en guerre, mon frère. Des gens meurent pour servir des intérêts.

Il ne l'obtiendrait pas. Seuls le bruit de ses talons claquant contre le sol se fit entendre quand elle délaissa la terrasse. Les oiseaux ne chantaient pas ce matin. À croire qu'ils étaient morts.

Elle savait Régulus dans le bureau de feu leur père. Elle s'y invita sans même prendre la peine de toquer. Il l'attendait déjà.

Installé confortablement derrière l'écritoire, il l'observa entrer avec un air malicieux plaqué sur le visage. Elle détestait quand il prenait cette pose ; c'était comme se confronter au polititien pur et dur qu'il était. Mais bon, elle supposait que c'était ça, sa vraie nature.

-Alors ? s'enquit-il.

-C'est mon mari qui s'y ait opposé le plus.

Il haussa les sourcils, replaçant une plume sur le droit chemin.

-Voilà pourquoi je n'ai jamais voulu me marier.

Elle adorait son humour, vraiment. Dans un soupir dédaigneux, elle prit place sur la chaise face à lui, croisant ses jambes et déposant ses mains par dessus.

-Que sommes-nous censé faire, à présent ?

-Lycoris et moi rentrons en France dans deux jours. Doliona et toi, vous nous accompagnerez. Là-bas, vous rencontrerez ma cousine, Cassiopeia, et Perseus, son amant, qui se battront eux aussi aux côtés de Grindelwald. Enfin, Perseus sert plus d'espion que de combattant.

-Et Cassiopeia ? Sait-elle bien se battre ?

Il sourit à sa question. Hyades ne vit pas bien ce qu'il y avait de drôle mais ne fit aucune remarque.

-Mieux que personne, je dirais.

Sa réponse ne la satisfaisait pas vraiment. Cependant, elle n'insista pas. Elle verrait bien le genre de personne qu'était sa cousine en arrivant là-bas.

-Et mon frère ? Tu vas le laisser là une nouvelle fois ?

Son sourire fondit pour laisser place à une grimace.

-Je n'en ai nullement l'intention, seulement, je crois que je n'aurai pas le choix.

-Pourquoi dis-tu...

La porte du bureau s'ouvrit sur Lycoris. Régulus se redressa, son attention entièrement accaparée sur sa soeur. Celle ci s'avança, les bras croisés sur la poitrine. La gravité surplombait ses traits.

-Aucune réponse, prononça-t-elle froidement.

Il ferma un instant les yeux, semblant se contrôler pour ne pas balayer tous les ornements du bureau au sol.

-Qui à part cet idiot retardé ne profiterait pas d'une telle occasion ? grinça-t-il.

-Cassiopeia est revenue. Je pense que ça a un rapport avec elle.

Il frappa le bureau du plat de sa main. Hyades sursauta. Lycoris demeura de marbre ; peut-être y était-elle habituée.

-Évidemment. Cassiopeia, toujours Cassiopeia. Quand apprendra-t-il à rester à sa place ?

Le ton de sa voix ressemblait à une peau brûlée au fer rouge. Hyades ne savait pas de qui ils parlaient, mais visiblement, il n'y avait pas que ce prénommé Perseus qui était intéressé par Cassiopeia. Elle imagina un triangle amoureux et s'en réjouit presque. Pas pour la visible colère de Régulus, bien entendu, mais pour ce genre de situation qui ne se reproduisait que dans les romans.

-Il est trop tard pour envoyer une demande à Arcturus, à présent, réalisa-t-il avec amertume. Ou même à Harfang.

Lycoris dirigea son regard sur elle.

-David devra demeurer ici pour reprendre le Ministère jusqu'à ce qu'un Black vienne prendre sa place, lui expliqua-t-elle. Une fois fait, il agira comme Ambassadeur en Angleterre aux côtés de Régulus, et un membre de notre famille ici représentera l'alliance entre les Black et les Duchesses. Ainsi, personne ne pourra prendre votre place.

-C'est très intelligent, admit-elle. Et qui était censé venir ici avant votre départ ?

Elle avait bien compris que l'heureux élu n'avait envoyé aucune réponse positive et que, ainsi, Régulus et David devaient se séparer.

-Pollux Black, prononça sévèrement Régulus.

-Et qui est-il par rapport à Cassiopeia ? demanda-t-elle, curieuse de savoir quel genre de lien il entretenait avec cette femme qui semblait le retenir.

Régulus prit un temps de pause. Sa mâchoire se contracta.

-Son frère.

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