LVIII. 21 mai 1945 - la fin

Un vent frais souffla sur la place de la capitale. Vinda attendait depuis plusieurs minutes, debout devant la haute fontaine qui ne crachait plus d'eau. Un brouillard gris enveloppait les lieux, s'engouffrant dans les moindres recoins. Elle avait protégé les lieux pour qu'aucun sorcier ne s'approche. Grindelwald devait arriver à tout instant, pensant faire face à Régulus Black.
Quelle surprise il aurait quand il la verrait. Vinda avait hâte de contempler la décomposition de son visage.

Des pigeons se déposèrent sur les pavés, réalisant quelques pas boîteux. Leur bec piquèrent le sol pour attraper du vide. Vinda détourna l'attention de ces animaux, se concentrant sur la rue face à elle. Cinq minutes plus tard, elle entendit un craquement.

Les pans noirs du manteau de Grindelwald se soulevèrent sous la légère brise. Comme prévu, aucun Auror ne le suivait. Il avait respecté les supposés conditions de Régulus Black. Ou plutôt, ses propres conditions. Il eut besoin de temps avant de réaliser un pas dans sa direction. Les lèvres pincées, il la scrutait attentivement.

Il avait compris le piège.

-Pourquoi ? fut tout ce qu'il prononça.

Vinda se félicita d'avoir trompé le plus grand sorcier de tous les temps. Elle retint un sourire.

-Vous m'avez utilisée.

Plusieurs mètres de distance les séparait. La poussière des pavés remontait avec la brise et le brouillard. Les pigeons s'en étaient allés. On disait que l'espèce animal pressentait quand la mort arrivait.

-Tu m'avais juré fidélité.

-Je ne vous ai rien juré du tout.

La gravité de son expression parut aussi lourde qu'une pierre.

-Quand je pense, cracha-t-elle, quand je pense que j'ai condamné mon propre frère à sa perte pour que vous puissiez avoir une Black à votre service. Je me suis humiliée. J'ai humilié ma famille.

-Tu étais une femme assez indépendante pour te faire un nom en dehors de ta famille.

-Non, secoua-t-elle la tête. Voyez, quand on naît dans une maison noble, on dédie sa vie à cette maison. On se bat pour cette maison, on meurt pour cette maison. Le nom est la raison de vivre.

-J'avais de meilleurs idéaux que vos petites guerres familiales ! s'énerva-t-il.

-C'était ambitieux. Mais on ne crée pas une guerre quand il en existe déjà une. On utilise pas ses partisans comme des pions en pensant qu'ils adopteront la même idéologie que vous sans broncher quand derrière, il y a une autre bataille qui se livre. Ce fut votre erreur et ça vous condamnera.

-Vinda, souffla-t-il.

Le plus grand mage noir trahi par sa plus fidèle conseillère. Une pure tragédie. Cela la fit presque sourire.

-Votre règne est terminé.

Il s'apprêta à répondre quelque chose quand une silhouette imposa sa présence dans son dos. Elle sut de qui il s'agissait. Pile à l'heure.

Elle recula, laissant place à Albus Dumbledore. Ce qu'il y avait sur le visage de Grindelwald c'était... de la douleur. Oui, il avait mal. Il voyait ses idéaux s'effriter. Et même si des sorciers commettaient des crimes dans les quatre coins du monde pour lui, il n'avait plus personne à ses côtés. Cassiopeia était partie depuis plus d'un an déjà. Perseus l'avait suivie. Carl s'était volatilisé, les jumelles étaient mortes. Et elle, elle le trahissait. Ouvertement. Qu'avait-elle à cacher ?

Qu'il contemple sa propre création l'assassiner.

-Mon vieil ami, dit-il en grimaçant.

La poussière continuait de se soulever autour d'eux. Le ciel se faisait noir.

-Tu as causé trop de morts, Gellert. Il est temps que ça s'arrête.

-Tu rêvais de ce moment, n'est-ce pas ?

Il avança d'un pas, la main crispée autour de sa baguette.

-Pourtant, c'est ensemble qu'on a commencé ce parcours. Nous aurions pu être des légendes. Les sorciers qui réussirent à dominer la mort et le monde avec.

-J'étais jeune, répliqua calmement Dumbledore. Et aveugle.

-C'est l'excuse des lâches. Allons, bats-toi à présent. Sois un grand et affronte-moi.

Dumbeldore alla pour lever sa baguette quand Vinda cria :

-Non !

Adonis lui avait ordonné de partir dès que les choses se chaufferaient. Mais elle ne pouvait pas. C'était plus fort qu'elle. Elle avait dédié sa vie à cet homme, elle avait sacrifié la sauvegarde de sa famille pour ses idéaux utopiques. C'était elle qui devait lever la baguette sur lui. Elle devança Dumbledore et fit face à Grindelwald dans toute sa dignitié.

-Laissez-moi alors compléter votre légende.

Elle leva son bras. De la poussière grise balaya le bout de sa cape. Les épais nuages gris grondèrent. La lenteur de son geste, sa mâchoire serré, le menton relevé de Grindelwald, tout cela souleva sa poitrine. Elle pouvait le faire. Elle avait attendu ce moment avec tellement d'impatience, enfin elle y était. Enfin elle...

Un bruit électrique résonna dans la place. Les yeux de Vinda s'écarquillèrent.

Ses doigts délaissèrent sa prise. La baguette en bois de chêne s'écrasa lourdement contre le sol. Une froideur extrême se déversa dans ses veines.

Son corps s'effondra sur les pavés dans un bruit sec.

Grindelwald ne put parler. Il fixait le corps de sa plus fidèle partisane avec incompréhension, avant de relever les yeux sur Dumbledore. Celui-ci rebaissa son arme.

-C'était ça en échange d'un poste de directeur de Poudlard, prononça-t-il sans une once de fierté.

Un rire brisa le silence. Grindelwald ne put se retenir. C'était trop. Trop rapide, trop improbable. Régulus Black était fort, très fort, il ne le doutait plus à présent.

-Alors il ne reste que toi et moi.

Ils se dévisagèrent mutuellement. Une goutte tomba et humifia le sol. Puis une autre. Bientôt, la pluie s'écrasa lourdement sur la capital. Le ciel pleurait.

-Toi et moi.

***

Adonis Rosier passa par dessus des décombres. Il plongea son pied dans une flaque d'eau, humifiant le bas de son menteau. La fontaine était brisée en deux. Un ruissellement découlait d'elle. La bataille s'était entendue à des kilomètres, faisant rugir le ciel. Vinda n'était pas revenue.

Alors il était venu la chercher.

La place était déserte à présent. Le sol avait été violemment soulevé, les maisons autour n'étaient que des ruines. Le duel entre Dumbledore et Grindelwald ne pouvait pas exister dans l'imagination. Le pouvoir généré entre les deux ennemis avait été telle une bombe atomique. Personne ne pourrait jamais égaler la force qui avait soufflé sur Vienne. Mais tout le monde savait.

Il n'en était ressorti qu'un seul vainqueur.

Il parcourut son regard sur les petites montagnes de briques fissurées. Pas une âme ne se manifesta. Rien ne bougea. La mort s'était posée sur la place et ne voulait plus partir.

-Vinda ! cria-t-il.

Le son de sa propre voix lui fit mal. Il avança, perdu, analysant chaque petit bout de pierre en espérant voir sa soeur surgir du massacre. Un détail attira son attention. Un bout de tissu ressortait de l'amoncellement de deux roches. Adonis se jeta sur la matière dure et, à genoux, ôta une à une les lourdes masses de pierre. Elles atterrirent toutes au sol dans un bruit sourd, certaines roulèrent quelques centimètres. Sa respiration s'accéléra. Il souleva une brique et alors, il se sentit mourir de l'intérieur.

Le visage de Vinda était tourné sur le côté. Blanc comme le marbre. Les yeux grands ouverts, vidés de toute vie. Le reste de son corps demeurait sous les pierres.

La voilà. Sa petite soeur.

Il ne sut comment il continua à retirer les pierres. Ce fut un pure miracle, une force divine. Parce que, de l'intérieur, il hurlait. Vengeance. Vengeance. Vengeance. Son sang s'était figé dans ses veines et il vouait toute sa haine à ces pierres qui avaient ensevelli sa soeur. Une à une. Certaines, quand elles cognèrent sur les pavés, se brisèrent. Comme lui. Comme Vinda. Comme leur famille.

Il termina son entreprise. Un bras sous ses épaules, un autre sous ses genoux, il porta le cadavre de sa soeur. Sa tête bascula en arrière, fixant avec ses pupilles vertes pâles le ciel gris. Il quitta la place.

Plus jamais il n'y reviendrait.

Adonis ouvrit la porte de son appartement d'un coup de pied. Il traversa les couloirs en silence. Le moindre bruit sonore frappait son coeur. Le silence devint son unique source de consolation.

Il la déposa sur le lit de la chambre comme on déposerait un enfant endormi. Sa main pendait dans le vide. Il s'en empara avec une tendresse infini, la déposant sur son ventre immobile. Puis il posa délicatement sa main de fer sur son visage. Il ne sentit pas la froideur de sa peau. C'était mieux. Ainsi, il pourrait croire qu'elle se reposait seulement.

Il ferma ses yeux. Et alors, sans même qu'il n'ait pu s'en empêcher, une larme déborda de son œil et glissa sur sa joue.

Ce fut la seule.


LE PLUS GRAND DUEL DE L'HISTOIRE

Hier, à Vienne, s'est produit le plus grand événement de toute l'histoire de la magie. La place principale a été détruite suite aux faits qui se sont produits. Là-bas se sont battus les deux plus grands sorciers de notre époque, Gellert Grindelwald et Albus Dumbledore, deux mages qui s'étaient jurés autrefois de conquérir ensemble le monde et qui ont fini par s'affronter. La défaite de Grindelwald a généré des révoltes dans certains groupes d'extrémistes. La Confédération a envoyé des Aurors dans les pays baignés dans l'idéologie puritiste pour y remettre l'ordre. Le duel a duré quatre heures et s'est terminé avec l'arrestation de Grindelwald. Le procès débutera dans quelques jours.

JUGEMENT DONNÉ À LA COUR D'AUTRICHE

Les juges en charge du procès de Grindelwald recensent les nombres de :

Quatres cent milles morts en Ardennes et plus de vingt mille blessés.

Neuf cent mille né-moldus ou moldus victimes d'attaques de sang-purs

Massacre de deux familles renommées

Destruction de villes telles que Sofia, Vienne, Londres, Madrid ou Paris.

Six milles Aurors disparus

Plus de cent milles sorciers soumis à l'Imperium

Les dédomagements seront payés par chaque gouvernement qui bénéfiecieront d'aides financés par la Confédération Internationale Magique. Tout sorcier revendiquant encore l'idéologie puritiste de Grindelwald sera condamné à deux ans de prison ferme. Les communautés sang-purs demeureront exclues de cette sentence du moment que leurs paroles ne dépassent pas les limites de leurs territoires.

Le mage noir Gellert Grindelwald a été condamné à perpétuité à l'emprisonnement dans la tour de Nurmengard. Une traque a été faite pour retrouver sa plus fidèle partisane, Vinda Rosier, mais les recherches demeurent vaines. Toute personne ayant aperçu une femme ressemblant à la description donnée ci-joint est invité à le reporter aux autorités.

LA CHUTE DÉFINITIVE DU MAGE NOIR

La mort de Vinda Rosier s'est répandue partout en Europe. Selon la rumeur, elle aurait été celle qui l'aurait conduit dans le piège de Dumbledore. La famille Rosier a reçu l'autorisation de retourner en Angleterre malgré le désaccord de la Confédération. Le Ministre Anglais réplique que "sans l'aide de Vinda Rosier, Grindelwald serait encore en train de tuer des innocents partout dans le monde". Quant à la situation politique, les Russes ont rendu les États-Unis d'Amérique où une nouvelle démocratie à été implantée. Cependant, l'emprise anglaise sur des territoires saisis pendant la guerre comme l'Espagne, la Bulgarie ou la Hongrie s'est refermé. Régulus Black s'éloigne peu à peu des décisions de la Confédération pour gérer ses propres conquêtes. Néanmoins, aucun crime ne peut empêcher la famille Black de s'étendre ce qui semble pousser le ministre anglais à continuer.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top