IV. 15 mars 1940 - le thé
Dédié à Ptit-Mangemort
Elizabeth Nott était dans tous ses états. Elle criait auprès des elfes de maison après avoir vu le moindre grin de poussière, lissait sa robe toutes les minutes et vérifiait que le thé ne s'était pas transformé en liquide noir visqueux. Tout devait être parfait. Bientôt, l'avenir de leur monde se tiendrait dans son salon, alors il était hors de question qu'un détail le froisse.
Elle jeta une oeillade à l'escalier en songeant à la jeune fille qui se trouvait au dessus, puis se garda de l'appeler. Elle savait quand descendre. Son arrivée était calculée, Elizabeth s'en était assurée. Avec nervosité, elle s'assit sur le grand canapé noir de son salon et attentit patiemment le moment.
Quelques minutes seulement s'étaient écoulées quand la domestique annonça l'arrivée de l'attendu. Elizabeth trembla sur son canapé. Une haute silhouette se dessina dans l'ouverture du couloir, à moitié caché par les ombres. Un oeil blanc transperçait l'obscurité ; il semblait sonder son âme. La femme se leva, inclinant légèrement la tête vers le bas.
-Monsieur Grindelwald.
Elle avait attendu ce moment pendant si longtemps. Elle avait suivi ses actions dans les journeaux, avait analysé chaque visage dans chaque bal depuis quatre ans sans jamais rien trouver. Et maintenant qu'elle se trouvait face à lui, elle brûlait de lui transmettre son admiration. Pour elle, il était le sauveteur de leur tendre Angleterre. Elle ne faisait pas confiance à Black qui ressemblait plus à un dictateur qu'à un Ministre démocratique, mais lui, il les élèverait tous, familles mélangées. Les sang-purs méritaient leur suprématie, et il était la solution à cette récompense volée.
-Madame Nott, salua-t-il en retour.
Ses pas résonnèrent en bruits sourds dans la grande pièce. La lumière se déversa et fit briller ses cheveux qui devinrent alors aussi resplandissants qu'une lune pleine. Son costume était élégant, orné de chaînes en argent et de symboles en tout genre. Elizabeth y reconnut le principal : un triangle, un cercle et un trait. Les reliques de la mort.
-Je suis honorée de vous recevoir, commença-t-il. Depuis le temps qu'on parle de vous, j'avais la curiosité de vous voir quelque part.
-J'ai préféré me faire discret.
Il esquissa un léger sourire puis, les mains dans le dos, vint s'asseoir face à elle. Il observa les tasses de thé comme si elles menaçaient de se jeter sur lui à tout moment.
-Vous aviez quelque chose à me montrer, lui rappela-t-elle en reportant son attention sur elle.
-Oui. La voici.
Une jeune fille choisit ce moment opportun pour apparaître dans le cadre de la porte. Ses grands yeux bruns scrutaient Grindelwald avec autant d'admiration que Elizabeth. De longues boucles brunes tombaient jusque dans le bas de son dos, entourant un visage innocent portant encore les marques de l'enfance. Elle s'avança timidement, n'osant se présenter. Quand le mage noir se retourna pour la regarder, elle sembla mourir sur place.
-C'est ma nièce, Blanche Rosenweiss.
-Bon...bonjour, balbutia-t-elle quand elle arriva à sa hauteur.
Une rougeur s'était étendue sur toute la surface de ses joues. Elle ne pouvait pas détacher ses yeux de Grindelwald. Elle l'avaiit vu tant de fois dans les journeaux, et pourtant, aujourd'hui, il paraissait différent. Il n'était pas la figure héroïque innacessible. Il était un homme, un sorcier comme elle. Et il la regardait comme elle le regardait, avec curiosité.
-Blanche, répéta-t-il comme pour se forcer à retenir son prénom.
-Oui, déglutit-elle.
Il sourit. Pourquoi souriait-il ? Peut-être parce qu'il la trouvait belle. Non, c'était absurde. Elle ne se trouvait jamais belle. Ce n'était pas aujourd'hui qu'elle allait changer.
-Quel âge as-tu ?
-Seize ans, Monsieur.
-L'âge de la sagesse, dit-il en haussant les sourcils. Une valeur aussi importante que la jeunesse, car contrairement à celle-ci, elle ne fait que grandir au fur et à mesure du temps. Qu'aimerais-tu faire, plus tard ?
Elle hésita. Il la trouverait peut-être ridicule. Après tout, elle ne servait qu'à une chose, et c'était la raison pour laquelle sa tante l'avait emmenée ici. Cela pourrait sembler futile, semblable à un rêve d'enfant oublié. Mais Blanche y tenait, à ce rêve. Alors elle murmura :
-J'aimerais jouer du violon.
Sa réponse le contenta. Son visage s'éclaircit, un sourire fendit son expression sérieuse. Il ne s'y attendait pas, mais il aimait ça.
-Allons ma chère, intervint Elizabeth en tapotant la place à côté d'elle, assis toi et dis lui ce que tu as vu.
Blanche baissa la tête et obéit. Elle détestait les ordres de sa tante mais ne voulait pas faire une scène devant le mage noir. Après tout, il n'était pas là pour avoir une discussion paisible avec elle. Il était là pour une seule chose, cette chose que elle seule était capable de lui donner.
-Je fais des rêves, expliqua-t-elle, des rêves qui prennent vie. J'arrive à contrôler les événements, les tourner à mon avantage et m'en rappeler pendant plusieurs années. Mais j'en ai d'autres. Ils n'arrivent pas tout le temps. Et je suis incapable de m'en saisir. Ils s'échappent de mes doigts et m'emportent contre mon gré. Ce sont les rêves prémonitoires.
Elle laissa passer un silence, fière de son petit effet dramatique, puis continua :
-Il y en a un qui revient souvent.
-Décris-le moi, demanda-t-il.
-Je suis au milieu d'un champ de bataille. Il y a du feu, partout. Des hommes qui hurlent, des femmes qui pleurent. Les arbres sont carbonisés et les cendres tombent en pluie fine. Ça sent le brûlé et la mort. Puis il y a une femme, au milieu. Les cheveux longs, blonds, un visage désespéré face au paysage. Je crois qu'elle pleure elle aussi, mais en silence.
-C'est la seule debout ?
-La seule que la mort ne vient pas chercher.
La gravité surplomba les traits de Grindelwald.
-Sais-tu pourquoi ?
Blanche mouilla ses lèvres et tordit ses doigts.
-Parce que c'est elle, la mort.
Une pierre tomba dans son estomac à l'instant où elle prononçait ces mots. Elle détestait intérpréter les rêves prémonitoires. C'était comme prononcer une condamnation à haute voix.
-Connais-tu son nom ?
-J'ai essayé de lui demander, mais elle ne me réponds pas. C'est comme si j'étais invisible. Elle continue de fixer les victimes du désastre avec des larmes silencieuses.
-Dis lui l'élément principal, l'incita sa tante.
Elle envoya un regard presque noir à la femme mais se plia à sa demande.
-C'est là que vous faites votre apparition. Vous posez une main sur son épaule, et vous dites "Tu as réussi". Ça s'arrête là, je me réveille juste après.
C'était un peu brusque comme fin, mais elle sembla captiver Grindelwald.
-As-tu vu d'autres éléments, dans ce rêve ?
-Je ne crois pas.
-En es-tu sûre ?
Il insistait sur cette question, comme s'il attendait la pièce manquante du puzzle. Blanche chercha profondément dans son esprit, se représentant la scène mentalement. Elle revit la grande femme blonde, ses larmes, les blessés au sol qui se lamantaient dans des cris inhumains, des arbres noirs puis sur la cime... ah, oui.
-Non, il y a autre chose.
-Quoi donc ?
Il s'était penché, un regard transperçant planté sur elle. Elle inspira un bon coup avant de donner son dernier indice :
-Un corbeau surplombe la scène.
***
Hérodes parcouraient les couloirs de Poudlard avec une crainte présente dans ses yeux écarquillés. Il observait les tableaux le dévisager, ces fantômes passer comme si de rien n'était, errant simplement dans les couloirs. Les lieux étaient immenses et il avait peur de se perdre. Pour l'instant, son père marchait à côté de lui, mais il ne pourrait pas rester longtemps. Cornelius Nott s'arrêta face à une grande statue de phénix qui tourna sur elle-même et leur fit découvrir des escaliers en pierre. Hérodes resta pentant face à cette apparition surprise.
Son père posa une main dans son dos et le poussa doucement. Le jeune garçon monta une à une les marches, admirant en même temps l'or qui revêtissait l'animal. Puis une porte se présenta face à lui, imposante dans son vieux bois. Il activa la poignée timidement.
-Ah ! Vous voilà enfin ! les accueillit une voix masculine.
Un homme d'une cinquantaine d'année, des lunettes aux montures fines posées sur le bout du nez et un costume de velours bleu les firent entrer. Il offrit un magnifique sourire au garçon et serra la main du père.
-Cornelius, c'est un plaisir de te revoir.
-Le plaisir est partagé, Armando. Voici mon fils, Hérodes.
Le professeur se tourna vers le concerné et lui ébourrifa les cheveux.
-Il a tout de sa mère.
Il partit ensuite derrière son bureau. Cornelius s'avança, faisant un signe silencieux à Hérodes de le suivre. Celui ci s'éxécuta, ne sachant pas vraiment où se placer dans cette immense pièce à la bibliothèque lourde de vieux grimoires.
-Je suis Armando Dippet, le directeur de cette école et ton futur professeur de Sortilèges, se présenta-t-il tandis qu'il triait des parchemins. Tu as onze ans, c'est ça ?
-Douze, corrigea-t-il d'une voix timide.
-Ah, seconde année donc ?
Il hocha activement la tête, et son père se chargea de la suite.
-Je lui ai enseigné tout le programme de première et la moitié de la deuxième année. Il n'a rien manqué, que cela ne soit pas un sujet de préocupation.
-Je sais, je sais, marmonna le professeur qui ne semblait pas trouver son papier. Venant de ta part je m'en doutais. Mais où Diable ai-je mis ce document ?
Hérodes voyait la pauvre feuille au sol depuis son entrée dans la salle. Il observa alternativement le professeur et l'objet abandonné puis le pointa timidement du doigt.
-Celui-là ?
-Nom d'une gargouille ! s'exclama-t-il en se baissant pour le récupérer. Futé le petit bonhomme !
Un sourire fier orna les lèvres de Cornelius. Hérodes adorait quand son père le regardait ainsi. Il sentait son cour surchauffer sous sa poitrine.
-Hérodes Nott, lit-il, né le 6 mars 1928 au Devonshire, absent la première année scolaire obligatoire par cause d'une maladie héréditaire. Mmm.
Il demeura un instant pendu à son papier et perdu dans ses pensées. Hérodes eut peur qu'il ne lise quelque chose qui lui déplaise et le renvoie chez lui. Mais quand il releva la tête, ce fut avec réjouissement.
-Mais tu vas mieux, non ?
Il hocha la tête.
-Alors au Diable ce document. Il te faut une maison, parce que la maison sera ta future famille. Tiens, assis-toi là.
Il prit une chaise qu'il sortit d'il ne sut où et y fit asseoir le jeune garçon. Hérodes lança un regard d'alerte à son père, mais celui-ci le rassura d'un hochement de tête. Quelques secondes plus tard, un chapeau s'enfonça jusqu'à la pointe de son nez. L'obscurité l'engloutit et une voix grave fit écho dans ses oreilles.
-Une forte envie de montrer ce que tu vaux, intelligent, observateur mais silencieux, des qualités d'un Serdaigle ou d'un Serpentard. Mais tu es un Nott, non, et pour toi les valeurs familiales sont plus importantes que tout le reste... SERPENTARD !
Le soulagement le traversa tel un courant électrique. Les traits tendus de son père se détendirent. Hérodes sauta sur ses pieds et lui offrit un beau sourire satisfait. Il serait à Serpentard comme l'avait été toute sa famille avant lui.
-Parfait ! s'exclama Dippet. Et si tu découvrais ta salle commune, mon garçon ? Elle se trouve à deux couloirs de là, dans les cachots. Tu verras, elle est très jolie.
L'idée qu'elle soit dans les cachots ne l'enchantait guère, mais son oncle lui en avait déjà parlé et il avait été émerveillé par la description. Néanmoins, l'idée de se retrouver seul dans cet immense château lui faisait peur. Il n'avait été jamais seul auparavant. Sa mère l'accompagnait toujours, ou son père, ou son oncle, ou même Harfang. Il était gentil Harfang, Callidora aussi d'ailleurs. Elle lui avait offert un coffret entier de plumes d'argent pour son entrée à Poudlard. Hérodes avait hâte de les utiliser.
Cornelius s'agenouilla face à son fils et posa une main sur son épaule.
-C'est parti pour la grande aventure, lui sourit-il. Profite de ces quelques mois, découvre le château, il y a beaucoup de choses à voir. Et n'hésite pas à faire des connaissances. Tu es un Nott, n'oublie pas. Ne laisse personne te sous estimer.
Hérodes hocha activement la tête. Il avait l'impression de ne faire que ça depuis le début.
-Vous m'enverrez des lettres ? demanda-t-il, la gorge serrée.
-Tous les jours.
Il se lança à son cou et l'enlaça. Cornelius le serra contre lui. Hérodes n'avait pas connu un moment pareil depuis longtemps. D'habitude, c'était toujours sa mère qui l'embrassait ou lui faisait des câlins. Son père se contentait de le féliciter ou de le rassurer avec des mot qu'il aimait entendre. Mais pour cette fois, Hérodes n'avait pas besoin de mots. Il avait juste besoin d'une dernière présence avant de se jeter dans la gueule du loup.
-Je vous rendrai fier, Père, déclara-t-il avec un ton déterminé.
-J'en suis certain.
Hérodes Nott sortit donc du bureau avec son nouvel uniforme dans les mains et une tristesse qu'il tenta de cacher dans une expression plus ou moins certaine. Il s'aventura dans les couloirs et se perdit dans la contemplation des tableaux. Il aimait ces profils qui bougeaient et parlaient. Chez lui, il en avait quelques un qui le saluaient tous les matins. Il espérait avoir de bonnes relations avec ceux ci aussi.
Pourtant, quand il revint à lui, il ne reconnut pas les lieux. Il tourna sur lui-même, paniqué. Voilà ce qui arrivait quand on rêvait les yeux ouverts. Ça lui arrivait beaucoup de fois, mais cette fois ci, Hérodes aurait voulu que cela se passe autrement. Mais comme toujours, il n'avait pas su se montrer attentif.
Alors qu'il faisait des tours sur lui-même, des pas élevèrent leur claquement contre la pierre dans son dos. Il fit volte face dans un sursaut. Un jeune homme à la carrure un peu plus solide lui faisait face, droite comme les colonnes de pierre de l'entrée. Son visage était dur et froid, pourtant, Hérodes se surprit à y voir de la compassion dans ses yeux verts.
-Tu dois être le nouveau, fit-il d'une voix élevée et calme. Je reviens tout juste du bureau du directeur. Tu es Nott, c'est ça ?
-Oui, réussit à articuler le garçon. Hérodes.
-Ah bien. Tu as perdu ton chemin ?
Il hocha la tête.
-Je peux t'aider à te retrouver. Tu verras, au début c'est difficile de se repérer mais en réalité, c'est très facile. Commençons par la Salle Commune.
Hérodes remarqua alors qu'il portait l'insigne Serpentard sur sa cape de sorcier.
-Et tu es ?
-Ah, pardon, je ne me suis pas présenté.
Il présenta sa main, un sourire froid sur les lèvres.
-Tom. Tom Jédusor.
**Le personnage de Tom n'apparaîtra pas plus dans ce tome, celui de Hérodes non plus, mais ils reviendront comme personnages principaux dans l'extra 3 (nommé Jédusor) qui sortira après ce la publication de ce livre.**
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