❝ une goutte de champagne dans la mer (et sur leurs cœurs). ❞

nda - elle a une semaine de décalage, mais finalement elle est en adéquation avec mon calendrier et elle arrive pour une belle journée pour moi : voici la bungô stray dogs rarepair week 2020 !
vous avez déjà vu le programme des couples, et on commence avec un de mes favoris parce qu'ils étaient juste parfaits pour mon idée (et que détruire l'image badass de Mori est un mode de vie dont je ne me lasse pas.)

je dois être un peu folle vu que j'ai décidé de donner un vrai titre à tous mes jours de la week, parce que je ne me suis pas contentée de choisir un seul prompt par jour... j'en ai fait en général deux voire les trois si on cherche bien hum- globalement ma ligne directrice, c'était toujours la citation, que vous retrouverez traduite approximativement en français dans chaque texte ~ (j'ai souvent vachement transformé la formulation au profit du sens, parce que les traductions littérales hum hum)
j'ai aussi précisé au début de chaque texte si on était dans le canon, dans un univers alternatif, ou dans une canon divergence (donc dans l'univers de bsd mais avec des événements notables modifiés).

bonne lecture en tout cas ☆

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« too much of anything is bad, but too much champagne is just right. »
canon.

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Yukichi Fukuzawa avait l'habitude de se trouver dans des situations improbables, pour ne pas dire complètement tordues, surtout depuis qu'il connaissait Ôgai Mori. Quand il était encore le garde du corps de ce médecin illégal, il s'était trouvé entraîné dans des situations ridiculement risquées, qui semblaient grandement amuser l'homme aux cheveux bleu foncé. Le parrain de la mafia – qui était loin de l'être à ce moment-là – paraissait avoir un goût du risque que l'ancien assassin était loin de partager.

Et pourtant, malgré son manque total d'attrait pour ces situations dangereuses, il se retrouvait toujours immanquablement fourré dedans.

(Et c'était toujours la faute de Mori quand il y réfléchissait bien.)

Ce soir-là était de loin le plus improbable, songeait-il justement en balayant du regard la jetée nocturne qui s'étendait devant lui. Les étoiles se reflétaient sur l'eau calme qui bordait la plage de sable fin sur laquelle il se trouvait, et donnaient encore plus à la scène des airs irréels. Il passa une main dans ses cheveux gris – d'argent, aimait dire Ôgai autrefois – et s'arracha à sa contemplation pour observer un tout autre spectacle.

Debout face aux arbres qui s'élevaient derrière le sable comme pour protéger ce havre de paix, les cheveux balayés par le vent qui soufflait doucement et le regard posé dans le vide, Ôgai Mori était appuyé contre la portière avant de sa voiture. Il paraissait plongé dans d'intenses pensées sérieuses, mais le patron de l'Agence n'était pas dupe ; derrière ce visage sévère, le parrain de la mafia portuaire était sans doute en train de s'interroger sur l'utilité du sable qu'il avait sous les yeux.

Ou sur toute autre chose idiote sur laquelle son cerveau embrumé par l'alcool s'était fixé. Le taux d'alcoolémie de l'homme était outrageusement élevé pour son âge et ses fonctions, et le président de l'Agence des Détectives Armés avait été obligé de lui dérober ses clés de voiture pour être sûr qu'il ne commette pas l'acte irresponsable de conduire alors qu'il n'était clairement pas en état de le faire.

« Yukichi ? » Justement, l'homme venait de prendre la parole d'un ton pâteux, et l'emploi de son prénom en disait long sur l'état d'esprit du parrain. L'espace d'un instant, l'homme aux cheveux gris fut tenté de lui répondre sèchement qu'il n'avait plus le droit de l'appeler ainsi, plus depuis leur rupture, mais il fut pris d'un cas de conscience et se ravisa.

« Quoi ?

Depuis quand il y a des mouettes dans mon bureau ? » La nuit allait être longue, songea Yukichi en se massant les temps – lui n'avait pas bu plus que de raison, mais sentait la migraine poindre dans son crâne.

« Nous ne sommes pas dans ton bureau, répondit-il, et le retour inconscient au tutoiement lui fit autant plaisir que souffrir. Tu as voulu venir ici. »

Yukichi avait récupéré les clés de voiture du parrain, qui était, malheureusement, pour la première fois de sa vie, venu à une soirée mondaine sans ses gardes du corps. Impossible donc de compter sur eux pour ramener leur supérieur chez lui sans problème. Il avait – bien malgré lui – accepté d'endosser ce rôle, mais c'était sans compter sur le caractère horripilant du quadragénaire qui avait exigé que Fukuzawa l'emmène d'abord ici, sur une plage en périphérie de Yokohama. Le trajet avait été atroce, et le patron de l'Agence s'était maudit pour avoir cédé aux désirs de l'autre homme. Il ne savait même pas pourquoi il avait accepté...

... enfin, si, il le savait très bien en réalité. Il avait accepté parce qu'ils y avaient déjà été tous les deux, sur cette plage, il y avait des années de cela, alors qu'ils étaient encore ensemble. Avant que la vie ne les sépare – ou plutôt, avant qu'ils ne se séparent, parce que faire peser sur la vie le poids de cette décision était de l'hypocrisie pure et simple. Ils avaient rompu parce qu'ils ne pouvaient plus avancer côte à côte sur le même chemin, et c'était leur propre décision.

« C'est vrai..., finit par marmonner Mori après de si longues minutes de silence que l'argenté avait cru qu'il avait juste perdu le fil. Pourquoi je voulais venir ici ?

Si seulement je le savais, marmonna Yukichi avec un soupir.

Tu as toujours été un des seuls à me comprendre. »

Le ton sur lequel cette phrase venait d'être prononcée était empreint d'une telle lucidité que l'ancien assassin crut pendant quelques instants que son interlocuteur avait mystérieusement décuvé. Mais non, le parrain était toujours en train de vaciller sur ses jambes changées en coton par l'alcool, tandis qu'il essayait de construire une phrase complète et cohérente. Fukuzawa soupira imperceptiblement en se demandant combien de temps allait durer son calvaire. Peut-être pouvait-il profiter de la confusion du parrain pour le ramener à ses appartements sans qu'il ne s'en rende compte ? L'homme avait formellement exprimé son désir de venir et rester ici, mais il était probablement trop éméché pour réaliser ce qu'il se passait.

Mori continuait de vaciller, et l'ancien membre du gouvernement hésitait entre l'aider à rester debout ou le laisser se débrouiller. L'état dans lequel était son interlocuteur le déstabilisait grandement, et il songea que, tant qu'à avoir une discussion avec son ancien amant, il aurait préféré que ce soit dans des circonstances toutes autres. Pour la cinquantième fois de la soirée au moins, il maudit Francis Fitzgerald et son invitation ridicule.

Depuis son retour sur la scène du business, le magnat américain prenait grand plaisir à se mettre en avant – à croire que les semaines passées dans le bidonville de Yokohama n'avaient jamais existé. Il avait décidé d'organiser une soirée clinquante pour son anniversaire, le genre d'événement ridicule auquel Yukichi détestait participer. Et, d'ailleurs, il n'avait eu aucune intention de s'y rendre lorsqu'il avait reçu l'invitation. Il l'avait jetée après l'avoir lue, sans y accorder plus d'intérêt.

Sauf qu'il avait sous-estimé ses fouineurs de subordonnés, que l'invitation s'adressait à toute l'Agence , et qu'ils avaient évidemment insisté pour s'y rendre, « pour s'amuser ». Le quadragénaire s'était donc retrouvé lui aussi embarqué chez Fitzgerald pour la soirée la plus longue de sa vie. Ou la plus étrange.

(Probablement les deux.)

« Yukichi ! »

La voix lointaine de Mori lui rappela que, malgré les apparences, la soirée était loin d'être achevée et qu'il avait encore un enfant à surveiller – oui, le parrain avait quarante ans mais actuellement, il était bien loin de les faire, et ce n'était pas un compliment physique. Il réalisa alors que son ancien amant s'était approché de la mer – s'il se jetait dedans, Fukuzawa ne le repêchait pas. Elle devait être gelée.

« Quoi ? soupira le président de l'Agence en se rapprochant.

J'ai perdu ma cravate noire ! » L'homme aux cheveux gris leva les yeux au ciel devant cette réponse. Il n'aurait jamais dû céder. Il aurait juste dû tenir tête à cet homme insupportable et le confier aux bons soins de ses subordonnés.

« Je suis sûr que tu en as plein d'identiques. » répondit-il sans s'émouvoir de cette funeste disparition qui semblait en revanche grandement attrister Mori.

Il essaya de ramener le parrain de la mafia loin de la rive pour éviter qu'ils ne finissent tous les deux trempés par les vagues qui prenaient de l'importance, mais l'autre lui résista... et finit, sous le regard interloqué du président de l'ADA, par chuter la tête la première dans l'océan. Derrière lui, la silhouette fantomatique d'Élise flottait, les bras croisés sur sa robe rouge et une moue réprobatrice sur le visage. Elle décocha une œillade maussade au détective.

« Au moins, il décuvera. » s'exclama-t-elle avant de disparaître comme si de rien n'était.

Yukichi resta encore quelques secondes sans voix avant de se décider à repêcher malgré tout son ancien amant, qui n'avait pas bougé d'un pouce depuis que son pouvoir l'avait jeté sans ménagement dans l'eau. Il restait sceptique sur la méthode employée pour aider Mori à recouvrer ses esprits, mais, lorsqu'il attrapa le bras du parrain et qu'il le ramena sur la rive sèche, l'homme semblait en effet un peu plus assuré et lucide.

« Fukuzawa, lâcha-t-il au bout de quelques secondes – et l'homme nota qu'ils en étaient revenus à son nom de famille, signe que l'homme était réellement moins imbibé d'alcool. Comment sommes-nous passés de la salle des fêtes de Fitzgerald à cette plage ?

J'aimerais le savoir, soupira le gris. Vous ne vous souvenez de rien, docteur Mori ? »

En un sens, le gris n'était pas surpris. Le nombre de flûtes de champagnes vides qui entouraient Fitzgerald et Mori quand il les avait trouvés expliquait assez bien cet oubli. Il avait abandonné l'idée de les compter dès qu'il avait réalisé que les deux hommes étaient complètement saoûls. Aussi bien le magnat américain que le parrain de la mafia. Heureusement que l'homme d'affaire était chez lui, et qu'il avait tous ses subordonnés à portée de main pour le gérer. Un homme éméché, c'était suffisant.

« Je me souviens juste avoir discuté avec Fitzgerald. Et avoir pris quelques flûtes de champagne.

Je crois que ce « quelques » est le plus grand euphémisme que j'ai entendu de la semaine. » Mori laissa échapper un rire désabusé qui mourut aussi vite qu'il ne lui était venu.

« J'ai un mal de crâne intense.

Ce n'est pas surprenant compte tenu de la quantité d'alcool présente dans votre sang.

Vous m'avez jeté à l'eau pour me faire recouvrer mes esprits ? Quelle violence de votre part.

Ce n'était pas moi, mais votre pouvoir. » Yukichi avait tenté de dissimuler son mépris pour le pouvoir de son interlocuteur mais cela ne sembla pas très efficace car un mince sourire apparut sur les lèvres du parrain.

« Élise est toujours méchante avec moi, gémit-il comme un enfant.

N'est-ce pas ironique de dire cela quand il s'agit d'une part de vous-même ? »

Mori balaya sa remarque d'un geste de la main et n'ajouta rien. Il resta quelques secondes immobile avant de se baisser pour s'installer sur le sable. Yukichi le regarda faire et, en comprenant qu'il ne convaincrait pas l'homme de rentrer même maintenant qu'il était un peu plus lucide, l'imita avec un soupir.

« Pourquoi être venu ici ? finit par demander Mori après quelques instants de silence.

Vous l'avez voulu.

Pourquoi avoir accepté de m'y emmener ? reformula le parrain. Je pensais que vous ne voudriez pas revenir ici. Surtout pas à trois heures du matin, avec ma personne.

C'était un défi de votre part, cette demande soudaine ?

Vous accordez trop de crédit à mon esprit embrumé par le champagne. » Voyant que son interlocuteur était on ne peut plus sérieux, le président de l'Agence des Détectives Armés réfléchit à une réponse à peu près correcte et honnête.

« Je pensais que vous ne lâcheriez pas l'affaire avant que j'accepte. »

Jusqu'à présent, depuis son plongeon forcé dans l'océan glacé, le parrain de la mafia avait ostensiblement évité son regard. Mais, après cette déclaration, il se tourna vers lui pour planter son regard rosé dans celui bleuté de Yukichi.

« Vraiment ? Pour cette seule raison ? » D'abord sans voix, Fukuzawa se perdit quelques instants dans les yeux de son interlocuteur avant de détourner le regard à son tour.

« Pourquoi avoir bu autant ? demanda-t-il ensuite en fixant l'étendue d'eau devant eux.

Voila une bien piètre façon de changer de sujet.

Répondez-moi, docteur Mori. Cela ne vous ressemble pas de vous laisser aller ainsi. » Le susnommé eut un rire bref et moqueur qui lui ressemblait bien plus.

« La philosophie de Fitzgerald m'a semblée attrayante.

Sa philosophie ?

« Un trop plein de n'importe quoi, c'est mauvais, mais un trop plein de champagne, c'est juste parfait. », cita le quadragénaire aux cheveux bleu foncé. Elle m'a semblée particulièrement juste ce soir. »

Son regard rose ne quittait pas son interlocuteur, et Yukichi comprit ce qu'il voulait dire par là. Les yeux fixement posés sur l'océan devant eux, il ne savait pas quoi dire.

« Trop d'amour, trop d'affection, c'est mauvais. La plus mauvaise chose du monde, murmura Mori. Cela n'apporte que de la douleur.

Ce n'est pas la vérité. » le coupa Fukuzawa. Il y avait tant de bonnes choses aussi qui pouvaient résulter d'un trop plein de choses.

« Vraiment ?

Je sais quel jour on est aujourd'hui. » Le parrain de la mafia lui offrit un sourire brisé sans piper mot. « Cela aurait fait onze ans.

Si nous étions restés ensemble. » souffla Mori.

Onze ans plus tôt, sur cette plage vide et oubliée de tous, ils avaient échangé le baiser qui avait débuté leur relation. Un an d'amour et de passion les avaient ensuite rendus heureux, avant de les détruire petit à petit. Les choses avaient changé, leurs sentiments y avaient résisté, mais ils n'avaient pas pu continuer. Ils se seraient détruits l'un et l'autre s'ils l'avaient fait. C'était pour cette raison qu'au bout d'un an, ils avaient clôturé leur relation dans les cris et la douleur.

Sauf qu'aujourd'hui encore, leurs sentiments les détruisaient. C'était l'amour qu'ils se portaient qui les avaient réunis sur cette plage, et non l'alcool ou un altruisme inexpliqué. Ils ne pouvaient pas se voiler la face devant cette évidence absolue.

« Nous ne sommes plus les mêmes, reprit Mori.

Nous prétendons ne plus être les mêmes. » le corrigea doucement Fukuzawa.

Il se sentait épuisé. Il était aux côtés de l'homme qu'il l'aimait depuis des années, et qui lui rendait son amour. Mais, encore une fois, le poids de leurs vies actuelles le rattrapait. Était-il réellement possible qu'ils puissent s'aimer de nouveau sans refaire les mêmes erreurs, alors que les raisons de leurs ruptures étaient toujours d'actualité ?

« Yukichi... » La voix de Mori le tira de ses pensées et il réalisa au bout de quelques secondes seulement l'emploi du prénom. Le parrain s'était relevé, et le fixait d'un regard impénétrable « Pourquoi on ne recommencerait pas de zéro ? »

La demande laissa Fukuzawa pantois quelques instants. Il n'en éprouvait pas grande envie, car une part de lui lui rappelait sans cesse que l'homme qui lui faisait face n'était pas quelqu'un de bien, quelqu'un en adéquation avec lui. Ôgai Mori était tout son contraire, et pour cela il doutait que renouer avec lui des liens aussi proches était une bonne idée.

Mais, il n'avait juste plus envie de lutter, plus envie de se battre contre son cœur. Il n'avait plus envie d'être l'implacable Fukuzawa qui écoutait sa raison. Il voulait redevenir le Yukichi qui écoutait son cœur.

Alors, en guise de réponse, il attira vers lui le parrain pour l'entraîner dans un long baiser dans lequel tout l'amour, la passion et l'affection qu'ils se portaient l'un à l'autre passaient aussi clairement que s'ils les avaient hurlés.

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