C H A P I T R E 9


Le matin suivant cette nuit de folie, je me souviens avoir pensé une seule chose une fois mes yeux ouverts : wow, quel rêve. Puis, j'avais tourné la tête et trouvé Louis, nu, endormi à côté de moi. Car oui, ce n'était pas un rêve. Pas du tout. Et à sentir les courbatures que j'avais... Non, ce n'en était définitivement pas un.

J'aurais pu hésiter, rester de mon côté du lit et attendre qu'il se réveille. Mais les choses n'étaient pas comme ça entre nous ; même après une grande rupture comme ça, qui était d'ailleurs toujours d'actualité, nous n'étions pas gênés l'un avec l'autre. En même temps, après la nuit qu'on venait de passer, il était impossible d'être gênés.

Donc, je décidai de me rapprocher et de me blottir contre lui. Ma tête contre son torse, mon oreille contre son cœur. Les yeux fermés, je redécouvris momentanément le bonheur d'être contre lui, sentant son corps réagir avec le mien. J'avais oublié ces petites choses quotidiennes.

« Hey, me dit-il doucement, de sa voix douce et rappeuse du matin. »

Cela me fit simplement sourire, niaisement probablement. J'étais le pire, quand cela touchait à Louis. Peut-être est-ce parce que je n'étais qu'un gosse quand je suis tombé amoureux de lui. 16 ans. Qu'est-ce qu'on sait de la vie, à 16 ans ? Rien. On se croit très mûr, très fort, et on peut l'être en fonction de ce que l'on a traversé ; mais il reste toujours plein de choses de la vie à découvrir, c'est évident.

Moi, à 16 ans, je n'étais pas fort, mûr je pense que oui, mais absolument pas prêt à affronter toute la merde qui a suivie, sur le fait qu'il faut absolument que j'ai une image publique et médiatique d'hétérosexuel totalement irrespectueux envers les femmes, et tout ce qui touche à ça.

Enfin, bref, je m'égare. Tout ça pour dire que j'ai aimé Louis bien jeune, et que j'ai continué en grandissant ; alors il m'a apprit toutes les choses stupides et mignonnes qui touchent à l'amour et sa folie.

« Hey, répondis-je finalement. Tu as bien dormi ? »

Il passa sa main dans mon dos qu'il se mit à caresser doucement. C'était si agréable, si doux.

Je refusai catégoriquement que Camille me touche après le sexe, ou même au réveil. On s'embrassait, oui, on avait des relations sexuelles, on avait aussi les bons moments, la rigolade et les conversations ; mais je n'étais aucunement tactile avec elle. Elle pensait que j'étais juste comme ça.

C'est marrant, quand on y pense. Elle était amoureuse de moi, je le sais, et je regretterai toujours de lui avoir fait du mal ainsi, même si cela paraissait inévitable. Elle était dingue de moi, de tout ce qui me concernait, avec une sincérité immense ; mais finalement, malgré tout ça, elle était amoureuse d'un autre. La personne que j'étais devenu suite à ma rupture avec Louis, la personne que j'affichais à Camille car justement elle n'était pas Louis... Ce n'était pas moi. Pas le moins du monde.

« Si j'ai bien dormi ? Reprit Louis en riant. Tu veux dire entre le moment où on a couché en arrivant dans la chambre, celui où on a recommencé cinq minutes après, celui où on a encore recommencé deux heures après et celui où tu t'es réveillé vers 4 heures et a décidé de me réveiller de la manière la plus excitante possible pour faire un quatrième round ? Ah, ouais, un sommeil de plomb. »

Je rigolai un peu à mon tour. C'est vrai que l'on n'avait pas chômé, je m'en souviendrai toujours je crois.

« D'ailleurs, ajouta t-il en descendant sa main vers le bas de mes reins. Tu n'as pas mal ? »

Je relevai la tête pour le regarder. Nous n'avions aucune gêne face à l'autre, nous connaissant par cœur, alors se voir le matin, pas coiffé, ni maquillé, c'était habituel. On avait passé beaucoup de temps dans un bus de tournée, on n'était pas frais tout le temps ; peu importe à quel point les fans nous idéalisaient.

« Je n'ai pas mal. Je vais t'avouer que ce n'est pas super agréable et que je sens que t'es passé par là, mais je ne vais pas boiter ni rien.

- Heureusement. Là, il n'y aurait carrément plus de doutes sur ce que tu as fais cette nuit.

- Oh, tu m'étonnes. Mes musiciens seraient en mode "Quoi ? Harry est bi ?" »

Louis haussa un sourcil en me regardant.

« Ils ne sont pas au courant ? Je veux dire... Avec tous les signes que tu laisses partout, ils n'ont pas compris que tu n'es pas totalement hétéro ?

- Je suppose qu'ils ne s'immiscent juste pas dans ma vie privée. Ils connaissent Camille, mais juste Camille. Ils sont arrivés et elle était déjà là, même si je n'étais pas encore en couple avec elle. Alors ils se sont jamais demandés, et ils ne m'ont jamais demandés... Qui il y avait eu avant. »

Je le vis acquiescer en silence, et probablement réfléchir quelques instants. Il finit par ajouter un simple :

« Je comprends. »

Ainsi, la conversation se clôtura plus ou moins. Je reposai ma tête sur son torse, ses caresses sur mon dos reprenant et un silence apaisant prit place dans la chambre d'hôtel.

Il faisait chaud, la pièce avait l'odeur de sexe, et je me disais qu'heureusement, j'allais rejoindre l'équipe devant l'hôtel pour monter dans les voitures et partir à l'aéroport, direction Anvers. Cela aurait clairement été compliqué s'ils avaient décidés qu'on s'attendait devant les chambres ou quelque chose comme ça.

Je ne parlai pas, pendant plusieurs minutes. Louis non plus. Le calme régna juste, et pour le coup, c'était vraiment le calme pur et simple. Les fenêtres possédaient le double vitrage alors nous n'étions pas embêtés par le bruit plutôt désagréable de la vie de ville – et puis, nous étions à un étage relativement élevé, ce qui aidait également. Les murs étaient aussi vraiment bien isolés, alors les bruits de l'hôtel et la circulation dans le couloir n'était pas non plus notre problème. Donc, nous étions juste bien, tranquillement, dans ce lit vraiment confortable. Ou alors c'est juste que le moment était si bon à mes yeux que je n'y trouvais pas un seul défaut.

Finalement, je fus celui qui prit la parole. Ce que je dis n'était pas forcément très agréable mais c'était une question qui me brûlait les lèvres, alors autant profiter de ce moment de proximité extrême.

« Pourquoi tu n'es plus avec Danielle ? »

Louis n'eut aucune réaction. Son cœur – contre lequel ma tête reposait toujours – n'accéléra pas, il ne se crispa pas, ne se redressa pas, ne me poussa pas. Pendant quelques secondes, il demeura simplement silencieux, avant de répondre :

« J'étais juste mal. Je pensais qu'elle allait être mon remède, face à tous les problèmes, face à la mort de ma mère. Mais ça n'a pas été le cas. Elle est très gentille, et elle a été très douce avec moi, mais ce n'était pas suffisant. »

Je ne dis rien. Je l'écoutai simplement, silencieux. À ses mots, j'hochai la tête, mais ne rétorquai rien. S'il l'avait senti comme ça avec elle, c'était juste ainsi et je ne jugeai pas cela. Pas du tout, en fait. D'ailleurs, égoïstement, j'aimais le savoir célibataire ; même si cette nuit ne signifiait pas que nous étions de retour ensemble.

Le silence reprit sa place quelques instants, puis je me redressai, un sourire aux lèvres. Je pris possession de celles de Louis. Haleine du matin ou pas, c'est aussi un stade peu glamour qu'on avait dépassé il y avait bien des années.

« Une cinquième fois ? Demanda t-il contre mes lèvres, où je pouvais sentir son sourire.

- Une cinquième fois, » je confirmai.

Il me fit rouler, de manière à être sur le dos sur le matelas et sa bouche se retrouva partout sur mon corps, mes gémissements de nouveau dans la grande pièce spacieuse.

Nous étions comme dans une bulle, ce jour-là, entre ces quelques murs. Il y avait une atmosphère et un univers entier qui s'était crée dans cette chambre d'hôtel, un monde rien qu'à Louis et moi. C'était bon, tellement bon ; sur le moment c'était rêvé et aucun de nous ne pensait au moment où nous partirions. On se retrouvait juste, dans cette bulle, cet univers. Et sans le dire, c'était très clair que ce qu'il se passait dans cette chambre d'hôtel, resterait dans cette chambre d'hôtel.


On s'embrassa encore bien longuement dans cette chambre, jusqu'à passer la porte et nous comporter à nouveau comme avant d'y entrer. On se salua simplement, il me remercia de lui avoir accordé du temps – jolie manière de dire qu'on avait prit notre pied ensemble – puis il s'en alla par la porte de derrière de l'hôtel, avant que des fans, des gens nous reconnaissant juste ou simplement que mon équipe nous voient ensemble.

J'enfilai une paire de lunettes de soleil, non pas parce que celui-ci était au rendez-vous, mais surtout pour cacher mes yeux qui reflétaient totalement ma fatigue.

L'ascenseur m'amena jusqu'au hall de l'hôtel. Je savais que le séjour était déjà réglé ; ce n'était pas le genre de choses dont moi ou les musiciens nous chargeaient, évidemment pas. Avoir ce métier avait quand même bon nombre d'avantages ; même si ce n'était pas gratuit non plus. En tant que musicien, on a quand même des sortes d'impôts de maison de disque – une taxe à verser à celle-ci. C'est logique, en soit. Ils se chargent de tout pour nous. Peut-être qu'ils se chargent un peu trop de tout, d'ailleurs.

Devant l'hôtel attendait un véhicule. Je me doutai que le reste des musiciens était déjà parti pour l'aéroport parce que le bus n'était plus là. Juste une voiture, le chauffeur installé dedans, et Jeff adossé contre la carrosserie, face à moi. Il adorait faire ça, m'attendre dans cette position, avec toujours la réplique qu'il fallait. Et même ce jour-là, il l'avait.

« Alors, tu l'as eu ton bisou cette fois. »

Ce n'était pas une question, juste une affirmation. Ah, je le détestai pour ne pas être dupe, pas du tout.

J'installai mon sac dans le coffre, disant au chauffeur de rester au volant car je pouvais m'en charger sans problèmes, et montai simplement dans le véhicule, ignorant complètement Jeff et ses mots – vrais, comme bien souvent malheureusement.



Il n'y avait pas beaucoup d'heures d'avion entre Amsterdam et Anvers. Le plus long, au final, fut l'embarquement et le débarquement, à attendre les bagages et tout ce qui va avec.

J'étais silencieux, fatigué, et troublé. Je venais de passer une soirée et une nuit relativement incroyables, et là j'étais dans un aéroport à regarder le tapis roulant se répéter, attendant mon grand sac noir. Il arriva finalement, et une fois que tout le monde eut réceptionné ses affaires, direction la devanture du géant établissement, et les voitures qui nous attendaient pour nous amener à la salle de concert.

Clare, Mitch, Sarah et Adam rigolaient beaucoup, discutaient, étaient ravis d'être en Belgique même s'ils n'avaient pas énormément entendus parler de ce petit pays. Moi, j'étais perdu dans mes pensées, les lunettes teintées toujours sur le nez, à regarder par la fenêtre du véhicule, opaque également. Ils parlaient de ce charmant petit pays qu'est la Belgique, à vanter ses mérites et à détailler les paysages ; moi, je ne voyais que par Louis, à me dire qu'il avait – et a toujours – un peu de sang belge. Oui, on peut dire que j'étais ce qu'on peut appeler pathétique. Je pense en avoir conscience et je le reconnais sans aucune gêne.

Une fois à la salle de concert, qui était impressionnante et qui chauffai mon cœur l'espace d'un instant, notre programme habituel se répéta. Répétitions, méditation, ping-pong, préparation, dîner, et discussions. Dont la mienne avec ma mère, qui arriva vers 19 heures, toute heureuse de me voir, comme si cela faisait longtemps alors que pas du tout.

« Tu es très bizarre aujourd'hui, fit-elle remarquer au bout de dix minutes en ma présence. Et tu as l'air très fatigué, même si tu es déjà maquillé. Tu es malade ? »

J'haussai les épaules.

« Je ne sais pas, peut-être que c'est le début oui. Je ne me sens pas au top. »

Ma mère, fidèle à ce rôle, amena sa main à mon front. Je ne pense pas que j'étais chaud, je ne pense pas que j'étais malade, pas le moins du monde ; et vu sa tête, je crois qu'elle remarqua également que ce n'était pas un problème de santé.

« Je n'ai pas beaucoup dormi cette nuit, j'ajoutai. J'ai eu du mal. Je me rattraperai ce soir, ça ira. »

Elle se contenta d'acquiescer, n'entrant pas dans les détails. Parfois, il y avait juste des jours où je me sentais mal, elle avait apprit à supporter cette vision, pourtant douloureuse pour une mère, je l'imagine parfaitement. Mais c'était comme ça, il fallait vivre avec. Alors je suppose que ce jour-là, elle pensa que c'était ça ; alors que finalement, c'était une histoire concernant Louis. Elle ne pouvait cependant pas le deviner et je ne voulais pas qu'elle le fasse, pour le coup. En parler à personne était prévu.

Et puis... Parler de quoi, après tout ? Du nombre d'orgasmes que j'avais eu la nuit passé parce que Louis savait exactement ce qui me faisait crier ? Doux jésus, je ne parlerai jamais de ça avec ma mère. Et puis, outre ça, c'était secret. Peu importe ce que cette nuit avait été, elle n'était qu'à nous et n'avait ni suite ni conséquences, dans nos têtes à tous les deux, à Louis et moi. Un secret qui en resterait un. C'est tout ce que nous étions, de toute manière. Un secret.



Sans mentir, ce concert fut compliqué. Je n'étais pas dans l'ambiance. Je n'avais – et n'ai toujours rien – contre Anvers et plus généralement la Belgique, mais c'était juste le mauvais soir, la mauvaise situation. Rien n'allait.

J'étais éteint, peu concentré, ce qui fut évidemment remarqué par le public, et bien vite sur les réseaux sociaux, accompagné de rumeurs en tous genres. Ce soir-là, j'avais l'impression d'être un de ces chanteurs malhonnêtes qui le faisaient juste pour l'argent et pas le plaisir, la passion ou l'amour du public. Je me contentais de chanter parce que c'était mon devoir de professionnel en tournée, mais le cœur n'y était pas. Alors, je me sentais coupable et cela s'accumula sur toute la négativité dans ma tête. C'était un cercle vicieux, un terrible cercle vraiment vicieux.

Arriva le moment où il y avait cette chanson sur la set-list, une que j'avais écrite en m'inspiration, encore et toujours, de mon vécu. Mais ce soir-là, la chanter, ce fut bien difficile. Ce qui fut remarqué par les fans présents dans la salle de concert, qui n'étaient pas très motivés non plus. Je ne leur en veux pas aujourd'hui et je ne leur en ai même pas voulu sur le coup, je suppose qu'ils n'avaient pas envie de se donner pour moi qui ne me donnait pas du tout non plus cette soirée. C'est donnant donnant, et je le méritais ; même si la chaleur de leur amour m'aurait fait du bien.

Meet me in the hallway
Meet me in the hallway
I just left your bedroom
Give me some morphine
Is there any more to do ?

Je chantai, les yeux fermés, tenant fermement le micro, me concentrant sur ma voix qui, malgré tous mes efforts, tremblait légèrement.

Just let me know
I'll be at the door, at the door
Hoping you'll come around

Just let me know
I'll be on the floor, on the floor
Maybe we'll work it out

I gotta get better, gotta get better
And maybe we'll work it out

Il règnait un calme assez impressionnant dans la salle, ce qui n'était pas désagréable dans la forme ; mais cela me permettait encore plus de me concentrer sur cette musique, sa tristesse, sa signification, mes pensées noires vu la situation qui me plombait présentement. À ce moment précis, je pensai tellement profondément qu'avoir revu Louis avait été la pire idée de ma vie.

'Cause you left me in the hallway
Give me some more
Just take my pain away

Oh, oui. Je voulais juste que ma douleur disparaisse.



Je quittai la scène, soupirant et épuisé. C'était la folie dans les coulisses, du personnel de l'arène qui avait plein de choses à gérer, comme la sortie des milliers de personnes, tout simplement. C'était un boulot monstre, quand j'y pense ; et j'avais la partie cool de tout ça.

À peine la porte de ma loge ouverte, je fus surpris par un :

« Harry ! »

Puis, deux bras fins autour de moi et une tête contre mon torse. Aussi méchant et irrespectueux cela soit-il, j'avais totalement oublié que Camille devait venir. Mon inconscient avait probablement chassé cette information de mon esprit.

« Le concert était génial, je suis heureuse d'avoir pu venir même si je suis arrivée un peu tard, dit-elle ensuite. Et puis je suis avec toi, tout va bien maintenant. »

Elle s'approcha pour m'embrasser.

Je me sentais vide, au dessus de mon corps mais certainement pas dedans. Et il y avait Camille, mon officielle petite-amie, pourtant agréable à regarder, qui m'embrassait, alors que je n'éprouvai aucune envie à son égard et que je l'avais trompée allègrement et plusieurs fois il y a quelques heures de ça. La réalité et sa dureté me frappaient simplement.

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