C H A P I T R E 6


« Alors ça, les fans vont vraiment adorer, dit Sarah.

- C'est évident, confirma Clare. Puis, ça va être la folie sur Twitter. »

J'haussai les épaules, même si je savais très bien qu'elles avaient totalement raison. Je portai un pantalon en cuir avec le bout plutôt pattes d'éléphant, puis mon haut était une chemise blanche avec beaucoup de coutures, ainsi qu'un veston noir. Ce n'était pas incroyable, mais ce n'était pas non plus très habituel. En tout cas, j'adorai.

« Helene est déjà en place ? » Je demandai.

Helene était ma photographe officielle. J'adorai moi-même la photographie, alors j'avais tenu à avoir quelqu'un de qualifié. Helene était parfaite pour ce poste.

« Oui, répondit Sarah. D'ailleurs, tout à l'heure elle nous a montré les photos du concert d'hier, et elle a prise en photo la demande en mariage d'une fille à une autre.

- Vraiment ? » Je m'étonnai.

Je trouvai cela incroyable que des personnes puissent se fiancer à un de mes concerts. C'était si puissant, selon moi. Puis, je trouvai encore plus beau le fait que par la musique, j'avais le pouvoir d'unir les gens, créer des nouvelles rencontres qui devenaient amitié ou amour. Peut-être que ces filles venaient de là. Quoi qu'il arrive, je trouvai cela merveilleux.

« Oui, elle cherche à retrouver une des deux pour pouvoir envoyer la photo.

- Qu'elle leur dise que je les félicite », je dis.

Les filles hochèrent la tête puis allèrent dans la petite salle commune, sûrement pour prendre un dernier café avant de monter sur scène. Jeff vint jusqu'à moi.

« Prêt ? Me demanda-t-il.

- Comme toujours.

- Louis est toujours là ? »

Il fit un signe de tête en direction du couloir qui menait à ma loge. Je soufflai et acquiesçai.

« Je suppose qu'il ne va pas tarder à partir. Je lui ai dit de le faire avant la fin du spectacle.

- Tu lui as dit de partir ?

- À quoi tu t'attendais ? Que je lui supplie de rester ? «

Jeff haussa lesépaules, puis dit :

« Je n'aurais pas été étonné si tu l'avais fait.

- Et bien ce n'est pas le cas. Je ne l'ai pas fait. »

Je voyais bien qu'il voulait en dire plus, tellement plus, mais qu'il se retenait. Et il faisait bien de le faire, car je n'avais pas envie de l'écouter, je n'étais pas prêt à l'écouter. Ses mots n'auraient été que du vent. Il voyait que je menais une sévère lutte contre moi-même, et il me laissait à mon propre combat.

« En place ! » Annonça un membre de l'équipe de la salle.

Alors, on s'éxécuta. Doucement, on alla jusqu'à la scène. La salle était si bruyante, je pouvais déjà entendre l'excitation de milliers de personnes alors qu'elles ne me voyaient même pas encore ; mais c'est comme si elles pouvaient sentir ma présence. Cela promettait une superbe ambiance.

Un petit stagiaire – probablement le même qui avait été chercher notre nourriture – vint à moi. Il y en avait toujours un qui faisait ça, et je lui confiai mon téléphone le temps du concert. Je sortis l'appareil de ma poche et m'apprêtai à lui donner, mais je remarquai que j'avais un message non lu.

     Camille : Envoie moi un petit message avant de commencer le concert. Je t'aime

Mon coeur se serra légèrement. Je passai le téléphone au jeune homme.



Le concert était magique, réellement. L'ambiance était dingue, les fans vivaient le moment tout comme moi, si ce n'est plus, et l'atmosphère dans la salle était incroyable.

Cependant, pour moi, dans ma tête, c'était plus compliqué. Je pensais beaucoup à Camille, mais encore plus à Louis ; et je pensais à l'un, puis à l'autre, et au fait que l'un n'allait pas avec l'autre et que j'en aimais un bien plus que l'autre.

Je me rendis compte que je les aimai tous les deux, mais pas de la même manière. Louis... C'était puissant, c'était mon premier amour, c'était mon premier tout, c'était celui qui avait cette place ultime dans mon coeur, cette place qui n'avait pas bougée. Camille, je l'aimai, mais je l'aimai comme quelqu'un que je voulais protéger, je ne l'aimai pas comme quelqu'un avec qui j'avais envie d'avancer dans la vie, de construire quelque chose de sérieux. Je le savais, c'était enfoui en moi, profondément, c'était là, quelque part, mais ça ne voulait pas dire que je ne me voilais pas la face. Je me rendais bien compte que Louis avait toujours cet effet sur moi et que par conséquent, cela ne pouvait signifier qu'une seule chose, mais je me sentais également coupable vis à vis de Camille. Pourtant, elle n'en savait rien, et je n'avais encore rien fait de mal ; je ne l'avais pas trompé. Pas encore. Et à cet instant précis, sur scène, je n'en avais pas l'intention. J'avais envie de retrouver Louis, sur le plan physique, mais je me refusais à cet acte, parce que nous n'étions plus ensemble et que cela ne devait pas arriver, mais également par respect pour ma petite-amie. Comme quoi, tout change.

Alors oui, j'avais la tête remplie, et une humeur assez étrange. Mais pourtant, je mettais une énergie folle pendant ce concert. Peut-être que le bordel dans ma tête sortait ainsi ; j'étais rayonnant, je sautai, courai, faisais des notes que je ne tentai pas trop habituellement, j'intervenai avec le public. C'était magique ; j'apparaissais au meilleur de ma forme, alors qu'en vérité, c'était l'inverse. Je n'étais pas malheureux, juste perdu. Absolument perdu, comme seul au milieu d'une fôret gigantesque, avec seulement deux sentiers. Et c'était le moment où je devais choisir lequel j'empruntais. Pourtant, par peur, stupidité, ou peut-être un fin mélange des deux, j'évitais et repoussais ce choix.

Je terminai ma chanson et me dirigeai vers le petit escalier qui menait au couloir qui lui-même amenait à la seconde scène. Pour chaque date de cette tournée, je faisais cela : il y avait une plus petite scène, plus loin, où je chantais uniquement deux chansons, toujours les mêmes. Mais c'était pratique pour les fans qui étaient situés à l'autre bout de la salle, et cela me faisait plaisir.

« Harry ! Harry ! Harry ! »

La foule disait, criait, répètait mon nom. C'était constant pendant les concerts, mais ça me provoquait toujours cette chaleur dans la poitrine. Je leur étais si reconnaissant.

Je commençai à traverser le petit couloir, un agent de sécurité m'ouvrant le passage. Cependant, le canal était sûrement trop étroit, car les fans pouvaient me toucher de trop près, ce qui fait que je me retrouvai avec des mains partout ; même sur le visage. Je dus terminer ma trajectoire baissé, puis j'arrivai finalement à la deuxième scène et m'installai devant le micro.

Mitch me tendit ma guitare et je le remerciai avant de fermer les yeux. La prochaine chanson était réellement importante pour moi ; je l'avais écrite par rapport à Louis, pour lui. C'était sacrément émouvant de la chanter, encore plus ce soir-là, vu la situation à laquelle je faisais face.

If I could fly,
I'd be coming right back home to you
I think I might
Give up everything just ask me to

Les fans, ils chantaient, tous, mais doucement. Ils ne criaient pas jusqu'à s'en casser la voix et mes tympans, c'était simplement doux ; ils respectaient la douceur de cette chanson, ils la comprenaient, même s'ils ne savaient pas forcément sa réelle signification – même si, certains, l'avaient bien deviné – et j'appréciai, tellement.

Je fermai les yeux, chantant les quelques lignes que j'avais écrite, plus de trois années plus tôt. Ça paraissait tellement loin, et pourtant tellement proche. Peut-être était-ce parce que le garçon pour qui j'avais écris ces mêmes lignes était toujours dans mon coeur, comme il l'était trois ans plus tôt.

For your eyes only, I'll show you my heart
For when you're lonely, and forget who you are
I'm missing half of me, when we're apart
Now you know me, for your eyes only

Je terminai le premier refrain. Cela allait être sa partie, mais je faisais toujours une pause avant de la chanter, ce qui avait d'ailleurs tendance à rendre les fans fous. Pendant cette courte pause, je levai les yeux, regardant le balcon le plus élevé. Sur le coup, je ne savais pas pourquoi je le regardais, c'était une sorte d'instinct.

C'est à ce moment-là que je le vis, que je vis Louis. Il était assis là, il me regardait, probablement depuis le début du spectacle. Malgré son mal de crâne qui devait être évident, le fait que les basses devaient lui gonfler la tête, il était là, il me regardait. Je n'essayai même pas de m'empêcher de sourire. Je souris comme un enfant. Puis je baissaibles yeux, et commençai la partie qu'il chantait si bien habituellement.

I've got scars, even though they can't always be seen
And pain gets hard, but now you're here and I don't feel a thing

Ces paroles qui collaient si bien à la situation du moment.

Je me laissai porter par le moment, laissant chanter la foule avec moi, créant un moment si intime et convivial, et une fois la chanson terminée, le public hurla son euphorie. Je levai discrètement les yeux ; Louis était debout, applaudissant. Mon sourire revint.



Je descendis de la scène, encore tout chaud par l'ambiance. Jeff m'interpela ; je l'ignorai, passai droit devant lui. Mes oreilles bourdonnaient, j'avais encore tous ces cris en tête, toute cette foule déterminée et comblée, toutes les basses et les vibrations qui m'avaient secouées.

Peut-être que je n'avais pas les idées claires. Ou peut-être que, au contraire, elles l'étaient parfaitement désormais. Difficile à dire. En tout cas, je me précipitai jusqu'à ma loge et ouvrit rapidement la porte.

Louis était là. Il se tenait debout, droit, les bras le long du corps. Il n'avait pas l'air surpris, même si je venais de pousser très violemment la porte. C'était comme si il... m'attendait. Je pense que c'était cela. Il m'attendait.

Je ne peux pas dire que je fus le premier qui l'embrassai, car il se précipita sur mes lèvres en même temps que je me ruai sur les siennes. C'était juste, nous deux, une action commune, consentie, absolument incontrôlable. C'était assez dingue, mais c'était réellement en train de se passer. Il avait toujours le même goût – celui de la menthe, avec un arrière goût de tabac froid. L'embrasser était toujours aussi agréable, toujours aussi chaud, et je me détestai pendant l'espace d'une seconde d'avoir oublié les précédents mois comment c'était.

Je savais que j'avais envie de ce moment et que c'était juste putaindebon, mais le reste était un peu flou. En tout cas, la seconde suivante, j'étais plaqué contre la porte – fermée – de la loge, la bouche de Louis sur mon cou, mes mains se baladant dans ses cheveux, serrant et tirant quelques mèches tout en gémissant et grognant.

« Je t'avais dis de partir, je soufflai.

- En effet, tu l'as fais », rétorqua t-il, haletant tout autant que moi.

Sa bouche retrouva la mienne. C'était assez brouillon ; pourtant, nous connaissions parfaitement l'autre, mais ce n'était pas le fait que nous avions oublié, c'était juste que cela faisait sûrement trop longtemps que nous n'avions pas échangé un moment comme celui-ci. Les retrouvailles étaient explosives, et inévitables. Il paraissait maintenant impensable d'avoir pu penser que la journée ne prendrait pas un tel tournant – peu importe à quel point nous avions essayé de l'éviter, c'était inévitable. Nous étions deux amants.

« C'est mal », dis-je entre deux gémissements.

Pourtant, se faisant, mes mains étaient sur le jean de Louis, lui détachant le bouton et descendant sa braguette.

« Rien ne nous oblige à faire ça, répondit-il en m'enlevant – que dis-je, en tirant n'importe comment – mon veston et ma chemise.

- Oh, tais-toi. »

Je saisis ses épaules afin d'inverser les rôles, ce qui fit que Louis se retrouva adossé contre la porte, ma bouche désormais contre son cou. Nous continuâmes à nous déshabiller mutuellement, entre des baisers de tous types, ainsi que des petites morsures. On se dépêchait, comme si le temps était compté, alors qu'il ne l'était pas du tout – mais l'impatience était bien présente, c'était comme si cela faisait trop longtemps que nos corps n'avaient pas été l'un contre l'autre, et c'était trop, bien trop.

J'avais beau avoir lutté de toutes mes forces, j'avais beau avoir essayé de ne pas en arriver là, c'était un pur échec. Mais le sentir contre moi, à cet instant précis, c'était comme une victoire. Mais c'était mal. Tellement mal. Et pourtant bon. Tellement bon.

Cependant, je réalisai quelque chose et donc, par conséquent, me forçai à pousser Louis ; pas totalement, juste de manière à ce qu'il ne m'embrasse plus et que je puisse parler.

« Tu es tout de même conscient de ce que tu fais, pas vrai ? J'interrogeai. Je ne veux pas que tu sois encore un peu trop alcoolisé, et que dès que tout sera retombé, tu me détestes. »

Son visage transmit une douleur certaine.

« Te détester ? Comment tu peux penser que je puisse être capable de ressentir ça envers toi ?

- Je ne sais pas, soupirai-je.

- Ça n'arrivera jamais, Harry, dit-il en posant sa main sur la bordure de ma mâchoire. Jamais. Et d'accord, c'est juste impossible que j'ai dessoûlé en seulement quelques heures de sieste, mais t'es là, devant moi, et je sais que je suis totalement consentant. »

Je le regardai quelques instants, sans réelle réaction, puis mes lèvres retrouvèrent les siennes. Je serrai un bout de son fin haut dans mes poings, puis le guidai jusqu'au canapé, où l'on tomba tous deux. Nos baisers doublaient, triplaient, entre plusieurs gémissements, grognements, bruits assez difficiles à identifier. C'était juste... Parfait. Absolument immoral – même si je n'y pensais pas sur le moment – mais pourtant parfait. Parfaitement immoral, immoralement parfait, quelque chose dans le genre.

Cependant, il paraissait impossible qu'un tel moment ne soit pas gâché. Quelqu'un toqua à la porte, ce qui interromput bien rapidement le moment. Je me redressai brusquement, maintenant le contact visuel avec Louis.

« Qui c'est ? Murmura-t-il, ses mains toujours posées sur mes hanches.

- Je n'en sais rien, dis-je.

- Harry ? Dit la fameuse personne, et c'était Sarah. On va partir, on t'attend pour la voiture.

- Foutue habitude », je grognai.

En effet, nous avions la petite tradition d'aller ensemble à l'hôtel après un concert. J'adorais le faire, mais pour le coup, cela tombait bien mal. Je ne pouvais cependant pas refuser, car cela aurait paru suspect – pour Jeff, du moins, et je ne savais pas bien ce que Louis pensait de la situation mais j'étais presque sûr qu'il ne voulait pas que cela s'ébruite, tout comme moi. Ce n'était pas comme si nous étions de nouveau ensemble ou quelque chose du genre.

« Je vais devoir y aller, dis-je en remettant ma chemise.

- Tu es à quel hôtel ? » Demanda Louis en se levant à son tour.

Je savais parfaitement ce que sa question signifiait ; que le moment qui venait d'être interrompu allait avoir une suite, que la nuit allait être courte, mais aussi et surtout que Louis ne regrettait pas ce que nous venions de faire et qu'il voulait même aller jusqu'au bout. C'en était de même pour moi. J'aurais dû ne pas vouloir aller au bout ; mais pourtant, j'en avais envie. Je me mordis la lèvre.

« Le Palace, à quelques rues seulement. »

Il acquiesça. Cela toqua de nouveau à la porte.

« Harry ? Ont'attend !

- J'arrive ! »

J'attrapainfurtivement le haut de Louis et déposai un bécot sur ses lèvres avant d'attraper ma veste. Je me dirigeaibvers la porte, et lançai à Louis :

« À tout à l'heure. »

Puis je quittai la loge – sans ouvrir en grand la porte, évidemment – les pensées vraiment, mais alors vraiment en bordel.



Étant le dernier à monter dans la grande voiture noire, je claqua la portière, et le véhicule démarra presque aussitôt, direction l'hôtel.

Mes pensées n'étaient pas focalisés sur ce que Clare était en train de dire, je n'écoutais pas un seul mot. J'étais encore absorbé par ce qu'il venait de se passer avec Louis, dans ma loge, et je n'arrivais pas à y croire. N'étant plus dans le moment, possédant un peu de recul, je me sentais assez mal, car je me trouvais ridicule d'avoir si facilement cédé à Louis. J'étais d'autant plus tiraillé car je lui avais dis quel était mon hôtel, désirant le recevoir plus tard dans la soirée – et cela n'allait pas être pour jouer aux cartes – alors que j'avais réellement quelqu'un dans ma vie, une petite-amie.

C'était horrible. Je ne savais pas quoi faire. Mais de toute manière, je n'étais pas encore confronté au retour de Louis, j'étais simplement dans la voiture avec mes musiciens, après un concert magique même si quelque peu turbulant.

« Tu n'étais pas là, mais les agents ont expliqués que le couloir pour traverser entre les deux scènes allait devenir plus large. Tu te faisais frapper de partout. »

J'acquiesçai, toujours rêveur, même si j'entendais tout de même ses mots. Il est vrai que les fans, dans l'euphorie et la folie du moment, m'avaient tiré un peu dans tous les sens, jusqu'à me frapper. J'avais conscience qu'ils n'avaient pas ça dans un but méchant, mais cela restait dangereux.

« D'accord, répondis-je, distrait.

- À part ça, reprit Sarah, l'ambiance était super.

- Oui, confirma Mitch. Le public imposait vraiment sa présence, c'était agréable. »

J'hochai simplement la tête de temps à autre, n'écoutant pas tous les mots. Je n'étais pas du genre à faire ça, j'aimais qu'on m'écoute alors je trouvais normal d'écouter les autres – le principe même de la politesse – mais sur l'instant, me concentrer sur autre chose que LouisLouisLouis et ses lèvreslèvreslèvres était impossible.

C'était si bizarre, ce mélange d'envie et de réticence, cette mixture entre désir et culpabilité. Je n'avais jamais ressenti cela avant, et je n'étais pas sûr d'aimer le faire, mais je n'étais pas sûr de détester non plus. Bizarre.

Je tournai la tête vers Jeff, qui me fixait, sans réelle expression sur le visage. Je lui adressai un petit signe de tête. Peut-être qu'il se doutait de quelque chose – j'ai appris bien plus tard qu'il avait totalement deviné la situation – mais encore une fois, je n'y prêtais pas vraiment attention.

Je me contentai de regarder par la fenêtre teintée, la vie autour de moi ; dépassé par la mienne.

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