Chapitre 12 : Au Palais
Pour ceux qui veulent se faire une meilleure idée du milieu dans lequel se déroule l'histoire, regardez la vidéo en média du palais de la cité au XIVe siècle.
*=======*
Je sens qu'on me regarde. Parfois, quand je passe à côté de quelques groupes de personnes, je les entends chuchoter et lorsque je me retourne vers eux, je les vois qui me fixent bizarrement. Je me sens gênée et légèrement agacée, ça me rappelle les intercours à l'école, quand on me dévisageait dans le couloir, sauf qu'ici, je ne comprends pas pourquoi j'attire autant l'attention. Et ça commence sérieusement à m'énerver, j'ai l'impression d'être un clown au milieu d'un cirque, n'aime vraiment pas ça !
On m'attrape subitement par le bras, mais dans un réflexe, je m'arrache à cette prise et me tourne précipitamment vers la personne potentiellement mal intentionnée en position de combat. Léon écarquille les yeux et porte automatiquement une main à son épée, mais on se détend tous les deux en reconnaissant la personne devant nous. Léon soupire en se détendant un peu.
- Que faites-vous ! Cessez de rêvasser sinon je vous laisse là.
Il m'attrape de nouveau le poignet pour me tirer à travers la foule bruyante et cette fois-ci, je me laisse faire, me contentant de regarder autour ne nous, plus personne ne fait attention à moi. Léon se sert de ses épaules pour dégager le passage, c'est étrange de le voir agir ainsi, on aurait dit que traverser la foule est tout un art et qu'il en a la parfaite maîtrise. Le niveau sonore augmente à mesure qu'on avance et Léon m'attire encore plus près de lui, serrant ma main avec plus de force, il ne semble d'ailleurs pas s'en rendre compte.
- Léon ! Arrêtez, vous me faites mal.
Subitement, il accélère le pas et me tire d'un coup pour me faire sortir de la foule, puis sans crier garde, me pousse dans une petite ruelle pratiquement vide. Je tire sur mon bras pour le forcer à s'arrêter, je ne comprends plus rien, qu'est-ce qu'il lui prend tout à coup ?
- Hey, mais qu'est-ce que...
- Par ici !, m'ordonne-t-il sans même me regarder, me tirant à sa suite, mais je résiste.
Sentant sa prise lui échapper, Léon se tourne vers moi et de sa main valide, m'attrape par la taille pour me pousser en avant. J'arrête de justesse un réflexe qui voulait que je lui donne un coude dans l'abdomen, je vois Léon regarder derrière nous en essayant de m'emmener le plus loin possible de la foule en marmonnant dans sa barbe naissante, j'essaye d'ancrer mes pieds au sol pour ne pas bouger, mais il a plus de force que moi et mes pieds glissent sur les petits cailloux. Pourquoi toute cette précipitation ?!
Instinctivement, il bouge son autre bras vers moi pour me tirer avec, malgré son écharpe, mais s'arrête brusquement en poussant un grognement de douleur. Il pousse un juron, ce qui me fait lever les sourcils, les insultes du moyen-âge sont étranges.
- Tudieu ? Ah ! Vous voyez ce qu'il arrive si vous agissez sans rien m'expliquer.
- Éloïse !, cri-t-il presque.
Je lève les mains en l'air.
- C'est bon, c'est bon, j'avance. Pas la peine de t'énerver... Euh... Vous ! Vous énerver, m'empresse-je de me corriger sous son regard venimeux.
Décidément, il n'est pas très commode avec les règles de la politesse. Il soupire avant de me lâcher et de m'intimer l'ordre de le suivre. Je marmonne de mécontentement, mais le suis sans broncher, pas trop le choix en même temps.
Léon s'arrête à un tournant, les rues sont étroites et obscures par ici. Je n'ai jamais vu ça, ces petites rues de terre sont inégales, tantôt couvertes de bosses, tantôt remplies de trous. Les maisons, à l'architecture particulière du moyen-âge, avec les sortes de croix en bois qui partent d'une extrémité à l'autre du mur, sont hautes et à chaque fois, les étages sont plus larges que la base, comme s'il n'y a pas assez de place au sol et qu'ils en profitent pour gagner plus d'espace en hauteur. Léon se redresse dans une posture plus fière en se détendant quelque peu et avance d'un pas assuré. Mais qu'est-ce qu'il lui arrive ?
- Pourquoi vous vous cachez ? Vous avez peur qu'on vous voie ici ou quoi ?
Ma question le prend au dépourvu car il me jette un regard étonné par-dessus son épaule. Il me regarde un long moment, scandant la moindre émotion sur mon visage comme pour déchiffrer ce qu'il peut bien se passer dans ma petite tête.
- Un problème ?
Il secoue la tête en se passant la main valide dans ses cheveux puis sur sa nuque, il a l'air vraiment épuisé.
- Avançons, il nous faut passer le pont pour arriver au palais, je pense pouvoir vous y trouver une bonne place. Vous aurez de quoi manger et un toit où dormir.
Je le remercie en lui offrant un semblant de sourire, bien trop crispé cependant, Léon se contente de hocher la tête. Autour de nous, les habitants circulent librement, ils crient, rigolent, des enfants jouent à se courir après. Je me sens étrange, tout est si différent ici. Si grand et minuscule à la fois, j'ai l'impression de rêver, voire même de délirer, mais je sais bien que tout ceci est réel.
Léon m'intime à nouveau l'ordre de le suivre et je lève les yeux au ciel, merci, je pense que j'ai compris ! Je sais bien qu'il ne faut pas que je le perde car il ne viendra pas me chercher, il me l'a assez fait comprendre.
- Où sommes-nous maintenant ?
- Sur le pont.
- Comment ça sur le pont ?! Mais il y a des maisons ici !, m'exclamé-je peut-être un peu trop fort car certains passants tournent la tête dans ma direction pour me dévisager, mais je ne leur accorde aucune attention.
- Justement ! Avez-vous déjà vu des ponts sans maisons !?
Je reste ahuri, des maisons sur des ponts ? C'est comme ça au moyen-âge ?
Nous marchons à travers une foule de plus en plus dense et je ne sais plus où donner de la tête, j'ai fini par comprendre que ça ne sert à rien de baisser le regard, la tentation est d'ailleurs trop forte et j'ai fini par lever les yeux pour mieux admirer l'improbable aventure que je suis en train de vivre. Ce n'est pas tous les jours qu'on débarque au moyen-âge.
J'avance au niveau de Léon en lui posant des questions pour faire passer le temps même si je commence sérieusement à fatiguer, il y a beaucoup trop d'informations visuelles à ingurgité d'un coup.
- Votre bras vous fait toujours aussi mal ?
- Non.
Je me tais, il n'est vraiment pas très bavard, il ne cesse de surveiller les alentours.
- Vous cherchez quelqu'un ? Parce que depuis tout à l'heure, vous n'arrêtez pas d'agir bizarrement.
Plongé dans ses pensées, il ne m'a pas entendu et je dois répéter ma question plus fort pour qu'il fasse attention à moi.
- Pardon, vous disiez ?
Je le fusille du regard.
- Non non, je ne cherche personne.
- Ouais, c'est ça...
- Écoutez, nous ne sommes pas loin du palais et je préférerais que tout se passe pour le mieux.
- De quoi avez-vous peur, qu'un psychopathe vienne tuer le roi, c'est ça ?
Léon se crispe soudainement et m'attrape le bras pour le serrer très fort en arrêtant de marcher, provoquant ainsi des exclamations d'agacement de la part de ceux à qui on bloque le passage.
- Qui !? Qui veut tuer le roi ?!
Mes yeux s'écarquillent sous l'effet de la surprise. Il me pousse sur le côté pour venir me plaquer le dos contre l'une des maisons. Deux femmes qui passent près de nous me lancent des regards désolés alors que personne d'autres ne fait même pas attention à nous.
Wow, il se passe quoi là ?!
- Oh ! Relax, personne ne tuera votre roi, fin, je dis ça, j'en sais rien moi.
Il me regarde froidement en me pressant contre le mur, il me scrute pendant un moment et je lève mon bras libre en signe de paix, il fini par me relâcher à contre cœur en me disant doucement d'un ton dur:
- Évitez de dire tout ce qui vous passe par la tête, vous risquerez de le regretter.
- C'est une menace ?!, m'offusqué-je en lui rendant son regard.
Il plisse les paupières en s'écartant un peu de moi.
- Non, je ne vous veux aucun mal, mais je ne peux pas dire autant de tout le monde, alors restez sur vos gardes, beaucoup de personnes n'apprécient pas qu'une fame parle trop.
Je reste sur le cul, c'est n'importe quoi. Mais je me rappelle qu'on est au moyen-âge, et que les droits de la femme, ça n'a pas encore été découvert. Bande de macho !
Il me fait signe de le suivre et très vite, nous arrivons en face de deux tourelles incrustées dans un autre rempart d'un peu moins de dix mètres. Comparé à ça, l'entrée semble minuscule. Celle-ci est gardée par quatre hommes en armures, deux juste devant l'entrée et deux autres, un peu en retrait, Léon s'avance vers le garde le plus proche, celui-ci plisse les yeux avant de le reconnaître. Un air joyeux s'affiche sur son visage mais se fait bien vite balayer par une pointe d'inquiétude en voyant le bras bandé de mon camarade de voyage.
- Général ? Que vous est-il arrivé ?!
Général ?
À cette exclamation, un de ses collèges resté surveiller l'avant de l'entrée s'avance vers Léon.
- Vous êtes salement amoché !
Léon grimace et fusille du regard les hommes devant lui qui se mettent instinctivement en garde-à-vous et font un pas en arrière pour lui laisser le chemin libre.
- Restez à vos postes soldats !
L'ordre une fois donné, les deux hommes se précipitent à leur place attribuée.
Le blessé s'avance, mais dès que je fais de même, l'un des hommes m'interpelle en me barrant la route de son corps légèrement plus grand que le mien, mais bien trop gringalet pour m'impressionner, contrairement à l'épée attachée à sa ceinture. Léon ordonne d'une voix autoritaire qu'on me laisse passer.
- Mais...
- Elle est avec moi !, rétorque mon camarade de voyage, grimaçant d'agacement.
Son ton est catégorique et les hommes m'autorisent enfin à rejoindre Léon en se jetant des regards interrogatoires contrairement aux deux autres hommes restés en retraite qui eux, ne bronchent même pas à notre passage. Je les observe par-dessus mon épaule puis me concentre sur le dos de Léon en me disant que c'est maintenant que les choses sérieuses vont commencer.
Devant moi se dresse le palais. La cour du roi rassemble plusieurs bâtiments immenses que je ne connais pas. J'ai déjà mentionné que je ne suis jamais allé à Paris ? Il me semblait bien...
- Woh !
J'avance, le nez en l'air, trop occupée à admirer l'architecture impressionnante de cet immense endroit. Je siffle, impressionnée et fais un tour sur moi-même tout en marchant derrière Léon. Sérieusement, il y a même une chapelle dans la cour royale et elle est étrangement imbriquée dans ce que je suppose être le palais.
- Avancez plus vite, je suis attendu !, me réprimande Léon, visiblement pressé.
- C'est bon, ne pleures pas, j'arrive, ne puis-je m'empêcher de maugréer sous son regard assassin.
Devant nous, énormément de monde vont et viennent dans tous les sens, une vraie fourmilière, certains ont l'air si pressés. Subitement, une femme bien en chaire se détache de l'espèce de marée humaine. Vêtue d'une robe toute simple avec un tablier ainsi qu'une sorte de bonnet qui lui couvre entièrement la chevelure, ne laissant deviner sa blondeur que par ses sourcils d'un blond presque blanc, elle s'avance précipitamment vers Léon en faisant de grandes gesticulations pour qu'il puisse l'apercevoir. Cependant, il est difficile de ne pas la remarquer avec ses cris. Elle appelle Léon avec tant de force et de détermination que je ne serais pas surprise de le voir détaler à toute allure, de peur de se trouver coincé dans ses bras, car elle accoure clairement pour l'enlacer avec beaucoup de vigueur, beaucoup !
Le pauvre, ne puis-je m'empêcher de le plaindre à l'avance.
Le concerné se raidit dans un premier temps avant de laisser échapper un petit soupir de résignation. Mais alors que la femme d'un âge déjà bien avancé n'est plus qu'à quelques pas de lui, elle s'immobilise d'un coup, coupant son élan et pâlit d'inquiétude.
- Seigneur ! Mais que vous est-il arrivé mon garçon ?!
Celui-ci grimace avant de rassurer la femme.
- Ce n'est rien, tout va bien, je vous assure Catherine.
- Ouais, ben on ne dirait pas, vous êtes si blanc qu'on a surtout l'impression que vous êtes en train d'agoniser, ajouté-je en ricanant.
Les deux personnes se tournent subitement vers moi, comme s'ils viennent tout juste de remarquer ma présence. Sympa !
La femme un peu rondelette attrape sans crier garde le visage de Léon dans ses petites mains potelés pour le faire pivoter de droite à gauche.
- Oh ! Elle dit vrai, vous êtes tout pâle !, sursaute la femme d'un ton où l'inquiétude grandit au fur et à mesure qu'elle analyse l'état du jeune homme.
- Oh Seigneur ! Oh Seigneur !, répète-t-elle en boucle.
Léon se dégage de sa prise en tentant tant bien que mal de la convaincre que ce n'est rien, que tout va bien. Il me lance ensuite un regard si noir que je détourne immédiatement le regard avant de me rendre compte que je n'ai rien fait de mal, je relève la tête pour le regarder dans les yeux.
- Catherine, je dois absolument rencontrer le roi !
Le jeune homme fait mine de vouloir avancer, mais Catherine l'en empêche et fait signe à une jeune fille d'à peu prêt quatorze ans de venir.
- Mon enfant, dit-elle en s'adressant à la jeune fille, va faire parvenir au roi un message. Le général Léon est rentré de mission, blessé, il viendra faire son rapport.
La petite brune hoche vigoureusement la tête avant de se lancer à toute allure vers le palais. Léon la suit un moment du regard.
- Et vous, qui êtes-vous ? Je ne vous ai jamais vu.
La femme au bonnet plus tout à fait blanc fait un pas dans ma direction en me scrutant avec attention.
- Je l'ai trouvé en chemin, elle n'a nulle part où aller et est déterminé à travailler, c'est pourquoi je l'ai amené avec moi, elle pourrait être utile au palais.
Catherine ne me lâche pas du regard tout en acquiesçant. Elle se tourne vers Léon en le gratifiant d'un sourire doux.
- Vous êtes bien bon mon général.
Je fronce les sourcils. Techniquement, je l'ai supplié de m'emmener avec lui, il n'avait pas trop l'air de le vouloir tant que ça. Et il me semble qui a omis de lui dire que je lui ai quand même sauvé la vie et que c'est sûrement pour ça qu'il m'a aidé. Mais je juge judicieux de ne pas lui faire remarquer, il changerait peut-être d'avis et me chasserait d'ici. Et là, je serais dans la merde.
Léon fait un signe de tête à Catherine.
- Pourriez-vous vous charger de lui trouver une place, je ne peux pas me permettre de faire attendre le roi.
- Je vous en prie, allez voir un guérisseur après votre entrevue avec le roi, je serais moins inquiète.
- Je vous le promets. Je viendrai ensuite voir comme va Éloïse.
Comprenant que c'est moi Éloïse, la femme incline légèrement la tête en signe de salut et Léon se dirige vers les grands escaliers qui mènent à l'entrée du palais. Je croise les bras.
Sympas de parler de moi alors que je suis là, vraiment, ne vous gênez surtout pas...
- Quel jeune homme remarquable, dit doucement Catherine en le regardant avancer le dos droit, la démarche assurée.
Je ne dis rien alors la femme blonde, légèrement plus petite que moi, se détourne de sa contemplation pour m'analyser à nouveau des pieds à la tête avant de fixer ses yeux noisette dans les miens. Elle lève un sourcil.
- Bien Éloïse, que savez-vous faire ?
Je reste un moment à réfléchir, puis plisse les yeux.
Euh... Me battre, ça compte ou pas ?
À suivre ...
============================
=================
*========*
Vraiment désolée pour cette longue période d'attente, ne me frapper pas SVP.
Alors ? Quel sera son rôle dans cet immense palais, des proposition ?
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top