5. début de soirée d'inté
- Tu vas vraiment y aller... Tout seul ? me demande Shelly avec un petit air suspicieux sur le visage.
Je hausse un sourcil. Je ne suis pas réellement du genre à m'énerver, j'ai toujours eu le sang froid. Je me souviens qu'en maternelle, l'un des jeux préférés de mes camarades de classe était d'essayer de me faire piquer une colère. Et rare ont été ceux ayant réussi ce défis. Parfois, il m'arrive même de faire semblant de m'énerver. Par exemple, avec mon ancienne copine, que j'ai eu pendant les grandes vacances du passage en seconde. A ce moment de ma vie, je ne savais même pas ce que ça voulait dire être amoureux, mais je faisais de mon mieux pour être un petit-copain sympa et attirant. Bref, un vrai petit bonhomme qui se la jouait en petit adulte. Mais cette fille ne cessait de me faire des crises, encore et toujours, me disant que j'étais trop passif, trop ennuyant. Un jour, je ne sais pas pourquoi, peut-être même l'une des premières fois de ma vie, j'ai haussé le ton face à une fille. Et étrangement, j'ai remarqué que la fille est tout de suite devenue plus gentille avec moi. J'ai compris qu'elle avait réellement besoin que nous nous hurlions dessus pour que notre couple fonctionne. Alors j'ai fait semblant quelque temps de m'énerver, mais je n'ai pas tenu bien longtemps.
Cependant, aujourd'hui, ils commencent réellement à me casser les pieds. Shelly n'arrête pas de me bassiner avec cette histoire de soirée d'intégration, et au fait que j'ai décidé d'y aller seul. Déjà, Jonas n'arrêtait pas de m'en faire tout un plat lorsqu'on est sorti tous les deux, et si maintenant Shelly s'y met elle-aussi, je vais finir par croire que quelque chose cloche chez moi. Non, le pire, c'est que je sais très bien que quelque chose chez moi à ce niveau-là, mais étant donné que j'ai décidé de faire l'effort et de surmonter mes craintes, je n'ai pas besoin de les avoir tous les deux sur le dos en train de constamment remettre le sujet sur le tapis. Je stresse déjà bien assez comme ça.
Autant avec Jonas, j'aurais pu craquer et me décider finalement à lui demander de venir avec moi, autant avec Shelly, c'est hors de question. Et ce, à cause de quelqu'un en particulier, que je sais pertinemment que je vais croiser là-bas. Il n'y a pas de doute, son pote Henrik est l'un des membres du Bureau des Étudiants, alors Eden y sera forcément. Mais je me suis répété en boucle, encore et encore, que peu importe, je suis assez grand pour faire ma vie de mon côté, et que ce qu'Eden et moi avons fait dans le passé est justement, du passé. C'est passé, révolu, c'est du passé. Du passé... C'est passé. Il faut que je me détende...
- Ça va très bien se passer, c'est l'occasion pour moi de me faire des amis... répondis-je simplement tout en enfilant un t-shirt blanc.
Shelly s'approche de moi et défait les boutons du col qui se refermaient autour de mon cou, et qui m'étranglaient presque.
- Ça faisait trop stricte... me dit-elle avec un clin d'œil avant de poser ses lèvres contre les miennes.
Je souris et passe mes mains dans le bas de son dos, la serrant un peu plus contre moi. J'essaye de détendre tous les muscles de mon corps qui semblent prêt à craquer et je ferme les yeux. Je suis sûr que tout se passera bien. Shelly met fin au baiser avant de me tendre ma veste kaki style un peu grunge, qui était posée sur mon lit. La première veste que je me suis payé avec mon argent. Bien sûr, je n'ai pas été idiot au point de partir de chez moi les mains vides, et j'ai fait attention à prendre le plus d'affaires possible, mais cette veste a une signification bien particulière, elle représente le fruit de ma liberté. D'autant plus que c'est loin d'être le style de vêtements que mes parents auraient approuvé. A vrai dire, rien dans ma tenue ne leur plairait. Un t-shirt blanc un peu bancale, une veste kaki grunge, un jean serré sur une paire de boots marrons, qui font penser aux chaussures des bucherons. Avant, pour sortir en soirée, c'était chemise et pantalon en toile obligatoire. Je pense que j'essaye de marquer la différence au maximum en choisissant un style plus rock et libre. Et j'adore ça.
Après avoir raccompagné Shelly chez elle, tel le gentleman que je suis, je suis bien obligé de devoir arrêter de repousser ce moment. La soirée était prévue sur les coups de 21h, et comme j'ai fait exprès de trainer, il est déjà 22h passé. Quel idiot. Il faut vraiment que je me décoince. Je n'étais pas comme ça avant.
Je finis par arriver devant le bar, après avoir vérifié l'adresse une bonne dizaine de fois (pourtant, je ne pouvais pas me tromper, c'est l'unique bar de la rue et il est plein à craquer). Mais maintenant, qu'est-ce que je fais ? Je ne connais personne. Et honnêtement, je sais très bien que ça ne se passera pas comme dans les films, ou, pour une raison inconnue, quand une personne seule arrive en soirée, quelqu'un l'aborde naturellement et lui propose de le présenter à sa bande de potes qui tombent tous sous son charme et décident d'en faire leur meilleur ami. Je vais rentrer dans ce bar, prendre un verre au bar et poireauter seul, tel un poivron alcoolique. Mon dieu, je n'aurais jamais dû venir. Je comprends maintenant pourquoi Jonas et Shelly étaient inquiets. Ils savaient que je n'aurais pas le cran pour le faire. Je n'y arriverai jamais.
- Oh putain de bordel de merde j'y crois pas !
Je me fige. Non, c'est de moi qu'on parle, là ? J'ai l'impression de me liquéfier. J'ai développé cette paranoïa horrible que les gens passent leur temps à me critiquer dans mon dos, et c'est pire encore de m'imaginer qu'ils le font face à moi. Et là, ça se trouve, j'ai fait une erreur de style vestimentaire, ou alors j'ai mis trop de gel dans mes cheveux (pourtant je n'ai pas mis une goutte...). Peut-être que j'ai une tâche dégueulasse sur mon jean qui laisse penser que je me suis pisser dessus ? Pire encore, j'ai un truc coincé entre les dents... Je pense que le mieux à faire maintenant, c'est de fuir.
Et là, contre tout attente, une tête blonde émerge d'un troupeau de gens bourrés, et se dirige vers moi. Anton Monty.
- Solly !!
Le garçon, que je n'ai pas vu depuis la fin du lycée, c'est à dire trois mois, s'approche à grands pas de moi. Anton ne fait pas parti de la liste de mes amis qui ont arrêté de me parler après que j'ai choisi de couper les ponts avec mes parents et que je sois devenu pauvre. Non, il fait parti de la liste de ceux que j'ai moi-même décidé d'effacer de la liste. L'extravagance d'Anton ne m'aurait jamais allé, nous sommes beaucoup trop différents, et je ne l'ai jamais réellement considéré comme un ami.
Et pourtant, ce soir, je me sens terriblement soulagé de le trouver là et d'avoir au moins une personne dans ce bar qui connaît mon prénom. Bien que techniquement, ils soient deux...
Anton me sert alors une accolade digne des retrouvailles monumentales de deux hommes virils après une guerre meurtrière. C'est à dire, il est un peu trop près, si vous voulez mon avis.
- Comment ça va ? me demande-t-il en m'observant, un grand sourire plaqué sur ses lèvres.
- Euh, bien... Et toi ?
Je ne peux m'empêcher d'être perplexe. Anton n'est-il pas au courant que je n'ai plus un sous ? Une main toujours sur mon épaule, il passe une main dans ses cheveux avec son légendaire air décontracté en toute occasion.
- Je fais une année sabbatique, mon pote.
Mon pote ? Il n'a pas changé d'un pouce, il agit comme avant.
- Enfin, je suis en première année de droit, quoi... enchaine-t-il en faisant une moue désinvolte.
- Euh, du coup, tu ne fais pas une vraie année sabbatique, non ?
Anton me fait alors un clin d'œil, et sans que je ne puisse esquisser un geste, le voilà en train de m'entraîner dans le bar. Ce mec est une vraie lanterne, et tout comme Jonas, c'est un cas à part. Anton était le premier de la classe, sans jamais faire un seul effort. Et il a l'air de continuer sur sa lancée, c'est à dire réussir ses études sans se poser la moindre question. Voilà pourquoi cela ressemble à une année sabbatique pour lui.
- Alors, tu habites où maintenant ? me demande-t-il soudainement en m'amenant au bar.
Je ne peux m'empêcher de me figer, soudainement, me demandant s'il ne me pose pas une question piège. Me demande-t-il où j'habite maintenant que je ne suis plus dans les jupons de ma mère ? Ou tout simplement me demande-t-il dans quel quartier mes parents m'ont-ils payé un magnifique appartement ? Il veut me juger, j'en suis sûr. Anton me regarde en haussant un sourcil.
- Mec, dis-moi que t'as réussi à te trouver une place dans une de ces supers résidences universitaires où y'a des trous dans les douches et que tu peux mater les filles ! s'exclame-t-il en rigolant.
Voilà également pourquoi j'ai rayé Anton de ma liste d'amis, ce mec me fout trop la honte, et c'est un pervers fini. Comme si j'irais faire une chose pareille ! Heureusement pour moi, les toilettes et les douches ne sont pas communes avec tout le couloir. Le tout arrive à se couler dans mon neuf mètres carrés, bien que ce soit difficile.
- Euh... Non, je...
- Tu sais, quand j'ai appris par rapport à tes parents, j'étais super impressionné, honnêtement, t'as des putains de couilles ! T'es putain de libre maintenant, t'es pas obligé de suivre leurs études, de faire ce qu'ils disent... Mais je peux pas vivre sans fric, que veux-tu... Alors je continue à faire les lèches-bottes...
Je reste comme deux ronds de flan alors que le moulin à parole Anton Monty est lancé.
- Tu te rends compte, je fais le lèche-botte auprès de mes parents... J'ai l'impression d'être une pute... Avec mes propres parents. Genre ils me payent pour que je joue le fils cool à qui tout réussi, le petit fils prodige...
Anton fait une grimace monumentale.
- C'est dégueulasse, j'ai des images dans la tête maintenant, beurk...
Je suis tellement surpris que je ne sais pas quoi répondre. Anton est totalement au courant de ma situation, et contrairement à ceux que je considérais comme mes amis et qui n'ont pas attendu une journée pour me virer de leurs vies, voilà qu'Anton me trouve cool. Ce mec, qui a un très gros grain, si vous voulez mon avis, ce mec ne me juge pas. Et de plus, il comprend tout à fait ce que j'ai ressenti pendant toutes ces années. Cette impression de ne pas être l'être aimé de ses parents, le fruit de leur amour, mais simplement un bout de chair et d'os, qui coûte de l'argent, et qui, dans ce sens, ne doit jamais les décevoir et doit être parfait en tout point. Un placement d'argent, voilà ce que j'avais l'impression d'être. Une usine de plus qu'ils devaient gérer et qui devait leur rapporter.
- Anton, si tu veux, je peux te faire entrer dans la résidence en face de la mienne, je suis sûr qu'il y a des trous aux douches...
Anton éclate alors de rire et pose une main sur son cœur, un petit air théâtrale et touché sur le visage.
- Tu ferais ça pour moi ? Tu serais un amour... roucoule-t-il tout en pouffant de rire.
Je me sens soudainement plus détendu. Je n'aurais peut-être pas dû supprimer Anton de ma liste d'amis. Le barman arrive alors et nous demande ce que nous voulons boire. Anton choisit un verre de vodka, avec, je cite : un soupçons de jus de pomme. Quant à moi, je commande une bière. La soirée ne s'annonce peut-être pas aussi terrible que ça. Je me demande ce que fiche Anton ici. Peut-être que ce n'est pas une soirée d'intégration seulement pour notre licence ? Cependant, je ne crois pas que ce soit notre Université qui gère les cursus en droit...
- Oh, j'suis venu avec mon ami d'enfance, tu te souviens, je te l'avais présenté une fois... Ah, tiens, le voilà ! Eh, Eden ramène ton cul ici !
J'ai soudainement l'impression que la terre se met dangereusement à tanguer autour de moi, et que bien que tout me paraisse tellement flou que je ne pourrais vous dire où je me trouve, je distingue parfaitement Anton faire un signe de la main en direction de quelqu'un se trouvant dans mon dos. Et ce quelqu'un, j'ai l'impression que tout mon corps se remémore son prénom, surtout mes lèvres.
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MON DIEU CE GIF ME REND DINGUE.
BONJOUR AU REVOIR JE MEURS...
Sinon, j'adore faire paniquer Solly, je dois vous avouer que ça va devenir mon passe-temps favoris. C'est la première fois que je fais un personnage comme lui, peureux, voir même carrément parano sur les bords, mais j'essaye quand même de le rendre chou XD
D'ailleurs, je ne vous dis pas le mouvement de panique dans le prochain chapitre, ahah Comment vont se passer les retrouvailles ? héhé
BREF, à bientôt ! XD
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