4. groupes

Autant le dire tout de suite, le réveil a été plutôt dur. Mais il y a une chose plutôt agréable, c'est que contrairement à Jonas, je me rappelle toujours de tout, même quand j'ai bu comme un trou. Je dis que c'est une chose plutôt agréable parce que, même si parfois ça fout la honte de se remémorer que j'ai finis par danser torse nu sur le bar, je préfère avoir conscience de mes conneries. Parce qu'en attendant, Jonas a fait un strip-tease sur le bar, justement, et lui ne s'en rappellera jamais, et non seulement je pourrais lui faire croire n'importe quoi, mais quand nous retournerons dans ce bar, il ne saura même pas pourquoi tout le monde l'appellera Joli Cul. Moi et mon terrible manque de confiance en moi, au moins, je saurais pourquoi on murmure à mon passage, et je préfère ça à me poser trente six milles questions et me prendre la tête. Et je pourrais mourir de honte en pleine connaissance de cause.

J'ai passé bien trois heures enroulé dans ma couette, dans mon neuf mètres carré, à simplement regarder le mur en face. Malheureusement, dès que j'essayais de regarder un écran, un mal de tête attaquait mon crâne sans répit, et j'étais trop mal pour lire un livre, me sentant trop nauséeux. Alors observer les fissures sur le mur m'a paru un très bon passe-temps.

Au bout d'un moment, j'ai décidé qu'il me serait sûrement bénéfique de prendre l'air. J'ai pris une douche, que je voulais rapide dans un premier temps mais qui s'est terminée en une longue vingtaine de minutes à comater sous l'eau froide (oui, dans ma résidence, l'eau chaude est un bien assez rare). Ensuite, je suis allé à la Fac, histoire de savoir dans quel groupe je suis et aussi de connaître mon emploi du temps. Les cours ne commencent que lundi prochain, mais, malgré la gueule de bois qui me plane dessus, je n'aime pas trop rester à rien faire, enfermé chez moi. Et c'est une bonne excuse pour sortir et me dégourdir le cerveau amorphe dont je suis pourvu aujourd'hui.

Avant, je pouvais rester des heures et des heures enfermés dans ma chambre, dans le noir, à m'occuper tout seul. Après tout, je suis fils unique, mes parents n'ont pas de frères et sœurs, ce qui fait que je n'ai pas de cousins non plus, bref, j'ai toujours été l'enfant choyé. Mais j'ai dû, tout de suite, apprendre à m'occuper tout seul. Et je l'ai très bien fait. Je pouvais passer un week-end enfermé sans que cela ne me pose le moindre problème. Maintenant, c'est totalement différent. Imaginer ne pas sortir une fois dans une journée représente une perte de temps pour moi. Et même, j'ai peur de faire une crise de nerfs. D'ailleurs, entre le boulot, Shelly, Jonas, et les cours qui vont arriver, je me doute que de toute façon, je n'aurais que très peu de temps à perdre dans mon appartement.

Cependant, lorsque j'arrive à la Fac, je ne suis pas particulièrement plus frais. Le trajet en métro a été tout bonnement horrible, même si pour une fois il n'était pas bondé. J'ai envoyé un message à Jonas, mais je n'ai toujours pas de nouvelles. Je ne suis pas particulièrement inquiet, je sais pertinemment qu'il n'a pas dormi chez lui, mais j'ai besoin de partager ma cuite avec lui. C'est le premier jour de cours de Shelly, alors je ne veux pas la déranger maintenant avec ça, bien que je lui en parlerai forcément ce soir. Je repense à ce que m'a dit Jonas hier, concernant mon couple avec Shelly. Il a dit que nous ne nous disputons jamais, et il a bien raison. Je sais très bien d'ailleurs que je peux lui raconter toute ma soirée d'hier, dans les moindres détails, et elle ne s'énervera pas. Pourtant, Jonas m'a déjà dit que, dans un couple, il arrivait que la fille fasse une crise pour ce genre de situation. Quand Jonas et moi sortons, on boit sans vraiment compter les verres, on finit toujours pas créer des petites conneries, Jonas ne rentre jamais seul chez lui, ou il ne rentre pas tout court. Mais Shelly ne m'a jamais rien reproché. J'ai sûrement de la chance parce qu'elle a confiance en moi. Jonas voit peut-être les femmes d'un mauvais œil, mais Shelly n'est pas jalouse, et elle sait que je ne la tromperais pas, même complètement bourré. Non, moi, je trouve que je m'en sors très bien avec Shelly.

Les couloirs de la Fac forment un vrai labyrinthe, mais heureusement, comme j'ai déjà fait le tour plusieurs fois histoire de m'habituer à ce lieu, je m'y retrouve assez bien. Ils ont dit hier à la réunion d'entrée que les groupes seraient affichés dans le couloir correspondant à notre licence. Tout ça est donc un jeu d'enfant pour moi et je trouve le tableau en quelques minutes à peine. L'UFR d'Art et Culture, qui est celui correspondant à notre licence, est l'un des plus grands, sûrement parce qu'il fait référence à plus de la moitié des licences de la Fac. L'Histoire de l'Art se trouve entre les licences de Cinéma et de Danse. Je crois même que nous aurons des cours jumelé avec ces licences. Comme je m'y attendais, il y a cinq groupes d'une quarantaine de personnes qui forment notre année de licence. Je n'ose d'ailleurs pas imaginer les cours en amphithéâtre avec les autres licences, il n'y aura jamais assez de place pour tout le monde... 

Malheureusement, les groupes n'ont pas été fait par ordre alphabétique, ce qui ne me facilite pas la tâche pour me trouver. Après avoir parcouru la liste des quarante premiers noms, je me vois espérer ne pas être dans la dernière liste. Je me demande d'ailleurs comment ont-ils formé les groupes ? Au tirage au sort ? Ou par niveau ? C'est le genre de question idiote que j'aime me poser...

Solly Green.

Me voilà, deuxième groupe. Ça va, je n'ai pas eu beaucoup à chercher. Maintenant, je n'ai plus qu'à regarder l'emploi du temps qui correspond à mon groupe, j'espère que ça correspondra avec mes heures de travail. Je n'ai pas vu le prénom d'Eden dans mon groupe.

Merde, j'y ai fait attention sans même m'en rendre compte. Mais au moins, maintenant, je sais que je n'aurais pas à le supporter. Supporter est un mot assez fort en réalité... Enfin, je n'aurais pas à le côtoyer. Voilà, côtoyer c'est mieux. Du coup, je me demande dans quel groupe il est. Pas dans le groupe un non plus. Peut-être dans le trois ? Non. Le quatre ?

Eden Dvoske.

Ah oui, il est dans le groupe quatre. A moins qu'il y ait plusieurs Eden... Je ne connais pas son nom de famille après tout.

Non, pas d'Eden dans le dernier groupe. Dvoske est bien son nom de famille. J'y crois pas, je me suis farci toutes les listes des groupes au final... Enfin, voilà, la question est réglée, il n'est pas dans mon groupe. Je ne le verrai qu'aux cours groupés pour les masterclasses, et ceux avec les autres licences. Je n'ai donc pas à m'inquiéter de quoi que ce soit, même si je ne vois même pas pourquoi je devrais être inquiet.

Je suis vraiment puéril.

Je secoue la tête, histoire de me ramener à la réalité et je cherche sur les autres murs du couloir l'emploi du temps des premières années, groupe deux. Les murs sont entièrement placardés de feuilles de papier en tout genre, et c'est presque de l'autre côté du couloir que je trouve enfin l'emploi du temps. Je le prends en photo avec mon téléphone, histoire de l'avoir toujours sur moi. Je l'étudie de fond en comble, mémorisant déjà presque le nom des salles dans lesquels j'ai cours, même si je ne sais pas encore où elles se trouvent. Les intitulés des cours sont tous plus alléchants les uns que les autres, et en soit, je n'ai qu'une vingtaine d'heures de cours par semaine, je finis même maximum à 17h, ce qui me laissera le temps d'aller à mon travail. Je dois avouer que je m'en sors donc plutôt bien.

Au final, même en étant resté plus d'une heure dans ce couloir à m'imprégner de mon groupe et de mon emploi du temps, j'ai encore quelques heures à tuer avant d'aller au travail. J'envoie un texto rapide à Shelly, je vais pouvoir lui raconter ma soirée, et elle, sa rentrée. Jonas ne semble toujours pas avoir sorti la tête de l'eau, mais je ne suis pas vraiment inquiet.

Au détour d'un couloir, j'aperçois une des portes menant à un escalier. Il faut savoir qu'ils y a des portes partout, dans cette université, et la moitié d'entre elles mènent à des escaliers. Des rires résonnent dans la cage d'escalier, mais ce n'est pas vraiment ça qui m'arrête. Non, ce qui me fait me stopper net, alors que je suis à une dizaine de mètres de cette porte, c'est que je reconnais très bien la silhouette qui s'extirpe des portes battantes ouvrant sur les escaliers.

Eden Dvoske.

Eden.

Ce Eden.

De toute façon, je crois qu'il n'y a qu'un, ici.

Merde.

Sans réfléchir, je tourne la tête dans tous les sens, à la recherche d'une échappatoire, et je remarque que je suis seulement à deux mètres de la porte des toilettes. Je me rue dessus, baissant la tête, et je m'engouffre à l'intérieur, allant même jusqu'à me réfugier dans l'une des toilettes, fermant la porte derrière moi, le cœur battant. J'ai l'impression d'entendre résonner les battements de mon cœur contre mes tympans, alors que je le sens tambouriner dans ma poitrine. J'attends, presque sans respirer, de les savoir partis. A vrai dire, Eden et ses amis rigolent si fort qu'on pourrait les entendre à l'autre bout de la Fac.

Au bout d'un moment, le calme revient dans le couloir, et j'expire lourdement. Jusqu'à me rendre compte de mon comportement. Je passe une main fatiguée sur mon visage. Mais qu'est-ce qui me prend ? Je ne devrais pas réagir comme ça, j'ai fui comme un parfait idiot, comme un peureux. Je ne suis plus un enfant, je devrais pouvoir me prendre en main. Je suis bien obligé de le faire de toute façon, c'est une des raisons pour lesquels j'ai quitté mes parents. Pourquoi ne puis-je pas lui faire face ? Suis-je si faible ? C'est complètement idiot...

Je serre les dents en sortant des toilettes et en retournant dans le couloir. Je ne jette même pas un coup d'œil au couloir avant de me diriger vers la cage d'escalier. Je me sens comme un petit enfant qui n'ose pas dormir de peur que le monstre sorte de sa cachette sous le lit.

Je ne devrais pas avoir peur d'Eden. Que peut-il se passer s'il me voit ? J'ai de grandes chances qu'il m'ait oublié, ou au pire, que pourrions-nous nous dire ? Ça se trouve, il m'évitera, ou se fichera totalement de moi. Mais combien de fois vais-je encore avoir besoin de me répéter ce genre de chose ?

• • •

Coucou tout le monde !

 Voilà un nouveau petit chapitre pas très très mouvementé, je vous l'accorde, mais à vrai dire, je pense qu'étant donné les prochaines chapitres, il valait mieux que je vous préserve et que vous ayez le temps de vous préparer psychologiquement... ou pas ;) (en vrai, je ne sais pas encore vraiment comment vont se passer les choses dans le prochain chapitre, tout ce que je peux vous dire c'est qu'on verra enfin Eden, et qu'il aura enfin quelque chose à dire) Pressé de revoir Eden ? :P

J'espère néanmoins que ce chapitre vous a plu ! J'ai bien pu finir de poser les bases concernant le personnage de Solly, ainsi que son caractère maintenant, alors on va pouvoir entrer dans le vif du sujet à partir de maintenant héhé

A bientôt !

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