Chapitre 33
Le lendemain, Meredyce appréhendait sa visite au centre. Klaus lui vouait une confiance qui lui faisait peur. Il espérait qu'elle puisse parler à Tara, qu'elle s'ouvre à elle. Meredyce se sentait toutefois privilégiée qu'il lui ouvre la porte de sa vie et qu'il lui donne une place importante. Si important qu'elle était nerveuse à l'idée de ne pas être appréciée par Tara. Quand il coupa le moteur devant l'établissement au cadre resplendissant Meredyce fut surprise par les façades très accueillante...du moins, ce corps de ferme ne donnait pas l'impression de pénétrer dans un centre spécialisé. La veille, alors qu'elle s'était endormie dans ses bras, Meredyce n'avait pas oublié les questions qu'il lui avait posé sur Robert Willis. Elle s'était montrée honnête sur les propos tenus par Robert et depuis...Klaus semblait tendu, voire agacé. Il utilisait l'éclat du soleil pour garder ses lunettes afin de dissimuler son regard ciselé et très expressif. Pas de chance, songea Meredyce lorsque le ciel devint subitement sombre.
- Le temps ne va pas nous aider, commenta-t-elle pour le tirer de ses réflexions.
Il ôta ses lunettes pour lui accorder un regard. Eberluée par tant de tendresse affichait sur ses plis, Meredyce en resta sans voix. Étrange...pourquoi était-il si doux et si....impossible pour elle de trouver la bonne définition.
- Nous sommes en bord de mer, le temps change souvent, expliqua-t-il confia.
Il embrassa sa paume de main et quitta la voiture, déterminé. Un long frisson remonta le long de son échine lorsqu'il lui prit la main avec...ah oui ça y est ! Meredyce venait de trouver la bonne définition pour décrire cet homme au mille facettes.
Autoritaire.
Jugulant au mieux sa panique, Meredyce le suivit à l'intérieur du corps de ferme et le charme de l'extérieur contrastait avec l'horrible scène qui se déroulait sous ses yeux. Si ça ne tenait qu'à elle, Meredyce aurait commenté cet endroit avec dégoût. Mais Klaus le prendrait certainement mal. Il se donnait tellement pour donner le meilleur pour Tara qu'elle s'y refusait. Mais l'endroit était clinique. Deux jeunes filles en blouses blanches se disputaient la télécommande. L'une d'entre elles avait la peau sur les os. Signe distinctif d'un trouble alimentaire défini par de l'anorexie. Une boule d'angoisse lui brûla la gorge.
- Il n'y a que des filles ? Demanda-t-elle tout bas.
La mine triste, Klaus acquiesça silencieuse.
- C'était le seul établissement qui accueillait que des femmes.
- Avec de diverses problèmes, conclut-elle en voyant une femme se prendre la tête entre ses mains tout en longeant le couloir en riant toute seule.
Seigneur.
Meredyce ferma les yeux en déglutissant avec peine.
- Je suis un monstre n'est-ce pas ?
- Non ! Bien-sûr que non ! S'écria Meredyce en le regardant droit dans les yeux ; Je suis persuadée que tu as fait de ton mieux pour qu'elle soit en sécurisée et entourée de personnes capables de l'aider.
Ses yeux prirent une teinte métallique. Il était clair qu'il s'en voulait et qu'aucun mot assez fort suffirait à moins le dégoûter de lui-même.
- Tu devrais y aller seule, suggéra Klaus.
- Quoi, souffla Meredyce désorientée ; Tu ne viens pas avec moi ?
- C'est mieux qui tu ailles seule, c'est la chambre 104.
Il planta un baiser sur son front et s'effaça comme une épaisse et sombre lueur entre les deux jeunes filles qui se disputaient la télécommande. Le cœur battant, elle grimpa l'escalier en suivant les indications sur les portes et trouva facilement la chambre 104...un peu trop facilement à son goût. Klaus ne se rendait pas compte de ce qu'il lui demandait. Tara ne s'attendait pas à cette visite et pourrait mal le prendre. Ou au contraire...s'ouvrir à elle.
Elle se lança et tapa quelques coups à la porte.
- Oui ?
La voix douce qui lui répondit lui donna déjà une idée très précise sur la jeune femme qui était derrière cette porte. Difficile de ne pas entendre cette tristesse incommensurable qui venait de percer le timbre de sa voix.
Meredyce ouvrit la porte et pénétra dans la chambre extrêmement éclairée par les murs immaculés de blanc. Et ce fut le choc lorsqu'elle rencontra le regard de Tara. Son visage en forme de cœur portait les traits d'une jeune femme qui avait la douceur d'une enfant. Des cheveux noirs corbeau, épais et lisse tombaient contre le dossier de la chaise. La longueur de cette chevelure laissait supposer qu'elle n'avait pas était coupée depuis des années. Ses yeux azur étaient complètement vide. Elle était frêle, les épaules volontairement voûtées. Mais incroyablement belle...
- Bonjour, je m'appelle Meredyce...je suis une amie de Klaus.
Un vague sourire se dessina sur ses lèvres.
- Vous êtes la femme qui lui le troublait hier, je vous imaginais exactement comme ça.
Comme le contact semblait s'amorcer dans la douceur qu'elle espérait, Meredyce referma doucement la porte.
- Pourquoi il n'est pas avec vous ? Demanda-t-elle le regard inquiet.
- Il est en bas, il ne devrait plus tarder, s'empressa de répondre Meredyce en s'approchant de la table.
De plus près, Tara avait les yeux pigmentés d'un éclat gris. Par où commencer alors qu'elle semblait déjà avoir compris pourquoi elle était là ?
- Il vous envoie pour tenter de me faire sortir dehors ?
- Il m'envoie parce qu'il est désespéré et se sent impuissant.
Les mains posées à plat sur le puzzle à moitié fini, Tara secoua de la tête.
- Il n'a pas à l'être, rétorqua-t-elle en la regardant l'air intrigué ; J'avais raison de le mettre en garde, vous êtes différente des autres femmes.
Ingénieuse, Tara détournait la conversation vers lui.
- Klaus est un homme qui a des rêves inavouables qu'il ne comprend pas lui-même, reprit-elle en posant une pièce avec minutie.
- Et vous Tara, qu'est-ce que vous voulez ?
Elle releva lentement son regard sur elle, le regard absent.
- Ce que je veux n'est pas important, dit-elle enfin en abaissant son visage sur son puzzle.
Klaus l'avait prévenu sur son activité qu'elle répétait toute la journée. Alors Meredyce tenta de l'aider en s'emparant d'une pièce. Tara la laissa faire sans un mot. Comment ne pas avoir le cœur déchiré devant cette image insupportable. Une seule nuit avait suffi pour tuer cette jeune femme.
- Vous ne voulez pas vous balader dehors ?
- Il va pleuvoir.
Meredyce se pinça les lèvres.
- Ma mère était une droguée qui ne s'est jamais occupée de moi, lâcha-t-elle dans l'espoir qu'elle s'ouvre à elle.
- Je suis navré pour vous Meredyce, j'espère que la vie vous rendra tout ce que votre mère vous a volé.
Encore une fois, Tara vouait un bonheur pour elle, pour Klaus mais demeurait totalement insignifiante au sien. Les larmes aux yeux, Meredyce comprit qu'elle serait impuissante autant que l'avait été Klaus. Alors elle lui tint compagnie en terminant le puzzle avec elle. Lorsqu'elle vit l'ombre de Klaus passer la porte le regard empli d'espoir, Meredyce secoua de la tête négativement pour réduire ses espoirs à néant. Les émotions qui se succédèrent sur son visage furent insaisissables. La seconde suivante, Klaus affichait un sourire de façade.
- Alors comme ça moi je n'ai pas le droit de t'aider mais Meredyce oui ? Lança-t-il en venant vers elles.
Tara esquissa un sourire fermé.
- Tu n'as pas de patience, lui fit-elle remarquer.
Klaus tiqua.
- C'est vrai, admit-il en l'embrassant sur la tempe ; Alors vous avez fait connaissances ?
- Oui, Meredyce est très charmante et si tu lui fais du mal...
- ....je brulerais en enfer, termina-t-il à sa place en nouant sa main dans celle de Meredyce.
- Sans doute, affirma Tara en posant la dernière pièce du puzzle ; Celui-ci je ne vais pas le détruire tout de suite, vous m'avez aidé à la faire.
Klaus se raidit. Une infime étincelle d'espoir se raviva en lui. Meredyce n'avait pas été inutile car c'était bien la première fois que Tara ne détruisait pas ce qu'elle avait mis des heures à mettre en lumière tout de suite. Il resserra ses doigts contre les siens.
- Vous êtes parfait, murmura Tara en les admirant avec un sourire heureux ; Je suis heureuse que Klaus vous ai trouvé Meredyce.
" Tu trouveras aussi le bonheur " songea Klaus silencieusement et lui prenant la main.
- Monsieur Kreighton, puis-je vous parler en privé ? Intervint la directrice la mine grave.
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