Chapitre 17
Klaus était confortablement installé dans son fauteuil en consultant la remontée de ses affaires lorsque Meredyce, vêtue d'une élégante robe rouge entra dans son bureau le visage cendré, bras contre ses épaules comme si un froid glacial venait de s'emparer d'elle.
- Est-ce que c'est vrai ? Demanda-t-elle d'un souffle coupé.
Klaus toisa la jeune américaine les sourcils froncés.
- Qu'est-ce qui est vrai ?
- Que vous avez tué quelqu'un à Rome il y a six ou sept ans.
Le sang de Klaus ne fit qu'un tour. Il se leva d'un bond manquant de renverser son fauteuil. Elle se recula farouchement, le visage blême.
- Qui a eu l'audace de vous parlez de ça ! Rugit-il si fort qu'elle hoqueta à plusieurs reprises.
- C....cela n'a aucune importance je...alors c'est vrai ?
Fou de rage, Klaus dévisageait la jeune femme poings serrés. Il n'eut aucun mal à deviner que cette information provenait de son ami.
- Il y a des années, mon père m'a envoyé dans un centre pour adolescents, commença-t-il d'une voix tremblante de colère ; Je ne l'intéressais guère enfant. Et dans ce centre d'accueil il y avait une petite fille prénommé Tara, elle avait été abandonné sur le parvis d'une église. Je me suis pris d'émotion pour cette petite qui restait toujours avec moi.
Il marqua un temps d'arrêt pour s'approcher d'elle.
- À l'âge de la majorité, je suis parti du centre, poursuivit-il avec la même froideur ; Je l'ai laissé derrière moi, et à l'âge de seize ans elle a été victime d'une agression sexuelle.
Meredyce chancela sur ses jambes.
- J'aurais dû la protéger...dit-il d'une voix acerbe ; Alors j'ai remué ciel et terre pour retrouver cet homme. Lorsque j'ai enfin touché au but, je l'ai trouvé dans un bar avec une jeune fille naïve....elle avait le même regard que Tara, et cette jeune fille je l'ai sauvé.
- Mon dieu, souffla-t-elle en se tenant la gorge.
- Je l'ai frappé à mort devant cette jeune fille étendue dans une ruelle criant à l'aide, et alors j'ai frappé encore plus fort en imaginant Tara crier de la même façon sans que personne ne vienne à son secours.
Sa bouche se tordit en une grimace amère.
- Elle a témoigné un peu comme vous...je lui ai sauvé la vie, je ne regrette rien de ce que j'ai fait.
Honteuse et tremblante de peur, Meredyce se retourna pour échapper à son regard.
- Quatre jours plus tard, la police italienne a découvert que c'était un violeur en série qui sévissait depuis sept ans dans Rome.
Meredyce prit sa respiration et ferma les yeux. Comment avait-elle pu penser qu'il avait tué par pur plaisir ? Elle l'avait injustement comparé à l'assassin du banquier.
- Et la jeune fille ? Demanda-t-elle d'une toute petite voix.
- Tara vit dans un centre spécialisé en Sicile depuis son agression, c'est moi que me charge de ses soins depuis six ans.
Il l'obligea à se retourner.
- Avez-vous d'autre question mademoiselle Farella ? Demanda-t-il d'une voix sourde.
Elle frissonna en secouant de la tête.
- Je suis navrée monsieur Kreighton, murmura-t-elle en fermant brièvement les yeux : On a tenté de me faire peur.
- Ma vie n'est plus un secret pour personne, Meredyce, lança-t-il en rejoignant son bureau ; Or je ne tolèrerais pas qu'un gamin qui sort de l'université vienne fourrer son nez dans mes affaires est-ce bien compris ?
La gorge nouée, Meredyce acquiesça et quitta le bureau sans mot dire. En refermant la porte elle fut saisie de panique en remarquant que les employés de Klaus Kreighton étaient comme suspendus dans le temps. Qui parmi eux s'était déjà risqué à entrer dans son immense bureau qu'elle avait brièvement observer sans frapper ?
Visiblement aucun.
Morte de honte elle se dirigea vers les archives tête baissée. Un étau gigantesque lui comprimait la poitrine. Toute la nuit elle s'était imaginée Klaus Kreighton comme un assassin. Et même si cet homme n'avait pas survécu à son déchaînement de rage, cela ne faisait pas de lui un tueur. Pauvre Tara, songea-t-elle tristement en se dirigeant vers son nouveau bureau.
- Bonjour ! S'exclama une femme à l'entrée des archives ; Je m'appelle Stella, tu es la nouvelle ?
- Oh..Oui je m'appelle Meredyce Farella.
Stella redressa le menton et entra dans la salle d'une démarche déterminée.
Ça y est...songea-t-elle en prenant place sur son siège, elle allait devoir affronter sa première créature frivole de la journée.
- On peut dire que tu as de la chance, le grand patron t'a épargné à ce que je vois.
- Je suis un peu tête en l'air, répondit Meredyce avec un sourire courtois, je n'ai pas frappé, j'ai oublié.
Vêtue d'un élégant tailleur, celle-ci pinça un sourire.
- La dernière personne à avoir fait ça a été renvoyée la seconde suivante.
- Je suppose qu'il veut me donner une chance, argua Meredyce en faisant mine d'être occupée.
Stella pouffa et quitta les archives sans manquer de lui rappeler quelle place elle occupait.
- Tâche de mettre un peu d'ordre ici, l'autre ne s'est pas donné la peine ranger.
Devant cette rebuffade, Meredyce ne releva pas et baissa la tête sur sa robe un peu trop démodée et grimaça.
Cette journée commençait très mal.
Klaus en était à son troisième café quand Tyler arriva à sa hauteur.
- Quarante-cinq minutes, lança-t-il en se postant à côté de lui.
- Quoi quarante-cinq minutes ?
- Ça va faire quarante-cinq minutes que tu observes Meredyce Farella caché à côté de cette machine à café qui n'avait jamais eu l'honneur de te servir.
Klaus grogna pour toute réponse.
- J'ai bien conscience d'être un fou, marmonna-t-il sans quitter la jeune femme des yeux ; C'était inutile de me le faire remarquer.
Elle avait eu de l'audace pour oser pénétrer dans son bureau sans frapper. De plus pour lui rappeler un affaire vieille de sept ans. Un souvenir qu'il tentait chaque jour d'oublier sans y parvenir. Venger Tara avait réveillé en lui une partie monstrueuse de sa personne. Avoir le sang de ce violeur sur les mains ne parviendrait jamais à lui faire oublier ce qu'elle avait subie. Encore aujourd'hui Tara n'était pas totalement guérie. Maintenant, Meredyce connaissait tout de lui. Il en venait même à se demander pourquoi elle était encore ici.
- Tu n'aurais jamais dû la faire venir travailler ici Klaus.
- Et pourquoi ça ? Demanda-t-il froidement.
- Pourquoi tu la regardes comme ça Klaus, s'agaça Tyler ; On dirait que tu vas la bouffer.
Et pas que ! Ses mains brûlaient d'envie de la toucher. Jamais une femme avait réussi à déclencher chez lui cette pulsion sauvage. Il n'avait pas touché une femme depuis cinq longues années. Et la seule qui arrivait à lui provoquer une réaction primitif et violente c'était le petit bout de jeune femme innocente en train de ranger les archives tête baissée vers le sol. Comme si elle craignait à tout instant qu'il surgisse de nulle part. Il se dégoutait tellement qu'il détourna les yeux un moment.
- J'ai fini par réaliser certaines choses que je ne m'expliquais pas avant, murmura-t-il sourcils froncés ; Cette paire d'yeux, je n'arrêtais pas d'y penser les premiers mois de ma détention.
- Cette paire d'yeux comme tu dis, appartient à une jeune femme rêveuse et fragile qui n'a pas besoin d'un homme comme toi dans sa vie.
Cette fois-ci Klaus pivota sur lui-même pour affronter son ami.
- Les conseilleurs ne sont pas les payeurs Tyler, commença-t-il d'une voix acerbe ; Dois-je te rappeler que j'ai sauvé tes fesses le jour où ta femme ta surpris dans une chambre d'hôtel avec une autre femme ?
- C'était une erreur Klaus, murmura Tyler en baissant les yeux encore traversés de honte.
- Et c'est moi qui ai menti pour sauver ton mariage, tu n'as pas de conseils à me donner mon ami.
- Ce n'est pas pour toi que je m'inquiète mais pour cette fille Klaus, réplique Tyler en le défiant du regard ; Regarde-là Klaus, as-tu vraiment l'intention...
- Je ne suis plus le même homme, coupa-t-il en articulant si lentement qu'il se recula d'un pas ; J'ai appris sur moi durant cinq ans. J'ai appris à me contrôler.
Il marqua une pause pour écraser son gobelet et le jeta dans la poubelle.
- Et toi aussi tu l'as regardé, je t'ai vu Tyler, comme j'ai vu la moitié de ces hommes en faire autant.
Il se pencha alors près de lui.
- Tout le monde l'a regardé Klaus, se défendit Tyler, même les femmes. Écoute Klaus, je suis désolé, je ne sais pas ce qui m'a pris.
Klaus fixa durement son ami pour fouiller dans ses pensées.
- Ma vie me concerne, mes choix aussi, déclara-t-il gravement ; Des choix qui n'appartiennent qu'à moi Tyler. Tout ce que tu dois savoir c'est que les chiffres remontent et que je te nomme officiellement directeur de la communication.
Tyler écarquilla les yeux en retenant un sourire.
- Tu es sérieux ?
Klaus lui tapota l'épaule.
- Ne me fais pas regretter mon choix, lui dit-il menaçant.
Klaus le quitta et se dirigea dangereusement vers les archives, mains dans les poches, mâchoires contractées.
- Meredyce ? L'appela-t-il les muscles ravagés de la voir dangereusement penché dans les tiroirs.
Elle se retourna en se passa la langue sur ses lèvres rouges. Instantanément ses sens se réveillèrent dangereusement.
Cherchant la bonne parade pour sortir de là au plus vite, Klaus parcourut les étagères et lança.
- Je veux le dossier Warner sur mon bureau dans cinq minutes, ordonna-t-il d'une voix si rauque qu'il sentit ses cordes vocales vibrer.
Meredyce battit des cils à toute vitesse alors qu'il était parti en donnant l'impression que la terre avait tremblée.
Les mains écartés, le regard perdu sur la pile de dossier, Meredyce lança d'une voix à peine audible ;
- Mais c'est quoi le dossier Warner ?
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