Embobinés

- Poum pidibam, pitibou...

- Silence, Disciple !

Plantés comme des piquets au milieu du dortoir des filles et en sous-vêtements, Athénaïs, Maye-Lie et moi regardons les cochons-d'inde prendre nos mesures. Depuis maintenant une heure, ils s'embobinent dans le mètre ruban, déroulent les bobines et il a fallu faire une pause pour expliquer au Disciple que le chas de l'aiguille était inoffensif.

- Ne le grondez pas, il chante bien ! lance Maye-Lie au Messager, qui répond par un grognement.

Le Disciple reprend donc sa chanson en jetant une œillade reconnaissante à la petite métisse.

- Poum pibam... Tournez-vous un peu... me demande le rongeur. Voilà, super !

- Ça va durer longtemps, votre cirque ? S'énerve Athénaïs, visiblement très mal à l'aise.

- Le temps qu'on prenne votre tour de taille, votre tour de tête, votre tour de ventre et votre tour de poitrine, énumère Le Messager, les pattes emmêlées dans le mètre ruban.

- Quoi ? Hors de question !

La blondinette fait un écart et renverse le tabouret sur lequel le cochon-d'inde se dressait. Le Messager chute d'assez haut, pour sa taille, et je m'angoisse à l'idée qu'il ne se soit blessé. Mais l'animal rebondit mollement sur son ventre arrondi et se remet sur ses pattes comme si de rien n'était, un peu agacé. Je me détends.

- Arrêtez de bouger, c'est pour vous faire vos uniformes, grogne le cochon-d'inde en grimpant à nouveau sur le tabouret.

- C'est bon pour vous, mademoiselle Maye-Lie, couine Le Disciple en se saisissant d'un petit carnet. Je note tout ça et j'envoie la commande aux couturières du palais !

- Pour le tour de poitrine, c'est plutôt vite vu, ironise la petite brune à voix basse.

Il faut dire que, du haut de ses onze ans, Maye-Lie a à peine entamée sa puberté. Je baisse discrètement la tête vers mon torse, un peu triste. La mienne est assez...faible. Je me console en me disant que ce sera plus pratique pour courir et ramper, pendant l'entraînement.

- Et voilà ! S'exclame Le Disciple en revenant vers moi. Alors, pour vous, on avait dit...

Le voilà qui tire la langue et griffonne des petites notes dans son carnet, tandis que son maître, non loin de là, se débat avec le maître ruban.

- Laissez, je vais le faire, s'impatiente Athénaïs en lui prenant l'objet des pattes. Allez plutôt vous occuper de l'autre dégénéré, dans son dortoir.

- Hé, tu parles de mon frère ? Se vexe soudain Maye-Lie en se rhabillant. Il n'est pas dégénéré !

- Si, et vous l'êtes tous, d'ailleurs ! Réplique la blondinette pendant que Le Messager s'éclipse discrètement. On nous débarque dans un monde plein de jolies fées et de beaux elfes, en nous disant que nous sommes les élus...et vous, vous foncez tête baissée !

La conversation tourne mal...

- Tu nous as suivi ! Proteste Maye.

- Je n'avais pas le choix, moi aussi je suis piégée, maintenant! C'est pas vrai, peut-être, Disciple ? On ne pourra jamais rentrer chez nous, n'est-ce pas ?

L'interpellé se dresse sur ses pattes arrière, portant contre son ventre une bobine de fil blanc. Le voilà qui remue les moustaches d'un air gêné, puis penche la tête en ronronnant.

- Mais si, vous pourrez rentrer, la rassure-t-il en tendant sa pelote de fil. En attendant, vous devrez faire de votre mieux avec Sire D'Armenture, puis on aura le droit de vous ramener sur Terre. Sur ce coup, on peut que la reine vous a...embobiné !

Fière de sa blague, il récupère les mesures d'Athénaïs, puis file aider son maître, nous laissant seules avec nos doutes.

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Qui c'est qui devait publier mercredi et qui publie un dimanche? C'est moi...

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