Chapitre 15 - Partie 3 - Confiance

« Croyez et faites ce que vous voulez, Evyna, enchaîna Elioth à mi-voix, me coupant dans ma réflexion. Mais si vous persistez à vous comporter comme une écervelée, je n'irai pas indéfiniment vous libérer. »

Sur ces paroles, il fit volte-face et s'enfonça dans les profondeurs de la grotte. J'eus un moment d'hésitation et décidai finalement de le suivre : il avait annoncé qu'il voulait retrouver Sophy et c'était également mon intention.

Cependant, à peine avions-nous fait quelques pas dans la grotte humide et obscure que nous entendîmes une voix ténébreuse, particulièrement familière, à une dizaine de mètres devant nous :

« Où comptez-vous aller avec Evyna, sale imposteur ? »

***

Elioth et moi fîmes volte-face pour découvrir Sophy, Cherise et Bryce en compagnie de... Elioth. QUOI ?! Mais qu'était-ce cette blague ?! Lequel était le bon ?

« La plaisanterie est vraiment de très mauvais goût, Ewan, » répliqua sèchement l'Elioth qui était avec moi, d'une voix identique en tout point à celle de l'autre.

Ewan... ? Ewan Neveen, le président d'Horizon & Paradise ? Pourquoi lui ? Quel était donc ce énième retournement de situation... ?

« Ewan ? reprit l'autre avec contrariété, toujours avec les mêmes intonations – j'avais beau prêter l'oreille, je n'entendais pas la moindre différence vocale... tout comme je ne voyais pas la moindre différence physique... –. Vous semblez assez prompt pour me dénoncer. Ce qui laisse bien entendu suggérer votre propre identité. Ai-je tort, Ewan ? Vous n'êtes qu'un piètre acteur et vous vous êtes seulement retrouvé directeur d'Horizon & Paradise, loin de toute célébrité : vous êtes jaloux, sans gloire qui vous est propre et c'est ce qui vous pousse à enlever ces jeunes prodiges. Mais vous êtes médiocre et vous le resterez. Le seul talent que je peux peut-être vous accorder est une imitation quelque peu réussie de mes manières et de ma voix. Cependant vous n'êtes qu'une pâle copie de ma personne, n'importe qui le remarquerait.

— Evy ! s'exclama à cet instant Sophy. Pourquoi il y a deux Elioth ?! Lequel est l'authentique ? »

Je ne savais absolument pas quoi lui répondre... plus j'y réfléchissais, moins la situation faisait du sens...

« Je comprends à présent mieux ce que vous vouliez dire, Evyna, marmonna l'Elioth qui m'accompagnait. Pourquoi vous pensiez que c'était moi votre ravisseur... »

Il se tourna vers son sosie avant de déclarer sèchement :

« Votre complexe d'infériorité est donc ce qui vous a motivé à vous en prendre à Alysea pendant plus de cinq ans ?

— Vous admettez donc vous-même votre propre complexe... susurra l'autre.

— Cessez de m'imiter, c'est déplaisant.

— Vous n'aimez pas mes manières à ce que je vois. Alors, vous, cessez de feindre et de m'imiter minablement !

— ASSEZ ! »

Je me rendis compte quelques secondes plus tard que c'était moi qui avais prononcé ces paroles.

« Tu as trouvé, Evy ? s'enquit la voix fluette de Sophy.

— Laissez Sophy, Cherise et Bryce me rejoindre, ordonnai-je alors à l'intention du second Elioth.

— Vous n'êtes définitivement qu'une petite idiote, Evyna... soupira l'interpellé. Ne comprenez-vous pas que c'est précisément ce que désire ma ridicule imitation ?

— Obéissez.

— Non. Evyna, rejoignez-les. »

Je me tournai vers l'Elioth qui m'accompagnait, ne comprenant pas pourquoi il venait de déclarer ceci. J'avais choisi de prendre son parti – ou du moins, j'avais plus décrété de manière très arbitraire qu'il était l'authentique – et voilà qu'il me disait de faire l'inverse !

« Avouez-vous donc votre défaite ? s'étonna l'autre.

— Nullement. Evyna, faites-moi confiance. Vous savez pourquoi. »

Je savais pourquoi ? Pourtant, je n'en avais pas la moindre idée...

« Vous êtes vraiment pathétique, Ewan, déclara à cet instant l'autre. Tenter d'établir avec ma stagiaire une relation spéciale qui n'existe nullement... vous devriez tout de même avoir compris avec tous les enregistrements que seul le mépris existe entre elle et moi. »

Mon Elioth ne répliqua rien, se contentant de me fixer de son regard vairon impassible. Puis ses yeux se relevèrent vers le plafond de la grotte pendant une demi-seconde, avant de se tourner vers son sosie. Je compris à cet instant qu'il cherchait à me faire comprendre quelque chose et je suivis son regard... pour découvrir une dizaine de stalactites accrochés au plafond juste au-dessus de nous...

« Laissez-nous rejoindre Evy ! s'exclama alors Sophy.

— Puisque c'est ce que veut Evyna pour être persuadée de mon identité, soit... grommela l'autre Elioth. Vous êtes définitivement une fille stupide, Evyna. »

Sophy commença à se diriger en compagnie de Cherise et Bryce vers nous, mais je me précipitai vers elle en m'écriant :

« Non, Sophy ! Reste où tu es ! »

Tout étonnée, ma meilleure amie se stoppa quand même, tout comme Bryce, je vis un rictus d'énervement passer dans le visage de l'autre Elioth, qui s'exclama :

« Restez où vous êtes, imposteur ! »

Je compris alors qu'il s'adressait à mon Elioth qui s'était rapproché pour quitter l'endroit des stalactites.

« Pourquoi m'arrêterais-je ? répliqua sèchement l'interpellé. Comment comptez-vous me stopper ? Prenez l'un d'entre eux en otage et vous admettez que vous êtes l'usurpateur.

— Détrompez-vous, pâle copie. Je peux toujours faire ça. »

L'autre Elioth sortit un pistolet dissimulé sous sa veste et accroché à sa ceinture avant de le pointer vers sa réplique. Elioth se stoppa net, Sophy poussa un cri perçant, aussitôt imitée par Cherise, tandis que Bryce reculait d'un pas. Je restai tétanisée, mon cerveau refusant de réfléchir pendant quelques secondes, avant de revenir à la réalité. Je n'avais pas le droit d'être passive ! Celui que j'avais décrété comme étant le vrai Elioth était menacé de mort ! Et maintenant, je n'en avais plus aucun doute : j'avais choisi de prendre le parti de celui désarmé. Je me tournai vers lui, espérant que je trouverais rapidement une solution, et il m'adressa étonnamment un léger sourire – le tout premier qu'il m'eût jamais adressé –, avant de déclarer à l'intention de celui au pistolet :

« Je reconnais ma défaite, Elioth. Les otages sont libres, livrez-moi en justice si cela vous chante, mais baissez votre arme.

— Vous vous rendez donc à l'évidence, pauvre imposteur ! jubila l'homme au pistolet, sans pour autant baisser son arme.

— Ouf... souffla Sophy. Tout est bien qui finit bien... »

Elle ne pouvait se tromper plus lourdement, mais sa crédulité allait être plus utile qu'escompté. Voyant que l'homme au pistolet ne semblait absolument pas désireux de baisser son arme malgré la capitulation d'Elioth, une idée me traversa l'esprit, je n'y réfléchis pas plus longtemps sentant que la situation devenait de plus en plus critique et, me retournant vers celui au pistolet, je déclarai :

« Elioth, veuillez m'excuser d'avoir douté de vous. »

Je décrochai alors les menottes de ma ceinture et annonçai, espérant qu'il me laisserait faire ce que je voulais :

« Je vais l'attacher, au moins, nous serons sûrs qu'il ne nous nuira plus. »

Celui au pistolet commença à protester, comme s'il se méfiait de ma proposition, et je m'empressai de reprendre :

« Ne vous inquiétiez pas, je l'approcherai par derrière et il ne pourra rien tenter puisque vous êtes là. »

J'osai à peine respirer, craignant qu'il ne refuse, pourtant, il finit par concéder :

« Très bien. Mains dans le dos, vous, » aboya-t-il alors à l'intention de son sosie.

Celui-ci obtempéra, je me dirigeai vers lui et une fois parvenue derrière lui, je passai les deux menottes autour du même poignet. Je relevai brièvement les yeux, constatant que l'homme au pistolet ne pouvait pas me voir et je soufflai presque imperceptiblement :

« Je vous fais confiance, Elioth... »

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