Texte pour thème : "L'amour".

Premier amour.

Je l'ai rencontrée parmi mes moutons, j'étais là seul au monde. En haut d'une montagne abandonnée de tous, où l'herbe pousse fraiche et d'un vert éclatant. Assise entre ces hautes herbes, je ne l'avais jamais vue et pourtant, elle était là, cette jeune fille dont je ne connaissais ni l'identité ni le caractère mais qui me semblait si douce. Elle avait de longs cheveux bruns et bouclés qui semblaient si légers et qui descendaient délicatement à ses jambes. Son teint avait la couleur des fleurs blanches qu'elle cueillait. Elle portait une robe beige dont les rubans étaient fous et, posé sur ses longs cheveux, un chapeau de paille troué et abimé, mais qui ne la rendait pas moins ravissante.

Soudain, elle se leva, rougit, prit son bouquet et s'enfuit sa robe voletant au vent. J'aurais aimé que cet agréable plaisir continue, parce que, caché derrière mon buisson, ma timidité me surpassant, la regardant cueillir de jolies fleurs, était comme un rêve.

Il aurait pu durer encore longtemps si la jeune fille n'avait pas vu un pan de mon manteau en dehors du buisson. Ce fut la fin de ce doux instant et le début d'un agréable sentiment que je n'avais jamais ressenti mais que je voudrais dans mon cœur toute ma vie.

Chaque soir depuis dix ans, je descendais de ma montagne abandonnée, pour m'en retourner jusqu'au village avec mes moutons. Je les comptais et les rentrais dans la bergerie.

Mon oncle venait vérifier mon travail. Voire de lui même s'il n'en manquait pas un seul. Si c'était le cas, la punition serait aussi sévère que son regard dans ces moments.

Ce jour-là il n'en manquait pas. Je pus donc sortir me balader dans le village à ma guise le soir même. C'était un village nommé Hautefage, perdu entre deux montagnes, inconnu du monde. 

Je me promenais dans ses rues encore claires, quand je la revis derrière un canapé aux fines broderies porté par deux grands hommes. Elle était assise sur une marche à l'entrée d'une maison et cousait un tissu aussi délicatement que quand elle cueillait des fleurs. Elle releva son regard vers moi qui la fixait depuis quelques secondes et je pus admirer ses iris de la couleur du ciel sans nuages. Nous ne firent que nous fixer, moi, j'ancrais en mon crâne sa beauté.

Une dame criait après les deux hommes qui portaient le canapé. Cette femme était vieille et maigre, avait une voix rauque et désagréable. Elle tourna son regard vers moi qui regardait la scène du coin de l'œil, puis sur la jeune fille et cria : "Alice !".

Cette dernière tourna la tête, se qui coupa nôtre contact visuel, et se leva pour venir près de la femme aigrie. Elles rentrèrent ensemble dans la seule maison d'Hautefage qui était à vendre. J'en déduis deux choses ce jour-là. La jeune fille que j'aimais depuis la première fois que j'avais posé mes yeux sur elle s'appelait Alice et elle et cette femme, venaient d'emménager ici !

Ce jour-là, je savais directement quoi raconter dans mon journal :

"19 avril 1919,

Je viens de passer le plus beau jour de ma vie.

Ne jamais oublier : Alice

Essayer : de lui parler "

Le lendemain de ce beau jour je sortais mes moutons quand je vis Alice sur la place du village, un air embarrassé. Deux garçonnets lui reprochaient d'avoir par mégarde écrasé leur jouet.

Elle leur expliqua embêtée que seule sa grand-mère avait l'argent pour les rembourser mais qu'il fallait économiser selon cette dernière, ce qui la rendait un peu avare. J'oubliai ma timidité et leur donnai l'argent qui devait servir à payer mon repas. Alice me remercia en me donnant la baguette qu'elle venait d'acheter.

Je voulais refuser son offre mais son sourire était si beau...que je ne pus dire non.

Je lui proposai de venir garder les moutons avec moi. En chemin nous nous sommes raconté plusieurs blagues, nous avons couru après le troupeau. Elle me parla de ses parents, qui avaient du l'éloigner d'eux, et de son irritable grand-mère. Moi, je lui parlais de mon oncle qui était ma seule famille depuis l'accident de mes parents. Il était un peu sévère mais heureusement j'avais appris à lire et à écrire alors j'arrivais à m'échapper dans les livres ou dans l'écriture de mon journal quand il criait trop fort.

En haut de la montagne, nous étions assis l'un à côté de l'autre pour regarder le troupeau paitre, quand je fis la chose que je voulais faire depuis la première fois que je l'avais vue. 

Je posai ma main sur la sienne, et je m'apprêtai à lui dire ce que je ressentais, quand elle tourna son visage vers moi pour me poser un délicat baiser sur la bouche. Pour moi ce baiser avait duré un millénaire, j'avais des frissons, je suis sûr que j'étais rouge. Était-ce normal ?

Après cela, nous avons regardé le soleil se coucher, elle avait posé sa tête sur mon épaule et s'était endormie.

Ce fut le début de ma première histoire d'amour, car maintenant je le savais, ce mystérieux sentiment, était celui de l'amour. Et il était merveilleux.

Après ce doux moment nous avons passés des jours à nous amuser, à garder le bétail et à embêter sa grand-mère. Nous venions à peine d'avoir quinze ans tout les deux, ce qui nous permettais de garder encore quelques instants, nos âmes d'enfants. 

J'avais tout retranscrit dans mon journal.

Je ne puis dire combien de fois nous nous sommes embrassés. A chaque fois, j'ancrais en mon esprit, la forme de sa bouche, l'emplacement de son unique et jolie fossette et son sourire contre mes lèvres. 

Un jour Alice rentra dans sa maison et n'en sortit plus. Je demandai à sa grand-mère ce qu'elle avait mais elle ne me répondit rien, comme tenu par une promesse ou un tabou. J'attendis une semaine qu'elle franchisse enfin, le seuil de la porte.

Cependant elle ne le fit jamais et ce fut au bout de ces sept jours que sa grand-mère me dit qu'Alice voulait me parler. J'entrai dans la maison de fortune et je la trouvai dans son lit, pâle et fiévreuse. Elle me dit qu'elle m'aimait très fort. Je voulus l'embrasser, m'approcher mais elle me somma de rester loin d'elle et me parla pour la dernière fois :

"S'il te plait, ne m'en veut pas trop. J'ai fui la maladie mais elle m'a vite rattrapée. Je t'aime. Continue ce beau métier de berger et une dernière fois s'il te plaît, malgré tout son comportement, dis à ma grand mère qui s'est si bien occupée de moi que je l'aime tout comme toi... Merci, tu m'as permise de sourire, je suis heureuse bien qu'ingrate, merci..."

Alice est décédée de la grippe espagnole une heure après m'avoir dit cela. Je l'ai enterrée parmi ses fleurs blanches qu'elle cueillait, que je nommai Alices. Quand je vis son corps une dernière fois, elle avait son sourire si beau aux lèvres mais elle n'avait pu cacher, l'eau qui avait coulé sur ses joues. Après avoir pleuré toutes mes larmes, je continuai mon métier de berger qu'elle trouvait si beau jusqu'en 1939, année lors de laquelle je fus enrôlé dans l'armée.

Un jour, je vis au beau milieu de la tranchée, une jolie fleur du nom d'Alice, les autres se demandèrent comment je pouvais sourire de façon aussi apaisée, sur un champ de bataille assourdissant. Peut être n'avait il jamais eu, un véritable premier amour. Je me rappelais encore de la forme de sa bouche, l'emplacement de sa jolie et unique fossette, son sourire contre mes lèvres et ses yeux, dont j'avais oublié la couleur hélas, ne me rappelant que de celle de la boue. C'était le plus beau de mes tourments, me rappeler la couleur de ses jolies yeux.

Si vous trouvez mon nom dans l'un des milliers de registre de cette guerre, ou même mon journal, caché sous mon oreiller comme le ferait un enfant, pensez aussi à Alice, mon premier et dernier amour qui m'a fait découvrir tant de chose sur la beauté de ces sentiments. 

Finis !

Pour le concours de  RiviereDeNuit 😊 J'espère que ça ne sera pas trop long, j'ai fait moins de 1500 mots (1351 pour être exact !). N'hésite pas à me le signaler sinon !

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