chapitre 2
La jeune femme ne se souvenait plus vraiment comment elle était arrivée là, ici au poste central de Conyers. Tout n'était que rouge et blanc dans son esprit. Rouge comme le sang, liquide vital qui recouvrait le corps de Brie. Blanc comme les murs insipides et ternes de la salle de soins dans laquelle elle s'était éteinte, comme le visage sans vie de son amie.
Cette pièce était froide, des murs jaunes pâles, une table et quatre chaises en son centre et un miroir qu'elle devinait être sans tain sur le mur opposé. Une salle d'interrogatoire en somme.
Elle se posait encore et encore la même question. Pourquoi ? Pourquoi l'inspecteur Loki était présent ? Un accident de voiture, banal et mortel, pas besoin d'un inspecteur pour enquêter.
Oh mon Dieu ! Brie, morte. Elle ne la reverrait plus jamais.
Les larmes avaient fait de nouveau leur apparition dans les yeux bleus marine du médecin. Elle avait perdu une sœur cette nuit. Elle avait perdu son amie, sa seule famille.
Désespérée, son visage caché dans ses mains, elle pleurait toutes les larmes qui lui restait. Elle s'était effondrée sur la table, la tête plongée dans la sécurité de ses bras. La solitude de la salle brisée par ses sanglots, elle n'avait pas entendu l'inspecteur entrer par la seule porte. Il avait entre ses doigts tatoués, un café dans un gobelet en carton. Triste consolation recueillie au distributeur de l'accueil.
- Mademoiselle Cooper? Avait-il dit doucement.
La brunette, surprise, avait redressé la tête, essuyant ses yeux rougis de tristesse dans le revers de sa manche. Elle était dans un triste état, les cheveux emmêlés et encore humides, la peau terne, les pieds nus et frigorifiés dans ses baskets. Terrifiée par l'appel de John, elle était partie en un rien de temps, enfilant simplement son jean et son gilet. Maintenant elle avait froid et mal, tellement mal.
L'inspecteur avait fait glisser le verre jusqu'aux mains tremblantes de la jeune femme, avant de s'installer sur une chaise juste en face d'elle. La jolie brune, reconnaissante, s'empara du café et la chaleur du gobelet lui réchauffa les mains et un peu l'âme.
- Je...je ne comprends pas. Avait-elle dit en bégayant, sa lèvre inférieure prise entre ses dents afin d'éviter une nouvelle chute de larmes.
- Mademoiselle Cooper. Avait-il dit de nouveau, clignant des yeux deux fois.
Elle l'avait observé un instant, se rappelant qu'il avait un tic facial plutôt spécial et elle le savait, elle s'en était aperçu quand il avait été hospitalisé. Ce n'était pas vraiment gênant, mais il devait être nerveux à cet instant.
Elle secoua la tête dans la négation, n'étant pas prête du tout à entendre quoique ce soit au sujet de Brie, pas prête à affronter la vérité. Mais avait-elle le choix ?
- Je suis vraiment désolé pour votre amie. C'était sincère. Avait-elle de la famille ? Demanda-t-il mal à l'aise.
- Non, elle n'a... n'avait que moi. S'était-elle reprise. Comme je n'ai qu'elle. Avait pensé la jeune femme. Qu'est-ce que vous ne me dites pas inspecteur ? Avait-elle demandé dans un murmure angoissé.
Le policier avait frotté son menton entre son pouce et son index, ses yeux se fermant de nouveau deux fois. Il lui devait la vérité. Elle devait savoir.
- Je suis désolé, mais les premiers éléments montrent que ce n'est pas un accident, mais certainement un homicide, avait-il avoué.
- Quoi ? Elle était complètement sous le choc. Son cœur battait à tout rompre sous ses côtés. Elle n'en revenait pas. Qui pouvait faire ça ? Qui avait fait ça ? Pourquoi ? Pensa-t-elle. Je...je...vous me dites qu'elle a été assassinée ? Sa voix était tremblante d'émotions mal contenues. La nausée lui vrillait l'estomac, elle avait un mal fou à imaginer un seul instant que quelqu'un puisse avoir fait une telle chose.
- Savez-vous si Mademoiselle Evans avait des soucis en ce moment ? Avait demandé le tatoué.
Alors c'était donc un interrogatoire, elle était interrogée comme suspecte ? Avait-elle fait quelque chose de mal ? Était-elle en état d'arrestation ? Mary ne comprenait plus rien.
- Non, NON, Brie n'avait pas de soucis, avait-elle répondu énervée. Elle m'en aurait parlé.
L'inspecteur s'était reculé sur sa chaise et laissait passer un moment de façon à donner le temps suffisant à la femme devant lui, de reprendre ses esprits. Elle avait baissé la tête et il pouvait voir le tremblement de ses épaules dans des sanglots silencieux, ses doigts fins toujours serrés sur le gobelet. Elle devait rentrer et se reposer.
- Vous êtes sous le choc et il est très tôt, lui annonça l'inspecteur changeant radicalement de sujet.
Il voyait bien que la femme médecin en face de lui était à deux doigts de craquer. Elle avait beaucoup enduré cette nuit. Y a-t-il quelqu'un que nous puissions contacter pour vous raccompagner ? Demanda-t-il gentiment.
- Je...non, non. Brie était ma seule famille.
Elle avait dit ça sans réfléchir, lui montrant à quel point le lien entre elles était vraiment puissant.
Il lui aurait bien proposé de prendre un taxi car il ne voulait pas qu'elle reprenne sa voiture garée devant l'hôpital. La jeune femme ne serait pas capable de conduire. Décemment, il ne pouvait la laisser partir ainsi, mais il n'avait pas vraiment le choix. Il avait déjà beaucoup de boulot pour résoudre cette enquête. Ceci dit, il voulait la raccompagner chez elle et s'assurer qu'elle allait bien et qu'elle prenne du repos durant quelques heures. Cette nuit avait radicalement changé sa vie. Elle avait perdu une personne chère à son cœur et il savait comment le chagrin pouvait accabler quelqu'un, surtout dans de telles circonstances.
- Je vais vous reconduire chez vous, avait-il proposé en se levant.
La femme était tellement surprise qu'elle n'avait pas fait un seul geste, se contentant de le regarder bêtement, à la fois surprise et touchée d'un tel geste. Il s'était positionné devant la porte et attendait qu'elle se lève à son tour.
- Mademoiselle Cooper ? L'avait-il appelée, la ramenant à la réalité. Vous venez ?
Elle s'était levée, abandonnant le café toujours intact et maintenant froid, sur la table. Elle s'était redressée et n'avait pas fait plus de deux pas vers l'inspecteur, qu'une vague de vertiges l'avait assaillie violemment, des points noirs dansant devant ses yeux. Elle ne s'était pas rendu compte qu'elle était à ce point troublée et tourmentée. Sa main s'était posée rapidement sur le dossier de la chaise toute à côté, essayant de reprendre son souffle.
Loki avait vu bien avant qu'elle ne se retienne au fauteuil qu'elle n'était pas bien. Elle était très pâle et tremblante. Il aurait dû le voir bien avant et ne pas la précipiter. En deux enjambées, il l'avait rejoint et avait enroulé ses doigts tatoués autour de son bras.
- Vous devriez vous rasseoir un instant.
Il avait poussé la chaise et aidé Mary à y prendre place.
Immédiatement, le médecin avait baissé la tête entre ses genoux et reprenait son souffle, l'homme accroupi devant elle, sa prise toujours ferme autour de son biceps. Il se rappela que les rôles étaient inversés il y a peu quand la petite Dover avait été secouru et qu'il l'avait ramenée ce soir-là. C'était Mary Cooper qui était accroupie devant lui cette fameuse nuit.
- Je peux faire quelque chose pour vous aider ? Lui avait-il demandé doucement.
Elle s'était contentée de secouer la tête négativement, le chagrin de retour pour mieux la blesser.
L'homme avait patienté quelques minutes avant que le docteur Cooper ait assez de force pour se relever. L'inspecteur la soutenant toujours, l'avait accompagné jusqu'à sa voiture.
Sur la route la menant chez elle, Mary avait posé sa tempe contre la vitre fraîche, essayant en vain de faire passer son mal de tête. Elle n'avait pas décroché un mot, même si elle était reconnaissante envers l'inspecteur Loki de l'avoir aidé ainsi. Elle n'avait plus la force de parler ou même d'avoir une pensée cohérente.
Prévenant, Loki l'avait ramenée jusqu'à la porte d'entrée de sa petite maison et l'avait aidée à ouvrir la porte, ses mains tremblantes encore sous la fatigue et les maux.
Un miaulement les avait accueillis. Minou attendait sa maîtresse.
- Je vous remercie inspecteur Loki, avait-elle dit d'une voix graveleuse. Fatiguée, triste et nauséeuse.
L'homme avait noté son numéro de téléphone sur un papier dans son carnet et l'avait tendu à la jeune femme.
- Je vous laisse mon numéro. N'hésitez pas à m'appeler, jour ou nuit, lui avait-il dit gentiment.
Elle l'avait récupéré, l'avait salué poliment avant qu'il ne prenne congé et qu'il rejoigne sa Ford.
À l'aube, le ciel teinté d'une merveilleuse nuance de rose et d'orange, elle s'était laissée tomber sur son lit sans même se changer et s'endormit espérant que tout ceci n'était qu'un cauchemar, un horrible cauchemar.
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