8.

Je sais que vous vous demandez qui sait en média 😏 et moi, je n'aime pas montrer en image à qui peut ressembler les personnages parce que chacun son imagination et les commentaires qui arrivent par la suite du genre "il est moche", "je ne le voyais pas comme ça" et "patati et patata" m'énervent au plus haut point mais lui, je l'ai vu, je me suis dit "T'es Gideon mon pote" ! Je le trouve trop chou. Les trucs de beauté, je m'en fiche vraiment. La beauté est subjective et différente chez chacun et NOUS SOMMES TOUS DIFFÉRENTS alors les gens qui aiment dire "moche" arrêtez un peu 😂😂😂. Bref, c'est Gideon. Les autres, je les ai dans ma tête mais en vrai, aucune idée et pas besoin de me proposer, je ne veux pas savoir. 😂. Si j'ai d'autres illuminations, je vous dirais. 

***

Edna Fall

C'est lorsque je suis dans mon lit depuis déjà 10 minutes que je me rends compte que j'ai le téléphone de Billie.

Cette idiote est partie sans son téléphone et ce dénommé Douglas s'impatiente par message en faisant vibrer son téléphone chaque seconde.

Je me décide de l'appeler pour couvrir le retard de Billie, mais aussi pour savoir qui il est vraiment et le menacer comme toute super amie, le ferait.

Dès la première sonnerie, il décroche et je ne dis rien pendant plusieurs secondes à l'entente de sa voix grave répétant des « allô » incessants, puis je me ressaisis rapidement.

— Oui Douglas. C'est la meilleure amie de Billie. Edna. Elle a oublié son téléphone et elle doit probablement te chercher depuis tout à l'heure.

C'est à son tour d'être silencieux face à ma voix puis il se racle la gorge.

— Oh. D'accord. Je vais donc la chercher. Elle ne doit pas être loin. Je me suis déplacé de notre lieu de rendez-vous.

— Ah bah tu es donc responsable ! l'accusé-je. Ça doit faire peut-être 10 minutes qu'elle t'attend.

Il ne dit rien puis je reprends :

— Écoute-moi bien Douglas je ne sais quoi, si tu es un peu trop entreprenant avec Billie pour un premier rendez-vous, je te jure que je te trouve et je te fais la peau. Est-ce que je suis claire ?

Il ricane doucement et j'ai presque envie de quitter l'appartement pour aller le retrouver. Il est clairement culotté cet homme alors que je suis super sérieuse de rire comme ça.

— C'est vrai ! Elle m'a dit que tu es policière. Ne t'en fais pas Edna, je me permets de t'appeler comme ça hein, je serai gentil et je ne suis pas ce genre de gars, crois-moi. Et Billie a l'air de pouvoir se défendre toute seule en plus alors ...

— Ouais mais ça n'empêche qu'elle a des gens autour d'elle et qu'on peut venir te régler ton compte. Donc fais attention, c'est tout.

— Compris Madame ! le prend-t-il avec humour.

— Bien. Bon, retrouve-là et dis-lui de m'envoyer un message.

— Ça sera fait. À bientôt.

— Ouais, c'est ça.

Je raccroche en me disant que ce type est du genre à prendre la confiance trop rapidement, ce qui n'est pas bon pour Billie, car elle est pareille.

Cette fille a besoin d'un mec « mature » mentalement. J'ai l'impression qu'il ne la tirera pas vers le haut, mais plus vers le bas et elle n'a pas de besoin de ça. Elle n'a pas besoin d'un gamin, mais d'un homme, un vrai.

Bon, je vais lui laisser le bénéfice du doute car c'est ce qu'il faut absolument faire dans ce cas. On ne peut juger une personne par son style ou par le son de sa voix. Il est peut-être super gentil et super mature qui sait ...

Je m'apprête à me recoucher lorsque mon téléphone sonne.

Je décroche en voyant que c'est Gideon.

— Ouais ?

— Salut Edna. T'es chez toi ? Parce que le Chef m'a dit de t'appeler. On a un autre meurtre, enchaîne-t-il sans préambule.

Je me liquéfie sur place et ma respiration se bloque instantanément.

Cette histoire m'était clairement sortie de la tête avec ce week-end où j'ai fait en sorte de me la sortir de tête.

Bon, peut-être que ça n'avait rien à voir après tout ...

— Edna ? T'es là ?

— Euh ... ouais. C'est ... C'est le même meurtre ?

— Je ne sais pas. Je suis en route pour m'y rendre. Je t'envoie l'adresse.

— OK... Merde ! Je n'ai pas ma voiture Gideon, l'avertis-je.

— Je viens te chercher alors. Je suis là dans dix minutes.

Il raccroche et je quitte mon lit en vitesse pour m'habiller rapidement étant en pyjama.

J'enfile mes vêtements le cœur battant et l'esprit tourmenté.

Mon Dieu. J'espère que ça n'a rien à voir avec ma « vision » de vendredi soir. Je ne veux pas que ça soit cette femme.

Si c'est le même crime, c'est que ...

Je déglutis en enfilant mon gilet à capuche puis ma veste par-dessus.

Je saisis aussi mon insigne et mon arme et je quitte la chambre après avoir pris mon téléphone et celui de Billie qui m'avertit d'un message.

Elle a retrouvé Douglas.

Je quitte aussitôt notre appartement pour attendre à l'extérieur Gideon.

Après cinq minutes dans le froid, je vois sa voiture et je ne le lui laisse pas le temps de se garer avant de m'engouffrer dans sa voiture.

— Ça va ? me questionne-t-il.

— On y va, Gideon. Dis-moi ce que tu sais.

— Je ne sais pas trop, dit-il en démarrant. Le Chef m'a appelé en urgence et m'a dit de venir et de te contacter.

— Quand est-ce que ça s'est passé ?

— De quoi ?

— Le meurtre.

— Oh. Dans la nuit de vendredi soir apparemment. C'est la voisine qui a découvert le corps ce matin.

Je ferme les yeux, presque tremblante face à ses mots. Mes espoirs se réduisent à vue d'œil...

Mais faites que ça ne soit pas cette femme que j'ai vu !

— Edna, tu m'inquiètes vraiment. Dis-moi ce qu'il se passe en ce moment.

— Rien, soufflé-je.

— Tu n'as plus confiance en moi ?

Je lui jette un coup d'œil furtif avant de regarder à l'extérieur.

— Aucun rapport, Gideon.

— Je sais que tu me caches des choses, dit-il. Depuis lundi, tu agis bizarrement.

Je le regarde à nouveau et croise son regard brun qui est toujours aussi adorable.

Oui, depuis ce lundi, ma vie avait pris une nouvelle tournure inattendue qui ne me rassurait pas.

— Tu racontes que des conneries, pouffé-je.

— Arrête. Au bout de deux ans, j'ai fini par te connaitre Edna. Je ne suis pas dupe.

Je ne préfère rien dire le reste du trajet et nous finissons par arriver devant le bâtiment en question.

Les voitures de police sont là ainsi que celle du médecin légiste.

Les badauds curieux se demandent ce qu'il se passe tandis que Gideon se gare.

Je sors de la voiture sans l'attendre et m'avance vers l'entrée du bâtiment. Je montre ma carte d'agent et on me laisse passer.

Gideon me rattrape et nous montons jusqu'à l'étage de la victime.

Mon cœur bat à une allure affolante et il cesse de battre complètement lorsque je croise le regard d'Elliott.

Je l'avais oublié.

Comment autant de problèmes peuvent te resurgir en pleine poire sans crier gare ?

Je le contourne sans le saluer et sans l'effleurer, car il n'y a pas beaucoup de place vue le monde, pour retrouver le Chef et m'arrête devant le corps couvert d'un draps au sol.

— Ah vous êtes là, Edna et Gideon...

Aussitôt, sa voix se fait lointaine tandis que mon bras commence à me picoter légèrement comme la première fois.

Je me mords fortement la lèvre pour ne pas me laisser happer par la vision qui tente de surgir.

Je la sens tenter d'envahir mon esprit et je ne le veux pas.

— Edna ...

Ma respiration se fait haletante et lorsque je ferme enfin les yeux, la vision m'envahit.

Je me retrouve, plongée dans le salon de la femme où la lumière est très faible.

Trois hommes sont habillés en noir et leur visage est couvert d'un masque neutre.

La femme qui est habillée d'une robe blanche, se débat comme une force née, mais elle ne peut hurler et ne peut s'enfuir. L'un la tient par les bras et l'autre par les pieds.

Elle a un bâillon dans la bouche et des larmes ruissellent sur ses joues, alors qu'elle voit le troisième homme, sortir une petite pochette contenant ses objets de torture.

Elle tente d'hurler encore en les voyant et le même homme commence à professer des paroles incompréhensibles puis, prends son scalpel et le pose sur son bras.

Il fait ensuite une entaille profonde et le sang s'écoule rapidement.

Il prend ensuite sa main gantée pour commencer un tracé un cercle avec le sang de la pauvre femme et ...

— Edna !

Je quitte la vision comme propulsée dans une autre dimension et Elliott me rattrape juste avant que je ne rentre en collision avec le sol.

Mon souffle est court et une envie de pleurer me prend, mais je me retiens.

Le médecin légiste et le Chef me dévisagent avec anxiété quant à Gideon, il me regarde encore plus perplexe. Il n'y a qu'Elliott qui a l'air d'être réellement inquiet par ma situation. 

— Ça va ? me questionne-t-il.

Je m'écarte aussitôt de lui, presque en le poussant, car son parfum me donne juste envie de gerber à cet instant et passe une main sur mon visage.

— Je ... pardon. J'ai ... bafouillé-je.

— La scène est difficile, je le sais, déclare le médecin avec compassion.

J'acquiesce pour masquer les apparences et évite tout bonnement le regard du Chef.

— Vous ... vous pouvez répéter ce que vous disiez ? dis-je d'une voix mesurée.

— Bien sûr. Je disais donc que la victime s'appelait Taylor Bryges. 26 ans. Morte par strangulation et comme l'autre victime corporelle , Iris Snow, elle a subi de la torture corporelle.

— Les ... Les mêmes que l'autre ? questionné-je.

— Oui, sauf qu'il y a du nouveau. Une mèche de cheveux lui a été coupée et déposée dans le bol numéro 3 que tu vois là. Dans le numéro 4, il y a ses ongles arrachés.

Je frissonne et j'entends ses étouffements de douleurs dans ma tête, alors qu'on lui retire ses ongles.

— D'a..D'accord donc au lieu de deux bols, il y a en quatre maintenant, dis-je.

— Oui, confirme-t-il. Tout est aussi bien fait. Ce sont presque des interventions chirurgicales et je suis même convaincu que notre meurtrier est chirurgien.

— Combien seraient-ils selon vous ? l'interroge Gideon.

— Une personne me parait difficile, mais c'est possible, répond-t-il.

— Ils sont trois, lancé-je.

Ils me regardent tous, mais je ne fais pas attention à leur regard même lorsque je m'accroupis près du corps de cette pauvre Taylor que j'aurais pu sauver si je l'avais dit à quelqu'un ce soir là.

Si je n'avais pas décidé de me taire et de mettre ça sur le compte de la bizarrerie, elle serait peut-être vivante et j'aurais arrêté ces meurtriers.

Le regret commence lentement à m'envahir près de ce corps sans vie qui n'avait rien demandé.

— Il y en a un qui la tient par les pieds, un autre par les bras pendant que l'autre s'occupe du reste, dis-je. Ils sont trois, répété-je. Et ce sont des hommes.

Je relève mon regard vers eux qui me fixent avec curiosité.

Le médecin légiste me rejoint et semble vouloir en savoir plus.

— Et, comment peux-tu être certaine que ce sont des hommes ? Pour retirer chirurgicalement l'appareil génital de cette femme, peut-être qu'il y a une femme parmi eux ...

— Il y a des hommes qui sont gynécologues, le coupé-je. Et ce sont des hommes. J'en suis certaine. Il faut qu'on trouve pourquoi ils font ça.

Le médecin légiste m'observe longuement et je me redresse, car son regard insistant me met mal à l'aise.

— C'est peut-être le début de meurtres en série, déclare le Chef. Il faut que vous cherchiez si on a ce genre de crime dans nos archives. Si, ça arrive encore une fois, et je ne l'espère pas, le FBI va devoir intervenir et nous aider sur cette enquête.

— Oui, confirme l'autre. Je vous tiens au courant si j'ai des preuves ou de l'ADN, mais c'est comme chercher une aiguille dans une botte de foin. Ils sont doués ces trois gars.

Je croise son regard et me décide de les laisser, pour aller interroger la voisine qui a l'air totalement choquée.

Les secours sont avec elle, puis ils finissent pas s'en aller après avoir vérifié que tout allait bien.

Je m'assois à côté d'elle en tentant de garder un état serein.

— Bonjour, je suis l'agent Fall. C'est vous qui avait découvert le corps de la victime, affirmé-je. Ça a dû être difficile.

— C'était horrible mademoiselle, me dit la vieille femme, la voix triste. Je ... Chaque dimanche matin, j'emmène des petits gâteaux à Taylor et on prend le petit déjeuner ensemble. C'était vraiment une gentille fille. Elle travaillait beaucoup. C'était une grande avocate. Elle a obtenu une promotion. Elle allait devenir juge, je crois. Un truc comme ça. Pour tout vous avouer, je ne comprenais pas tout ce qu'elle me disait par rapport à son travail, sourit-elle mélancolique, mais j'aimais beaucoup l'écouter. Je suis une vieille femme et elle prenait soin de moi comme moi, d'elle.

Je sais qu'on ne doit pas être dans le contact avec les témoins ou autres, mais cette vieille femme m'attristait beaucoup, alors je passe un bras autour d'elle pour un peu la réconforter. Et peut-être pour me réconforter aussi de la vision que j'ai vu.

Elle s'essuie les joues à cause des larmes qui coulaient et je lui demande :

— Vous n'avez rien entendu ?

— Non. Ici, c'est calme. Je n'ai rien entendu. Vraiment rien alors qu'on est voisine de palier.

J'acquiesce compréhensive.

Ces hommes savaient s'y prendre dans leur crime...

— Donc, vous n'avez vu personne, entendu aucun bruit et aucun moyen de savoir à quoi ressemble ce meurtrier.

— Je suis désolée, dit-elle en pleurant. Je veux qu'on arrête la personne qui a fait ça. Taylor ne méritait pas ça.

— Je sais. Ce n'est pas de votre faute et je vais retrouver ces personnes.

— Je crois en vous.

Je plisse mes lèvres pour mimer un petit sourire avant de me lever, puis je rejoins Elliott et Gideon qui attendaient que je finisse mon interrogatoire.

— Alors ? me demande Gideon.

— Comme pour Iris Snow. Rien. Ce sont comme des fantômes. Ils sont silencieux. Ils ne laissent aucune trace. Ils agissent avec une connaissance préalable de leur victime, répondé-je.

— Tu as l'air certaine de toi, commente Elliott.

Je ne lui réponds pas et le Chef nous rejoint.

— Bon, il n'y a plus rien à faire ici. Allons au poste et cherchons ces tueurs. Et Edna, tu as complètement convaincue le légiste et je t'avoue que moi aussi. On a déjà une piste. On cherche donc trois hommes.

J'opine de la tête et le Chef ajoute :

— Je ne sais pas ce qu'il t'arrive Edna lorsque tu vois le corps de la victime, mais si ça continue, je vais devoir te retirer de l'enquête. Je ne veux pas perdre l'un de mes meilleurs éléments pour une affaire morbide. Ce genre d'affaire est dur et j'en ai conscience alors ...

— Ça ne m'arrivera plus, le coupé-je abruptement. Je ... Ça me fait mal au cœur de savoir que ces pauvres femmes sont mortes en souffrant, expliqué-je maladroitement.

Il n'avait pas l'air convaincu, mais il s'en contente et on descend pour gagner les véhicules et se retrouver au poste.

Une fois dans la voiture de Gideon, il décide de rester silencieux et je l'en remercie presque.

Je n'avais pas envie de parler ou de lui mentir encore. Ça ne me ressemblait pas et surtout vis-à-vis de lui.

Il fallait que je me confie à lui, sur toute cette histoire pour avoir un avis impartial sur la situation. Mais, je n'étais pas encore prête. 

On arrive assez rapidement au poste et nous sommes les premiers.

Je quitte la voiture et je décide de l'attendre. Il contourne son véhicule et je croise ses yeux bruns qui sont, à présent, clairement inquiets pour moi, mais il ne dit rien.

On entre dans le poste et on salue rapidement le mec qui est à l'accueil le week-end, à la place de Cassandra.

Je ne retiens jamais son prénom et je ne cherche pas non plus à le savoir.

Gideon est à côté de moi, complètement dans ses pensées tandis qu'on marche tranquillement.

Je lui donne un coup d'épaule avec le sourire pour détendre cette atmosphère, mais il me lorgne plus qu'autre chose lorsqu'on arrive à notre unité.

— Qu'est-ce que tu as Gideon ? Tu es silencieux. T'es une vraie pipelette en général. 

— Rien, grommelle-t-il en évitant mon regard. On se met au travail et on en a.

Je tente de placer un mot, mais il me dépasse en me bousculant presque et entre dans l'unité.

Je reste quelques secondes stoïque face à sa froideur et entre à mon tour. Bon, je ne vais pas lui tirer les vers du nez.

Je vais vers mon bureau en jouant à son jeu et jette ma veste sur mon siège, puis je vais chercher le tableau pour pouvoir écrire nos notes dessus.

Je prends les marqueurs et retourne à mon bureau pour allumer mon ordinateur.

Elliott et le Chef finissent par nous rejoindre et je suis déjà prête à bosser.

— Alors, qu'est-ce qu'on a comme éléments ? demande le Chef

— Pas grand chose, répondé-je. La première victime avait 26 ans tout comme celle-ci. Ça fait déjà un point commun.

Je décide de l'écrire, puis le Chef hoche la tête et regarde Gideon et Elliott.

Gideon se décide de parler.

— Elles ont toutes les deux subis sévices physiques sauf que Taylor a eu les ongles arrachés et une mèche de cheveux coupés, dit-il.

Je le note et nous regardons Elliott qui lâche :

— Niveau professionnel, c'est différent. Iris Snow allait peut-être élue comme membre du Conseil d'Administration de l'American Airlines, lit-il. À seulement 26 ans , appuie-t-il en relevant sa tête vers nous. Ce n'est pas un peu trop tôt, Edna ? me demande-t-il. Ton père travaille pour la American Airlines, non ?

Je reste figée alors que son regard me sonde sans scrupule et je sens aussi les deux autres regards inquisiteurs sur moi se demandant depuis quand, Elliott me pose des questions sur ma vie.

Je le scrute en me demandant à quoi il joue et pourquoi il parle du travail de mon père dont j'ai parlé lors de ce dîner chez lui.

Je déglutis et opine de la tête.

— Oui, je pense. Je ne travaille pas là-bas.

— Il faudrait se renseigner alors, déclare le Chef. Peut-être que ce sont des meurtres qui visent à éliminer des potentiels candidats à un grand poste.

— Vous avez peut-être raison, dis-je. Taylor Bryges allait devenir juge. Apparemment, elle était brillante.

Je décide de noter ces éléments sur le tableau.

Oui, peut-être que les trois hommes éliminaient des futures concurrentes à un poste important.

— Autre élément, lance le Chef Taylor, elles étaient jeunes et vraiment prises par le vie professionnel. Les deux n'avaient pas de petits-copains.

Je le note aussi et on continue comme ça pendant une trentaine de minutes sur ce brainstorming.

Le Chef satisfait, nous invite à chercher dans les archives pour trouver ce genre de crime semblable et on s'y met en silence.

*

Au bout de deux heures de recherches, rien d'intéressant ne ressort de nos archives.

Des homicides morbides, il y en a, mais pas de ce type et encore moins avec trois types dont nous ne savons rien.

Notre patron revient parmi nous avec des pizzas qui sentent divinement bons et mon estomac le signale. Il pose les boissons et les pizzas sur le bureau de Gideon qui est sur son chemin.

L'heure du déjeuner nous est complètement passée au-dessus de la tête, tellement nous étions concentrés sur ces recherches.

— Pour votre travail en ce dimanche maussade, voici des pizzas, annonce-t-il avec joie.

Je glisse ma chaise devant son bureau et Elliott fait de même.

Affamée, je saute presque pour obtenir ma part, ce qui fait sourire le patron, mais pas moi.

Il est près de 15 heures et nous n'avons rien de concret et cela m'irrite au plus haut point.

— Alors, du nouveau de votre côté ? nous interroge-t-il après s'être installé.

— Non, répond Gideon. Des tueries en trio, on a jamais eu. En duo, il y en a eu, mais je pense qu'on a pas assez d'éléments.

— Je suis d'accord avec lui, rétorque Elliott ce qui surprend Gideon. Edna dit qu'ils sont trois mais ... on a aucune preuve, les scènes de crime sont sans faute et ... tout ça m'a l'air étrange.

Je mâchouille ma pizza et bougonne :

— Ils sont trois, j'en suis sûre.

Il me dévisage avant de détourner son regard et il se ressert une part et j'en fais de même, après avoir vidé la sauce piquante sur la mienne. 

— Il y a toujours des erreurs, dit le Chef. Pour l'instant, ils n'en ont fait aucune, mais ça arrivera si ça continue. Le meurtre parfait n'existe pas. Le « presque » oui, mais le parfait, absolument pas.

Nous ne disons rien et nous continuons tranquillement de manger chacun dans nos pensées.

Les miennes sont mélangées. J'essaye vainement de trouver un élément qui pourrait m'informer sur l'un des hommes, mais je ne vois pas assez la scène pour savoir qui ça peut être.

De toute façon, je ne savais même pas contrôler ces visions qui surviennent, lorsque je suis dans la pièce du meurtre ou dans la rue ...

— Bon, restez encore une heure et vous pouvez partir, dit-il en se levant.

Il nous quitte avec son autre part et je ne me gêne absolument pas de prendre ma troisième avant de regagner mon bureau.

Je me remets au boulot avec une petite pose digestive et je reste concentrée sur ce que je fais.

*

— Je vais aux toilettes, avertis-je Gideon qui rangeait son bureau.

— D'accord. Je t'attends en bas, me sourit-il en coin.

On pouvait enfin s'en aller après cette journée inattendue.

Et pour la première fois depuis que j'ai quitté l'appartement, je regarde mon téléphone et celui de Billie, mais aucun message.

Elle est encore avec ce type ? Il est quand même déjà 16 heures ...

J'enfile ma veste et quitte notre bureau non sans lancer un regard au bureau d'Elliott qui est vide de sa présence.

Il est parti cinq minutes avant nous pour une urgence.

Je traverse donc le couloir et je passe devant le bureau de Chef Taylor qui a la porte entrouverte et je m'apprête à descendre les marches lorsque j'entends la voix d'Elliott :

— Peut-être qu'Edna est en danger, dit-il d'une voix dure.

Je me fige instantanément à ses mots. Pourquoi disait-il cela ?

Je joue la fouineuse et tente de voir à travers la porte entrebâillée mais je ne vois rien. Merde !

En revanche, j'entends le soupir du Chef qui a l'air dubitatif.

— Si tu tentes de jouer aux devinettes avec moi Elliott, je ne n'ai vraiment pas le temps pour ça alors dis-moi tout.

— Je n'ai rien à te dire, je dis juste qu'Edna est peut-être en danger, répète-t-il d'une voix plus calme.

Le Chef Taylor ricane.

— Donc maintenant tu te préoccupes d'elle ?! Ce coup de genoux t'ait réellement monté au cerveau Levy ! Mais c'est bien. Tu ne vois plus sa couleur qui te dérangeait tant et le fait que ça soit une femme ...

Je suis surprise que le Chef me défend, mais ça me fait plaisir.

C'est au tour d'Elliott de ricaner et de lâcher :

— Entre nous Anthony, je sais que tu sais que je ne suis pas un raciste ou un homophobe et encore moins un machiste, parce que je me serais mal comporté avec Brittany et toutes les autres femmes du poste et ce n'est pas le cas. De plus, je fréquente Jackson et Chris et j'ai énormément de respecter pour toi et pour toute la communauté noire. En fait, je n'ai pas ce problème de racisme. Si j'ai agis comme ça envers Edna, c'est pour des raisons personnelles, mais je devais le faire, se justifie-t-il. Réfléchis ! Ma première semaine ici, je n'ai eu aucun souci avec personne et encore moins avec elle.

Je réfléchis tout comme le Chef à cet instant à ce qu'il disait.

Tout ce qu'il venait de dire me remuer davantage et bien plus que je ne l'aurais cru.

C'est vrai, notre première semaine à tous s'était bien déroulée. Elliott avait été même très cordial envers tout le monde et je n'avais eu aucun souci particulier avec lui. Je lui avais même parlé brièvement pour faire connaissance, après c'était juste pour faire les présentations et jouer la carte de la courtoisie.

— Mets-là sur surveillance pour une semaine, demande-t-il. Toutes ces histoires de meurtres, ça ne me rassure pas. 

— Tu as quelque chose à te reprocher Elliott ? Si c'est le cas, c'est vraiment le temps d'en parler, l'invite-t-il à parler. 

— Non, le coupa-t-il abruptement.

Le Chef soupire et dit :

— Edna est une grande fille et forte et je ne veux pas lui faire ça dans son dos. Alors, si tu veux que je la mettes sous surveillance, tu dois m'en dire plus et j'aviserai. Je ne peux pas poster des agents devant chez elle sans son accord. Reviens me parler quand tu seras prêt. La porte sera ouverte.

Elliott jure, mécontent, avant de marcher en direction de la porte et je déguerpis le plus vite possible, mais je ne suis qu'à la moitié des marches et je sens son regard dans mon dos.

Pour la discrétion, c'est raté.

Je m'arrête et lève les yeux vers lui pour lui faire comprendre que j'ai tout entendu. Je ne cède pas à la pression de son regard et je veux savoir ce qu'il a à dire.

Il descend l'air grave et se poste face à moi.

— Qu'est-ce que tu as entendu ?

— Tout, répondé-je sans détour. 

Il ferme quelques secondes avant de les rouvrir et ses yeux gris me sondent d'une manière que je ne peux qualifier. Il ne m'avait jamais regardé comme ça. 

— On peut se parler ?

— Pourquoi je suis en danger ?

— J'ai dis peut-être.

— Ça ne répond pas à ma question ! m'exclamé-je. Tu es le type le plus bizarre que je connaisse Elliott. Tu changes du jour au lendemain. 

Il ne dit rien et me regarde juste sévèrement.

— Peux-t-on se parler ailleurs qu'ici ?

— Pourquoi tu es parti lui dire tout ça ? Qu'est-ce que tu as fait ? Tu m'as vendu à un gang du quartier en échange d'argent ? Ou attends, j'ai mieux ! Tu veux que je me fasse tuer ?

— Arrête, bougonne-t-il. Tu veux savoir alors parlons ailleurs qu'ici.

Je croise les bras, prête à ne pas céder à sa demande.

— Arrête de t'entêter, râle-t-il. Tu compliques vraiment tout. Tu aurais accepté cette demande en mariage ...

— Nan mais tu es sérieusement atteint mon pauvre, le coupé-je.

Il soupire et se pince l'arête du nez tandis que je me lance dans un monologue sur sa façon d'agir, qui est tout sauf respectable envers ses parents qui sont gentils. 

Il finit par me regarder à nouveau, s'approche beaucoup trop de moi que je sens son souffle sur ma figure lorsqu'il lâche :

— Viens chez moi. Ou on peut aller chez toi. Je te dirais tout ce que tu veux savoir. Je te le jure. 

Je bloque ma lèvre inférieure entre mes dents, réellement tentée d'en savoir plus sur ses grands secrets, mais je ne lui fais pas confiance.

Ses yeux tentent de me faire céder et bien qu'ils soient beaux comme un dessert de grand chef, je ne me laisse pas atteindre aussi facilement par cet escroc enfant du diable de première.

Je m'apprête à lui répondre que je voulais qu'il me dise tout, maintenant, lorsque le raclement de gorge de Gideon nous éloigne de cette distance restreinte et bien trop intime, pour des collègues qui se détestent.

Sauf que nous ne l'avions pas remarqué. 

Je me sens mal à l'aise et j'évite tout bonnement le regard d'Elliott qui me fixe, tandis que Gideon nous regarde tour à tour avec curiosité.

— Qu'est-ce que vous faisiez ?

— Rien d'important, répondé-je. Il tente toujours de se faire pardonner pour ses conneries. Tu viens ?

Je prends par la main, mon très ami Gideon et nous dévalons les escaliers non sans lancer un dernier regard vers l'autre imbécile qui nous fixe durant toute notre descente.

Une fois dehors, Gideon s'échappe de mon emprise et me force à lui faire face.

— Je te le redemande Edna, qu'est-ce qu'il se passe avec ce type ?

Ma bouche n'émet aucun son même si je le veux.

J'ai envie de lui dire et de me confier à lui pour ne pas qu'il se fasse de fausse idée, ou encore que mes secrets en pâtissent sur notre amitié forte depuis qu'on se connait.

Je reste juste à le regarder et lorsqu'Elliott nous dépasse pour rejoindre sa voiture, Gideon bouillonne juste de rage et ça se voit dans son regard.

— Pourquoi tu ne veux rien me dire ?! Je ne te comprends pas !

Je me gratte l'arrière de la tête et me décide de parler.

— Ne t'imagine pas des scénarios farfelues, Gideon. Vraiment. Je vais t'expliquer, mais pas maintenant. S'il te plait. J'ai juste peur que tu ne comprennes pas.

Il se fige et me toise avant de ricaner.

— Que je ne comprennes pas !? Sérieux !

— Gideon ...

Il s'apprête à me réprimander et à vouloir dire je ne sais quoi, mais je l'attire juste contre moi pour le faire taire et je l'étreins aussi fort que je le peux.

— S'il te plait. Juste, attends un peu.

Je reste comme ça pendant plusieurs secondes et le force à m'entourer de ses bras qui se font lasses, mais il finit par en faire de même en soupirant, vaincu. 

— C'est une technique d'escroc que tu viens d'utiliser là. Ce n'est pas juste. 

— Je sais, ris-je doucement, mais je ne veux pas qu'on se dispute pour des stupidités. On s'aime trop pour ça. T'es mon pote ! Je t'aime trop, Deon. 

Je m'écarte de lui et constate que ses joues sont légèrement écarlates. Il tente de le cacher, ce qui me fait rire.

— Mes câlins ont cet effet sur tous les hommes, le taquiné-je.

— Très drôle. Allez, je te dépose.

Je lui embrasse longuement la joue, pour le remercier de ne pas persister et il me dépose comme promis chez moi.

*

— Douglas est vraiment un type cool, dit-elle avec le sourire.

Je lève les yeux en secouant la tête.

Nous étions tranquillement en train de dîner.

J'étais rentrée avant elle, alors j'avais eu le temps de préparer des pommes de terre au four avec du poulet mariné.

Elle avait dû lire dans mon esprit car elle avait acheté notre dessert, alors c'était parfait. Une excellente charlotte aux fraises qui nous faisait les yeux doux sur la table basse.

Elle me racontait sa journée avec ce Douglas visiblement drôle mais très intelligent aussi. Il connaissait beaucoup de choses sur l'histoire et avait peut-être autant d'imaginations que Billie qui avait adoré écouter ses histoires rocambolesques.

Ils avaient pris le petit-déjeuner, puis ils s'étaient promenés dans la ville avant d'aller se mettre au chaud dans un musée, même si ce n'était pas ce qu'ils aimaient (point commun). Et ensuite, il l'avait invité à déjeuner dans un fast-food pour que « ça ne soit pas formel » selon lui, ce qui avait plu à Madame et ils avaient continués à parler, parler et parler.

Ils s'étaient bien trouvés ces deux pipelettes.

Puis, il l'avait accompagné acheter le gâteau et il l'avait déposé chez nous sans rien tenter, ce qu'elle regrettait depuis tout à l'heure.

Moi, j'en étais contente. Il avait écouté mes recommandations et franchement les mecs qui embrassent au premier rendez-vous sont juste des imbéciles, parce qu'il y avait des filles comme Billie qui sont fanatiques de l'amour alors un baiser, pour elles, c'est le conte de fées ...

— Franchement, il aurait pu tenter de m'embrasser quand même ! Je l'aurais repoussé bien sûr mais ... Il était vraiment mignon, Edna ! C'était une superbe journée.

Elle ressort sa lèvre inférieure avec une moue triste ce qui me fait sourire.

— Et demain tu me diras que tu es amoureuse ! soupiré-je.

Elle me lance un petit oreiller que j'évite en riant.

— Absolument pas, mais ça faisait longtemps que je ne m'étais pas sentie aussi importante.

— Merci pour nous !

Elle roule des yeux et se justifie :

— Ce n'est pas pareil ! Et tu le sais. Bref, on va se revoir dans la semaine. Et toi, ta journée ?

Je prends un morceau de pommes de terre qui reste en suspens et j'hausse les épaules.

— Bah, je suis restée à la maison.

— Cool. Tu as pu te reposer ?

J'acquiesce et finis mon assiette.

Je me sens mal de lui mentir, mais si je lui dis qu'une autre femme est morte et qu'une vision est apparut, ça lui fera peur. Je la connais Billie. C'est une trouillarde de première et déjà que toute cette histoire n'augure rien de bon, je ne veux pas en rajouter avec ces scènes de crime horribles.

— Tu vas donc écrire ce soir, lâché-je en me posant mon assiette sur la table.

— Oui, couine-t-elle. Mon histoire va cartonner, Edna.

— Je sais. Je crois en toi, Fernandez !

— Awhhh, t'es trop mignonne quand tu me dis des choses comme ça. Bon, on le mange ce gâteau ?

— Avec plaisir.

La soirée se termine tranquillement et même si j'ai du mal à trouver le sommeil au début à cause des images qui hantent mon esprit, je finis par m'endormir.

*

— Vous êtes enfin là ! s'exclame Cassandra. On allait partir manger sans vous ! Vous savez très bien qu'il y a du monde au Chicken Kings !

Gideon et moi venons de descendre pour aller déjeuner à l'extérieur avec Cassandra et Marilyn.

La matinée s'était déroulée sans encombre.

On bossait sur nos meurtres et sur d'autres affaires entre temps.

Nous n'avions toujours pas reçu de nouvelles de Tammy par rapport au dealer, mais on devait patienter.

Avec Gideon, ça se passait pour le mieux. Je le préférais souriant que triste.

Quant à Elliott, je l'évitais soigneusement et il avait l'air de ne pas s'en préoccuper, alors c'était parfait.

Ouais, c'est définitivement un bon lundi.

Surtout lorsqu'on va déjeuner avec la grande Cassandra qui nous tue de rire et Marilyn.

On quitte le poste et on marche en direction du restaurant où nous comptons déjeuner, car ce n'est pas loin lorsqu'on hèle mon prénom.

La voix me dit vaguement quelque chose et je me retourne tout comme les autres pour tenter de savoir de qui il s'agit.

Je me liquéfie presque sur place quand je vois que c'est la mère d'Elliott.

Ma bouche s'ouvre et je la referme aussitôt tandis qu'elle trottine vers nous avec le sourire.

OH MON DIEU !!!!!! Tout mais sauf ça !

— Ce n'est pas la mère du petit con mignon d'Elliott ? demande Cassandra.

J'avale difficilement ma salive, alors qu'elle s'approche de moi et me prend dans ses bras comme si de rien était. 

Comme s'il ne s'était rien passé vendredi soir.

— Oh Edna ma belle ! Je suis si contente de te voir et de ne pas t'avoir raté !

J'ai encore une fois envie que ce malaise apparaisse, mais rien. Alors, je sors un sourire crispé et lâche :

— Moi aussi Madame Levy. Je ne m'attendais pas à ... vous voir. Elliott est au poste ...

— C'est toi que je suis venue voir en secret, me coupe-t-elle avec un petit clin d'œil. Oh mon Dieu ! Que je suis impolie. Bonjour chers collègues d'Elliott et d'Edna bien sûr, sourit-elle en les enlaçant comme si ça faisait des années qu'elle les connaissait.

Elle se présente, mais tout le monde la connait apparemment. Moi, je ne l'avais jamais vu cette femme avant l'autre fois...

Je vois Marilyn qui a envie d'éclater de rire et Gideon relance ce regard curieux qui veut tout dire.

Elle me sourit et me prend la main qu'elle presse.

— Ça te dirait de venir déjeuner avec moi ? J'y tiens et je dois te parler.

— Euh ... j'y allai avec eux ...

— C'est bon ma belle, me coupe Cassandra avec un sourire espiègle. Vas-y. Ce n'est pas comme si, nous ne déjeunions jamais ensemble. 

Elle laisse échapper un petit clin d'œil pour me faire comprendre que je devrais tout leur raconter plus tard.

— Merci beaucoup ! s'exclame madame Levy. Je sais que c'est imprévu mais je dois lui parler.

Je me retiens de soupirer et pense juste à la façon dont je vais dégommer Elliott lorsque je le reverrai.

— Mais Gideon, tenté-je d'échapper à ce déjeuner improvisé, ...

— On va prendre soin de ton Gideon, m'assure Marilyn. Puis, c'est un grand garçon hein !

La folle de Levy dévisage Gideon avec une légère insistance et arbore un sourire totalement faux.

— Oui, c'est un grand garçon, Edna. Allez, fais-moi plaisir.

— Vas-y, dit-il. On se retrouve plus tard. On te prend une tarte au daim.

— Merci.

Je l'observe longuement tout comme il le fait. Et sans m'y attendre, il m'embrasse la joue et ils s'en vont non sans se retourner plusieurs fois vers nous et madame Levy attrape mon bras pour qu'on aille à l'opposé.

— Je vais t'emmener dans un restaurant non loin d'ici qu'Elliott aime beaucoup et que j'aime beaucoup aussi. C'est à peine dix minutes de marche.

Je me fais silencieuse et je regarde les gens qui nous regardent curieusement.

Je les comprends en même temps, car elle se tient à mon bras comme si je comptais m'échapper ... bon, c'est ce que je comptais faire. Mais, aucune possibilité avec cette femme.

Nous arrivons enfin dans le restaurant en question qui se surnomme « Racine » et qui est étoilé d'une étoile.

— J'aime beaucoup les restaurants à deux et trois étoiles. Mais, il faut réserver et il n'y avait pas de place. Puis, celui-là est vraiment sympa ma chérie, pour une étoile.

J'ai envie de lui répondre que je m'en fiche des étoiles et que je n'avais jamais mangé dans un restaurant étoilé, car tout ce qui compte pour moi, c'est juste la nourriture qui vous fait fondre sur place alors étoile ou pas, c'était le cadet de mes soucis.

Ah si ! Le prix. Les prix sont totalement différents. 

On vient donc nous accueillir puis, on nous installe non loin de la vitre qui donne sur la rue.

Je prends la carte que le serveuse me tend tout comme cette bonne femme.

D'ailleurs, à certains prix de plats, j'ai presque envie de me lever pour me barrer d'ici et rejoindre les autres qui mangent du poulet au fromage avec des frites et ...

— Tu prends ce que tu veux ! appuie-t-elle. J'offre. Ça me tient vraiment à cœur.

— Je peux me payer toute seule mon déjeuner, dis-je, durement.

Son sourire disparaît et je me sens aussitôt mal de lui avoir parlé comme ça. Alors je me reprends :

— Mais si ça vous fait plaisir ...

— Oh ! dit-elle en jouant la femme attendrie.

Elle retrouve son sourire et j'opte pour un plat au nom bizarre mais, il y a du saumon (poisson que j'adore) et une purée de légumes.

La serveuse revient et prend nos commandes.

Elle nous apporte deux minutes plus tard nos limonades et s'en va.

Le silence s'installe de lui-même et je regarde l'extérieur, après avoir retiré mon blouson pour être plus confortable.

Je sens son regard sur moi, alors je me décide de la regarder.

— Qu'est-ce qu'il y a ? l'interrogé-je. Vous vouliez me parler alors que je vous écoute.

Elle a l'air soudainement moins confiante et son sourire fond un peu.

— Je voulais te parler de vendredi soir et de ce qu'il s'est passé. Ça m'a tourmenté tout le week-end de ne pas savoir ... comment tu allais à cause de l'affreux mensonge, d'Elliott. Son père aussi. Sincèrement. Je ne sais vraiment pas ce qui lui a pris, Edna. Il n'est vraiment pas du genre à mentir. C'est un bon garçon, je te le jure.

Je reste dubitative et l'observe repousser une mèche de son chignon avec élégance.

La voir aussi bien habillée et raffinée fait que j'ai du mal à l'imaginer en ancienne « hippie » comme elle disait.

Elle reprend avec un sourire en coin mais qui est triste.

— Son père est vraiment vraiment déçu et moi aussi, mais mon instinct maternel me dit que mon fils n'est pas l'homme que tu nous as confié lors de ce dîner et qu'il nous a montré.

— Qu...

— Attends, m'arrête-t-elle voyant bien que je compte m'emporter, je ne dis pas que tu as menti. Il nous a dit toute la vérité et ça nous a brisé le cœur. Mais quand je dis ça, je veux dire par là, qu'il ...

Elle regarde autour d'elle et s'abaisse vers moi.

— Peut-être qu'il a des problèmes. Je dois t'avouer qu'il agit étrangement depuis un moment, mais que j'avais mis ça sur le compte de l'amour. À présent, la vérité a éclaté alors ... je reste perplexe face à tout ça. Il doit y avoir une raison valable à ce mensonge, Edna, se confie-t-elle.

Je la fixe comme elle le fait et les mots de son fils me traverse l'esprit.

Je dis quand même :

— Il n'est peut-être pas ce que vous croyez. Il a été affreux durant ces deux années. Vraiment. Ça a été un gros connard et encore je suis gentille ...

Je m'arrête en réalisant que j'insulte son fils devant elle, mais cela la fait sourire.

— Ne te gêne pas. Il n'a pas été correct c'est vrai. Pardonne-nous.

— Vous n'avez rien fait. C'est lui le problème.

Elle acquiesce et la serveuse revient avec nos plats qu'elle pose devant nous.

On commence à manger silencieusement, puis je la sens encore une fois me jeter quelques coups d'œil.

Moi, je savoure mon déjeuner qui est très bon.

Finalement, je regrette beaucoup moins ce déjeuner juste pour le goût succulent des légumes et du poisson.

Elle décide de reprendre la conversation en m'interrogeant sur notre relation qui n'a jamais existé.

— Donc, vous n'êtes jamais sortis ensemble ?

— Même pas une seule fois. Il m'a offert juste un muffin. C'était déjà un grand geste.

Elle sourit tout comme moi.

— Et ... tu as décidé de mentir pour lui ?

— Oui, répondé-je. J'ai vraiment hésité. Mais, je l'ai fait pour ma meilleure amie pour tout vous avouer. Elle écrit et elle avait besoin d'avoir ce genre d'action pour ... pouvoir écrire. C'est inspirant apparemment.

— Oh. C'est vraiment gentil de ta part.

Je ris doucement et prends des légumes.

— Je vais te dire une chose qui va peut-être te gêner et te paraître saugrenue, étant donné la situation, mais ... je pense que mon fils t'aime bien, Edna.

J'avale de travers et je me mets à tousser bruyamment ce qui attire des tas de regards.

Elle se sent aussitôt désolée et essaye de me taper dans le dos, mais c'est une chose qu'il ne faut pas faire.

Je tousse donc, me moquant bien des regards et une fois la chose passée, je prends une gorgée de ma limonade, les yeux rougis par la quinte de toux.

— Je suis désolée, Edna. Je ne voulais pas susciter ce type de réaction.

— Ça va. Pourquoi vous dites ça ? C'est juste horrible !

— Horrible ?! ricane-t-elle. Quand même pas à ce point. Mon fils est un bon parti. Sache-le. 

— Vous tentez de le caser avec moi là ? ris-je.

Elle se joignit à mon rire avec une petite moue.

— Eh bien, il se fait vieux alors ... et puis je t'apprécie vraiment beaucoup aussi ...

— On va se calmer, Madame Levy.

— Je dis ça, je dis rien. Vous allez merveilleusement bien ensemble. Et vendredi soir, je n'ai pas douté un seul instant de votre couple. Daniel aussi. Il te regardait avec ses yeux, lorsque tu parlais que mon cœur fondait et ...

— Patricia, l'arrêté-je.

— Bon, j'arrête, dit-elle en levant les mains en signe de reddition avec le sourire, mais voilà. Il est célibataire, ses parents t'aiment bien pour ta sincérité et ta façon d'être alors ...

— J'ai compris. Mais Elliott, je ne peux vraiment pas.

— Parce qu'il est blanc ?

Je lève les yeux.

— Non ! Enfin ... non. C'est juste qu'il n'est pas mon genre de type ...

— Donc parce qu'il est blanc, m'interrompt-elle. Tu peux le dire. Ou c'est ce Gideon. Charmant homme au passage. 

— On ne veut pas se lancer sur ce sujet, je veux juste dire qu'il m'a vraiment blessé et que j'ai vraiment du mal à oublier, voilà. Et Gideon, ne le mêlez pas à ça. 

— Bien, mais il a l'air de bien t'apprécier aussi. En tout cas Edna, il faut savoir pardonner. Je sais que c'est difficile, mais je t'assure qu'Elliott est quelqu'un bien. Il ne ferait pas de mal à une mouche. Il est adorable comme petit-ami alors en époux, il sera fabuleux.

Je lui lance encore ce regard pour lui demander d'arrêter ses délires et le fait à contre-cœur.

— Bon, il faut quand même que tu m'aides à savoir ce qu'il cloche avec lui. Il cache quelque chose et c'est l'instinct maternel qui me le dit. Ne le remets pas en doute.

J'exhale face à cette femme qui peut être très têtue tout comme moi.

J'ai clairement du mal à changer d'avis sur Elliott, mais avec ce qu'il a dit hier et elle maintenant, mes jugements s'effondrent doucement.

— Tu vas enquêter alors ?

— Je ne sais pas ...

— Je t'en supplie, Edna. C'est une mère inquiète pour son fils qui te le demande.

Elle ancre son regard au mien et au bout de deux minutes, je soupire par capitulation.

— D'accord. Je vais voir ce que je peux faire.

— Oh merci ! s'exclame-t-elle en couinant toute heureuse. Je savais que tu avais un grand cœur et que tu accepterais. Quel dommage que tu ne sois pas réellement sa ...

— J'ai compris, Patricia ! Vous êtes clairement dans ... l'excès sur cette situation.

— C'est que j'avais quelques rêves à propos de vous.

Elle sourit comme une cinglée et on finit de déjeuner tranquillement.

Puis son dessert me revient en tête. Peut-être que je pourrais avoir une petite compensation, tiens ! 

— Je voulais vous dire aussi que votre dessert de vendredi était juste à tomber par terre. J'en ai parlé à mes amies et elles salivaient carrément.

Elle rigole toute béate par ce compliment.

— Eh bien pour te remercier d'avoir accepté ma demande, tu peux leur proposer de venir disons, mercredi soir vers 18 heures pour prendre un petit goûter et je ferais ce crumble.

— C'est vrai ? Ça fait un peu bizarre qu'on vienne chez vous ...

— Daniel ne sera pas là et Elliott ne vit plus chez nous alors il n'y a aucun problème. Entre filles. Tu peux inviter ta mère comme ça je la rencontrerais ... non, viens avec tes amies, corrige-t-elle face à mon regard.

— Oui, c'est mieux, dis-je en secouant la tête. Patricia, je dois vous le dire, vous êtes la femme la plus dingue que je connaisse, avoué-je. Il fallait que je vous le dise.

Elle éclate de rire avec sincérité et en aucun cas vexée par mon commentaire.

— Merci Edna, fait-elle en prenant ma main. Merci pour ce compliment. Tu sais, la vie et ses expériences nous changent. Je n'étais pas comme ça plus jeune mais, j'ai décidé d'être qui je voulais. Jouer un rôle qui ne vous définit pas pour rentrer dans le moule, je l'ai joué trop longtemps.

Je l'observe, touchée, parce qu'elle venait de dire et elle retire sa main.

*

— Merci pour ce déjeuner Edna. On devrait le faire plus souvent. Ça me change de mon quotidien à l'hôpital et toi, au poste, dit-elle.

— Merci à vous de m'avoir invité et pour le « plus souvent », on verra.

Elle sourit comme toujours avant de m'enlacer.

— Merci encore pour l'aide.

— Je ne vous garantis rien.

— Je sais, tiens-moi juste au courant. Je suis certaine qu'il va se confier à toi. Instinct maternel ma belle. Allez, va travailler.

— Oui.

Je m'apprête à m'en aller mais, elle m'arrête et attrape ma main où elle pose la petite boite où se trouve l'alliance qu'il comptait m'offrir.

— Mon rêve de vous voir marier n'arrivera jamais vu ta réticence évidente mais, cette bague te revient de droit. Il ne l'a pas récupérée et cette bague, ça vous regarde vous, alors tu lui redonneras et s'il ne la veut pas, tu es en fait ce que tu veux hein. Les femmes aiment les diamants, rétorque-t-elle avec un clin d'oeil, alors ne te gêne pas. Ça sera sa punition. À très vite, ma Edna.

Je n'ai pas le temps de rétorquer ou de lui balancer la boite à la figure qu'elle s'en va déjà.

Moi, je n'en veux pas cette foutue bague même si elle ... elle est belle cette bague. Et coûteuse ! Je pourrais me racheter une voiture avec ...

Je reste quelques instants à la regarder avant de fermer la boite et pars en direction du poste des tas de questions à l'esprit.

Lorsque j'arrive au poste, Cassandra et les autres ne sont pas encore là alors, je peux inventer un mensonge entre temps.

Je salue quelques collègues et monte dans notre unité en vitesse en espérant trouver Elliott mais il n'y est pas.

Peut-être qu'il est au réfectoire.

Je décide donc de descendre et effectivement, il y est avec les autres.

Je me dirige vers les autres et lance :

— Levy, j'ai à te parler. Suis-moi.

Tout le monde nous regarde, choqué, et lui, le premier. Néanmoins, il se lève pour me suivre à l'extérieur et je l'attends, appuyée sur le mur.

Il finit par arriver en terminant de mâcher son sandwich je crois et se pose en face de moi.

— Je passe chez toi ce soir et tu me raconteras tout, mais vraiment tout sinon je te tue chez toi et je me retrouve en prison, tant pis. Et tu n'as pas intérêt à me mentir, Elliott. Hé ! Regarde-moi quand je te parle.

Il sourit en coin en relevant sa tête vers moi. J'ai juste envie de lui faire ravaler son sourire.

— OK. Tu me suivras en voiture.

— Ouais, c'était évident de toute façon. Mais, tu pars avant. Je ne veux pas que les gens s'imaginent des choses. Déjà que je viens de déjeuner avec ta mère et que les autres ont vu ...

Il perd aussitôt sa mine enjouée et fronce les sourcils.

— Quoi ? Mais comment ...

— Je ne sais pas. Je m'en allais déjeuner avec Cassandra, Deon et Marilyn et elle a surgit au bon moment. Bref ...

— Qu'est-ce qu'elle a fait ? Qu'est-ce qu'elle t'a dit ?

— Conversation de femmes, lui tapoté-je la joue. Maintenant bouge, j'ai à faire.

Je le décale, le laissant sur le cul par ce que je venais de lui annoncer et remonte à notre unité.

Finalement, peut-être que si tout se passait bien, je pourrais toujours montrer ce pop-up à son père parce que ça, c'était important.

***

« Ce qui est bien avec le lundi, c'est que ça recommence mais, c'est ce renouveau qui est intéressant et à la fois énervant. On s'en plaint de ce foutu jour mais, finalement il vous montre un peu comme ça va se passer avec ses autres copains. Le lundi est plein de surprise et de mystères. Les autres jours le sont aussi mais, le lundi a encore plus ce pouvoir là. Vous prévoyez des choses sauf que le lundi en prévoit d'autres pour vous. Ouais, c'est le rôle du lundi : vous faire chier mais, vous obtenez la possibilité de pouvoir faire bouger les choses ... ». JFL. 

***

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