5.


***

Billie Fernandez

— Très bien Mlle Fernandez, on se voit donc demain, à 9 heures, pour un bref entretien mais je pense que c'est bon. Vous m'avez l'air sérieuse et motivée, commente Madame Johnson, directrice de l'école où travaille Fatima.

— Merci. À demain alors.

Je coupe la communication et soupire en me demandant comment elle a pu trouver que j'étais motivée, car j'avais pris une voix lente pour ne pas décrocher ce boulot.

Sincèrement, je préfère me la couler douce et continuer mon oeuvre tranquillement.

Je m'affale donc sur mon lit quelques minutes, avant de me relever en vitesse pour pouvoir sortir avec Amiri et Niya, car Mirah travaille et Edna fait de même.

J'avais longtemps hésité avant de sortir avec elles. Avec ce qu'Edna m'a raconté hier soir, je flippe un peu, mais je ne vais pas arrêter de vivre pour des psychopathes quand même. 

De plus, je dois absolument raconter la révélation d'Edna au sujet de Gideon. Il ne serait tarder qu'elle nous le présente en tant que petit-ami. Ce qui me réjouit grandement. Je jubile même d'avance de la voir toute amoureuse...

Bien que, Elliott me peine un peu. Je dois l'admettre. Eh bien oui, même s'ils vont se marier sous l'influence d'un voyeurisme, clairement visible de ceux qui nous ont sélectionnés, pour un programme encore non élucidé, ça peut déranger Elliott de voir qu'elle sera en couple avec Gideon.

Au fait, de quoi je me préoccupe ?

Tout ça arrive parce que Dieu m'est venu en aide dans mon projet et que toute cette histoire est d'une grande inspiration pour moi. Tout simplement.

Une fois prête et après avoir envoyé un message aux filles, je quitte l'appartement en prenant soin de bien le fermer à clé et je rejoins les filles au lieu de rendez-vous prévu.

Sans grande surprise, au restaurant pour déjeuner.

Vivement que j'ai une voiture parce que les transports, ce n'est pas fait pour les futurs stars interplanétaire comme ma personne.

C'est essoufflée que j'arrive auprès des filles qui sont déjà attablées. Je les salue d'une voix fatiguée et m'affale sur ma chaise comme une larve.

— Tu transpires Billie, commente Amiri sans lever sa tête de sa carte.

— La ferme ! J'ai couru ! Le métro était bondé, me justifié-je.

— Achète-toi une voiture, tu verras ta vie différemment, me dit Niya avec le sourire.

— Donne-moi l'argent. Puis, j'ai toute mes amies qui ont une voiture alors ...

— Et donc, elle pense qu'elle a des chauffeurs, termine Amiri.

Elle referme sa carte et daigne enfin me regarder cette sorcière. Évidemment, son maquillage ne coule pas, son visage est toujours aussi parfait et ses vêtements soigneusement choisies, Youtubeuse qu'elle est. Elle a trop d'assurance et d'insolence dans le regard, pour une japonaise qui devrait être discrète comme ses compatriotes. Ceci est une boutade. 

Et, elle le sait.

Je le jure que si mon livre ne marche pas (ce qui n'arrivera pas, parce que je sais que ça va marcher), je deviens Youtubeuse. Rien à battre.

— Enfin ! Tu regardes le chef d'oeuvre que je suis, dis-je en retour.

Elles rient ce qui provoque le mien et je me décide de prendre ma carte pour choisir ce que je vais manger. Sans hésiter, je prends des frites au cheddar fondu et son poulet au parmesan avec un grand verre de Coke.

Ainsi, le serveur tombe à pic pour venir prendre nos commandes et revient aussi vite avec nos boissons.

— J'aime ce restaurant parce qu'ils font du bon travail, rétorque Niya avant de siroter son verre d'eau pétillante.

Vous avez toujours ce genre d'amie qui fait genre de ne boire que de l'eau. Et ça, c'est Niya. Surtout au restaurant.

Amiri et moi, on s'en moque.

On confirme ses propos, concernant le restaurant à l'appellation pas très aguicheuse, mais excellent pour nos bourses et Amiri lance directement le sujet d'Edna.

— Allez ! Raconte-nous ! Arrête de nous faire poireauter !

— Bon, le diner a été une catastrophe mais en y repensant, c'était à mourir de rire et vous me croirez jamais lorsque je vous dirais qui s'est ramené comme une fleur...

Je leur raconte tout, sans oublier aucun détails et plusieurs fois, nous nous retrouvons hilares face à cette soirée qui a failli virer à la catastrophe. Edna nous aurait tué de rire sur son sort.

Elles regrettent de ne pas avoir pu être là et moi, je me retiens de le leur dire que j'ai un début de vidéo mais ... ça, je le garde pour moi.

Peut-être que je pourrais le réutiliser contre Edna lorsque j'aurais le besoin, de lui faire du chantage. Ça reste quand même mémorable tout ça.

— Je pense que nous devrions songer à faire un petit tour chez Aaron, dit Niya. Ce type est outrageusement culotté !

— Je suis pour ! appuie Amiri en hochant la tête vivement. Elle aurait du le boxer, il serait parti la queue entre les jambes ! s'exclame-t-elle.

Un couple non loin de nous, nous dévisagent et on conseille du regard, à Amiri, de ne pas rétorquer. Elle fait mine de respirer un bon coup, puis dessine un sourire hypocrite au couple après leur avoir envoyé un baiser volant.

Je vous avais dit qu'elle était insolente ! Elle hausse les épaules, mine de rien.

— Edna s'en charge les filles ! Si elle a besoin de nous, elle nous fera signe, rétorqué-je.

— M'Ouais ! Elle a intérêt, réplique Niya. Et cet Elliott, finalement, je suis impatiente de le rencontrer ! chantonne-t-elle en tapant dans ses mains comme une folle. Il l'a parfaitement défendu !

— Ouais mais n'oublions pas son passé, s'il vous plait. Il a été très mauvais envers elle et Gideon. Puis, il y a Gideon maintenant, ajoute Amiri. Et, je pense que Gideon est quand même mieux avec Edna. Même s'il est bi, du coup.

Évidemment, je leur avait raconté la prise de conscience sentimentale d'Edna. Elles se sont agitées comme des folles à la nouvelle.

— Ouais mais j'en suis sûre qu'il n'a jamais été réellement gay, fait Niya. Ça se voyait trop. Il l'a maté beaucoup trop. On l'avait tous remarqué !

Je roule des yeux tout comme Amiri. Bien sûr, je ne révèle pas le secret de Gideon qui n'a effectivement jamais été gay.

— Bah quoi ? C'est vrai ! se justifie-t-elle en passant une main dans ses magnifiques cheveux. Bref, Edna est surprenante ! Peut-être qu'au cours de cette journée, elle a réalisé qu'elle n'aime pas Gideon. On la connait trop. Imprévisible comme toi, Billie. C'est d'ailleurs pour ça que vous êtes le Ying et le Yang.

Je pince les lèvres en réfléchissant aux propos de Niya qui ne sont pas si faux que ça. Edna est si imprévisible qu'elle pourrait prendre un tournant à 360° sans réfléchir.

On continue donc nos allégations sur Edna et ses relations sentimentales (qui vont nous accaparer car c'est tellement un fait rarissime ... d'accord, pour nous aussi mais elle, encore plus).

Nous quittons donc le restaurant après qu'Amiri ait payé pour nous (elle a de l'argent, qu'elle paye !).

Nous trainons dans le centre commercial en faisant du shopping, puis Amiri nous embarque dans un magasin spécialisé dans la vente d'appareil photo. Avec pour raison : s'acquérir d'un nouveau trépied pour pouvoir faire ses vidéos.

D'ailleurs, l'une des vendeuses la reconnait et s'extasie devant elle en lui disant qu'elle regarde chacune de ses vidéos.

Donc, Niya et moi, préférons nous égarer dans les petits rayons, parce qu'elle a repéré un gars de dos et qu'elle est certaine que c'est l'homme de sa vie.

Alors, je la suis, puis elle me demande si elle est canon et je lui confirme que c'est le cas. Et, au moment où elle s'apprête à interroger le type, mon prénom résonne derrière nous.

Alors, je me retourne et je souris immédiatement en le voyant. Décidément, je le rencontre partout. Si, ce n'est pas un signe ...

— Douglas !

Il s'avance vers moi et me donne une accolade amicale qui me retourne complètement.

Respire Billie, respire !

Sauf qu'il sent si bon et que ses cheveux sont attachés en chignon et qu'il porte des lunettes qui le rendent ultra-sexy et que s'habiller tout en noir avec différentes matières lui va bien et que ...

Je suis ridicule ! On dirait une adolescente pré-pubère face à une bombe atomique.

Je me racle donc la gorge pour sortir de mes pensées et affiche un sourire.

Niya abandonne donc sa proie pour me dévisager du regard.

— Euh ... Douglas, je te présente Niya, l'une de nos soeurs de notre secte secrète. Niya, voici Douglas. Je l'ai rencontré au Blue Valentine's. La dernière fois.

Nina clignote des yeux et dévoile sa dentition en lui tendant sa main d'un air charmeur qui m'irrite déjà.

— Oh ! Je comprends donc que tu veuilles cacher l'existence de ce joli garçon. Enchantée de te rencontrer Douglas !

— De même Niya ! lui dit-il en lui serrant la main avec le sourire.

Il la relâche quelques secondes après et Amiri décide de faire acte de présence. Elle aussi a les yeux qui papillonnent, puis sourit comme une idiote face à lui.

Calme-toi Billie ! Elles veulent juste te faire chier ...

— Alors, vous êtes combien de votre secte ?! questionne-t-il.

En coeur, nous rions comme des poules ce qui le fait rire aussi.

Nous sommes pathétiques. Je me ressaisis donc rapidement et lui répond :

— C'était une blague, Douglas.

— Je sais, Billie. Je vous taquine.

— Trop chou ! commente Niya. Mais, il en manque deux. Edna et Mirah.

— Oh. Il reste Mirah alors. J'ai déjà rencontré Edna.

— Ah oui ? Billie nous a rien dit, souligne Amiri, malicieuse.

Je me sens rougir et la fusille du regard ce qui provoque son sourire de sorcière. Je croise le regard de Douglas et me confonds en excuse.

— Pas de problème, me rassure-t-il. Ça me rassure même.

Il arbore son sourire en coin qui le rend diablement sexy et se gratte la caboche d'un air innocent.

— Je vais y aller et vous laissez finir votre journée entre filles, dit-il.

— Tu peux te joindre à nous ! clame Niya.

— Tu fais de la photo ? demande Amiri.

— Euh ..., ricane-t-il. Je n'ai pas vraiment le temps, parce que je travaille en ce moment même et que je suis ici pour ça, explique-t-il en montrant le petit paquet qu'il tenait dans sa main. Et, pas vraiment mais comme je suis dessinateur, il est vrai que parfois, nous entrons en contact avec des fanatiques de photographie. C'est ton cas ?

— Non, répond-t-elle avec un large sourire. Je suis une jeune Youtubeuse ultra connue avec plus d'un million d'abonnés ...

— Bref, elle se la pète, la coupé-je avec un petit rire. Je t'accompagne à la caisse, Douglas ?

Celui-ci sourit avec espièglerie et accepte après, avoir joué de son charme auprès des filles qui gloussent comme des idiotes.

Parfois, je me demande comment et pourquoi elles font parties de mes amies les plus proches.

Douglas règle donc sa course pendant que je patiente tranquillement en jetant des rapides coups d'oeil derrière moi où les filles nous guettent.

Amiri joue la fille qui se fait embrasser tout en se tortillant et Niya imite l'acte ...

Que d'obscénités celles-là !

Je leur fais un doigt et les fusille du regard alors, je sursaute lorsque Douglas me dit que nous pouvions y aller.

Elles font mine de lui faire « coucou » et nous quittions le petit magasin.

L'air frais s'insinue sans gêne dans mon manteau que je ferme aussitôt sous le regard protecteur de l'homme de mes rêves.

— Tu vas attraper froid jeune fille, dit-il en entourant mon écharpe autour de mon cou. Je n'aimerais pas que tu tombes malade. 

Pourquoi pas ! Tu pourrais venir me soigner et être à mon chevet. 

Il se fige, je me fige et je me rends compte que j'ai dit cela à haute voix.

Seigneur !

Je rougis aussitôt et éclate de rire en feignant l'indifférence totale.

— Je plaisante Douglas glas ! ricané-je en lui foutant mon poing dans le ventre.

Sainte-Marie ! Il a l'air d'être bien bâti sous ce pull le petit ange ...

Je souris faussement et lui, il a juste envie d'éclater de rire.

— Tu es tellement ... naturelle, Billie ! Tu ne joues pas dans ta personnalité. Tu te montres tel que tu es et ça te rend encore plus belle.

Je vire pivoine de plus belle, mais toujours dans une situation où je me sens défaillir, j'use d'humour pour paraitre nonchalante, alors que je n'ai qu'une envie, que ça passe comme dans les films à l'eau de rose qu'Edna et moi regardons, ayant l'espoir qu'une de ces scènes se reproduisent dans notre vie.

— Oh arrête ton baratin ! Sinon, épouse-moi, ça nous évitera toute cette partie « drague et sensualité » que deux personnes qui s'attirent, s'amusent à faire. 

Il explose de rire et je suis juste envoutée par sa façon de rire et de balancer sa tête en arrière tandis que quelqu'une de ses mèches virevoltent autour de sa tête.

Je l'aime !

Bon, ma grande Billie, ressaisis-toi voyons !

— À force de me dire que tu veuilles m'épouser, je vais commencer à croire que tu le désires vraiment Billie.

— Je suis juste une grande blagueuse Douglas ! Ne prends pas tes rêves pour des réalités. Avant toi, j'ai beaucoup de prétendants alors ta candidature, il faudrait que je l'étudie minutieusement.

À cet instant là, j'entends dans ma boîte crânienne, le ricanement de sorcière qu'Edna émet, lorsque je raconte des conneries et surtout, je l'entends me dire « Quels prétendants Billie ?!Niveau mec, on est à sec ! C'est la pénurie ! On a des chances de finir vieilles filles avec des chats pour compagnie. Soyons honnêtes et commençons sérieusement d'envisager, d'installer un stand où nous expliciterons clairement notre envie de nous marier !!!! ».

Bah quoi ? C'est vrai qu'avec les filles, on a songé à cette idée. Elle n'est pas si terrible que ça en soit !

Nous cinq, on veut surtout se marier pour la robe et pour danser comme des folles jusqu'au bout de la nuit. Bien sûr, se goinfrer de mets de traiteurs fait partie du plan.

Le mari, c'est un détail.

Mais très franchement, nous en sommes pas encore là et puis, Douglas, je l'épouserai un jour.

Je sais qu'il m'aime ... Ceci fait très psychopathe mais écoutez ! Je suis comme un tas de jeune femmes sur cette planète terre ! On s'emballe trop dès qu'un mignon garçon nous fait les yeux doux. C'est plus fort que nous !

— Eh bien, je vais essayer d'être à la hauteur de tes exigences pour peut-être évincer tes prétendants, qu'en dis-tu ?

Ses yeux me fixent avec malice et je me sens presque déshabillée du regard. Je tente de rester de marbre face à son mordillement de lèvres.

Il est fou.

Je me meurs. 

— Essaye donc brave chevalier ! rétorqué-je. Allez, va travailler !

Au lieu de me faire ce type de regard et de te mordre la lèvre, péché du regard ...

— Bien gente de dame ! dit-il en s'inclinant légèrement.

Que d'espoir ! S'il s'abaissait un peu plus et qu'il mettait son genou sur le goudron souillé de je ne sais quoi, avec une bague, il pourrait ...

JE PLAISANTE !

— Allez, j'y vais vraiment Billie. Ça me plairait bien qu'on se voit demain pour aller au cinéma. Ou dimanche.

— Je vais y réfléchir.

Je suis une grosse hypocrite avec moi-même. J'ai envie de me frapper moi-même.

Pourquoi ne pas avoir dit « oui, je le veux ! » ?

Il opine de la tête avant de prendre son courage à quitter sa future épouse, tout en marchant à reculons pour savourer encore quelques instants ma vue, avant de complètement se retourner.

Je retourne donc dans le magasin et me laisse harceler par les filles qui veulent tout savoir.

Sans gêne, je les menace quant à leur intention envers Douglas.

Niya roule des yeux et Amiri pouffe tout en réglant à la caisse son stupide matériel.

— C'est chasse gardée les filles ! appuyé-je. Je ne plaisante pas.

— Un mec comme ça a forcément une amante cachée quelque part et/ou un secret ! lance Niya avec conviction.

— Naaan ! Il est célibataire puis arrête de faire ta jalouse ! craché-je, irritée.

— Bon, j'admets être jalouse ! Mais, vous iriez parfaitement ensemble ma Billie d'amour ! Tu crois que je vais présenter un mec au long cheveux à ma mère ?! J'attends mon petit indien de Bollywood, moi !

— Tu n'as pas de souci à te faire Billie ! me sourit ma japonaise favorite. Toi même tu sais que lorsqu'une d'entre nous, a de possibles chances d'être casée, on va la faire chier avec. C'est ça la vraie amitié !

Sur ces bonnes paroles, pleines de coeur fondant d'amour, nous décidons de crécher chez Edna et moi, car elles veulent absolument savoir si elle a révélé ses potentiels sentiments à Gideon.

*

Edna Fall

Ma journée vient de se finir.

La visite de mon père m'a fait un bien fou.

Sauf que, je me suis très vite replongée dans cette scène de crime atroce.

Ces visions sont épuisantes et j'ai peur de finir par en faire des cauchemars.

Tammy a été interrogé par l'équipe. Ils n'ont pas voulu que je le fasse en raison de notre amitié.

Puis, ils craignaient que ça altère ses propos, ce que je peux comprendre, alors je n'ai pas bronché.

J'ai juste patienté, totalement plongée dans mes pensées et re-visualisant mentalement la scène de crime.

Quelque chose m'échappait.

J'ai expliqué discrètement ma vision aux garçons et la seule piste que nous avions, c'était la montre. Et rien d'autre.

Alors, nous avions portés nos recherches sur les propriétaires de ce type de montre.

Le néant.

J'avais donc décidé de me rendre demain, au magasin Jaeger Lecoultre. Il y en avait un sur Madison Avenue.

Et les garçons n'étaient pas au courant.

Puis, cette phrase « Ceci n'est que le début. Ceci n'est qu'un sacrifice. Arrêtez le programme » m'a fait comprendre une chose : Ces types me connaissaient ou du moins, nous connaissaient et ils savaient pour le programme.

Ce programme est-il si dangereux pour que des hommes commettent de tels crimes ?

Je soupire en rangeant mon bureau. Je n'ai rien pu obtenir de la phrase en latin. Ça ne voulait strictement rien dire et j'ai compris rapidement que je n'avais pas assez bien entendu.

Presque abattue par cette histoire sordide, je me décide de me ressaisir pour aller voir Tammy.

Malheureusement, elle ne peut venir avec moi étant un témoin. J'ai donc dû marchander avec le Chef pour qu'elle puisse être mise dans un lieu sûr, le temps d'éclaircir cette histoire. Il a fini par accepter et je m'apprête à lui annoncer.

Je la trouve assise avec une tasse de café à la main.

Elle a pu se changer grâce à un pull que j'avais dans mon vestiaire et le choc s'est dissipé. 

Elle remarque ma présence et me sourit faiblement.

— Hé !

Je m'abaisse comme si je m'apprêtai à parler à un enfant.

— Je vais y aller Tammy. J'ai fini ma journée.

Ses yeux se mettent à briller et j'ai mon coeur qui se fend.

— Je ne peux pas venir avec toi ?

— Malheureusement non. Mais, tu vas être placée en lieu sûr, le temps de l'enquête.

— Vous avez trouvé quelques choses ?

J'inspire profondément avant de répondre négativement. Dépitée, elle acquiesce mollement.

— Mais ... je devais t'aider à trouver ce dealer et ... les filles ont besoin de moi. Elles doivent être sous le choc aussi.

— Ne t'en fais pas, Tammy. Une patrouille de nuit va surveiller les alentours pour surveiller les filles et ce dealer, je m'en charge avec le gars. J'ai un plan.

J'arbore un léger sourire qu'elle me renvoie.

— Bien. Si tu as besoin d'aide, n'hésite pas.

Je me redresse et la surplombe de ma taille. Elle décide de se lever pour me prendre dans ses bras et pour me remercier avec beaucoup d'émotions.

— Ça me touche que tu tiennes à moi Ed. Vraiment. Merci infiniment. Même si je suis une pu...

— Hé ! Arrête ça. 

Je m'écarte d'elle vivement, ce qui la coupe dans sa phrase et elle rit doucement.

— J'ai horreur que tu dises ça. Je suis ton amie, peu importe ce que tu fais. Bon, sauf si tu es une criminelle, mais ce n'est pas le cas alors tais-toi. Tu vas gentiment te reposer et prendre un bon bain lorsque tu seras arriver à l'hôtel que le Chef t'a réservé.

Elle fait une moue et sourit en coin.

— Tu es un vrai tyran avec ton patron. On se demande qui commande ici.

Je lui souris et lui souhaite la plus agréable des nuits avant de la quitter pour retrouver mon chez moi.

J'espère que Billie a passé une meilleure journée. En fait, j'en suis presque sûre puisque cette sorcière ne travaille pas et rêve de gloire en rédigeant une histoire ridicule sur nous.

Je retourne dans l'unité, récupère mes affaires, salue les collègues en constatant qu'Elliott et Gideon ne sont pas là.

Ça ne me perturbe pas plus que ça et je quitte l'unité avec un appel sur mon cellulaire.

Je décroche en râlant et en voyant le numéro s'afficher.

— Qu'est-ce qu'il y a Madame Levy ?

— Oh Edna ! Je ne veux pas paraitre lourde. Vraiment. Je devrais te laisser ...

Elle prend sa petit voix chevrotante qui forcément, te fait céder.

— Ça va. Dites-moi. 

J'arrive en bas et embrasse sur la joue de ma Cassandra et Marilyn que je croise en partant.

— Eh bien, j'ai préparé tous ces crumbles pour tes amies et toi, comme convenu. Tu te souviens ? J'ai tenté de t'en parle ce matin.

— Oh !

Je pose une main sur mon front tout en me dirigeant vers ma voiture.

En effet, en ce vendredi, je devais me rendre avec mon groupe de choc chez elle pour ces crumbles, car je devais obtenir des informations sur son unique fils qui l'inquiétait.

C'était notre deal.

— Ça m'est complètement sorti de la tête Madame Levy ! Désolée !

— Pitié ! Appelle-moi Pattie et il n'est pas trop tard ! réplique-t-elle avec enthousiasme. Il va être 19 heures et le temps que vous arrivez toutes, je peux vous concocter un petit plat. Ça me ferait très plaisir.

Je reste devant ma voiture en train de réfléchir, puis je ricane.

— Vous l'avez déjà fait ce plat hein ?!

— C'est un gratin de macaroni aux fromages et à l'émincé de poulet, énonce-t-elle avec vivacité.

Ça me donne l'eau à la bouche juste à l'entente du plat.

— Ma mère en fait d'excellent, dis-je.

— Je la mets au défi ! s'exclame-t-elle avec joie. Allez, ramenez-nous ! Daniel n'est pas là ce soir, car il fait une partie de poker avec son club de vieux et mon fils ne vit plus ici alors ...

— Je vais faire de mon mieux Pattie. Merci de l'invitation.

— Avec plaisir ma chérie ! Tu peux dire à ta mère et ta soeur de ...

— Patricia ! m'exclamé-je pour l'arrêter.

— OK. OK ! J'arrête ! Mais, on aurait pu parler du mariage et ...

— À plus tard Pattie !

Elle rigole et je décide de raccrocher.

Cette femme est définitivement folle.

Avant d'entrer dans ma voiture, j'envoie un message sur le groupe de discussion avec les filles que nous partageons.

Je ne fais pas de roman et leur annonce qu'on mange gratuit ce soir. La réponse ne se fait pas attendre, car Billie m'annonce que les filles sont déjà à notre appartement.

C'est quoi cette réunion imprévue de G5 ?

Je soupire et m'apprête enfin à rentrer dans ma voiture, lorsque Gideon me hèle.

Je me stoppe donc et me retourne vers lui.

Notre baiser me revient et mon coeur s'emballe en croisant son regard.

Il arrive à ma hauteur et je le détaille du regard. Il en fait de même et finit par délier sa langue.

— Tu allais partir sans m'attendre, dit-il faussement offusqué.

— Je ne t'ai pas vu en haut alors je suis partie.

— Je suis parti récupérer ma voiture. Et elle marche !

— Comme si tu devais en douter.

— Oui mais les femmes sont des belles parleuses aussi, minaude-t-il.

Je lève les yeux et émets un léger rire qui provoque son si beau sourire.

— La journée n'a pas été facile, fait-il après plusieurs secondes.

— Entièrement d'accord avec toi. Mais, c'est la vie que nous avons choisis alors il faut prendre sur soi.

Il acquiesce et regarde autour comme s'il allait y trouver une réponse avant de reporter son attention vers moi.

— Demain. On peut sortir ... diner ? me propose-t-il.

La nuit ne masque pas la teinte rosée qu'il arbore sur ses joues. Je trouve cela tellement craquant, que je me dis que je suis définitivement foutue à cause des filles et de leurs trucs à l'eau de rose.

— Pourquoi pas.

Il hausse les sourcils, espiègle.

— Ça veut dire oui ? sourit-il.

Je m'approche de lui et me surprends moi-même de mon action, lorsque je dépose mes lèvres près des siennes. Cela me donne envie de goûter à ses lèvres mais je n'en fais pas plus.

— À demain Deon ! Repose-toi bien.

Je rentre dans ma voiture et il est tellement surpris qu'il ne bouge pas.

C'est lorsque je démarre qu'il réalise enfin et me fait signe à travers le rétroviseur.

Par ailleurs, je constate qu'Elliott a encore assisté à cette scène.

Décidément, ce gars est toujours là, au mauvais moment.

*

Billie Fernandez

À la suite du message d'Edna, on est toutes excitées à l'idée de goûter la cuisine de Madame Levy et son crumble.

On raconte à Mirah, le diner désastreux d'hier soir et le retour non désiré d'Aaron. Elle réagit comme nous : elle veut qu'on attaque ce gros connard.

Bien sûr, la colère qui l'habite n'a pas durée avec l'aspect Gideon et ma description d'Elliott. Elle était aussi enthousiaste que nous pour la future sentimentale d'Edna, mais reste méfiante vis-à-vis d'Elliott et ses attentions. Puis, cette histoire de mariage pour le boulot ne la rassure pas.

— Imaginez qu'Elliott, c'est un gros psychopathe ! dit-elle.

— Edna saura se défendre comme nous l'a dit cette après-midi, Billie, rétorque Niya. Puis, on se transformera en sexy ninja pour le corriger comme il faut !

— C'est sûr qu'on doit rester méfiante, dit Amiri, mais tant qu'on ne connait pas, on ne juge pas.

On acquiesce toutes à ses propos et ces vipères d'Amiri et Niya, dérivent sur Douglas. Elles jouent les filles « in love » pour que je réagisse, mais je reste de marbre. Elles veulent juste que je joue ma jalouse mais elles n'obtiendront rien.

Cela fait beaucoup rire Mirah qui les écoute.

— Bon ça va les filles ! Tu as l'air d'avoir trouvé un bon gars, Billie. J'en suis heureuse !

— Ce n'est pas encore son gars, souligne Niya avec dédain, puis, elle est cramée à 10000 km qu'elle veut qu'il lui saute dessus. Agis ma grande avant qu'il ne te file entre les doigts.

— Ta vulgarité Niya, me fera défaillir un jour ! commenté-je avec sarcasme. Et je gère les filles ! Quand je vous le présenterai, je dirais « Salut les filles, je vous re-présente Douglas, mon cher et tendre petit-ami ».

On éclate de rire tandis que la porte sonne.

Peut-être que c'est Edna mais elle n'oublie jamais ses clés.

Je vais ouvrir quand même sous leurs commentaires à mon effigie et je regrette de ne pas avoir regardé dans le judas avant d'ouvrir.

Je me liquéfie sur place en voyant la personne qui se tient devant ma porte, avec un sourire qui a de tout ce qu'il y a de plus innocent.

— Bonsoir Billie.

***

« Lorsque tu veux repousser une chose qui ne te parait pas évidente, mais qu'elle l'est finalement, sache que ça revient toujours. Et en pleine face. Sans que tu t'y attendes. En mode « Surprise! ». Et tu n'aimes pas cette surprise. Normal, elle n'était pas voulue ! Tu l'as même repoussé, mais sache aussi qu'il faut parfois, prendre à bras le corps cette chose, et savoir l'affronter une bonne fois pour toute, pour montrer ta capacité à faire face à tes problèmes. Ne laisse pas cette chose prendre le dessus. PRENDS LE DESSUS ! ». JFL

***

Les deux personnes sont encore une fois dans un bar soigneusement choisie pour sa présence abondante.

En effet, il ne faut pas qu'on sache qu'elles sont ensembles et qu'elles se connaissent même.

Leur plan risquerait de tomber à l'eau et si proche du but, cela ne pourrait arriver.

Les deux personnes sont assises à une distance tout aussi réfléchie.

Un tabouret vide les sépare. Et chacun boit tranquille son verre. L'une, un verre de Gin Tonic et l'autre, une simple boisson.

— Il faut que Billie et Edna changent au plus vite, dit la personne avec simplicité. On a plus de temps à perdre. Le processus est trop long et Billie parvient à bloquer ses visions.

— Je sais.

La personne ne soupire pas. Elle a pleinement conscience des événements.

— Je pense qu'on devrait faire accélérer la chose.

Les personnes se croisent du regard et hochent en même temps.

— Si ces hommes parviennent à tuer encore des jeunes femmes, ils ne tarderont pas à s'attaquer à Billie et Edna. Ils sont au courant. Le sommet est au courant.

— Je sais, répond l'autre. Ils savent pour le programme et son re-lancement. Et, ils savent qu'Edna et Billie en font parti. D'ailleurs, je ne sais comment, mais on doit agir, sans pour autant nous révéler pour le moment.

— Les autres sont d'accord ?

— Oui.

La personne acquiesce et passe une main sur son visage.

— J'ai envoyé le programme pour qu'elles puissent en prendre connaissance. Comme prévu.

— C'est bien. Edna a cette âme de super-héros et Billie de rêveuse. Je crois en elles.

La personne reste dubitative.

— Oui mais parfois, trop rêver nous coupe de la réalité. Et je te garantis que Billie, ça en devient exagéré. J'espère qu'elles sont les bonnes candidates, sinon, on procédera à l'élimination. Et, tu le sais.

Cette personne finit son verre sous le regard courroucé de l'autre puis s'en va.

L'autre reste assise un moment en remettant en question leur plan.

Elles avaient tellement travaillés dessus que ça ne pouvait pas échouer. La personne ne le permettrait pas.

Son objectif est de sauver le monde de ce qu'il se prépare, et Billie et Edna sont la « clé ».

La personne en était persuadée. Et même son binôme qui perdait espoir, ne pourrait pas détruire sa conviction.

Billie et Edna seront parfaites pour le rôle qui leur était destiné. 

***

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