4.

En ce mardi soir, certains pleurent leur désarroi et d'autres expriment leur joie. 

Personne n'est jamais heureux au même moment.

En revanche, d'autres savent que leur grand moment ne va pas tarder. 

Ces personnes savent que leur patience et leur effort vont payer. Elles savent qu'elles verront bientôt le revers de leur travail. Elles le sentent, elles le savent.

Dans ce monde, tout est une question de temps.

Ces personnes se rejoignent à la vue de tous pour se retrouver et partager ce petit avant-goût.

Personne ne se doute que ces personnes parmi eux, vont changer la donne.

Personne ne sait ce qu'il est en train de se préparer parce que la vie n'a pas de bouton « pause ».

Personne ne sait qu'une seconde peut changer le cours du temps.

Personne ne sait que ces gens tentent de changer le cours du temps.

Ces personnes s'installent, l'une en face de l'autre avec un petit sourire en coin. Elles savent que leur première étape a été un succès et que tout est une question de temps.

Ces personnes se font servir un verre et dès que la serveuse se tire, elles trinquent à leur prochaine victoire.

Elles reposent leur verre en même temps et l'une de ces personnes engage la conversation.

— Ça a marché, dit cette personne, comme si le dire, rendait plus réaliste la situation. Ça a marché ! 

L'autre acquiesce extrêmement satisfait.

— D'ici cette fin de semaine, le temps que l'implant ait complètement fait son effet sur leur cerveau, les missions seront prêtes. Elles seront prêtes. 

L'autre acquiesce parfaitement en accord avant de demander.

— Penses-tu qu'elles sont réellement favorables à ce programme ?

— On a amélioré ce programme, insiste la personne. Nous l'avons rendu meilleur ! Ce programme doit marcher. Ne vois-tu pas que le monde est en train de s'écrouler avec ces guerres, ces morts, cette haine, la destruction de notre éco-système, cette tristesse et cette morosité qui entoure notre atmosphère ? Ce programme peut sauver l'humanité ! Les femmes peuvent redresser la situation mondiale pour que tout devienne meilleure. Elles ont la capacité de rendre les choses négatives en choses positives. Tu verras ! On sera gracieusement récompensé.

La personne s'abaisse vers l'autre et vérifie que personne ne les écoute. Puis cette personne ajoute :

— On a peut-être volé ce programme confidentiel à la CIA, nous avons pu nous financer grâce à l'argent que nous avons pris chez les personnes les plus riches du pays sans qu'elles ne se rendent compte mais ... ça devait arriver. Ce programme doit marcher et va marcher. C'est le futur de ce monde qui est en jeu !

L'autre analyse ses paroles et reprend une gorgée de sa liqueur.

— J'espère que Billie pourra calmer Edna. Et j'espère qu'Edna, sera guider une novice comme son amie dans ce genre d'aventure, souhaite l'autre personne.

— C'est la raison de notre choix. Elles sont différentes, mais cet atout qu'elles ont chacune, montrera qu'elles peuvent s'aider dans ce qu'il va leur arriver. Tout est une question de temps.

Oui, c'est ça. Tout est une question de temps.

*

Billie Fernandez

Après le coup de fil avec ma mère, j'ai hésité avant d'aller à l'église.

C'était un peu loin. Et en plus, je devais prendre les transports en commun et même si dehors, le climat était doux pour un mois de novembre, j'avais la flemme.

Cependant, je voulais tellement raconter ce qui m'était arrivée au père de l'église, que j'ai enfilé mon manteau, mes bottes et que je suis partie.

Tout le trajet, je souriais comme une idiote.

Les gens devaient me prendre pour une demeurée, sauf que je m'en moquais.

J'avais la musique de Missy Elliott « Lose control » qui se déversait dans mes oreilles et je lâchais même quelques petits pas de danse.

Lorsque j'arrive devant l'église, je retire mes écouteurs, y pénètre après avoir fait le signe de croix.

Il y a quelques personnes qui sont présentes et qui font des prières.

Moi, je me dirige vers le confessionnal de l'église, toute impatiente de retrouver cet homme gentil. Malheureusement, je vois que quelqu'un s'y trouve.

Argff ! Fais chier !

Je soupire et regarde autour de moi tout en me demandant si je dois patienter ou non.

Problème : je ne suis aucunement patiente ! Je n'aime pas attendre. Alors là, pas du tout.

Je me ronge l'ongle et décide d'agir à la Billie.

Je toque à la porte par politesse pour avertir de mon interruption, en m'excusant mentalement auprès de Dieu quand même, et je l'ouvre.

Une femme âgée me dévisage, outrée et je lui souris grandement.

Allez ! Elle, elle est là pour parler, car à cet âge, on a besoin de faire la discussion, c'est tout.

Alors, je me sens moins coupable et je dis :

— Bonjour ma petite dame. Désolée de cette interruption bien plus qu'impolie, mais je dois absolument parler à mon père. C'est très urgent. Il en va de ma survie. Je vais peut-être bientôt mourir alors ...

Pardon Dieu !

Je fouille ma poche et y trouve un billet de dix dollars que je mets dans sa main avant de l'aider à se lever, car elle a l'air totalement abasourdie parce ce qu'il se passe.

— Merci madame. Dieu vous le rendra !

— Mais, je ...

Je lui fais un petit signe de main et m'engouffre dans le confessionnal où le prête me regarde fixement.

Bien sûr, je ne peux pas vraiment distinguée son visage et ça ne me gêne pas.

— Encore vous ! s'exclame-t-il.

— Oui, c'est encore moi mon père. Comment allez-vous ?

— Je ...

— Bref ! Je dois ab-so-lu-ment vous parler ! Dieu a entendu vos prières ! Nos prières ! Il m'est arrivé quelque chose de presque paranormal hier soir avec ma meilleure amie.

Il se racle la gorge, visiblement pour reprendre ses esprits.

Ah là là ! Pourquoi les gens sont choqués par la spontanéité de certains individus hein ?

— Je vous écoute, mon enfant.

— Et bien, avec ma copine, on regardait notre série à la télé, grâce à mon ordinateur ... Attendez ! Vous connaissez la télé et l'ordinateur ?

Nos regards se croisent et il tourne sa tête.

— Bien sûr que oui ! s'offusque-t-il. Qu'est-ce que vous croyez tout de même ?!

— Ah mais ne vous vexez pas ! Je demandais mon père ! C'est tout ! Bon, bah tant mieux ! Donc, on regardait la télé tranquillement lorsqu'un « pop-up » est apparu. C'est les fenêtres qui s'ouvrent pour rien avec des pubs. Je vous épargne les détails mais, j'ai eu extrêmement peur vous savez. Des images et des codes sont apparus sur les écrans et tout. Bref, on tombe dans le sommeil à la suite de ce visionnage non désiré. Et vous savez quoi ?

— Non, mais vous allez me le dire, soupire-t-il.

— Je me suis réveillée en pleine forme et avec énormément d'inspiration en tête. J'ai écrit une centaine de ligne, mais c'est déjà très prometteur mon père ! déclaré-je. J'attends juste encore plus ... d'action. Ma meilleure amie, ça l'inquiète. Mais moi, je suis certaine que ce n'est rien de grave. Ça m'était adressée. Donc, il faut que vous priez encore pour moi. Ça serait fan-tas-tique !

Il secoue la tête et rit nerveusement.

Bah, qu'est-ce qui lui prend ?

— Qu'est-ce qu'il se passe ?

— Rien. Mais je pense que vous rêvez un petit peu trop. Priez davantage pour retrouver la paix intérieure. Vous êtes perturbée ...

— Perturbée ?! m'exclamai-je, interloquée. Vous pensez que je suis folle mon père ?! Vous n'avez pas le droit de me juger ! Je me confesse à vous là ! Et puis d'abord, je suis en paix avec moi-même depuis longtemps. Je fais du yoga ! Vous devriez en faire ! Vous êtes fermé d'esprit. 

Pardon Dieu, j'ai encore menti. Le sport et moi, ça fait 15, alors le yoga où tu as des postions mystiques pour évacuer tes chakras ou je ne sais quoi, non merci.

Il soupire à nouveau.

— Excusez-moi mon enfant. Je ne voulais pas le faire, dit-il en se sentant coupable. Bon. Et bien, c'est tant mieux. Je prierai davantage pour vous afin que vous puissiez rédiger ce Best seller.

— Ahhhhh merci. J'aime mieux ça mon père ! m'exclamé-je, heureuse. Vous serez le premier à qui je signerai un autographe. Et ... pour pimenter mon histoire, il faudrait une histoire d'amour. Dieu aime l'amour non ?

— Oui. Ça serait le plus grand des remèdes dans ce monde. Si tout le monde s'aimait, il y aurait moins de problèmes. Puis, qui ne rêve pas d'histoires d'amours ? Du moins, je parle de tout ce qui ne sont pas dans l'ordre religieux.

— Je sais, je ne suis pas conne, ris-je. Sinon, entièrement d'accord avec vous. Bon, prions que je sois inspirée par une idylle amoureuse qui déchire tout. Roméo et Juliet pourront aller se rhabiller. Et en plus, moi, ma fin sera magique et non tragique !

J'inspire avant d'expirer satisfaite et apaisée.

— Bon, je pense vous avoir tout dit mon père. Je vais y aller.

— Oui, fais donc ça mon enfant ! Allez écrire.

— Oui, comptez sur moi. On se revoit bientôt. Allez, salut.

Je quitte le confessionnal encore plus heureuse que lorsque j'y étais entrée.

Ouais, perdre ce job, avoir ce problème informatique, ne pouvait pas tomber mieux.

*

Lorsqu'Edna rentre le soir, je me trouve en conversation FaceTime avec Niyati, notre très bonne amie d'origine indienne. Son prénom signifie « bon comportement » si vous voulez savoir en hindou.

Malheureusement, son prénom n'allait pas avec sa personnalité, car elle est la fille la plus nerveuse que je connaisse. Un rien l'irrite et elle ne se garde pas de répondre avec virulence aux personnes qui l'a font chier.

Alors ça, hors de question pour Niya (on l'appelle comme ça) !

Elle aussi, on l'a connu du lycée avec une autre amie à nous, Mirah.

À nous cinq, on représentait assez bien le monde avec nos différentes origines. 

Bon, moi, je pouvais passer pour une fille du nord en hiver, lorsque je n'étais pas bronzée et Edna représentait l'Afrique quant à Mirah les pays arabes et l'Asie parce que oui, l'Iran c'est en Asie pour ceux qui ne le savaient pas, Amiri est japonaise donc ça fait tilt dans vos têtes tout comme Niya.

Ouais, on était une belle brochette de copines et lorsqu'on allait manger l'une chez les autres, c'était juste le paradis sur Terre.

Différentes religions, différentes cultures, mais le même amour pour la nourriture, les bons moments, les discussions entre filles, le shopping et le rêve d'un monde où tout le monde pourrait s'entendre aussi bien que nous.

Bref, je lève ma tête à l'entrée d'Edna qui a un énorme bouquet de roses rouges à la main, un Tupperware et mon ordi chéri.

— Tu ne m'écoutes plus Billie ! me réprimande Niya. Il faut qu'on sorte vendredi soir. Ça fait longtemps !

Sauf que je l'écoute à moitié car Edna a l'air au bout de sa vie. Elle a l'air profondément plongé dans ses pensées et comme je la connais très bien, je sais que quelque chose lui est arrivée.

— Attends Niya, Edna vient de rentrer.

Elle grogne car elle n'aime pas non plus lorsqu'on discute avec elle, être accaparée par autre chose.

— Dis à cette impolie d'Edna qu'elle pourrait répondre à mes messages.

Je lui fais un geste de la main et lance :

— Bah Edna, tu en fait une drôle de tête ! Qu'est-ce qu'il y a ?

Elle pose les affaires sur notre table basse et regarde mon téléphone où elle voit Niya.

— Ah ! Salut Niya. Je vais prendre une douche Billie. Il y a à manger ?

— Euh ...

Je suis sur le point de lui répondre qu'il y avait des restes, mais elle a déjà disparu dans le couloir pour gagner la salle de bain.

Niya fronce les sourcils tout comme moi.

— Bah, qu'est-ce qu'elle a ?

— Peut-être qu'elle a travaillé sur une affaire difficile, répondé-je.

— Oh. Fort probable. Voilà pourquoi je ne peux pas être flic. J'aurais frappé chaque bandit. Je suis contente d'être ophtalmologue. Bon, va la voir. Je te laisse. On se voit toutes les cinq vendredi soir et je ne plaisante même pas.

— Oui Niya. À plus.

Je coupe la communication et je me lève en direction de la salle de bain.

Je frappe à la porte et j'entends l'eau couler.

Bien sûr, ce n'est pas le genre d'Edna de répondre lorsqu'elle prend sa douche.

Je me décide d'attendre bien sagement dans sa chambre avec le magnifique bouquet, mon ordinateur qui a l'air d'être en parfaite état. 

C'était clairement pour moi ce qui est arrivé.

C'était la réponse de Dieu pour la vie que je voulais.

Le Tupperware de gâteaux est aussi de la partie et me fait de l'œil depuis plusieurs minutes. Je lui dis d'arrêter sa drague, mais trop gourmande j'en prends un discrètement.

Oh mon Dieu ! Il est trop bon !

Bon, si je reprends un autre, elle ne le verra pas hein ?

Allez, un petit deuxième parce qu'elle me fait attendre. Mh, succulent.

Elle pénètre dans sa chambre, quinze minutes plus tard, et je me redresse aussitôt sur son lit car j'y étais allongée.

Elle se dirige vers sa commode sans faire attention à ma personne, pour prendre un pyjama.

Oui, elle est définitivement bizarre.

— Edna, ici la terre !

Elle se tourne vers moi et soupire.

— J'espère que tu n'as pas mangé sur mon lit !

Ah, elle n'a pas complètement disparu.

— Non.

Elle me toise perplexe et enfile son tee-shirt.

Nous vous imaginez pas des choses bien sûr. Ça fait longtemps qu'on se connait donc s'habiller l'une devant l'autre, ça ne nous gêne pas, mais nous ne sommes pas nudistes non plus.

Elle finit par me rejoindre sur son lit et ouvre la boite.

Quoi ? Elle me reproche une chose et elle va le faire après ?!

En fait, tout ça est trop mystique à mon goût.

Elle pioche le même gâteau que moi et l'engloutit dans sa bouche.

— Je peux goûter ? demandé-je d'une petite voix.

Je ricane mentalement parce que j'ai déjà bien entamé ça. Elle me tend la boite et je reprends mon troisième petit gâteau.

Nan mais c'est excellent ! Qui a fait ça ?

Nos mamans ont de la concurrence niveau pâtisserie là !

On entend que les bruits de notre mastication - on ne mâche pas comme des vaches non plus - et je lui jette un coup d'œil. Elle a complètement le regard dans le vide.

Je décide de la lancer sur la narration de sa journée.

— Edna, je t'écoute. Pourquoi ce bouquet ? Est-ce un prétendant ?

Elle lève un sourcil vers moi et expire lourdement avant de me répondre.

— C'est de la part de Chris, Elliott et Jackson.

Mon cerveau ne capte qu'Elliott. Elliott le vilain beau garçon ?!

— Qu'est-ce que tu as dit ?

Elle éclate de rire sans raison en secouant la tête et reprend un autre gâteau.

— Ils sont bons ces gâteaux ! Tu ne trouves pas ?

Là, elle me fait peur. Il lui a fait quoi ce petit con ? Je vais mettre mes chaussures de suite et je vais lui montrer comment Billie n'est pas cool lorsqu'elle s'énerve. Il va finir à l'hôpital !

— Edna, m'impatienté-je.

— Billie. Tu ne vas pas y croire, mais ça fait un an et demi que je sors avec un type que je déteste et qui me déteste, dit-elle sans préambule.

Je grimace ne comprenant pas vraiment ce qu'elle veut dire.

— Ah bon ? C'est qui ? Et pourquoi tu ne m'as rien dit ? Je pensais qu'on était des meilleures amies ! T'es sérieuse là !?

— Elliott.

— Quoi Elliott ?

— Je suis sa copine.

— Q..Quoi ?

Ma bouche n'était plus contrôlable et ni le clignotement de mes yeux tellement je ne m'attendais pas à celle-là.

Elle rigole davantage et s'empiffre comme une folle.

Je veux en faire de même parce que c'est trop pour moi toutes ces informations. Alors je tends ma main, mais elle me frappe.

— Hé ! 

— Ça vient de la mère d'Elliott, m'explique-t-elle.

— Je ne comprends rien, Edna ! Parle correctement. Je suis nulle en charade et tout.

— Alors ouvre-bien tes oreilles parce que je vais te raconter une petite histoire et à la fin, tu me diras si mes plans pour l'achever sont bons. OK ?

— Je veux un autre gâteau d'abord. Et oui, ils sont excellents. 

Je prends une petite moue triste et elle se décide de partager les pâtisseries et sa journée.

*

— Alors, proposition 1 : demain, je le tue. Proposition 2 : demain, je le tue. Proposition 3 : demain, je le tue ? achève-t-elle son récit.

On a fini les pâtisseries et je suis juste sur le cul.

Sans mentir !

Elliott est un « potentielle » faux raciste, un peu gentil, qui s'est inventé une vie amoureuse depuis un an et demi avec Edna, il s'est excusé aujourd'hui, il a acheté ce bouquet de fleurs, il a une mère dingue qui pense vraiment qu'Edna et lui sont ensembles et qui est vraiment mais vraiment folle, mais qui fait des gâteaux à tomber par terre et elle l'a invité à dîner chez eux vendredi soir ?!

Là, je dis « Starf'Allah » comme Mr Fall, je dis « Dios mio » comme Maman et je dis « OOOO.KKKK » comme les filles lorsqu'une chose nous choque trop, je dis « Oh putain ! » et je dis « Euh .... ».

Il est fou ce type ! Je vais aller le voir ce petit con ! Il est carrément fou mais ...

Attendez ...

...

...

YAAAAAAAAAAAS BITCH !!!!!! 

Je me lève d'un bond de son lit et hurle de joie sous le regard incrédule et choqué d'Edna.

Je me mets à faire la danse de la joie tout en rigolant comme une folle.

C'est juste un miracle !

— Oh merci mon Dieu ! Je L'adore ! J'adore Dieu, Edna !

— Tu es heureuse de ma merde là ? geint-elle, éberluée.

— Oui Edna ! Ouiiiiiiiiiiiiiiii ! crié-je. Tu vas aller à ce dîner ! dis-je une main sur la hanche.

— Non, me lorgne-t-elle. Parce que demain je compte le tuer. C'est un malade ce type Billie ! Deux ans à me casser les ovaires et j'apprends, J'APPRENDS qu'il m'invente une vie avec lui.

— Nan mais tu vas y aller parce que c'est un autre signe de Dieu pour moi, l'avertis-je. Aujourd'hui, je suis partie à l'église ...

— Ton église ce n'est pas une secte ?! T'es trop bizarre Billie !

— Nooooooon ! m'offusqué-je. Bref, j'ai dit au prêtre que j'avais commencé à écrire grâce à ce qui nous était arrivé hier soir et je lui ai dit de prier davantage pour que Dieu m'envoie encore plus d'inspiration et on a dit qu'il fallait une romance dans cette histoire ! Et là, comme par magie, tu te ramènes avec cette histoire ! Ça tue Ed ! Je suis la future J.K Rowling ! Ha ha ! m'égosillé-je comme une folle.

Je lâche des « yes » par ci et par là avec mon poing.

Elle secoue la tête avec une envie de m'assommer et elle commence ses manières avec son long index pointé vers moi tout en parlant.

— Déjà, ne te compare pas à elle s'il te plait, tu sais qu'elle a une place particulière dans mon cœur et t'es complètement cinglée ! Ce qui s'est passé hier soir est très bizarre. Je te l'ai expliqué. Elliott m'a dit que ce ...

Ouais bon Elliott a exagéré. Ce n'était rien de grave ! Il voulait juste se rendre intéressant auprès d'elle. Pff, C'est évident !

— Ahhhh ! Ça commence à parler d'Elliott tout le temps là ! Nan mais Edna ...

Je prends la pose qui tue et balance mes cheveux blonds de l'autre côté de mon épaule et lui lance un regard qui se veut profond et sérieux.

— C'est mon destin qui se révèle là ! terminé-je. Je vais aller écrire. Tu vas vendredi à ce dîner. Je ne plaisante même pas ! J'ai besoin que tu me racontes tout !

— Non, moi je sors avec les filles ! J'ai lu le message de Niya et je compte démembrer Elliott, alors laisse-moi passer, je vais aller manger ! déclare-t-elle en se levant.

— Ouais ouais ! T'inquiète même pas que tes fesses vont se retrouver là-bas.

— N'y compte même pas.

Je souris alors qu'elle quitte sa chambre en me faisant un doigt.

Elle va aller à ce dîner pour que je ponde cette histoire d'amour et moi, je file écrire.

Ça m'a inspiré là !

Sauf qu'en traversant le couloir, un léger vertige me prend, des flash d'images dansent devant mes paupières avant de se stabiliser.

Houlà ! Peut-être qu'elle n'a pas mis que du sucre dans ces gâteaux !

En tout cas, une fois en meilleure état, je rentre dans ma chambre, me jette sur mon lit et je continue d'écrire la suite de mon histoire.

L'historie d'amour entre deux personnes diamétralement opposés et qui se détestent au début, ça marche tou-jours.

C'est une valeur sûre ça !

*

Je me réveille par des bruits insupportables dans la cuisine.

Je tente me rendormir car je me suis endormie vraiment tard ayant écrit, mais les bruits sont persistants.

Ça, c'est Edna.

Je me traîne hors du lit pour aller lui dire de se calmer, parce que certains ne travaillent pas dans cet appartement, surtout qu'il est que 8 heures.

J'arrive dans le salon et la regarde. Oui parce que notre cuisine donne sur le salon.

Elle a sorti tous les couteaux que nous avons et je cligne plusieurs fois des yeux avant de m'avancer vers elle.

Elle s'amuse à planter le couteau sur la planche à découper avant de le retirer en hochant la tête.

— Edna, tu fais quoi ? Tu me fais peur.

Elle lève sa tête vers moi et me sourit de toutes ses dents blanches comme des perles qui contrastent avec sa peau.

— Hé Billie ! Eh bien, je choisis le couteau qui va me servir aujourd'hui.

— Pardon ? Pour ? 

Quand je dis qu'elle est plus folle que moi, personne ne me croit.

— Pour Elliott, dit-elle comme si c'est l'évidence.

Je fronce les sourcils et m'esclaffe devant elle ce qui l'agace immédiatement.

— Franchement Edna, t'es archi marrante ! Allez, range tout ça et va bosser ! Évite de faire du bruit steuplait.

— Je suis archi sérieuse. Tu crois que je vais le laisser s'en sortir comme ça ?! s'esclaffe-t-elle à son tour. Hé, tu ne me connais pas ma sœur. Moi, Edna Fall, première du nom, je vais le terrasser !

Je roule des yeux.

Allez, c'est parti !

Edna qui est ma meilleure amie depuis des années (presque 19 ans d'amitié quand même), est l'une des personnes les plus rancunières de ce monde avant moi peut-être.

Elle aime dire « Je pardonne mais je n'oublie pas » mais c'est une menteuse.

Elle ne pardonne pas et elle oublie encore moins.

Lorsqu'on lui fait un coup dans le dos, cela la travaille comme si toute son existence est remise en question.

Après, je comprends ce sentiment de s'être faire prise pour une conne.

Surtout qu'Elliott n'était pas allé de main morte avec elle durant ces deux années,  alors de ce sens là, je comprends.

Mais elle, elle commençait à envisager des plans de vengeance qui étaient trop extrêmes pour moi.

Qu'elle lui foute un coup de genoux et puis c'est tout ! Pas besoin de sortir l'artillerie lourde. Comme si elle allait à la guerre.

Je souffle donc et m'avance vers elle.

— Bon, tu as choisis quel couteau ?

Elle me regarde et prend une petite moue en me montrant le couteau à steak.

— Il est discret et ça coupe bien.

— D'accord et tu vas faire quoi face à lui ?

Je lui montre à mon tour ma paire de dentition et évidemment, elle commence un peu à se dégonfler lorsque je rentre dans son jeu.

— Eh bien ... je vais l'attirer dans un petit coin du poste ...

— Ça, c'est littéralement sexy Edna ! J'aime, continue. Ça m'inspire !

Elle ouvre la bouche mais la referme aussitôt avant de grogner.

— Tu fais chier Billie ! Je me tire ! Tu m'as saoulé ! Au lieu de me soutenir, tu ... tu ne sers à rien ! s'égosille-t-elle.

Elle met sa veste, prend son insigne et son arme avec rage.

— Je t'évite de commettre le crime de ta vie Edna ! C'est pour ça que je suis ta meilleure amie ! Allez va mon enfant ! Salut Ellie chéri de ma part !

— Connasse ! profère-t-elle.

Je ris et lui fais un coucou tandis qu'elle quitte l'appartement sans couteau.

Voilà ! Tout revient dans l'ordre.

Je me décide d'aller me recoucher pour faire une petite grasse matinée.

*

— Je pense qu'Edna sera littéralement sexy dans ce pantalon. Ça va bien lui mouler les fesses.

Je regarde Amiri qui tient un pantalon noir entre ses mains.

C'est vrai qu'il est beau. C'est un simple pantalon chino taille haute mais avec les talons rouges que je lui ai offert lundi et un top blanc avec un décolleté pour mettre en valeur sa poitrine et sa couleur de peau, ça sera par-fait.

Nous sommes actuellement chez Zara parce que ça fait longtemps que je n'ai pas fait de shopping.

Arrêtez ! Une journée sans acheter, c'est beaucoup quand même !

Puis Amiri m'a forcé à sortir puisqu'elle veut s'acheter une tenue pour vendredi soir puisque nous sortons et moi aussi. Puis, comme je ne suis pas une balance, je lui ai raconté pour Elliott et Edna.

Elle s'est excitée à l'histoire parce qu'elle a trouvé ça trop « choupinou » et m'a proposé qu'on lui achète sa tenue de vendredi soir pour qu'elle soit au top.

Edna va nous tuer mais Amiri, Mirah et Niya sont d'accord avec moi : elle doit aller à se dîner pour m'aider.

C'est ça l'amitié !

J'ai besoin de ce moment pour écrire. C'est mon projet d'avenir. On se soutient !

— Va pour ce pantalon.

— Attends, j'envoie la photo aux filles. Passons au haut, dit Amiri.

Finalement, on tombe sur un petit haut tout mignon et trop original. Il est noir et court avec des grosses fleurs jaunes. Il y a un volant large qui donne un certain volume au haut. Ses épaules seront découvertes et on verra très discrètement son ventre plat d'athlète.

Elle sera canon.

— On prend celui-là, disons-nous en même temps.

— J'apporterai mes talons jaunes pour qu'on la prépare.

— T'es géniale, Amiri.

— Je sais ! C'est tellement rare que l'une d'entre nous sorte avec un mec.

— Je te jure, ris-je. Mais ce n'est pas son mec. Ne lui dis pas ça, sinon elle va te tuer !

— Ouais ouais ! Tout est une question de temps. On dit bien « Qui aime bien, châtie-bien ». Allez viens ! Moi aussi je veux avoir un petit ami vendredi soir. Six mois de célibat, c'est long.

— Et moi, un an !

Et ce n'était pas une relation très glorieuse.

Elle me tire par le bras et nous continuons notre shopping tranquillement. On passe en caisse lorsqu'un picotement au bras me prend.

Je grimace doucement en touchant l'endroit.

Depuis ma collision avec le mec, ça me fait toujours mal. Je le masse doucement tout en avançant vers la caissière qui me sourit.

Je pose mes articles, mais quand je rentre en contact avec sa main, dans ma tête, une petite voix comme ... comme robotique me lance « Danger ! Danger ! ».

Je fais un sourire forcé et ferme quelques secondes les yeux parce que là, c'est bien plus qu'anormal et je vois cette fille dans ma tête avec une énorme arme, postée sur un toit, prête à tirer ... C'est une tueuse à gage !

Mon souffle se coupe lorsqu'elle me dit :

— Ça vous fera 76 dollars et 18 cents s'il vous plait.

Un petit sourire...

Et là, je m'écroule avant de tomber dans l'inconscience.

« Il est définitivement impossible de connaitre la personne qui se tient en face de vous. On montre que ce que l'on veut montrer. Mais rien sur notre figure ne permet de savoir notre véritable et profonde identité. Absolument rien puisque rien n'est écrit sur notre front ». JFL.

*

Edna Fall

Bon, Edna, tu vas faire comme si de rien était, me répété-je mentalement.

Je suis encore dans ma voiture et je n'ose pas sortir.

Le poste de police ne me donne plus envie et surtout voir Elliott.

Juste au fait d'y penser, un frisson me parcourt.

Je respire profondément.

Bon, Edna, tu ne vas pas te laisser anéantir par ce que genre de type et par ce genre d'historie quand même ! me grommelle ma conscience.

Vrai !

Je suis Edna Fall, une jeune femme qui s'assume et qui peut surpasser ça quand même ! J'ai juste à l'éviter comme j'ai fait durant deux ans, c'est tout simple.

Ah, c'est beaucoup mieux ! me souffle ma conscience.

Je sors donc de ma voiture, un sourire plaqué sur mes lèvres.

Comme à mon habitude, je vais saluer ma très chère Cassandra sauf qu'elle est avec Marilyn aujourd'hui.

— Salut les filles ! lâché-je.

Un petit bisou et on se regarde avec le sourire. Sauf qu'elles, leur sourire me laisse perplexe.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

Marilyn me fait les yeux doux et me pince la joue.

— Tu commences à te faire populaire ici ! Donc comme ça, on t'offre un immense bouquet de roses et des excuses. Mh, intéressant.

Je dévisage Cassandra qui lève les deux mains.

Pourquoi elle avait ouvert sa bouche ?

— Je n'ai rien dit !

— C'est vrai ! adjuge Marilyn. Les nouvelles vont vite ici, sourit-elle. Alors ?

— Alors quoi ? Il n'y a rien. Le bouquet, Billie l'a pris et moi, je vais continuer à faire mon boulot.

— Ouais ouais ! dit Marilyn. Bientôt, tu auras des propositions de rendez-vous Ed' ! C'est mon petit doigt qui me le dit. Les hommes adorent les femmes de caractère ! Et lundi, ils ont vu le tien. Tu auras bientôt la bague au doigt si ça continue comme ça. 

Je lève la main pour qu'elle arrête de parler et elles se tapent dans la main en riant.

— Je vous laisse, vous êtes malades !

Je monte et Cassandra m'hurle qu'on déjeune ensemble.

J'arrive dans notre unité et l'angoisse me gagne, mais j'avance quand même.

Quelques agents me saluent et j'en fais de même sans vraiment l'envie.

Je me dirige tout droit vers mon bureau, mais mon cœur s'arrête lorsque je vois le Chef avec Elliott et Gideon en train de discuter.

J'ai presque envie de faire le moon-walk mais j'avance.

— Bonjour, lâché-je sans vraiment les regarder.

Surtout sans LE regarder ouais !

— Bonjour Edna ! répond le Chef. On t'attendait. Je disais aux garçons que comme vous avez résolu votre affaire, je vais vous mettre sur une autre. Je pense que celle-là sera plus longue par contre et plus difficile. Sinon, aujourd'hui, vous allez enquêter sur un trafiquant de drogue au nord de la ville. On ne sait pas grand-chose sur lui, mais renseignez-vous. Il est nouveau et vous pouvez aider les autres sur leur affaire si vous avez fini. Ça vous va ?

— Oui Chef, répondons-nous.

— Génial. Appelez-moi en cas de besoin.

Il nous sourit à tous les trois avant de s'en aller.

Gideon me tend mon gobelet de Latte avec le sourire et je sens le regard d'Elliott darder sur moi.

— Bon, on y va ? lancé-je.

— Je fais un truc deux minutes et on s'en va, répond mon ami.

Il me contourne en me frôlant et moi, je décide de déguerpir le plus rapidement possible, mais Elliott m'arrête en m'attrapant par le bras.

Bien sûr, il le retire aussitôt que je lui lance un mauvais regard. Il faut qu'il se canalise aussi. 

— Je ... Est-ce qu'on pourrait se parler ?

Et là, je pense au couteau que j'aurais pu amener pour lui faire comprendre qu'il devait se tenir le plus loin possible de moi.

Ne pensez pas que je suis dingue. Bon ... Je le suis un peu. Mais, il a dépassé les bornes avec ce mensonge énorme.

Oui, ce matin, j'en ai fait trop, mais je ne pense pas avoir la capacité de tuer.

Je suis policière mais j'éviterai par tous les moyens d'enlever la vie de quelqu'un.

Qui étais-je pour le faire ?

Évidemment, ça pouvait remettre en question mon job parce que si je n'avais pas d'autres choix de le faire, je le ferai.

Je priai juste pour que ça ne m'arrive pas.

Certains flics n'ont jamais tués de personnes durant leur carrière. Je pouvais donc être pareille.

Je sens les regards des autres sur nous, mais tout ce que je fais, c'est de ne pas lâcher son regard pour qu'il comprenne bien que nous n'allions pas faire ami-ami.

Un fou comme lui, il faut s'en éloigner le plus possible.

— Alors ? questionne-t-il, nerveux.

— Non. Je n'ai rien à te dire Elliott.

Je me dirige vers mon bureau mais il me suit et je croise le regard curieux de Gideon.

Mince ! Faut que je lui raconte. Il est de meilleur conseil que Billie.

Je m'y installe en l'occultant totalement, mais il se penche au-dessus du bureau pour tenter d'attirer mon regard, sauf que rien n'y fait, je ne céderai pas. Qu'il se débrouille avec ces conneries.

Je ne vois même pas pourquoi j'ai paniqué en fait.

C'est lui qui est dans la merde, pas moi !

D'ailleurs, ça me fait sourire. Sa maman va être tellement déçue d'apprendre que son fils chéri est un menteur. Dommage qu'elle n'en sache pas plus sur son comportement intolérable.

— S'il te plait, Edna. C'est vraiment important, appuie-t-il en chuchotant de sorte que je sois la seule à entendre.

— Pour toi, pas pour moi. Tu te débrouilles avec tes problèmes. Mentir, ça ne mène jamais à rien. 

Ses yeux gris ou bleus, je ne sais pas, me sondent et il se redresse avant de me tourner le dos pour aller rejoindre son bureau.

Ha ha ! J'ai gagné !

Et Edna fait un 2-0 !

*

Lorsque nous sommes au nord de la ville, je conduis ma voiture pour plus de discrétion.

Une voiture de police fait fuir tout le monde et ça ne plait pas trop dans ce quartier où ils n'hésitent pas à flinguer quelques policiers.

Mais moi, ça ne fait pas trop peur.

Il y a un an, j'ai rencontré ici une prostituée prénommait Tammy. Je bossais sur une affaire de meurtres de prostituées et cette Tammy m'avait filé un grand coup de main.

C'est dommage qu'elle ne veuille pas se sortir de cet endroit, de cet environnement mauvais.

Elle pourrait être une bonne policière aussi.

Grâce à elle, nous avons pu arrêter ce détraqué tueur de prostituées.

Gideon l'a connait aussi parce qu'il bossait avec moi sur l'affaire. Elle est adorable.

D'ailleurs, on guette par la fenêtre pour la rechercher.

Elle traîne souvent dans la rue avec ses copines de misère, même s'il fait un froid de canard. Comme aujourd'hui par exemple. Je regrette de ne pas avoir pris mon blouson et avoir mis un plus gros pull.

— Elle est là-bas Edna, m'avertit Deon.

En effet, je la vois plus loin en train de se tordre de rire avec ses copines, une cigarette à la main.

J'avance un peu la voiture pour m'arrêter juste à leur hauteur mais avant, je préviens Elliott de ne pas lui parler.

Une fois devant elle, je sors de la voiture avec le sourire et elle commence à hurler :

— Ohhh ma chérie ! Ça fait un bail !

Je l'enlace comme elle le fait et la relâche avec le sourire.

C'est étrange parce qu'avant d'être flic, je jugeai les prostituées comme tout le monde.

C'est presque ... normal de le faire. Même quand Mama me disait « Ne les juge pas, tu ne sais pas ce qui les a mené à ça ! », je m'en fichai. Je me comportai comme la société. On les juge, on les insulte, mais ne pensez pas qu'elles sont heureuses de faire ce métier. Bien sûr, certaines se plaisent à ça mais, je n'y crois pas vraiment.

Elles disent qu'elles n'ont pas le choix mais je leur dis tout le temps qu'elles l'ont.

Mais l'argent facile qu'on se fait en vendant son corps tout comme la drogue, c'est un cercle vicieux. Dès qu'on y entre, on a dû mal à en sortir et ça, la société d'aujourd'hui ne veut pas le comprendre.

Au lieu d'aider, on juge et on crache sur ce type de personnes qui finalement, ont une force mentale considérable pour faire ce travail ou pour aider leur famille à vivre.

C'est moche, je sais mais les temps sont durs. Et la prostitution est le plus vieux métier du monde alors ...

Elle en fait de même avec Gideon en le complimentant et on salue d'un signe de tête, ses amies.

— Qu'est-ce que vous faites là ? Vous ne venez même plus me dire bonjour ! C'est méchant ça !

— On a énormément de boulot Tammy, lui répondé-je.

— Je comprends. Vous essayez de sauver le monde à votre façon.

Je la fixe pendant qu'elle toise Elliott du regard car elle ne l'a jamais vu et les petits nouveaux, ça l'intéresse toujours.

D'ailleurs, ses deux amies se lèvent pour la rejoindre.

Tammy est très grande et à de grands yeux bleus qui font ressortir ses cheveux noirs qu'elle teint très souvent.

Malheureusement, son beau visage a été défiguré par l'un de ses ex-clients. Elle a une énorme trace de coupure et ça lui donne un côté mystérieux et ça n'enlève rien à sa beauté.

Elle, elle l'adore cette cicatrice (mais je sais qu'elle dit ça pour oublier la souffrance qu'elle a enduré et la peur qu'elle a eu). Ce sont les revers du métier comme elle le dit et elle ajoute aussi que les cicatrices extérieures ne sont jamais aussi affreuses que celles qui sont intérieures, car celles-ci sont difficilement guérissables.

Tammy est juste une femme d'une trentaine d'année et vraiment touchante.

— C'est qui ce mignon garçon là hein ? minaude-t-elle.

Je lève les yeux.

— Tammy ne commence pas. 

Ses copines gloussent et entourent Elliott.

Il rougit pivoine et je laisse échapper un petit rire parce qu'en deux ans, je ne l'avais jamais vu rougir de ma vie.

— Ah mais tout ce qui est beau se regarde et se savoure ! rétorque-t-elle. Tu t'appelles comment mon beau ?

— E..Elliott, bafouille-t-il en s'éloignant des deux femmes hilares.

— Ah lui, il n'est pas habitué à ça, tonne la rousse.

— J'aime bien les petits puceaux comme ça ! déclare l'autre.

Elliott est au bord de la syncope et franchement, j'éclate de rire tout comme Gideon qui est pris en otage par Tammy.

Elliott est à côté de moi. Il n'est clairement pas à l'aise.

— Allez, trêve de plaisanterie, dis-je. On a besoin de se renseigner, Tammy.

— Oh. Les filles, dégagez !

Les deux femmes retournent à leur place non sans jeter un regard pleins de sous-entendus à Elliott qui est toujours aussi rouge.

— Je vous écoute.

— Apparemment, un trafiquant de drogues a décidé de reprendre le business ici. Tu es au courant ? demande Gideon.

— Non. Ça fait chier ! À chaque fois que vous nous attrapez un type de ce genre, y'en a un autre qui revient ! râle-t-elle. Ça tue pleins de nos filles cette connerie de drogues !

— Je sais. C'est pour ça qu'on veut agir avant que cela arrive, lui expliqué-je.

— Je m'informe dessus et je vous tiens au courant. Je t'appellerai Edna, ma belle. Ce petit bâtard va déguerpir d'ici.

Je lui souris.

— On va y aller alors, annoncé-je.

— D'accord.

Elle salue Gideon puis serre la main d'Elliott qu'elle tient un peu trop longtemps pour le taquiner et ils regagnent la voiture.

Je me retrouve seule avec elle.

— Sinon ça va ?

— Tant que je suis en bonne santé, tout va bien, ne t'en fais pas, me confie-t-elle avec son sourire.

— Eh bah arrête de fumer !

Elle lève les yeux.

— Je fais du sport et tu sais très bien lequel je pratique.

— Tammy ! m'exclamé-je.

Elle rit.

— Tu devrais en profiter aussi. En plus, tu travailles avec deux beaux gosses. Bon, Gideon est gay même si j'ai des doutes dessus vu comment il te regarde. Tu lui plaît !

— Allez Tammy, je te laisse !

Elle s'esclaffe et je la salue tout en lui rappelant de me contacter.

Je m'installe au volant et encore un signe de main avant de démarrer.

— Je pense qu'elle va nous délivrer l'info, lâche Deon.

— Toujours. Tammy est une bonne enquêtrice.

— En tout cas, elle est ... marrante, commente Elliott de derrière.

— Oui, elle l'est.

Nos regards se croisent et je conduis en direction du poste de police.

*

Nous déjeunons au réfectoire du poste.

Réfectoire, c'est vite dit, c'est juste une petite salle aménagée pour qu'on puisse manger au poste si on ne déjeune pas à l'intérieur.

En général, ce n'est jamais vraiment bondé puisqu'il y a des rotations d'agents et c'est sympa. Et aujourd'hui, c'est même très calme.

Bon, en même temps il est bientôt 15 heures.

On a été encore gâté par Cassandra qui nous a préparé un excellent gratin.

Je suis avec Gideon et Marilyn et on discute des célébrités, parce que Marilyn adore ça et qu'elle a même son magazine avec elle.

— Nan mais Beyoncé est magnifique ! s'exclame-t-elle en regardant la photo.

— L'argent rend beau même le plus beau, commenté-je.

— Oh toi on sait que tu ne l'aimes pas trop Beyoncé ! me dit Cassandra.

— Je ne la connais pas cette femme, alors comment je peux l'aimer ou pas ?! Elle ne sait pas que j'existe ! 

— Tu nous parles bien de tes hommes de ta vie, alors qu'ils ne connaissent pas ton existence aussi, dit Gideon avec le sourire.

Je le mitraille du regard alors que les filles le félicitent. Il devrait être dans mon camp. 

— Ce n'est pas pareil ! dis-je pour me défendre. Puis, j'aime ses musiques. Je danse dessus depuis que je suis petite, mais voilà, elle n'est pas la seule dans ce monde. 

— En fait, Edna n'est pas vraiment une fille, elle ne s'intéresse pas à l'actualité people ! Ça me désole ma chérie ! réplique Cassandra.

— Et n'oublie pas qu'elle ne regarde la télé que pour regarder ses séries. Elle ne regarde même pas le journal ! ajoute Marilyn.

— Je suis là Mesdames ...

Un raclement de gorge nous interrompt et je tourne la tête vers la personne en question.

Oh non !

On le regarde tous incrédules, moi, la première.

Pourquoi il persiste comme ça ?

J'avais réussi à oublier le problème, moi !

— Je peux ... m'asseoir parmi vous ?

Il pose la question de manière générale, mais je sais qu'il attend uniquement ma réponse.

J'ai envie de lui planter la fourchette dans la cuisse qu'il aille voir ailleurs où je suis.

— Je dois retourner bosser, dit Cassandra en se levant.

— Moi aussi, réplique Marilyn.

Je me tourne vers les filles qui sont déjà prêtes à déguerpir et Cassandra lance :

— Viens m'aider Gideon, j'ai des cartons à soulever.

— Euh ouais, je te suis.

Je l'observe et ils s'en vont comme ça.

Super amitié en collègue et super soutien.

Je laisse échapper un petit rire et je m'apprête à me lever, mais il me retient.

— S'il te plait. Écoute-moi une seule fois et après tu fais ce que tu veux.

— Ils sont partis parce que tu es un raciste ! craché-je. 

— Je ne le suis pas Edna.

— Pardon ?

Je m'esclaffe nerveusement.

— Tu te fiches de moi là ?! Tu as déjà oublié tout ce que tu as fait ?

— Je ne suis pas là pour m'expliquer sur mon comportement de toute façon, dit-il durement. Je veux te parler d'hier soir et de ce qu'il s'est passé.

— Pour moi, c'est oublié ! Tu te démerdes Elliott. Tu as menti à tes parents, pas moi.

— Je sais. Mais s'il te plait, est-ce que tu pourrais venir vendredi soir ?

— Non. Je sors avec des amies.

— Je te raccompagne après. C'est pour 19 heures. Ça ne durera pas plus de deux heures.

— Non ! Je ne viendrai pas. Pourquoi je te rendrais service d'abord ? Tu as été un sacré connard avec moi. Deux ans tu m'as fait chier pour aller dire à tes parents que tu « sortais » avec moi. Pourquoi t'as pas choisis Brittany hein ?! Naaaan, Monsieur a choisi la fille qu'il a insulté pour sa couleur et parce qu'elle est une femme pour dire qu'il est en couple. T'es un malade, Elliott. Je n'aide pas les fous comme toi.

Il contracte la mâchoire et rapproche son visage du mien.

Ma respiration est saccadée tellement je suis en colère.

J'ai même envie de le gifler mais j'ai dit à papa que je ne le frapperai plus, alors lorsqu'il attrape mon poignet, j'ai presque envie d'oublier cette résolution mais il dit :

— J'ai dit ça à mes parents parce qu'ils me croyaient gay et qu'ils n'arrêtaient pas de me présenter à des filles de leurs amis que je déteste ! Ils sont snobs et je n'aime pas les gens snobs, alors j'ai parlé de toi parce que sur le moment, j'ai été en colère. Tu es la première personne qui m'est venue à l'esprit. Et le mensonge a pris de l'ampleur, c'est tout. Et je ne pensais pas me faire prendre. Après ce dîner, je te promets que tu n'entendras plus parler de moi. Il faut juste qu'ils soient persuadés que je n'ai pas menti. C'est tout.

— Je ne t'aiderais pas. J'en ai rien à battre.

— Tu sais pourquoi tu m'aideras Edna ? Parce que les gens bons aident toujours les gens mauvais à retrouver le droit chemin. Alors, aide-moi. 

Il lâche mon poignet que je récupère.

Il n'a pas le droit de sortir cette carte car il sait que j'aime aider. Il le sait ce connard. C'est dans mes valeurs et ça se trouve dans toutes les religions.

— J'attends ta réponse demain.

Et il se lève et se tire comme ça, me laissant juste en colère.

Connard, connard, connard !

***

« Ça fait mal, ça pique et ça irrite de savoir la vérité. C'est vrai. Les bons ont toujours cette envie d'aider les mauvais. C'est une fatalité. Et lorsque c'est ancré dans vos valeurs, il est d'autant plus difficile de refuser la demande d'une personne mauvaise qui veut se sortir du pétrin. Parce que le bon regarde toujours avec le cœur ». JFL

***


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