2.

Hey mes Mangues ❤️,

Ne me demandez pas comment je fais pour poster aussi vite ou peu importe ... J'ai le temps et l'envie et la passion donc ça donne ÇAAA ! 

Anyway, j'espère que vous commencez à être baigné dans cette histoire. 

Il s'agit du point de vue d'Edna plus posée que Billie on va dire mais tout aussi folle hein 😜. 

Allez, bonne lecture. 

PEACE AND LOOOOOOVE- ❤️

-JFL

PS : Et les commentaires et votes sont toujours valables hein. Ne faites pas les timides voyons. On a dépassé ce cap de notre relation non ? 😌😌 En tout cas, moi ça me fait plaisir et je suis contente de retrouver mes plus fidèles lectrices. 

***

Edna Fall

Lorsque je quitte notre appartement à Billie et à moi que nous louons depuis nos années universitaires, c'est-à-dire 5 ans maintenant, je vérifie que j'ai mon insigne de policière, mon badge et mon arme.

Quant à la tenue, je suis habillée en civile.

Ça fait deux ans que je travaille en tant qu'agent à la police.

Pour vous expliquer brièvement, il y a plusieurs unités dans une police. Il y a une unité pour les affaires minimes, pour les dépôts de plainte et les citoyens qui viennent se plaindre pour un « oui » ou un « non » et pour les affaires générales.

C'est une unité vraiment spéciale.

Et moi, je travaille dans cette unité. C'est nous qui nous occupons des gros cas tels que les affaires d'agressions, de drogues, la prostitution et les crimes en tout genre. Lorsque c'est un cas très grave que notre unité ne peut pas prendre en charge toute seule, on contacte le FBI qui travaille en collaboration avec nous.

En général, on mène l'enquête et on arrive à régler l'affaire.

Moi, mon rêve, c'est de travailler au FBI.

Mais je dois d'abord faire mes preuves à la police et avoir un excellent dossier pour que ma candidature soit la plus favorable possible. Ensuite, lorsque je serai assez bien expérimentée, je m'inscrirai au centre de formation de Quantico en Virginie, c'est mon rêve.

Et oui, ça existe des femmes qui veulent faire ce genre de métier.

Nous ne sommes pas nombreuses et c'est bien dommage.

Pourquoi je ne pourrais pas réaliser mon rêve à cause des standards de la société qui imposent aux femmes de faire des métiers de femme ?

Moi, je veux sauver des vies de cette manière, c'est ma vocation.

Et je l'ai su depuis très petite.

Pour vous mettre un peu dans le contexte et que vous compreniez un peu plus les choses, cette force combative, je l'ai prise de mon père, Idriss Fall et de ma mère Eva Fall.

Mon père est d'origine sénégalaise et vous connaissez certainement l'histoire de l'immigration, il a atterri en France dans les années 80, âgé d'une vingtaine d'année, pleins de rêves et d'espoir de gagner de l'argent pour nourrir sa famille au Sénégal ( il avait exactement 23 ans en 1983). C'était plutôt de celle de son oncle car il a perdu ses parents très tôt. 

Et son oncle l'a donc élevé comme beaucoup de proches font dans ce cas-là. Cet oncle n'avait malheureusement pas de fils, mais quatre filles. Il a donc récupéré celui de son frère et de sa belle-sœur de part ces tristes décès et c'est devenu son unique fils de substitution et il a toujours poussé mon père à vivre ses rêves et à croire en lui.

Mon père s'est donc senti redevable pour cette éducation que son oncle et sa tante lui ont prodigué, alors qu'ils auraient pu être méchants avec lui. C'était inconcevable qu'il ne puisse pas les aider financièrement et les prendre en charge.

Voilà pourquoi il est arrivé en France, à Paris précisément.

La France cherchait de la main d'oeuvre pas chers, les immigrés ne se plaignaient pas du travail de dur labeur alors tout le monde était gagnant.

Mais Idriss Fall voulait plus. Il rêvait de plus.

Alors à force de persévérer, il s'est lié d'amitié avec un français - Richard Verneuil- qui lui a proposé une formation pour être chauffeur de taxi.

Mon père a saisi l'occasion et a redoublé d'efforts dans l'apprentissage de la langue française qu'il connaissait déjà un peu grâce à son oncle qui était venu en France pour la guerre.

Évidemment, à cet époque, le permis en France n'était pas si difficile à obtenir et les contrôles étaient moindres.

Et il a réussi à être chauffeur de taxi.

Mais, ça ne lui suffisait pas toujours alors il apprenait d'autres langues : espagnol, portugais, italien et anglais avec l'aide de cet ami.

Et là, ce même ami - dont il ne veut pas vraiment nous parler - l'a recommandé à des amis à lui pour être pilote d'avion.

Là, mon père s'est dit que c'était ce qu'il voulait. Conduire un avion. Faire voyager les gens.

Déjà bien avancé en langue, il devait apprendre cette formation de pilote.

Courageux, déterminé et en quête du meilleur, il a suivi cette formation où il y avait très peu de noirs. 

D'ailleurs, il adore nous le rappeler. Il nous disait qu'à cette période, les blancs n'étaient pas si racistes que ça et qu'au contraire, ils l'encourageaient à obtenir ce diplôme.

En 1986, il est devenu pilote d'avion pour l'aviation française à 26 ans. Encore une fois, sa détermination l'a comme facilité dans ses projets. 

Et il a été très fier de lui tout comme sa famille au Sénégal à qu'il envoyait de l'argent. Il disait toujours que c'était Dieu qui l'avait guidé pour aller toujours plus loin.

Mon père est musulman pratiquant.

Avec ces voyages en avion, il a rencontré ma mère lorsqu'il faisait les premiers vol Paris - Johannesburg.

Mama - c'est comme ça que nous l'appelons, mon frère et ma sœur- ne m'a pas trop raconté leur rencontre, mais ils ont fait connaissance pendant les heures d'escales.

Papa proclame que Mama a flashé direct sur lui et ma mère dit le contraire.

Ça nous fait toujours rire d'ailleurs lorsqu'ils se disputent pour ça.

Elle, à l'époque où la ségrégation raciale faisait encore rage, elle travaillait comme femme de nettoyage à l'aéroport pour aider ses grands-parents avec qui elles vivaient, car ses parents étaient morts lors d'une émeute contre le gouvernement afin d'abolir l'apartheid.

Donc elle aussi était orpheline mais elle aussi voulait une meilleure vie.

Et je pense que mon père l'a convaincu de cette meilleure vie. En France, ça allait. Ce degrés élevé de racisme envers les noirs était différent, même si le terme n'était pas judicieux, qu'en Afrique du Sud et mon père gagnait assez bien sa vie, alors elle a dû quitter ses grands-parents avec leur bénédiction et elle l'a épousé.

Ma mère est chrétienne pratiquante.

Donc, niveau religieux, nos parents nous avaient laissés choisir et construire notre propre spiritualité. Mon grand frère Zackaria, que tout le monde appelle Zac, a décidé d'être musulman depuis des années. Il est âgé de 28 ans et il est marié avec une musulmane qui s'appelle Fatima - sénégalaise aussi - depuis déjà 6 ans.

Ma belle-sœur est vraiment géniale. Elle est douce et compréhensive. Elle est enseignante à l'école primaire et mon frère est banquier.

Ils ont une fils de 5 qui s'appelle Jamal et on l'aime tous ce petit monstre.

Quant à moi, je crois en Dieu et je le prie. Je n'ai encore rien décidé pour le moment. Ce n'est pas ma plus grande préoccupation. Il sait que j'ai foi en Lui.

Et ma petite sœur, Hanna qui a 20 ans, elle s'en fiche. Elle croit en Dieu mais ne fait rien de particulier.

Pour finir sur la petite histoire, en juillet 1995, mon père a eu ensuite une promotion pour travailler dans une compagnie aérienne américaine : L'American Airlines.

J'avais alors 5 ans étant née le 15 octobre 1990 et mon frère, Zac avait 8 ans.

Il a accepté avec l'accord de ma mère qui était tout juste enceinte d'Hanna.

Elle était triste de quitter ses amies qu'elle s'était faite en France, mais suivre son mari était plus important pour elle et de toute façon, elle était très sociable.

On a donc quitté notre petit appartement français pour vivre aux États-Unis à New York.

Les employeurs de papa l'avaient aidé pour l'installation.

Notre appartement était plus grand que celui de Paris et on a eu à apprendre l'anglais.

À partir de là, Zac et moi, on a voulu faire comme notre père, on a voulu apprendre le plus de langue possible ce qui l'a rendu fier de nous.

On a toujours été bons à l'école. On se donnait encore plus que les autres enfants parce que papa nous disait que notre couleur de peau serait un blocage aux yeux des autres, mais pour nous, ça ne devait pas être le cas. On devait réussir coûte que coûte.

Le 20 décembre 1995, a été un jour terrifiant pour nous. Malgré mon jeune âge, je n'oublierai jamais comment j'avais eu peur avec ma mère et Zac. Papa devait faire un vol reliant Miami à Cali et à la télévision, on avait appris qu'il s'était écrasé contre une montagne à son approche sur Cali, faisant 159 morts et 4 survivants.

Mama enceinte de six mois était presque à deux doigts d'accoucher prématurément de peur, car nous n'avions aucune nouvelle de mon père mais Dieu merci, ce jour-là, il était parti travailler, mais il avait finalement dû annuler ce vol car il s'était blessée.

Il est rentré à la maison, les larmes aux yeux, heureux de nous retrouver et je me rappelle ce jour-là qu'il a tellement prié pour remercier Dieu de l'avoir laissé auprès de sa famille. Et nous aussi on a prié avec lui.

Hanna est rentrée dans nos vies, le 8 mars 1996 et en bonne santé.

Mama a décidé de s'occuper de notre éducation, jusqu'à ce qu'Hanna grandisse suffisamment pour travailler en crèche.

Par la suite, ça nous a fait peur chaque vol qu'il prenait, mais il nous disait toujours « Si je ne rentre pas, ne pleurez pas ma mort. C'est Dieu qui l'aura décidé ainsi ».

Moi, cette phrase, je ne l'aimais pas trop parce que si Dieu l'aimait, il le laisserait parmi nous, non ?

En grandissant, j'ai compris que la mort n'a rien à voir avec le fait d'être aimé ou pas. Ou d'être bon ou mauvais. La mort ne regarde pas à la tête ou aux antécédents. Elle frappe à la porte au moment venu et on n'a pas le choix. On s'en va avec elle.

Tout comme faire face à son destin.

Et moi, aujourd'hui, mon destin c'était d'être policière, puis de travailler au FBI pour inciter davantage de femmes qu'elles soient noires, blanches, rouges, jaunes, vertes ou bleues à oser faire ces métiers risqués, mais on sauvait aussi de cette manière. De toute façon, la vie était risquée en soit.

Entre vous et moi, je veux bien plus. Je voulais diriger une unité d'élite. Je voulais être à la tête de cette unité pour protéger la population américaine et mondiale de toutes les menaces possibles.

Vous savez, je suis convaincue que nous pouvons faire tout autant de choses que les hommes. Et j'y crois. Avec les femmes au commande, peut-être que ça serait moins l'anarchie mondiale...quoique les femmes, nous pouvons être bien plus dangereuses que les hommes et ça, c'est un débat, cette comparaison entre les hommes et les femmes, alors qu'elle ne devrait pas avoir lieu d'être. 

Bref, je me gare non loin de notre poste de police qui est très grand.

Je souffle un bon coup avant de quitter ma voiture personnelle - dont Billie pourrait profiter si elle se réveillait plus tôt cette idiote que j'aime - et je me dirige vers l'entrée du poste.

Il a beau être 8 heures 15, ça fourmille déjà de partout.

Je salue quelques collègues par politesse et m'avance vers Cassandra, l'une des femmes noires qui travaille ici depuis 10 ans. Elle s'occupe de l'accueil et elle, elle porte l'uniforme. Elle est âgée de 45 ans et elle est à mourir de rire cette femme.

Et oui, dans le poste, nous sommes 10 femmes sur 40 hommes et les femmes noires, nous étions au nombre de trois et les autres étaient blanches, c'est pour vous dire !

Et j'étais la seule qui travaillait dans l'unité spéciale. C'est quand même une sacrée chance même si ce n'était pas facile. J'ai travaillé dur pour avoir ce poste.

Et l'autre qui s'appelle Marilyn était agent de paix et faisait des patrouilles dans les rues de New-York.

Évidemment, on s'entendait très bien toutes les trois se sentant liées à cause de notre couleur.

— Salut Cassandra ! lancé-je avec joie.

Elle relève sa tête vers moi et repousse ses cheveux lisses d'extensions. Cette femme était belle à n'importe quelle heure de la journée.

— Heeey ma chérie Edna ! Comment tu vas ma belle ?

— Très bien, merci. Le patron est là ?

— Oui, il est là, me répond-t-elle. Je crois que vous avez des nouveaux cas aujourd'hui.

— OK. On déjeune ensemble ?

— Bien sûr ma belle ! J'ai fait du poulet au parmesan pour toi !

— Ohhh, dis-je tout en commençant à marcher à reculons, là, tu me parles d'amour là.

Nous rigolons et je lui fais un petit signe de main avant de monter à mon étage.

Je ne calcule pas trop les hommes qui ne me calculent pas non plus et en deux minutes, je suis dans notre unité.

Dans notre unité, nous sommes dix en plus de notre patron et nous sommes deux femmes.

Ma collègue Brittany Nurs n'est pas la plus aimable du monde. Elle est, à vrai dire, insupportable et pense être la meilleure. Ça fait deux ans qu'on évite de se parler parce que ça finit toujours en conflit.

Cette fille, j'ai juste envie de l'étriper avec ses manières ridicules.

Je passe donc près de son bureau sans la saluer pour me diriger vers le mien.

Pour l'instant, il n'y a aucun de nos collègues masculins.

Je range un peu même si mon bureau est le plus organisé de notre unité et je vérifie si j'ai des mails.

Super, j'en ai aucun d'importants. 

Je commence à m'avancer sur des affaires de plaintes lorsque les sept hommes arrivent avec leur grosse voix et leur éclat de rire.

Ça sent le café et je relève ma tête, car je sais que mon seul ami de l'unité va m'apporter le mien car il est le seul à penser à moi.

Il me sourit et s'avance vers moi avec mon gobelet dans sa main, en contournant le groupe qui encercle Brittany comme si c'était le Messi. Il ne traînait pas avec eux, mais comme tout le monde se rendait au même café le matin, il les croisait bien évidemment.

C'est comme ça, chaque matin depuis deux ans.

Gideon et moi, et puis les autres.

— Salut Edna Sunshine !

— Arrête de m'appeler comme ça Gideon, le réprimandé-je gentiment tout en prenant mon gobelet, sinon ça va mal finir pour toi.

Mh, ça sent bon mon Latte au caramel.

Billie et moi, on pouvait en boire 15 fois par jour sans être écœurées. C'est tellement bon avec beaucoup de sucre. Nous sommes droguées à ça que ça soit hiver ou été, matin ou soir, notre Latte au caramel était notre allié.

— Comment ça va Gideon ? le questionné-je après une gorgée de ma liqueur chaude.

— Bien, j'ai passé un bon week-end et toi ?

— Comme d'hab', j'ai traîné avec cette cinglée de Billie.

Il secoue la tête avec un sourire en coin.

Gideon me connaissait bien.

En deux ans, nous avions pu former une amitié solide. Tellement solide qu'il m'avait confié un secret le concernant pour intégrer l'unité.

Vous savez, certains trichent sur leur CV ou leur diplôme et il en faisait en quelque sorte parti.

J'avais compris qu'il avait confiance en moi avec ses grands yeux bruns et ses cheveux bruns. Il était adorable avec sa moue innocente.

Gideon Mitchell avait le même âge que moi, mais il avait fait sa formation à Atlanta avant d'être muté ici, une fois diplômé.

Lors de notre premier jour, je me suis de suite liée d'amitié avec lui, car il n'était pas ce type machiste qui demandait pourquoi les femmes faisaient ce métier.

Il était plutôt calme mais sur des interventions, c'était un vrai monstre. Il était au taquet et se donnait à mille pour-cent. En fait, il n'en faisait pas trop comme certains mecs de notre unité que je détestais, alors on faisait toujours en sorte de travailler ensemble.

C'était un amour.

Et donc, il connaissait très bien Billie parce qu'il venait chez nous ou on sortait avec lui avec d'autres amis.

Billie et moi n'avions pas des tonnes d'amis. Et ce, depuis la primaire où nous nous sommes rencontrées.

J'étais la petite noire dans cette école où la plupart était blanc et parlait anglais tandis que je parlais encore français - que je parle toujours bien sûr - et elle, c'était la petite blonde qui parlait espagnol car elle avait vécu au Mexique avec sa mère durant son enfance et donc, elle devait aussi apprendre l'anglais.

Ça a de suite collé et on ne s'est plus lâché.

On n'avait pas besoin des autres pour s'amuser. À deux, on s'amusait très bien.

Puis Maria Fernandez a rencontré ma mère à la sortie de l'école et vous devinez la suite, elles sont devenues amies de part leur statut d'immigré.

— Vous avez encore glandées chez vous ? pouffe-t-il.

— Non ! On est sorti quand même pour faire les courses, Deon. 

Il roule des yeux et je le frappe à l'épaule alors que la grosse voix de notre patron nous salue.

On se tourne dans sa direction pour regarder Anthony Taylor dans toute sa splendeur.

Cet homme était un géant avec sa musculature imposante. Il était quand même séduisant et c'était l'un des rares patron noir d'une unité générale. Il fallait le dire. Surtout aux États-Unis où le racisme professionnel était encore ancré dans les mœurs.

— Jeunes gens, nous avons plusieurs affaires aujourd'hui à régler, dit-il en passant parmi nous pour remettre les dossier. Une affaire de viol où la victime a mystérieusement retirée sa plainte, retrouver une mère qui a abandonné son enfant dans une décharge et enfin, enquêter sur une potentielle affaire de pédophilie.

Affaires classiques pour un début de semaine. Et nous devions les résoudre le plus rapidement possible pour prendre d'autres affaires en charge.

J'attrape mon dossier et je vois que je suis sur le cas du viol tout comme Gideon à qui je souris parce que je suis heureuse de me retrouver avec lui sauf que dans «  le groupe qui ne s'approche de nous » sans grande raison, l'un d'eux élève sa voix pour se plaindre.

— Oh non, je suis avec la guenon et la tapette ! Pardon, je veux dire la noire et le gay. 

Certains gloussent et moi, je vois immédiatement rouge, parce que ça m'insupporte. 

Je relève immédiatement la tête en sachant tout bonnement qui a dit ça, parce que ça fait deux ans qu'il sort ce genre de propos intolérables et deux ans que je lui réponds d'aller se faire foutre en me retenant de l'encastrer dans le mur, car j'ai la voix de ma mère et de mon père qui me répètent « Ne cède pas à la colère face à des propos blessants ! Tu vaux mieux que ça ! ».

Mais là, je ne pouvais plus. C'était trop. Nous sommes lundi !

Le lundi, t'es calme, tu viens à peine de quitter le dimanche, putain ! 

Le lundi, ce n'est jamais facile pour personne surtout lorsque c'est pour travailler avec des individus irrespectueux que tu as envie d'achever. 

Je balance le dossier sur mon bureau avant de me lever, prête à casser des gueules ce matin. 

— Pardon ? laché-je en m'avançant vers le groupe malgré la tentative de Brighton de m'arrêter.

Ils se taisent tous et me fixent surpris. En général, je prends sur moi et je fais mon boulot en priant qu'il aille brûler en enfer.

— Agent Fall, me menace Anthony derrière moi.

Je lui fais un signe de main pour lui dire de se taire et toise avec mépris la bouche pourrie de ce type. Le concerné croise les bras et sourit avec dédain, tout fier de lui.

— Tu te sens comment avec ce genre de propos ?

— Très bien, répond-t-il en haussant les épaules. Il n'y a rien de discriminant. J'exprime juste mon mécontentement. On a plus le droit de donner son avis Fell ?

Je ricane nerveusement car il adore écorcher mon nom en plus de son comportement exécrable et me retourne vers notre patron qui m'observe.

Aujourd'hui, ça ne va pas le faire...

— Écoutez Chef, lancé-je, ça fait deux ans que j'essaye de ne pas lui casser la gueule pour chacun de ses propos dégueulasses et immatures pour un homme de son âge ! Deux ans ! appuyé-je. Aujourd'hui, je ne vais pas me taire ! Alors ça, non ! C'est fini la Edna qui supporte. Tu m'insultes de guenon, genre parce que je suis noire et que les racistes considèrent les noirs comme des singes, alors que ton patron est noir et que deux de tes collègues sont noirs ?! T'es con ou quoi ? C'est quoi ton but au juste ? 

Il hausse les sourcils et persiste à me fusiller du regard.

Je décide donc de m'adresser à ses deux collègues noirs qui ne le reprennent pas lorsqu'il dit des choses comme ça.

— D'ailleurs, vous, vous êtes vraiment pathétiques, alors que vous pourriez défendre votre sœur noire et un mec qui est gentil et respectueux. Tout ça pourquoi ? Moi, je vais vous dire pourquoi. Parce que son père a de l'argent et qu'il dirige une grosse firme de merde ! Vous lui sucez les boules alors qu'il est entré ici par piston et certainement pas pour son talent ou son travail car Elliott Levy n'est qu'une merde et qu'il est nul à chier ! clamé-je les poings serrés.

— Agent Fall ! s'exclame le patron. Ça suffit !

— Non, je n'ai pas fini, dis-je en m'approchant d'Elliott qui serre les poings. Regarde-moi, Elliott ! Regarde-bien ce que la noire va te faire.

Et sans qu'il ne s'y attende, je lui fous un coup de genoux dans ses bijoux de famille. Il se recroqueville immédiatement.

Tous les mecs s'exclament en compassion à sa douleur tandis qu'il se tord et gémit comme un bébé.

— Espèce de ...

— Quoi ? chuchoté-je à son oreille. Oui, je suis noire et fière de la femme que je suis. Alors si tu as un problème de fierté parce que je suis meilleure que toi, ce n'est pas mon problème, Elliott. Ce coup, c'était pour tous tes propos racistes et sexistes que tu as dit pendant deux ans et pour le « tapette » à Gideon qui vaut mieux que toi. Moi aussi je pourrai t'insulter de pauvre bla...

— EDNA DANS MON BUREAU TOUT DE SUITE ! gronde Taylor, mécontent.

Ce coup, j'en rêve depuis deux ans.

Taylor m'attrape par le bras pour me sortir de notre unité - car j'avais dans l'idée de lui donner un coup de poing qui l'aurait sonné - et pour m'emmener dans ce bureau.

Tout le monde nous dévisage pendant qu'on traverse le couloir. J'essaie d'échapper à son emprise autour de mon bras mais rien n'y fait, il me tient fermement.

Une fois dedans, il referme la porte violemment et se poste face à moi bouillonnant de rage.

— Mais qu'est-ce qu'il t'a pris Edna ?

Je ne dis rien et le fixe en colère.

— Ce que tu as fait est intolérable !

— Et ses propos le sont peut-être ? m'écrié-je. Ça fait deux ans Chef qui joue à ce jeu là ! Deux ans ! À chaque fois, je me dis, ne réponds pas à ce petit con ! Laisse-le ! La roue tourne mais aujourd'hui, ça suffit ! Je refuse de subir sous vos yeux alors que tu es toi-même noir. Lorsqu'il m'insulte, il t'insulte ainsi que Jackson et Chris, ainsi que les autres noirs de notre poste ! Si ça ne te touche pas, moi, ça me touche et je ne veux plus me laisser faire ! Rien à battre !

Oui, comme nous étions seuls, je me permettais de le tutoyer, même si j'aurais pu le faire devant mes autres collègues. De base, nous nous tutoyons tous pour être sur le même pied d'égalité. 

Je croise mes bras pour lui montrer que je ne compte pas abdiquer.

Et il me dévisage ne sachant que faire de moi parce qu'il sait très bien que j'ai raison.

— Tu prends ta journée, je ne veux pas te voir au poste aujourd'hui, dit-il.

— Quoi ? Non, je refuse ! Je reste !

— JE COMMANDE EDNA ! s'écrit-il. Et n'avise plus de dire que je lui suce les boules parce que ce n'est pas le cas. Je n'ai pas peur d'Elliott, ni de son père ou de sa famille ! Est-ce clair ? En voulant te défendre, tu rentres dans son jeu et tu fais comme lui, ce qui est stupide. 

Son doigt est devant ma face et son air est menaçant mais je n'en démords pas.

— Alors pourquoi tu n'as jamais rien dit ?

— Parce que c'est un petit con comme tu le dis ! Il est peut-être entré dans notre unité par piston, je ne sais pas, mais si c'est le cas, ça se verra à l'examen. La roue tourne Edna. Ne pas se laisser emporter par son impulsivité, c'est important chez un agent. C'est important chez un flic. Tu bosses très bien ici et tu as tes projets d'avenir, alors ne te laisse pas atteindre par ce genre de propos. Sinon, la prochaine fois, je serai obligé de faire un rapport et de le mettre dans ton dossier. C'est clair ?

Je ne dis rien et le regarde fixement.

Puis, je finis par hocher doucement la tête.

Il a raison. Je dois garder mes objectifs en tête. Ce petit chien de la casse d'Elliott n'allait pas briser mes rêves si près.

— Et ne rentre pas dans son jeu de raciste. Tu t'en moques, d'accord ?

J'acquiesce encore une fois, il me tape une petite tape à l'épaule et j'ouvre la porte.

Je marche devant lui car il joue l'escorte et je sens une nouvelle fois tous ces regards curieux et lorsque je regagne notre unité, ils me regardent tous surtout ce connard que j'ai envie de frapper de nouveau.

Il a de la chance qu'Anthony soit là sinon ... je rigole toute seule comme une folle en m'imaginant ce que je pourrai lui faire.

Je mets ma veste et fixe Deon pour qu'il comprenne ce que je compte faire.

Je crois qu'il a compris et je passe près du bureau d'Elliott et lui présente mon majeur avec le sourire.

Mais un sourire qui vient du cœur car je pense à Billie qui serait hilare et qui sauterait de joie.

Je lui raconterai ce soir.

Elle déteste autant que moi Elliott qu'elle a croisé quelques fois en venant me chercher.

À chaque fois, elle me dit « Frappe-le Ed ! Un uppercut à la mâchoire et bam ! K.O technique pour ce raciste et homophobe de merde ! ».

Et moi, à chaque fois je lui répondais que je devais écouter les paroles de mes parents.

Parce que même si papa ne me soutient pas à 100 % dans ce boulot qu'il juge inadéquate pour une femme et une jeune femme noire en plus, il voulait que je prenne sur moi car il savait que j'étais impulsive et bornée.

D'ailleurs, je ne savais pas de qui j'avais pris ça parce que papa était patient et ne se sentait pas touché par ce genre de propos et ma mère encore moins.

Mais, je suis sûre que c'est de mon père.

Anthony me raccompagne jusqu'à la sortie et je me tourne vers lui.

— Tu reprends l'affaire demain, me dit-il.

— Change-le de groupe sinon, je vais le flinguer lorsque je me retrouverai seule avec lui.

Il rit doucement.

— Allez, rentre profiter de ta journée Fall. À demain.

— Ouais c'est ça, grommelé-je en fourrant mes mains dans mes poches.

Je me dirige vers ma voiture et j'attends bien sagement que Gideon (Deon c'est son surnom hein pour ceux qui ne l'avaient pas compris) et Elliott sortent du bâtiment pour se rendre à l'hôpital où la jeune femme nous attend pour qu'on l'interroge.

Anthony a dit qu'il ne voulait pas me voir au poste, pas que je ne pouvais pas travailler, nuance.

Ils se décident de sortir à plusieurs à 9 heures.

Deon est devant Elliott et se dirige vers la voiture de fonction. Je le vois sortir son téléphone pour certainement m'envoyer un message. Il me donne l'adresse et je démarre aussitôt pour les retrouver à ELMHURST HOSPITAL CENTER qui se trouve dans le Queens.

*

J'arrive cinq minutes avant eux et j'attends devant l'entrée, car je ne sais pas comment s'appelle la victime, encore moins le numéro et les informations la concernant.

Ils finissent par arriver et Gideon est le premier à sortir du véhicule de police.

Elliott écarquille les yeux de surprise en me voyant.

— Tu n'es pas supposée être là ! dit-il.

— Quoi, tu vas le rapporter à ton patron noir ? En plus d'être raciste et homophobe Deon, c'est une balance !

Je prends le dossier que me tend Deon et nous entrons dans l'hôpital.

OK, caractéristique de la victime : victime de race blanche, 20 ans, aucun antécédents médicaux, arrivée ce matin à 8 heures. Nom : Banks Prénom : Mary.

Je parcours encore le dossier tandis qu'Elliott piaille derrière nous par rapport à ma présence mais on ne l'écoute même pas.

— Je vais la questionner Deon, lui dis-je en rendant le dossier, elle parlera plus facilement.

— D'accord.

— Tu ne devrais pas être là, Edna ! répète-t-il.

Je fais volte-face tellement vite qu'il recule d'un pas s'attendant que je le frappe de nouveau.

Un petit rire m'échappe ainsi qu'à mon ami.

— Je savais que c'était toi la tapette ! Tu veux mon téléphone pour appeler le Chef Taylor ?

On se dévisage durement et je lui tapote la joue car il ne répond rien.

— C'est bien, Elliott. Ça commence à rentrer dans le crâne.

Je demande à la standardiste si je peux aller voir la patiente après lui avoir montré mon badge de flic et elle me donne l'accord.

Je frappe donc à la chambre et entre dans la chambre sans les garçons.

La victime est allongée sur son lit et je l'entends sangloter.

Je me sens mal et la rage bouillonne en moi lorsqu'il y a ce genre d'affaire.

La pauvre fille, sa vie ne sera plus jamais pareille à cause d'un type qui ne savait pas garder son appareil dans son pantalon.

Si seulement j'avais le pouvoir de sauver toutes ces femmes qui souffrent de ce genre d'atrocité...

Je m'avance doucement vers son lit en me présentant.

— Bonjour Mary. Je suis l'agent Fall. Je suis là en raison d'une déposition d'agression sexuelle. Puis, apparemment la plainte a été retirée. Nous sommes obligés d'enquêter.

— Dégagez ! Je n'ai rien à dire !

— Alors quelles sont les causes de vos larmes ?

Elle me regarde rapidement par-dessus son épaule et repousse ses cheveux châtains de son visage.

— Je suis fatiguée, dit-elle.

— Dans votre dossier, il est marqué ... que ... que cet acte se serait produit lors d'une soirée étudiante.

— Laissez-moi s'il vous plait. Je ne veux plus en parler.

Je soupire et décide de jouer ma carte que je sors toujours dans ce genre d'affaire. D'ailleurs, tout le monde me demande comment je fais pour qu'une victime se confie à moi si facilement.

— Mary. Je suis une femme comme vous. J'ai une sœur qui est à l'université et ce genre de soirée, je lui interdis d'y mettre les pieds parce que ce genre de choses arrive trop fréquemment et beaucoup d'universités ferment les yeux dessus. Ces hommes qui agissent de la sorte doivent être punis. Vous ne pouvez pas retirer votre plainte, alors qu'il y a des preuves de viol, je suis désolée. En faisant ça, c'est comme si vous dites à ces hommes que ceux qu'ils font, est normal alors que ce n'est pas le cas. Je sais bien que ... que ça ne soignera pas les dommages causés mais vous devez vous battre ! Faites-le pour toutes ces femmes du monde, faites-le pour vous ! Ne le laissez pas gagner et ne craignez rien ! Nous sommes là pour vous protéger.

Après de longues minutes, elle finit par me regarder.

— Vous allez vraiment me protéger ?

— Bien sûr. Comment s'appelle-t-il ?

Je rajoute « ce salaud » mentalement car je n'ai pas le droit d'insulter devant une victime. Ce n'est pas professionnel.

*

Je sors de la chambre après avoir obtenu assez d'informations sur cette triste histoire, mais fréquente aux États-Unis.

Le viol dans une soirée universitaire.

C'est malheureusement le même genre de type : enfant friqué qui se croit tout permis et qui drogue une jeune fille pour la violer à son insu.

Ensuite, elle porte plainte puis soudainement, cette plainte disparaît parce que les parents interviennent pour protéger l'avenir prestigieux de leur enfant merdique.

Scénario typiquement courant.

Lorsque les gars me voient, ils m'observent, mais je ne regarde que mon compagnon de route.

— Alors ?

— Les parents sont intervenus. Cas classique, ajouté-je. Contacte Taylor pour qu'il la mette sous protection et rends-toi à cette adresse. C'est là que le criminel en puissance vit, dis-je en lui donnant le papier avec l'adresse.

— OK. Tu lui as encore sorti tes paroles magiques ? me sourit-il.

— Ouais. Les individus qui ont une case en moins, à l'esprit étriqué, doivent payer leurs erreurs, n'est-ce pas ?

Je croise le regard d'Elliott et lui lance un sourire hypocrite.

— Je te laisse finir, dis-je à mon co-équipier. Tu me tiens au courant.

— D'accord. Merci Ed !

— De rien beau gosse !

— J'existe vous savez ! lance Elliott.

On le regarde tous les deux et on rit.

— Mieux vaut que tu ne me parles pas parce que ce que j'éprouve pour ta personne, c'est du dégoût. Tu es répugnant, Elliott.

Il lève les yeux et Deon m'avertit que Marilyn a tenté de me joindre car elle est en patrouille non loin du café du coin pour qu'on se rejoigne.

Je le remercie de m'avoir fait passer le message et je les laisse non sans laisser un regard virulent à ce type sans scrupule.

*

— Alors ça ! Quand je vais le raconter à Cassandra et à mon mari, ils vont sauter de joie ma chérie ! T'as bien fait ! Il le méritait ! Si seulement j'étais là ! Tchiiiiip ! fait-elle avec ses ongles manucurés.

Je ris et prends une gorgée de mon second Latte de la journée.

Voici, Marilyn Williams dans toute sa splendeur. Un rayon de soleil comme Cassandra.

Elle bossait en tant qu'agent de patrouille depuis maintenant 7 ans.

C'est presque une grande-sœur pour moi du haut de ses 30 ans.

Dès mon arrivée, elles sont directement venues vers moi et m'ont dit de m'accrocher face au machisme dans ce milieu masculin. Je leur avais dit que je n'avais peur et ça les avait fait rire.

Sérieusement, je ne craignais que Dieu et mes parents après le reste, je m'en moque très franchement.

Je te respecte si tu me respectes, tout simplement.

— En tout cas, il ne va pas l'oublier ce coup, dis-je.

— C'est clair ! Fallait faire plus, sérieux ! Heureusement qu'il ne s'adressait pas à moi hein quand il disait ça ! Sinon, je lui aurais décollé une gifle que sa mère aurait senti même ! Tchiiiiip ! Enfant du diable !

J'éclate de rire parce qu'elle est carrément cinglée et sens une vibration dans ma poche.

Je sors mon téléphone pour voir que ce message vient de Billie.

Je l'ouvre et ris davantage.


De Billie Crazy ❤️:

J'ai été viré à cause de tes doigts de sorcière !

J'espère que tu vas inverser le sort parce que je sens que je vais te tuer Edna !

Je n'ai plus de boulot et je suis déjà en dépression. 😭

VILAIIIIIIINE !


— Qu'est-ce qu'il y a ? me demande Marilyn.

Je lui montre mon téléphone et elle sourit.

— Awhh la pauvre ! Toujours en retard ?!

— Toujours ! Cette fille a un problème avec le travail. Si elle se réveillait tôt, je pourrais la déposer à son lieu de travail mais elle se couche tard et en plus, elle accuse les autres après !

— J'aime Billie !

Je décide de lui répondre par un simple émoji pour lui foutre la rage.

Je lui avais bien dit que ça arriverait. Encore.

— Bon ma chérie Edna, je dois retourner au boulot. Toi, rentre chez toi dormir ou faire du shopping et dis bonjour à tes parents de ma part, d'accord ?

— Ça sera fait. Passe une bonne journée.

— Et encore bravo pour avoir botté le cul à ce petit imbécile ! On dresse un homme par ce qu'il a entre les jambes !

Je secoue la tête tandis qu'elle quitte la café.

Je finis rapidement le mien et décide de le quitter lorsqu'un serveur déboule de je ne sais où et entre en collision avec moi.

Je me retrouve au sol, du café chaud sur moi.

— Oh mon Dieu, je suis désolé ! Je reviens !

Je me relève doucement tandis que certains clients s'inquiètent pour moi et sa collègue revient avec des serviettes. C'était une forte collision dis donc !

Et ce n'est décidément pas ma journée.

Je m'essuie et décampe rapidement après la honte que je viens de prendre en tentant d'effacer les traces de café sur moi.

Franchement, il y en a qui ne devrait pas faire ce métier. 

Je regagne ma voiture après avoir jeté les serviettes tachées de café et me masse le bras.

Je suis tombée dessus donc c'est douloureux. Mais c'est de sa faute à cet autre imbécile !

Connard.

*

Lorsque je suis rentrée, j'ai mis ma veste dans un sac pour pouvoir l'emmener au pressing du coin de notre rue. Puis, j'ai fait le ménage car Billie ne le ferait jamais et ne le faisait jamais. 

Et comme je suis sa meilleure amie et je suis gentille, j'ai rangé sa chambre.

Une fois satisfaite des tâches ménagères accomplies, j'ai pris une douche et me suis préparée pour me rendre chez mes parents non loin de Brooklyn.

Je vous chasse rapidement les pensées concernant Brooklyn comme un quartier malfamé avec une grande population de noirs.

Oui, il y a des noirs, mais aussi des blancs, des latinos et des chinois.

Et malfamé, ça dépend d'où. Comme partout dans le monde.

En tout cas, où mes parents vivaient, c'était tranquille. De plus, ils avaient déménagés dès lors que j'avais quitté la maison pour vivre en colocation avec Billie.

Je n'oublierai jamais comment j'ai bataillé avec mon père qui ne comprenait pas pourquoi je voulais quitter la maison. Il me disait « Mais pourquoi tu veux quitter chez toi ? Tu as un lit, à manger, la télé, tu veux quoi de plus hein ?! ».

Imaginez ça avec le léger accent qu'il adorait exagérer. D'ailleurs, il était content de ne pas l'avoir perdu. Selon lui, ça lui rappelait d'où il venait et son parcours. 

Enfin bref, il a fini par céder car mon frère m'a apporté son soutien ainsi que ma mère.

Puis, il aimait beaucoup Billie. Il l'adorait même. Tout le monde l'aime à la maison. C'est la troisième fille de la famille.

J'arrive donc chez eux et insère les clés.

J'entends le son de la télé et je devine que c'est ma petite Hanna Banana qui doit regarder ça.

Elle lève sa tête vers moi et me sourit.

— Ça va la moche ? lance-t-elle.

Je lui flanque une claque derrière la tête qui l'a fait rire et m'assoit à côté d'elle.

— Et toi encore plus moche que moche ? Où sont les parents ?

Elle hausse les épaules et reprend son visionnage télé.

Je hais la télévision et je ne regarde que des séries. Quand je regarde la télé c'est ce que vraiment, mais vraiment, je n'ai rien à faire.

Ma sœur adore regarder ça, avec les télé-réalités américaines et les Top Models USA.

Pendant une année de sa vie, elle nous a bassiné avec cette émission. Elle s'était même inscrite en secret pour pourvoir y participer et elle a été prise pour le casting.

Il est vrai qu'elle est jolie ma sœur. Elle me dépasse, elle est toujours très coquette et elle peut facilement faire ce genre d'émission mais mon père lui a dit « Toi, Hanna Fall, porter des maillots de bain à la télé, et être nue devant les gens, c'est ça le métier que tu veux faire ?! Montrer ton corps ?! Mais tu es malade ! Moi, Idriss Fall si je te laisse faire ça, je ne suis pas un homme ! ».

Mon père lui a décollé une gifle en ajoutant un petite insulte à la sénégalaise et moi, j'ai ri avec Zac.

Entre frères et sœurs, tu ris très souvent du désarroi de l'autre sans aucune honte. Même si ce n'est pas juste, je vous l'accorde. 

Mais, elle était allée trop loin dans ses délires en nous mentant. 

Elle était mieux à l'université pour faire ses études de médecine qu'elle cartonnait d'ailleurs.

Elle, ça serait un futur médecin. Dr Hanna Fall et rien d'autre.

Après bien sûr, je ne juge pas ces femmes qui font du mannequinat. Chacun sa vie et son objectif, mais ce concept d'exposer son corps à la vue de tous, ce n'était pas très ancré dans beaucoup de culture et particulièrement dans la culture africaine où la pilule ne passe pas. 

Ensuite, je pars du principe que chacun fait ce qu'il veut de son corps. Et donc, nous étions contents pour les grandes top modèles d'origine africaines comme Naomi Campbell, Ajak Deng, Katoucha Niane, Iman la femme de David Bowie, Alek Wek, Liya Kebede et d'autres.

Je suis très contente qu'elles représentent la beauté noire.

Mais dans ce secteur, il y a trop de dangers et les dictas de la perfection comme le voit cet univers, peuvent engloutir une personne.

Ma Hanna Banana n'avait pas assez de caractère pour faire ça. Elle se serait noyée trop rapidement. 

— Ça va les cours ?

— Yep. J'ai eu un A- à mon devoir mais ça va. Et toi, Madame la policière ?

— Ça va. Aujourd'hui, j'ai réglé le compte d'Elliott.

Elle se redresse comme une fusée et me regarde avec un sourire sadique.

— Tu mens là ? Le beau gosse raciste ?!

— Quel beau gosse raciste ! Il a le démon en lui. Il n'y a rien de beau. Il est grave mauvais. 

Elle rigole et je lui raconte.

Pour l'avoir vu une fois, elle l'avait trouvé « ar-chi beau » comme elle le disait. Et Billie aussi admettait qu'il était beau.

Moi, je ne trouve pas ...

Bon. Il est passable.

Il a juste des yeux gris, des cheveux noirs et il est grand mais c'est tout. Ce n'était pas un truc de dingue. 

— Putaiiiiiiin Edna ! T'as dé-chi-ré ! Tu n'es pas une Fall pour rien ! me dit-elle en me frappant dans la main.

— Pourquoi ce n'est pas une Fall pour rien ?

Nous n'avions pas entendu nos parents rentrer.

Mama travaillait toujours à la crèche et papa travaillait juste à l'aéroport. Il ne pilotait plus d'avion ou il ne faisait que les petites destinations.

Il avait assez voyagé dans les airs comme il le dit souvent.

Et vous savez bien qu'aux États-Unis, l'âge de retraite est de 65 ans, mais tout le monde continue après.

Bon, mes parents ne les avaient pas atteints, mais ils envisageaient de continuer à travailler après la retraite. Ils ne faisaient pas du tout leur âge.

Je me lève donc pour les saluer en leur faisant un bisou chacun et prends les courses de leurs mains.

J'ai envie de frapper Hanna qui s'en fiche complètement et fait comme si de rien était.

— Pourquoi tu n'es pas allée faire les courses avec mama et papa, Hanna ? gueulé-je en apportant les affaires dans la cuisine.

— Ahhh laisse-là ! me dit ma mère en me frappant. Elle était fatiguée. Et ton père et moi, on se débrouille bien.

— Je te jure ! lâche mon père. Elle croit qu'on est rouillés ! Aucun respect cette fille !

Je ris.

— Mais vous pouvez m'appeler et je ferai les courses pour vous. 

Ma mère lève les yeux et mon père quitte la cuisine.

Les courses, il pouvait les faire, mais ranger, ce n'était pas pour lui.

Il avait encore son éducation où la femme s'occupait des tâches ménagères et l'homme apporte l'argent à la maison.

Bien sûr il l'aidait mais le moins possible ...

Et lorsqu'il avait fait le ménage, oh là là, il nous fatiguait avec pendant une semaine.

— Ça va ma fille ?

— Oui, répondé-je tout en rangeant.

Elle me sourit et j'en fais de même.

Ma mère était un bijou d'une valeur inestimable. Une vraie force de la nature. Elle est belle et j'adore son style coloré qu'elle arbore avec harmonie. Son petit foulard-turban ne quitte jamais sa tête sauf quand je dois lui faire des nattes collées et elle manie très bien le style occidental et le style africain.

Une vraie reine. Ma reine.

— Et comment va Billie, ma troisième fille ?

— Ça va. Elle a encore été virée.

Maman éclate de rire et mon père débarque.

— Ehhhh Eva, ta fille, faut la corriger ! Elle est partie frapper son collègue de travail !

— J'ai rien dit ! hurle ma sœur du salon.

Ma mère me dévisage et mon père me toise, mécontent. 

— Ça fait deux ans que je supporte ses propos racistes et homophobes. En plus, je vous l'ai dit qu'un jour, ça arriverait. Aujourd'hui, c'était trop alors je l'ai frappé !

— Frappé ?! tonne mon père en lâchant un petit ricanement par la suite. Tu as faillis le rendre stérile !

Ma mère pose une main sur sa hanche irritée et je souris, jaune.

— Je dois y aller, où est le gâteau de Billie ?

— Edna ! s'écrit-elle. Même s'il est raciste et homophobe, laisse-le ! Pense à ton travail.

— Moi, je vous ai dit que ce travail n'est pas bon pour une femme. Et s'il se venge ? questionne mon père.

Je soupire.

— Je sais me défendre papa et il a compris maintenant.

— Qui t'as dit ça ? Sa bouche ?! continue mon patriarche en colère. Les racistes bêtes comme ça, il faut les laisser. Ils sont dangereux Edna ! Je vais appeler Zac. Il va venir te corriger aussi parce que je n'ai plus la force !

Il commence à parler Wolof - la langue sénégalaise que je comprends très bien - et il s'en va.

— Edna ma chérie, me dit ma mère avec une voix douce.

Elle prend mon visage en coupe et se met sur la pointe des pieds pour me faire un bisou sur le front en disant qu'elle m'aime, dans sa langue maternelle à elle, l'afrikaans que je comprends tout aussi bien.

— Essaye de te contrôler. Déjà que ton père a peur pour toi, ça, ça va lui provoquer un arrêt cardiaque. D'accord ?

— OK, capitulé-je.

— C'est bien. Le gâteau est dans le four. Rentre, il commence à se faire tard.

— Ça va, je n'habite pas loin non plus.

— Tu es trop insolente avec moi, jeune fille !

Je ris, prends le gâteau qui sent super bon et lui embrasse la joue.

— Je passe dans la semaine et Marilyn te salue et Billie aussi.

Je regagne le salon et trouve mon père devant la télé en train de changer de chaines en parlant dans sa barbe.

Je m'approche de lui, lui prends la main et y dépose un bisou.

— Je ne le frapperai plus, papa.

— Ouais ouais !

— C'est vrai !

— Si tu changeais de métier, c'est mieux ! Tu as trop la tête dure, Edna !

Je roule des yeux. Je ne veux même pas rentrer dans cette conversation avec lui. On l'a eu des milliards de fois.

— Allez, je rentre, je passe dans la semaine.

Il me chasse d'un geste de main et je frappe ma sœur au front avant de déguerpir, car elle commence à se plaindre comme si elle avait 10 ans.

Je sors mon téléphone pour contacter la pizzeria de chez nous et passe commande.

J'espère que Billie va aller les récupérer.

*

Quand je rentre à la maison, je sens la pizza et j'entends surtout des sacs de magasins.

Billie est là et elle a encore fait ses conneries.

Dès que je claque la porte, les bruits cessent.

Je rentre directement dans le salon et Billie fonce dans sa chambre avec ses sacs pour s'y enfermer.

Je frappe à la porte de sa chambre.

— Billie t'as encore dépensé !

Cette fille ne sait pas faire d'économie et à la fin du mois, elle pleure et me demande sans cesse de lui prêter de l'argent que je lui passe parce que je ne peux pas lui résister.

Elle le sait !

— Oui mais c'est ma thérapie de licenciement ! Puis, c'est de ta faute ! m'accuse-t-elle.

— Je te jure que tu ne manges pas de gâteau ! proclamé-je en commençant à faire demi-tour pour gagner notre salon.

— Quoi ? Non ! J'ai dépensé 150 dollars ! Et je peux t'offrir des talons qui sont magnifiques. 

Je m'arrête en cours de chemin et elle ouvre un peu la porte.

— En plus, tu as rangé ma chambre alors ...

Elle me montre les talons en les agitant.

Ohhhh ! Elles sont canons !

— T'as dépensé plus que 150 dollars. Menteuse !

— Oui bah c'est mon argent hein ! Tiens cadeau !

— Haha merci ! Et ce n'est pas un cadeau parce qu'en fait, tes pieds potelées ne rentrent pas dedans !

— Han ! T'es la pire amie que je connaisse ! dit-elle faussement choquée. 

Je rigole, prends les talons qui m'iront parfaitement et les balance dans ma chambre.

— Allez, viens j'ai faim ! Il faut que je te raconte un truc dément !

— T'as un mec ?!

Je la toise. Elle est toujours hors contexte.

— Quoi ? Je demande ! Je propose qu'on s'inscrive sur un site de rencontre !

Je ne l'écoute déjà plus.

*

— Pourquoi je n'étais pas là putain de merde ?! s'exclame-t-elle après que je lui ai raconté l'épisode Elliott. J'aurais payé ce moment à 1000 dollars ! Bien fait pour lui ! Juste, il en a une grosse ?

Je m'arrête de manger, atterrée par ses propos. Je vois très bien où elle veut en venir.

— Tu es dégueulasse, Billie !

Elle rigole la bouche ouverte en se laissant retomber en arrière sur son canapé.

Nous avons chacune notre canapé.

Et heureusement parce qu'elle vient de faire tomber sa pizza dessus cette maladroite.

Elle jure mais reprend sa pizza, regarde si elle va bien et hausse les épaules avant de manger à nouveau.

Parfois, je me demande pourquoi on est amies...

J'existe à nouveau et elle dit :

— Rohhh c'est bon ! Comme il est quand même beau garçon, je voulais savoir, c'est touuuut ! Arrête de faire t'as coincée là !

— On va s'arrêter là ! Raconte-moi ta journée.

— Ton sort a marché. Et je suis partie avec dignité et en gaffant bien sûr.

Je lui demande donc de me raconter et elle m'explique qu'elle a dit à son ancien patron que sa femme le trompait.

Ça, c'est typiquement Billie.

Je m'esclaffe absolument pas surprise, puis elle me dit qu'elle a traîné toute la journée avec Amiri notre super amie.

— C'était une journée sympa, conclut-elle.

— Tu cherches du boulot dès demain. Et tu as appelé ta mère ? Elle m'a appelé Billie. Sinon, je le balance à ma mère.

— Ouais ouais ! Je ferai tout ce que tu voudras demain. Passons au gâteau de madame Fall. Je n'ai pensé qu'à ça toute la journée. Ils vont bien mes amours ?

— Très bien. Ils n'étaient pas contents de ma correction sur Elliott.

— Ils disent ça parce que c'est le rôle des parents mais dans le fond, j'en suis sûre qu'ils ont sautés de joie. Il le méritait ce connard. La prochaine fois, appelle-moi. Oh et Amiri aussi viendra. Elle va lui faire ses prises japonaises là ! Il ne va rien comprendre à sa vie ce diable !

*

Nous sommes affalées comme deux grosses vaches sur notre canapé à chacune, enroulées d'un plaid, repus pour 10 ans au moins.

Je somnole devant l'épisode d'Esprit Criminel.

Il est 22 heures. C'est bientôt l'heure pour moi de me coucher.

Je soupire et commente lorsque l'agent Derek Morgan - alias Shemar Moore, que j'épouserai sans me poser de questions s'il me demandait en mariage - se met à courir.

— Franchement, je ne comprends pas pourquoi dans les séries, ce sont tout le temps les noirs qui courent ! 

— Franchement, s'il pouvait courir après moi, ça serait magnifique. Putain Edna ! Regarde ce corps, regarde cette musculature ! Oh mon Dieu ! C'est un péché ce type !

Je m'esclaffe doucement lorsque l'épisode se met à beuguer.

— Oh non ! râlé-je. Billie, lève-toi. C'est ton ordinateur qui est lié par un câble HDMI à la télé alors règle ça !

— Tu étais obligée de détailler tout ça ?!

Puis, un satané « pop-up » apparaît à l'écran de la télé tout comme sur son ordinateur. Il commence à lancer « Vous avez un message ! ». Chose habituelle sur ordinateur.

Billie traîne des pieds et relève l'écran de son ordinateur.

Elle ferme le « pop-up » en cliquant sur la croix et appuie sur la touche « espace » de son clavier mais le « pop-up » réapparaît au moment où elle comptait regagner son canapé.

— Fais chier ! gronde-t-elle.

Elle refait la même manipulation sauf que le « pop-up » ne s'en va pas.

Je me redresse de mon canapé.

— Ton ordinateur déconne ou quoi ?

— Je ne sais pas. Il fait sa crise là. Il allait très bien hier soir... Allez !

Puis, plusieurs « pop-up » du même genre apparaissent. Je vais la rejoindre, intriguée par cette situation qui ne nous est jamais arrivée.

— Mais c'est quoi le problème là ?! Edna aide-moi !

Je débranche tout simplement le câble et une seconde plus tard, ça provoque une coupure de courant.

Je grogne dans la pénombre.

— T'as pas payé le loyer, Billie ? C'était à ton tour ! T'es chiante !

— Mais si je l'ai fait !

À sa voix, je sais très bien qu'elle ment car elle oublie tout le temps, mais au moment où j'allai la réprimander, la télé s'allume ainsi que son ordinateur.

Et une lampe apparaît à l'écran.

Je m'assois à côté d'elle au sol, de plus en plus inquiète par cette situation et limite, hypnotisée.

— Oh mon Dieu ! Imagine que ça fasse comme dans ce film d'horreur là ...

— Vous avez un nouveau message, disent la télé et l'ordinateur.

Hésitante, j'appuie sur une touche du clavier et la lampe disparaît pour laisser place à une voix robotique.

— Regardez l'écran, fixez l'écran, regardez l'écran, fixez l'écran ...

Billie s'agrippe à mon bras et je sens ses ongles pénétrer dans ma chair.

— C'est peut-être Elliott qui se venge ! Ou ... Mais la personne croit qu'on est dans cette télé réalité débile là ...

— Regardez attentivement l'écran ...

Et des images tellement lumineuses commencent à défiler sur l'écran.

Je les fixe, je les observe à contre cœur sans trop comprendre ce qu'il se passe et Billie aussi.

Je sens juste mon rythme cardiaque s'affoler, des perles de sueurs couvrir mon front et ma respiration devenir difficile comme si j'étais asthmatique.

Je sens ma tête s'alourdir au fur et à mesure du visionnage de ces images puis enfin, l'écran devient noir.

Et l'écran de la télé présente à nouveau cette lampe.

Il n'y a que nos souffles erratiques qui s'entendent, puis en même temps, on touche notre bras, au même endroit et on se regarde dans la pénombre avant de tomber.

C'est le trou noir. 

***

Bienvenue dans "Pop-up" quoi ! 

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