— Attends, répète un peu. Tu vas le suivre sur les routes cet été, s'exclame Emma juste après que je lui ai annoncée la nouvelle.

Elle paraît tout aussi surprise que moi par la proposition de mon petit-ami, mais cependant la mine qu'elle affiche me laisse penser qu'elle est moins joyeuse à l'idée que je suive les deux frères et leur équipe sur la route des festivals.

— Tu réalises ce que ça implique au moins ?

Le ton de sa voix sonne pesant.

Ce que ça implique ? Oui, ça veut juste dire ne pas être séparée de ce garçon pendant plus du deux mois, réellement découvrir son monde et plus simplement dans le rôle d'une fan, apprendre à le connaître différemment. Je ne vois que du positif à ce merveilleux été qui s'annonce.

— Tu avais déjà peur qu'on apprenne pour votre relation, Charline, souffle-t-elle pour s'expliquer. Là tu seras sur le devant de la scène, exposée à des milliers de personnes. C'est jouer avec le feu.

— Je serais très prudente à ce sujet. Et je ne serais intégrée que comme un nouveau membre à la vente de la merch, je tente de me justifier.

Je me mords la lèvre inférieure.

Et si elle avait raison à ce sujet ? Je me suis probablement trop enflammée, prise par l'euphorie d'être avec Olivio tout un été, sans me demander quand est-ce qu'il aura du temps pour moi dans son agenda.

— Les fans vont forcément chercher à se renseigner à ton sujet. De ce que j'ai compris, l'équipe actuelle est composée uniquement d'amis des garçons, et ça bien avant leur arrivée dans la renommée.

Elle marque un point, mais je pourrais très bien être une amie de Chloé par exemple, venue donner un coup de main.

— Charline. Elle soupire longuement. Je ne dis pas ça pour te décourager d'y aller. Je suis simplement inquiète, ajoute-t-elle devant ma mine déconfite.

Elle s'avance doucement vers moi et vient placer ses bras dans mon dos pour m'entourer dans un câlin réconfortant et sincère.

— En fait j'ai toujours eu cette sensation d'être comme ta grande soeur. Alors cet été qui te protègera à ma place ?

— Olivio sera là tu sais, je le souffle tout en resserrant notre étreinte.

— Et quand il sera sur scène, qui veillera sur toi ? dit-elle de manière saccadée.

Je sens quelques traces d'humidité perler dans ma nuque.

— Attends, tu pleures ?

Je me recule délicatement de mon amie, le visage baigné de larmes.

Je ne pensais pas qu'elle serait tant affectée par l'annonce de mon départ. A croire que je n'arrive pas à voir ce que les autres ressentent.

— Tu sais...avec tout ce qui s'est passé avec ma mère, tu es devenue ma deuxième famille. J'ai déjà cru te perdre une fois avec Alec, et je m'en voudrais à vie à ce sujet. Mais là on monte d'un cran. Tu ne seras qu'un oisillon qu'on jette du nid alors qu'il ne sait pas encore voler, pleurniche-t-elle. Non...je ne dis pas que tu as besoin d'être maternée et sans défense, mais c'est un autre monde tout ça et j'ai si peur de devoir te ramasser à la petite cuillère. T'en as assez bavé avec Alec. Pas une deuxième fois.

Je sens les larmes me monter aux yeux, prête à craquer devant tant de sincérité de sa part.

— Je te promets qu'on veillera sur moi, je lui dis la gorge serrée.

— Il faudrait qu'il y ait avec toi,une personne d'entière confiance, lance-t-elle après réflexion.

— Pourquoi, toi tu ne viendrais pas ? je lui suggère en la regardant droit dans les yeux.

— En fait, j'ai déjà accepté une proposition pour l'été, m'annonce-t-elle.

J'arque un sourcil, très surprise par ce qu'elle vient de me dire.

Elle a prévu quelque chose et elle ne m'en a pas parlé. C'est quelque chose de top secret ou bien...?

— Je sais, je ne t'ai rien dit mais parce que j'ai peur de ta réaction, dit-elle en baissant les yeux.

Elle n'a quand même pas remis le couvert avec Alec. Si c'est ça, personne ne me retiendra de l'étrangler.

— Je vois bien les éclairs dans tes yeux et je te rassure, ce n'est pas Alec, me devance-t-elle.

— Alors tu pars avec Allie, c'est ça ?

Je ne vois que ça comme option, quand on sait que je ne porte pas cette fille dans mon coeur.

— Même pas, murmure-t-elle.

Si ce n'est ni Alec, ni Allie...qui pourrait m'énerver ? Je ne vois pas.

— En fait, j'ai trouvé un petit boulot pour l'été, finit-elle par dire.

Et c'est censé m'énerver ? Je roule des yeux, mais tout de même placée sous le signe de l'incompréhension.

— Au même endroit que Nathan.

C'était donc ça. Nathan, sa petite relation du début de l'année mais avec qui elle a merdé et s'est rendue compte trop tard qu'elle l'appréciait plus que le jeu dangereux auquel elle a joué avec mon ex petit-ami.

— Et il ne le sait pas, je présume.

Elle baisse à nouveau les yeux et je comprends que non. Cette histoire de petit boulot n'est qu'un prétexte pour se rapprocher à nouveau du garçon, au risque d'être gravement déçue et blessée.

— Constance n'est pas un frein j'imagine.

— Je sens déjà ton regard accusateur, prêt à me condamner. Mais je ne sais pas, cette fille je ne la sens pas. Elle est hautaine, et elle ne se sert de Nathan que comme d'un accessoire mignon accroché en porte clés à son sac à main.

Je croise les bras sur ma poitrine, prête à ne pas lâcher le morceau et à lui faire dire tout haut ce qu'elle pense tout bas.

— Tu n'as pas été non plus très correcte avec lui, je lui rappelle tout en sachant que son coeur va se resserrer.

Touchée.

— Mais tu penses tout de même être meilleure pour lui qu'elle, j'ajoute en ne la quittant pas des yeux.

Elle acquiesce d'un simple petit hochement de la tête.

— Moi, je veux comprendre pourquoi. De ce que je vois, elle ne lui fait pas de mal.

Emma me fixe outrée, en relevant sèchement la tête vers moi.

— T'es censée être de mon côté !

— Je suis du côté de Nathan cette fois. Il mérite ce qu'il y a de mieux pour lui. Alors si tu penses être une meilleure option, je veux juste comprendre.

Son pied droit tape en rythme contre le parquet. Elle est clairement sur les nerfs, et même si ça me coûte de la mettre en rogne, j'ai appris avec le temps qu'il faut parfois secouer ma meilleure amie pour la faire réagir.

— Mais ce n'est pas comparable. Constance et moi n'avons aucun point en commun, s'énerve-t-elle doucement.

— A vue d'oeil, oui. Elle ne l'a pas trompé.

Je me sens mal de revenir sur le sujet, sachant combien ça a affecté la petite brune face à moi. Mais je n'ai pas tellement le choix. Elle devrait arrêter de suivre mon exemple et admettre les choses plus rapidement. Je n'aurais pas à lui tirer les vers du nez.

— Oh oui, peut-être mais moi je ne joue pas avec lui !

— Donc tu me dis que tu es sincère à son sujet. Auquel d'ailleurs ? je la provoque encore un peu.

— Merde, Charline ! Tu es aveugle ou juste un peu bête ? C'est visible comme mon nez au milieu de ma figure. Nathan me plaît, lâche-t-elle comme une bombe.

— C'est juste de l'ordre du physique ou...?

— Et toi, c'est de l'ordre du physique avec Olivio ?

J'esquisse un léger sourire, lui faisant comprendre que j'arrête de l'embêter et que j'ai bien compris.

— Alors bonne chance dans cette mission, je lui dis en lui tendant la main.

Elle répond à ma poigne de mains, également avec un joli sourire étirant ses croissants de chair.

Quelques secondes après, nous revenons au sujet initial. Mon départ sur les routes avec les frères toulousains.

— Qui va bien pouvoir veiller sur moi, dans ce cas ? je lui demande.

— J'ai bien une petite idée, mais je veux savoir si les garçons les accepte dans l'équipe.

— Les ? je répète, pour être sûre d'avoir bien compris.

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— Tu le fais exprès ? On va loger dans un tour-bus, pas un grand hôtel. Où veux-tu qu'on mette tout ça ? je râle en la voyant arriver avec une tonne d'affaires.

A ma droite, Alessa semble aussi désespérée que moi. Pas parce qu'elle n'a pas envie de parcourir la France pendant deux mois, mais parce que nous savions d'avance qu'Agathe ne respecterait pas la limite de bagages.

— Justement. Vous avez déjà vu un bus confortable, vous ? Mon coussin de voyage s'impose, ainsi que de quoi m'occuper pendant les trajets. Donc forcément il me fallait des livres, de quoi peindre. Et encore, j'ai pris un cahier pas trop grand. J'ai quand même hésité à prendre des toiles, mais je me suis dit que ça ferait peut-être trop. Ou peut-être simplement parce que ma mère m'a affirmé qu'on serait énervé contre moi si je venais avec trop d'affaires. J'ai été raisonnable, et je ne tiens pas à me mettre à dos toute leur équipe. Pas de suite du moins. Il y aurait des choses à modifier dans leur organisation par exemple. Tenez. Prenez par exemple, les horaires de départ pour certaines dates, quand on y réfléchit bien et qu'on se renseigne sur le trafic, on voit bien que...débite-t-elle à une vitesse folle.

— Tuez-moi, fait semblant de pleurnicher la brune à côté de moi.

Je lui donne un petit coup de coude, amusée.

J'ai hâte de voir la tête des autres quand ils verront Agathe chargée comme une mule.

— Ma parolière préférée !

Oh, ça c'est Florian qui vient d'arriver.

— Bonjour Florian, se contente de dire Agathe d'un air détaché.

— T'as l'air vachement ravie de me voir. Tu devais te douter que je serais là, non ? Non, parce que la tournée de Bigflo et Oli, ça inclut Bigflo, dit-il amusé.

— Non, je n'avais pas compris ça comme ça, soupire la petite blonde ennuyée.

Juste après, elle passe devant le garçon en fixant le sol et en soufflant, visiblement dérangée par sa présence. Du grand Agathe ça. Le sarcasme tellement bien dissimulé.

— Attendez, quoi ! Elle pensait vraiment que je ne serais pas là ? lance-t-il en se tournant rapidement avec Alessa et moi.

Nous nous regardons toutes les deux et éclatons de rire, sous l'incompréhension du moustachu.

— Elle se foutait de moi, hein ?

— T'en fais pas, Florian. Il t'en faudra du temps pour apprendre à la décrypter, dit Alessa en tentant de se montrer empathique, tout en lui tapant sur l'épaule gauche.

— Oh, deux mois devraient suffire, lâche-t-il.

— C'est un début, je précise.

— Quoi ? Un début. Son manuel de fonctionnement fait combien de pages ? demande-t-il en ouvrant grand les yeux.

— Combien de tomes tu veux dire, je m'amuse à lui répondre.

Ses yeux s'ouvrent de manière encore plus grande et j'éclate de rire, rapidement suivie par mon amie.

Je sens que cet été entre Agathe et Florian va être extrêmement drôle.

— Vous avez fini d'embêter mon frère ?

Je reconnaitrais cette voix entre mille, celle pour qui j'ai acceptée de passer un été sur les routes. Olivio.

— C'était juste histoire de détendre l'atmosphère, je lui explique un sourire éclatant sur le visage.

— Mais bien-sûr, souffle-t-il à mon oreille.

Je suis parcourue d'un frisson le long de ma colonne vertébrale.

Deux mois comme ça, je signe tout de suite.

Deux mois comme ça et plus si affinité.

Deux mois comme ça et moins si tempête.

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Pour ceux qui sont abonnés vous avez dû voir pourquoi je poste avec un jour de retard. Pour les autres, c'était juste une migraine hier et pas le courage de finir le chapitre.

Sinon, j'en suis assez fière. Il ajoute émotions et détente. J'ai vraiment apprécié l'écrire et je ne sais pas ce que vous en pensez, mais l'ellipse me semblait nécessaire. Meubler les quelques mois entre mi février et début juin aurait été inutile. Je précise aussi que Charline a bien validé sa première année, sinon maman ne l'aurait pas laissé partir.

Et vous pensez quoi de l'intégration de Agathe et Alessa au trip ? Ce sont deux persos que j'affectionne vraiment alors je suis heureuse de leur laisser plus de place.

Sinon pour finir, vous devez vous dire..."mais ça se passe en été 2020 et pas de COVID" ? Alors non. Depuis le début je suis très réaliste en terme de dates, mais là on a besoin d'un monde sans tout ça, alors j'ai volontairement choisi que cette histoire se ferait comme si le virus n'avait jamais existé. J'inventerais donc des dates de festival, par conséquent, en m'inspirant bien-sûr de la tournée de 2019 et des précédentes.

On se retrouve samedi prochain.