5. « Bah cadeau. »

Il a vu mon message mais n'a pas répondu.

Je me laisse tomber en arrière. Ma tête s'enfonce dans mon oreiller. Il a dû trouver ma réponse stupide et n'a plus de temps à perdre avec moi. Je me sens profondément idiote mais je ne peux pas revenir en arrière. Pourquoi faut-il toujours que je rate tout ce que j'entreprends ? Seule la prépa a été une petite réussite pour moi.

Et comme chaque fois que j'ai un coup de mou, je cherche une citation qui caractérise mon état d'esprit et l'ajoute à ma story Instagram avec une bonne vieille musique des One Direction, étant une grande fan, même si je ne le crie par sur tous les toits. Cette fois j'ai choisi "Ceux qui semblent être forts sont souvent les plus sensibles." accompagnée de la musique "Last First Kiss".

A peine cinq minutes après avoir posté dans ma story, Emma entre en trombe dans ma chambre, le visage crispé et de l'inquiétude dans les yeux. Je crois que ma citation l'a dérangé dans sa lecture du soir.

C'est à cause de ce que j'ai dit ? me demande ma meilleure amie en s'asseyant face à moi. 

J'esquisse un sourire et plaque mes mains sur ses joues, ce qui la rassure. Elle a sans doute compris que mes états d'âme n'ont rien à voir avec elle.

C'est juste le mal du pays, je mens à nouveau.

Mais cette fois, mon mensonge n'est pas une trahison. C'est simplement que je ne veux pas qu'elle s'inquiète d'avantage. 

Tu veux que je reste avec toi, demain ? me questionne Emma.

Comment ça, demain ? Je réfléchis une demi-seconde et me rappelle qu'elle a rendez-vous avec une ancienne amie du lycée qui vit dans le coin. Mais je n'ai pas envie de la priver de ces retrouvailles. Je suis déjà un assez gros boulet pour elle, alors il est hors de question de l'empêcher de sortir avec une amie.

T'en fais pas, Emma. J'irais faire un tour toute seule, demain.

Toute seule ? me répond-t-elle en fronçant les sourcils.

Ca t'étonne mais oui, je lui dis en riant à moitié. Maintenant, vas retrouver Tessa et Hardin !

Pas cette fois. Je découvre Eden et Tyler, s'exclame ma colocataire en quittant ma chambre.

Je n'ai aucune idée de qui elle parle. Il faut dire que je lis peu de livres d'amour depuis deux ans. Et j'ai mes raisons.

Je me couche à nouveau sur mon lit et prends mon téléphone. J'ai une notification Instagram. Je m'empresse d'aller dans mes messages.

Ce n'est pas Olivio. C'est juste une personne à qui je n'ai pas parlé depuis longtemps et que j'ai tout simplement envie d'effacer de ma mémoire. Il a répondu à ma story. Quel con de laisser mon compte public ! Je m'empresse de supprimer le message sans même le lire et verrouille mon téléphone. Mon coeur bat beaucoup trop rapidement. Je suis au bord de la crise de panique. Mais je dois reprendre mes esprits.

Je finis par m'endormir, les larmes aux yeux et mon oreiller noyé par mes pleurs.

***************

Tu m'accompagnes retrouver Elie mais tu ne veux pas rester avec nous...Je comprends pas. Pourquoi ? me demande Emma alors que nous marchons vers le Capitole où son amie doit la rejoindre.

Parce que c'est ton amie, Emma. Je ne la connais pas et je me dis qu'une journée seule ici va peut-être m'aider à apprécier le coin.

Ma meilleure sourit tout en haussant les épaules. Elle n'a visiblement pas envie de me forcer la main et tant mieux.

Lorsque nous arrivons, une petite brune avec des lunettes nous attend déjà. Elle fait des grands signes de main à ma coloc' et fonce sur elle en courant. Elles se jettent dans les bras l'une de l'autre et un peu mal à l'aise je m'écarte comme si de rien n'était. Après cinq minutes à se hurler dessus, Elie finit par me remarquer et semble demander à Emma qui je suis.

Elie, je te présente Charline. C'est la folle qui a fait prépa avec moi et qui m'a suivi jusqu'à Toulouse, rit Emma à bout de souffle.

La fille me salue et la seconde d'après, elle demande déjà à mon amie où elles vont aller manger. Génial...cette fille en a genre rien à foutre de ma présence. Heureusement que j'ai dit à Emma que je ne restais pas avec elle, où j'aurais passé la journée la plus gênante de mon existence.

T'es sûre de pas vouloir venir, Chachou ? me questionne Emma alors qu'Elie la traîne déjà loin de moi.

Ouais, t'en fais pas.

Je regarde ma meilleure amie et cette fille super bizarre partir. D'un seul coup, je me sens seule, comme une vieille touriste qui a perdu son groupe et son guide. J'hésite un instant à rentrer chez nous, mais me rappelle que je vais ruminer toute la journée si je fais ça. Je sors donc mes écouteurs et les visse sur mes oreilles, puis lance ma playlist de vacances sur Spotify. A ce moment-là, je me sens vraiment comme une touriste.

Pendant une heure je marche dans les rues de Toulouse, je prends des photos et je me sens bien. J'en oublie mon cafard, mon mal du pays et je souris dans la ville rose, le soleil dorant ma peau blanche. Du moins jusqu'à je tombe nez à nez avec un attroupement d'hystériques. Je déteste la foule, mais là c'est pire. Ces filles crient, leur téléphone en main et brandi en l'air. Mais qu'est-qui se passe, bon sang ? Ma curiosité prend le pas sur la peur de ces filles et je me faufile entre elles. Lorsque j'arrive à l'avant du groupe, après m'être fait insultée maintes fois, je comprends. Ils sont là, tous les deux et ces filles sont juste des fans qui veulent une photo. J'essaie de m'extirper du groupe, priant pour qu'il ne me voit pas, mais c'est trop tard. Son regard croise le mien. Mon estomac tente de s'échapper de mon ventre, et je pousse dans le tas pour passer. Une fois sortie, je souffle un grand coup et me mets à marcher très vite.

Une fois assez loin, je me pose contre un mur et reprends ma respiration. Mon téléphone vibre. Je le sors de ma poche et vois qu'il m'a envoyé un message. Sans réfléchir, je l'ouvre.

oli_real : Pourquoi tu t'es enfuie ?

charline_blze : J'aime pas la foule.

Cette fois, c'est un semi-mensonge et même si j'ai répondu sèchement, je ne suis pas désolée. La personne paniquée en moi a parlé à ma place. Tout ça parce qu'Emma n'est pas là. J'aurais mieux fait d'aller avec elle et la fille bizarre, finalement. Cela m'aurait évité ce genre de situation.

oli_real : Tu es quand même passée au milieu de ces filles. La vérité, s'il te plaît.

Il a compris que j'ai menti. Pour qui je vais passer maintenant ? J'ai horreur que les gens sachent que je ne suis pas très honnête. Du moins, la personne dissimulée en moi ne l'est pas quand elle a peur. Si seulement elle pouvait quitter mon corps pour que je reste moi-même.

charline_blze : J'ai paniqué. 😔

Voilà, j'ai avoué. Je ne sais pas si ma réponse va le convaincre, mais je l'ai laissé voir une petite partie de la personne sous la carapace, alors qu'on ne se connait pas. J'espère vraiment qu'il va me croire, et qu'il ne va pas juger mon comportement.

oli_real : Pourquoi est-ce que t'as paniqué ? C'était juste mon frère, moi et des fans. 🙃

Bon, il me croit. C'est un début, mais je ne peux pas répondre à sa question. Je ne peux pas lui dire que j'angoisse déjà quand on se parle par message Instagram, alors lui dire que j'ai mal au ventre quand je le vois, c'est trop pour moi. Il va me prendre pour une folle sortie d'un asile.

oli_real : Tu veux pas répondre, OK. Mais si t'étais pas partie, t'aurais pu avoir une vraie photo avec moi. 😄

Je lâche un sourire débile devant son message. Je trouve vraiment gentil de sa part qu'il ne me force pas à parler, et qu'il change de sujet. On voit que c'est le genre de garçon sensible qui sent quand c'est tendu.

oli_real : C'est pour moi que tu souris ? ☺️

Qu-Quoi ?!! Comment il sait que j'ai souri ? Je panique et me retourne brusquement vers la rue. Il n'est qu'à quelques mètres de moi. J'ai envie de partir en courant, mais mes pieds sont cloués au sol et je n'ai aucun moyen de fuir. La seule chose c'est que je sens que je serais dans l'incapacité de dire ne serait-ce qu'un mot. Ou si je parle, je vais dire une grosse connerie. Je redoute le moment où il va me parler et où je vais devoir répondre.

Plus de raison de fuir, me dit-il en s'arrêtant devant moi.

Je sens subitement que je deviens pâle. J'ai mal au ventre, comme si j'étais malade sauf que je ne le suis pas vraiment. Je déteste vraiment la fille terrifiée que je suis devenue.

T'es toute blanche. T'es malade ? me demande-t-il en avançant sa main vers moi.

J'écrase mon dos contre le mur derrière moi. J'ai même envie de m'y enfoncer. Je veux juste qu'il ne me touche pas.

Je crois qu'il a lu la terreur dans mes yeux, car il recule sa main et fronce les sourcils. J'ai l'air vraiment con, je le sais. Pourquoi est-ce qu'il faut que je sois aussi ridicule devant une personne que j'aime tant ? Est-ce que c'est ma manière de me protéger des gens que j'aime ? Je le crois car j'ai cette attitude par sa faute. La faute de la personne que j'ai le plus aimé au monde.

Je te fais peur...souffle Olivio en baissant les yeux.

Quoi ? Mais non. Il ne faut pas qu'il pense ça. Enfin si, j'ai peur. Mais pas comme il le croit. J'ai envie de lui expliquer, mais j'ai du mal à me l'avouer à moi-même alors le dire à un garçon avec qui j'ai échangé quelques messages, sûrement pas. Seule cette phrase débile sort des tréfonds de ma gorge.

Je peux avoir ma photo ? je dis sèchement en tendant la main.

Il a l'air aussi surpris que moi par ma question car il ne bouge plus pendant un instant. Il finit par sortir un cliché Polaroid de son sac à dos et me le lance en plein visage. Je ne remarque même pas son geste. Seules mes oreilles se focalisent sur les mots qu'il me dit.

Tu voulais juste ta photo...depuis le début, dit-il en colère. Bah cadeau. 

A ces mots, il tourne les talons et retourne dans la rue où il était précédemment.

Je reste collée au mur, les yeux perdus dans le vide et avec l'envie de frapper ma tête contre le mur de pierres. Je m'abaisse ensuite pour récupérer la photo et remarque une inscription au dos.

C'était ma photo. Souviens-toi en. Oli. 💙

Je m'assieds au sol, et hurle un coup.

Il détruit ma vie, même après deux ans.

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