30. « Il faut vraiment que je te parle »

Une vingtaine de minutes plus tard, nous sommes arrivés. Du moins, sûrement moins, mais Oli m'a bandé les yeux avec ma veste en jean, si bien que j'ai marché très lentement, guidée par le rappeur.

J'espère que cet endroit vaut le coup, je grommelle les mains prêtes à défaire le noeud formé par les manches de ma veste.

Oli rit tout doucement, puis dépose une main sur ma joue droite, avant de retirer ma veste.

Je cligne doucement des yeux, m'habituant doucement à la lumière des lampadaires.

C'est ça que tu voulais me montrer ? La place du capitole ? je râle, dubitative.

Il m'a vraiment fait me déplacer pour ça ? La place du capitole ? C'est pas comme si j'y allais assez souvent et que je l'avais déjà vu de nuit.

Retourne-toi, me susurre Olivio à l'oreille.

La chaleur de son souffle dans mon cou me donne des frissons. Je papillonne des yeux, et me retourne lentement. La façade de la mairie est éclairée par des projecteurs de couleur. Les couleurs changent petit à petit, passant de tons bleus à des violets. Mes yeux sont hypnotisés par ce spectacle. Soudainement, la photo que j'ai pris avec Oli apparaît. Je suis à la fois gênée et émerveillée. Il a fait ça pour moi ? Je ne sais absolument pas quoi dire, mis à part que c'est un garçon fantastique et adorable.

Tu en penses quoi ? chuchote-t-il.

Je...mais pourquoi ? je lui demande tout doucement, gênée.

C'est quand même grâce à cette photo qu'on s'est rencontré, et grâce à Emma, alors...

Je ne le laisse pas terminer et me jette sur lui afin d'écraser mes lèvres sur les siennes.

Bordel. Qu'est-ce qui m'a pris ? Je suis totalement conne. Jamais je ne vais me remettre de ce que j'ai fait.

Je recule subitement, et ne laisse pas le temps à Oli de réagir. Je pars déjà en courant, dans le sens inverse. Je cours tellement que je ne fais pas attention aux gens autour de moi, feignant de ne pas entendre Oli qui m'appelle. Je préfère effacer de ma mémoire ce que je viens de faire, et Olivio devrait en faire de même. C'était juste une petite erreur, due au stress qui est retombé soudainement.

Charline ? Où tu cours comme ça ? La surprise de Oli ne t'a pas plu ? 

Je reconnaîtrais entre mille cette voix. C'est donc Emma que je viens de percuter. Elle se tient juste devant moi, seule et une mine inquiète.

T'étais au courant de ce qui allait se passer ? je la questionne, en jetant des coups d'œil derrière moi.

Oli commence à se rapprocher de nous.

Oui, Oli a eu cette idée pour nous réconcilier. Mais qu'est-ce qui se passe ? poursuit-elle.

Je n'ai pas le temps de répondre, car une main sur pose sur mon épaule. Celle de Oli. Je me tourne rapidement vers lui. Un sourire se dessine sur ses lèvres, mais je n'ai pas envie d'en interpréter la cause. J'ai juste envie de me cacher, qu'il oublie ce que je viens de faire, voire qu'il m'oublie tout court. J'ai juste une boule au ventre, comme avant.

Est-ce qu'on peut parler, Charline ? me demande Olivio.

Pour qu'il me dise qu'il ne partage pas ce que je ressens ? Non. Et puis qu'est-ce que je dis ? Je ne ressens rien. C'était une petite erreur de parcours, une petite folie parce que Oli est beau garçon, mais rien de plus. Je dois rester focus sur ce que je m'étais promise. Aucune relation à distance, et encore moins avec un garçon pour qui je n'éprouve rien.

Je tourne les talons et me remets à courir, mais cette fois-ci mes mouvements sont beaucoup plus rapides. Je ne tiens absolument pas à ce que Olivio me rattrape, car je suis lâche. Je fonce jusqu'à la porte d'entrée de mon immeuble, située à dix minutes à pied de la place. Je m'écroule sur le pas de la porte, respirant bruyamment. Une larme perle sur ma joue. Je viens de tout gâcher avec un stupide baiser. Qu'est-ce qu'il va penser de moi maintenant ? On était devenus amis, on pouvait se parler de presque tout et j'ai franchi la ligne rouge.

Je ne sais pas combien je suis restée assise là, mais suffisamment longtemps pour que Emma me rejoigne en marchant tranquillement.

Tu vas comment ? me souffle-t-elle en s'agenouillant devant moi.

Comme quelqu'un qui a embrassé une personne qu'elle ne devait pas approcher de trop près, je souffle en essayant de sourire.

Emma se met assise en face de moi, et me prend les mains puis me caresse les paumes. Ce geste me détend, et Emma ne l'a pas oublié.

C'était comment de l'embrasser ? 

Je fronce les sourcils.

Bah t'as quand même embrassé Olivio Ordonez, rit ma meilleure amie.

J'essaie de lui sourire, mais je n'y parviens pas. Je suis bloquée, comme mes émotions positives. Olivio était devenu important dans ma vie et j'ai tout fichu en l'air parce que j'ai laissé une envie m'envahir. Pourtant c'était simple ! J'aurais dû le remercier en le prenant dans mes bras et ça s'arrêtait là. Quoique...je pense que je l'aurais quand même fait. Je l'aurais pris dans mes bras et ensuite embarrassé. Qu'est-ce que je cherchais à me prouver en faisant ça ? Est-ce que c'était simplement du réconfort après ce qui s'est passé avec Alec ?

Pourquoi est-ce que t'as l'air contrarié ? Ça aurait bien fini par arriver, me souffle ma meilleure amie.

Je lève les yeux vers elle. Comment ça, ça aurait fini par arriver ? C'est faux. C'est arrivé à cause de Alec.

Alec n'y est pour rien.

Elle lit dans mes pensées maintenant ?

Bien-sûr que si. Et tu le sais. Depuis qu'il est revenu dans nos vies, il a foutu sa merde dans tous les recoins. Il a réussi à nous séparer ! je m'énerve.

Charline. Admets que Oli te plaît, non ?

Certes, il n'est pas repoussant mais je ne peux pas dire que je sois attirée par lui. Ce garçon est une bête de scène et moi, une acharnée du travail destinée à être ingénieur. J'y vois un grand décalage entre nous deux, et une perte de temps d'espérer quoique ce soit. J'ai toujours réussi à chasser de possibles sentiments vers l'impossible, et je vais faire de même. Le sujet est clos.

Tu essayes seulement de te convaincre du contraire, ramage Emma en se relevant.

Elle lit vraiment dans mes pensées.

Bon. Imaginons qu'il me plaise, qu'est-ce que tu veux que je fasse ? je la questionne en faisant la tête.

Je ne sais pas, moi. Peut-être arrêter de l'éviter et lui dire ? ricane ma meilleure amie en me donnant une petite tape sur l'épaule.

Tu veux que je lui dise comme ça ?

Emma me regarde avec un petit air satisfait. Air que je suis heureuse de retrouver, car il veut dire un début de réconciliation. Même s'il va falloir qu'on parle.

Donc tu admets qu'il te plaît ?

Alors c'était ça ce petit air sur son visage. Je viens d'avouer quelque chose dont je ne suis même pas sûre. Ou peut-être que je le sais depuis quelques temps, mais que j'ai refusé de l'admettre.

J'en sais rien. Tu ne penses pas que j'ai l'impression de ressentir quelque chose pour lui, parce qu'il est trop gentil avec moi et qu'il a comblé un vide quand tu es partie ?

Emma reste sans voix suite à ma question. Est-ce qu'elle se rend compte que j'ai raison ?

On est des reines dans la catégorie "Erreur", hein ? souffle ma meilleure amie en se laissant glisser contre la façade l'immeuble.

Est-ce qu'elle fait référence à Alec ? J'en ai bien l'impression, et je meurs d'envie de savoir ce qui s'est passé avec lui, mais ce n'est sûrement pas le moment.

Tu ferais mieux d'aller te coucher, Charline.

Tu ne dors pas ici ? je lui demande, le regard suppliant.

Elle me répond d'un signe de tête que non, puis se lève et m'embrasse sur la joue avant de partir sans rien dire. Je me retrouve seule, comme une idiote, sur le pas de la porte d'entrée de l'immeuble, mes regrets et ma bêtise coincés dans mon sac à dos.

Je finis par rentrer à l'appartement, où je me laisse tomber comme une masse sur mon lit. J'ai envie de pleurer, et à la fois de hurler devant ma bêtise. Cette soirée avait merveilleusement bien commencé, et tout a dérapé avec l'appel de Allie et cette surprise sur la place du capitole.

Est-ce que lui aussi regrette ce que j'ai fait ? Est-ce qu'à ce moment-même il est rentré chez lui et pense à moi comme je pense à lui ? Apparemment oui. J'ai trois appels manqués de sa part sur mon téléphone, et quelques messages.

Oli 💙: Pourquoi est-ce que t'es partie comme ça ?

A ton avis, Oli ?

Oli 💙: Tu pourrais répondre quand je t'appelle ? Je pense qu'on doit parler.

Sûrement pas ce soir.

Oli 💙: Est-ce que t'es partie parce que je n'ai pas répondu à ton baiser ?

Non, je suis partie parce que c'était une grave erreur.

Oli 💙: Si tu ne réponds pas, je vais débarquer à ton appart.

Quoi ? Sûrement pas.

Moi : Oli, c'est pas la peine. Y'a rien à dire, d'accord ?

Je verrouille mon téléphone, puis enfonce ma tête dans mon oreiller. Quelle soirée de merde ! J'essaye de fermer les yeux, mais je n'en ai même pas le temps. Olivio n'a pas dû voir mon message, car je l'entends déjà frapper à ma porte. Mon estomac se noue à nouveau et les larmes me montent.

J'avance tout doucement jusqu'à ma porte d'entrée et m'y colle pour l'entendre. Il respire d'une manière assez forte et hachée, comme s'il avait couru pour venir jusqu'ici. Je n'ai pas envie de lui ouvrir, ni de lui parler. Je veux juste qu'il parte, qu'on oublie cette histoire, car j'ai trop honte.

Charline, ouvre-moi s'il te plait. Je sais que tu es là, dit-il d'une voix triste.

Je soupire, laissant d'autres larmes inonder mon visage. À quoi bon ?

Il faut vraiment que je te parle, que je te dise quelque chose, mais je ne pourrais pas le faire de derrière cette porte, gémit-il.

Je ne compte pas me montrer avec cette tête. Les larmes ont creusé mon visage, les cernes détruisent mon teint et j'ai les yeux gonflés.

C'est important, insiste-t-il.

Oli, tu veux bien partir ? je l'implore, en essayant de contrôler ma voix.

Je ne compte pas partir avant de t'avoir vu.

Il ne compte quand même pas camper devant ma porte d'entrée ?

On n'a rien à se dire.

Toi, peut-être, mais moi je dois te parler.

Parler de quoi ? De l'erreur que j'ai commise ? C'est inutile, on oublie, je murmure tandis que ma voix se casse.

Je l'entends soupirer depuis l'autre côté de la porte, puis un léger coup contre ma porte, avant d'entendre des pas dans le couloir. Il est reparti.

Je ne peux plus retenir mes larmes. J'éclate en sanglots, et c'est là que je comprends que je ressens vraiment quelque chose pour lui, quelque chose qui ne fonctionnera pas, car ce n'est pas partagé, et que j'ai été trop vite avec lui. Il n'avait pas besoin de savoir qu'une autre fan ressent quelque chose pour lui. Moi qui me pensais unique, je suis comme toutes les autres. Faible, imaginant qu'il pourrait se passer quelque chose. A présent, il me reste à agir comme je l'ai fait avec Alec. Laisser le temps faire, l'éviter au maximum, et je verrais ce qui se passera par la suite. Peut-être pourrons nous être à nouveau amis. En tout cas, je l'espère car il va me manquer pendant tout ce temps.


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Et voilà, je reviens enfin avec un chapitre. Je sais qu'il va en surprendre plus d'un, et que vous pourrez trouver le comportement de Charline stupide et incohérent, alors je vous vais demander d'essayer de la comprendre un peu. Par ailleurs, pour ceux qui trouveraient son comportement incohérent, j'ai envie de vous faire part de quelque chose : Charline est inspirée d'une personne que je connais assez bien et c'est ce que cette personne aurait fait, si ça lui arrivait.

D'ailleurs, j'ai été mal pendant l'écriture du chapitre : c'est la première fois que mon coeur se brise en écrivant.

Voilà voilà. On se retrouve bientôt sur un nouveau chapitre.

Et si vous avez de parler, n'hésitez pas à venir me parler en MP ou sur ma page Insta fan @visio_talents

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