CHAPITRE 3
Elles s'assoient sur le divan au milieu du salon, une assiette remplie d'amuses gueules trône sur la table salon.
- "Qu'est-ce qu'il est beau n'empêche, j'aimerais bien être sa sœur d'accueil moi.." Soupire bêtement Lira.
Je roule des yeux et souris.
- "On peut changer de place si tu veux."
Elle rigole.
- "Non, je n'arriverai pas à aligner deux mots en sa présence, déjà que la seule phrase en 10 ans que je lui ai dite est « Merci sjanakam »." Dit-elle en faisant exprès de bégayer sur la fin.
- "Effectivement, pas très glorieux." Ricanai-je.
Nous passons plusieurs heures à faire connaissance.
Delia est en section littérature. Elle m'a même avoué avec des yeux pleins de malice que ce n'était pas sa véritable couleur naturelle. Ses grands yeux marron et sa posture élancée faisaient d'elle une belle femme, même si elle n'arrivait visiblement pas à s'en convaincre.
Lira a pris comme matière la science, petite et en forme, elle avait l'air sûre d'elle et de son futur. Ses longs cheveux blonds bouclés et ramenés en coupe parfaite lui donnaient une allure de femme d'affaires avant l'heure. Mis à part quand elle parle aux garçons mignons, elle a une éloquence qui me fascine.
- "Et toi Jia, tu as pris quelle matière ?" Demande Délia avec quelques coupes de champagne dans le nez.
- "Je suis en art, rien de très mental comme vous."
- "Arrête, je préférerais dix fois plus savoir dessiner que de juste savoir écrire la langue de Shakespeare ou de Molière... ça fait plus d'effets aux garçons."
- "Crois-moi, dans cinq ans, les garçons préféreront un avenir stable avec une prof de langue plutôt qu'une vie de galère avec une artiste. Riais-je.
- "Ouais, mais nous, on veut des petits copains !" Se plaint Lira.
Je m'installe plus confortablement et la regarde.
- "Qu'est-ce que ça t'apporte là maintenant ? Apar un cœur brisé, le fait que tu te déconcentres, une possible MST et un bébé sur les bras ?" Pouffais-je.
Elle fait mine de réfléchir et souris.
- "Vu sous cet angle, l'amour ne m'inspire rien de bon. Mais ça fait du bien de se sentir apprécier. Quitte à sauter dans le vide et de souffrir jusqu'à notre deuxième année de fac.."
Le rire de Delia rigole et hoquette dû au champagne.
- "En tout cas, c'est toujours mieux que de n'avoir pas d'expériences."
- "Des fois, c'est mieux de ne pas l'avoir." Soufflai-je pensive.
Nous restons une heure de plus ainsi à discuter de choses et d'autres, jusqu'à que l'heure de la fin sonne. Devant le pas de la porte, mes deux nouvelles amies me souhaitaient une première bonne nuit. Elles se réjouissaient déjà de me revoir lundi.
Une fois le beau monde partis, je me sentis un peu plus vide que je ne l'étais déjà.
Je décide de monter dans ma chambre après avoir proposé mon aide aux salariées payé pour l'occasion. Bien entendu, ils n'ont guère accepté mon aide.
- "Vee! "Dit une voix derrière moi.
Dan se présente devant les marches de l'escalier.
- "J'espère que cette soirée t'a plus, j'ai vu que tu as pu rencontrer du monde de ton nouveau lycée !"
Je souris faiblement.
- "Oui, elles sont très sympa, ça rendra ma rentrée plus facile, sûrement."
Je m'appuie contre le montoir, un peu gênée j'esquive son regard et cherche un moyen d'aborder la discussion passionnante que j'ai eue avec son fils.
- "Je vous remercie pour la robe, mais je crois que ça n'a pas plus à tout le monde le fait que je la porte..."
Ces quelques mots ont suffi à Daniel pour comprendre la situation.
- "J'en suis désolé, il n'est pas encore totalement remis de la perte tragique de sa mère, moi non plus, mais la vie continue et je suis sûr qu'elle aurait été ravie de voir que je redonne seconde vie à ses tenues." Soupir t-il, un regard triste collé sur le visage.
Me grattant l'arrière de la tête, l'air hébétée, je me surpris à avoir de la tristesse pour lui.
- "Je la déposerai dans le dressing." Réussis-je à dire.
Mon tact ne rivalise pas avec celui de Isaak, mais je crois avoir pu l'égaler à cet instant.
Mes jambes bougent seule et me voilà à fuir la situation d'une manière un peu impolie. Une fois dans ma chambre, mon cerveau ne peut s'empêcher de m'envoyer des claques imaginaires face à mon manque d'humanité. Je m'écroule sur mon lit. Mes pieds me remerciant d'enlever mes chaussures.
Demain, c'est dimanche, je sens que je ne vais pas oser sortir de ma chambre. Surtout en me rappelant le regard froid que Isaak me lance à chaque fois que mes yeux croisent les siens.
Un frisson me parcourt le long de ma colonne vertébrale, ce gars a vraiment un souci à être aussi violent avec une inconnue. En enlevant la robe, je pris soin de la remettre sur le portant tout en évitant de faire un dégât sur la robe. Avec mon karma, il y aurait eu des chances que je l'abîme.
Je me mis en route pour aller déposer la robe dans le dressing quand je me fis interrompre par une discussion quelque peu épicée.
- "Tu n'as vraiment aucune tenue ! Je ne t'ai pas élevé comme ça !" Je crois entendre la voix de Mr Rainer.
- "Je vois pas où est le problème ? Je n'ai pas besoin de la connaître, je n'ai pas demandé à subir une pauvre orpheline !" La voix d'un Isaak en colère.
- "Je te rappelle que tu as plus en commun avec elle que tu ne le crois. Alors arrête de jouer au gamin pourri gâté et rappelle-toi d'où tu viens! Je ne t'ai pas appris à te comporter comme ça."
J'entends Isaak grogner puis soupirer, je m'accroupis pour me faire plus discrète.
- "Laisse-moi tranquille s'il te plait, Maman me manque et je n'ai pas envie de faire confiance à cette fille, j'ai le droit non ?" Laisse-moi le temps.
- "Isaak, ta mère me manque aussi terriblement mais nous devons avancer dans la vie, soigne ton cœur."
Il n'a vraiment pas l'air commode, même avec son père. Les deux ont l'air d'en avoir beaucoup sur les épaules. Je ne suis pas sûr que rajouter un poids soit une bonne idée. Mon visage triste et en colère me revient en tête, cette tête je l'ai eu après la mort de ma mère, elle m'avait abandonnée comme si de rien était. Je peux comprendre cette douleur qui ne s'efface pas dans la poitrine. Peut-être ai-je été trop dure avec lui?
Plus aucun bruit ne se fait entendre, je m'apprête à me relever quand deux pieds s'offrent à ma vision. Mon regard se lève doucement vers la tête de Isaak.
- "Dis donc toi, tu n'écoutais pas aux portes quand même ?" Souffle-t-il.
Je me pince les lèvres et fronce les sourcils.
- "Je... Noon!" Essayais-je de me défendre.
En me levant, je remarque qu'il était horriblement grand. Je me sens encore plus petite d'avoir écouté cette discussion.
- "Tu n'en rates pas une toi." Soupire Isaak.
Mon corps entier brûle et m'oblige à m'éloigner de lui.
- "Pardon, j'allais rendre la robe et j'ai accidentellement entendu..."
- "Accidentellement alors ?" Ricane-t-il en s'adossant contre les barrières de l'escalier.
Je hoche la tête et resserre l'emprise que j'ai sur la robe de sa mère.
Il se rapproche de moi jusqu'à ce que mon dos se colle au mur. Son souffle caresse mon visage. Une odeur mentholée s'émane de lui. Il partait si imposant et ce genre de spectacle ne me déplaît pas, mais je me sens coincée et vulnérable. Des bribes de souvenirs me reviennent et mon corps tremble au rythme effréné.
- "Tu... tu peux reculer... s'il te plait." Dis-je d'une voix cassante.
A la limite de pleurer, mes mains se posent sur son torse en essayant en vain de le repousser. Bordel, mais c'est un mur de brique ce type.
Je n'ai jamais aimé être aussi bloquée, je n'ai aucunes forces et encore moins le caractère pour y faire face.
Son regard devient de plus en plus sombre et il attrape mon poignet pour que je m'oblige à le regarder encore plus intensément.
- "Si tu veux qu'on puisse vivre en parfaite harmonie, il va falloir que tu respectes quelques règles, Vee.." Murmure-t-il à quelques centimètres de mon oreille.
Tout mon être est en train de brûler, pas d'envie, mais d'effroi. Comment arrive-t-il à me faire autant d'effet en si peu de temps ? J'ai l'impression qu'il va m'avaler tout cru.
- "Tu me fais peur la... arrête s'il te plaît." Dis-je au bord des larmes, le poignet endolori.
Quelque chose traverse dans ses yeux et d'un coup il me lâche et recule de quelques centimètres. Il parut perdu.
- "Désolé." Souffle-t-il avec un regard inquiet.
Il regarde de gauche à droite et disparaît devant moi en direction de sa chambre.
Mon cœur se remet à battre normalement et mon souffle peut reprendre. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé dans sa vie pour qu'il soit autant à cran, mais je jure de ne plus l'approcher... Je vais devoir me faire très petite...
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