Chapitre Quatorze - La Caverne Saline

Feunard toussa fortement. La fumée noire s'échappa de sa gueule. Des cendres souillaient son pelage d'or et la neige sacrée du Mont Glacial. Il était vaincu. Il paraît bien moins divin une fois vaincu, songea fièrement Goupix.
-Tu m'impressionnes une fois encore Goupix.
-Tais-toi. C'est un ordre.
-Très bien...
soupira Feunard avec nonchalance.
-Comment as-tu pu m'attaquer, moi, ta propre fille ?! Je m'attendais à voir un père en rage ou en larmes mais non.
-Tu m'as dit que tu étais là en exploratrice.
-Qu'est-ce que ça change ? Je suis toujours ta fille ! L'amour paternel, tu connais ?! Tu vois, au début j'ai retrouvé l'admiration que j'avais pour toi. Mais tu m'as attaqué ! Je n'osais pas y croire... Je pensais que tu avais changé. Mais non. Mon départ n'aura fait que conforter ton état d'esprit : tu es tellement attaché à ton rôle que tu es devenu un monstre sans aucun sentiment. Félicitations, Feunard !
-Et toi, tu es devenue très forte. C'est bon de constater ton progrès.
-Progrès auquel tu n'as rien fourni ! Espèce d'égoïste ! Tu n'en as jamais rien eu à faire de moi. Tu me voyais pas comme ta fille mais comme ton successeur. Je - te - méprise.
-Tu es dure, Goupix
, signala Absol.
-Et lui est toxique ! Mais tu as raison, je m'emporte. Feunard, tu me dois des informations. Que sais-tu sur les Contrées Inexplorées ?
-Elles sont dangereuses, difficiles à atteindre, impossible d'en ressortir et hors du temps.
-Difficile à atteindre ? Tu veux dire qu'il y a un moyen ?!
-Oui. Mais rares sont ceux qui ont réussi à trouver comment s'y rendre et encore plus sont ceux qui les ont atteintes.
-Dois-je te rappeler que le monde dépend de notre voyage là-bas ? Je suis prête à donner ma vie, mais tu ne dois peut-être pas comprendre ça.
-Rend-toi au fond de la Caverne Saline. Au fin fond de la grotte, il y aura un accès à la mer. Sur les parois de la grotte, tu trouveras des instructions dans une langue qui n'est pas la notre. Prend quelqu'un capable de les déchiffrer avec toi et tu sauras comment t'y rendre.
-Très bien. J'y vais. Au fait, merci Absol.
-Un plaisir de t'avoir revue...
murmura l'intéressé.
-Je ne reviendrai peut-être pas vivante. Adieu.
-Adieu...

Absol se releva doucement. De longues minutes étaient passées depuis que Goupix avait repris la route. Feunard était toujours allongé dans la poussière et les cendres. Il n'était pas blessé. Il n'était pas vaincu. Il a eu pitié de Goupix... C'est horrible...
-Deb... commença Absol avant d'être violemment interrompu.
-Tu seras prié d'éviter tes réflexions insolentes et méprisantes, Absol.
-Alors laisse-moi au moins te demander pourquoi as-tu fais ça.
-Elle a sacrément grandi en trois ans... Elle a enfin accompli son rêve...
-C'est tout ? C'est pour cette raison que tu la tortures depuis trois ans ?!
-Oui. Avec moi, elle aurait été malheureuse. Je l'ai poussé à prendre sa décision. Aujourd'hui, j'ai pu constater que j'avais eu raison. Je me contenterais volontiers de ce résultat.
-Elle a peut-être raison, tu es un monstre. Elle attendait l'amour d'un père.
-Oh mais elle l'a. Contrairement à ce qu'elle pense, ce combat lui aura appris beaucoup de choses. Et -
-Arrête ! Tu ne vois pas qu'elle est ta fille et pas ton apprentie ?!
-Elle est libre maintenant. C'est tout ce qui compte. Elle ne cherchait pas à voir son père mais son ami. Tu étais là. Absol, elle ne m'aime pas. J'aurais pu être moi-même, elle m'aurait rejeté. Elle n'aime pas son père, c'est un fait. Autant ne pas la faire souffrir et agir comme si c'était réciproque.
-Et toi ? Tu souffres aussi mais ne le dis pas. Tu te sens noble maintenant ? Tu te sens supérieur ?
-Je ne veux pas que mes enfants sentent les faiblesses de leur père.
-Trop tard. Alors quoi ? Tu comptes faire quoi ? Tenter de récupérer son amour ?
-Non. Elle est heureuse là où elle vit. Elle n'a plus besoin de moi. Et puis j'ai un autre fils qui m'aime assez pour deux, pas vrai ?
-T'en rates pas une, hein ?

Goupix posa une patte dans la Guilde. Elle respira un grand coup. C'était son air. L'air de chez elle. L'air de sa vie. Sa vie qui allait bientôt prendre fin. Mais aujourd'hui, elle allait revoir ceux qu'elle aimait. Plus que trois jours. Le soleil n'était pas encore à son zénith. C'était l'heure à laquelle Massko pouvait entrer à la Guilde sans être repéré par quelqu'un le considérant encore comme un cible à abattre ou un dangereux criminel. C'était le timing parfait. Goupix arrivait à l'heure pour pouvoir parler de ce qu'ils allaient faire ensemble. Elle déboula dans la pièce du rassemblement. A son grand étonnement, Ectoplasma et ce qui devait être le Zorua du futur étaient aussi là, avec bien évidemment Grimpal et Massko. Pijako présidait l'assemblée, comme à son habitude.
-La voilà ! s'écria joyeusement Grimpal.
-G-Goupix... s'émut Zoroark. Tu es en vie...
-Evidemment que je suis vivante. Je suis la Goupix de cette époque, pas celle que tu as connu.
-C'est du pareil au même. Tu es la même personne. Laisse moi te voir de plus près...
-Bas les pattes !
ordonna Ectoplasma. Tu veux que Grimpal te dévore, maintenant ? On t'a déjà expliqué que Goupix avait offert son cœur à Grimpal. Si tu l'approches trop, tu vas provoquer la bagarre. C'est pas spécialement ce qu'on recherche, non ? Nous n'avons pas de temps à perdre.
-Désolé...
souffla piteusement Zoroark.
-Un peu de joie, les mâles, s'il vous plaît ! Je sais où on peut trouver comment atteindre les Contrées Inexplorées !
-Quoi ?!
s'écria l'intégralité du groupe.
-La solution se trouve au fond de la Caverne Saline ! Là-bas, il y a un accès à l'océan et les instructions pour pouvoir atteindre les Contrées Inexplorées.
-Parfait !
s'exclama Grimpal. Nous nous mettons en route aujourd'hui !
-Une seconde. Y aller tous les cinq ne suffira pas. Il faut que Pijako vienne avec nous.
-Pourquoi ? Je ne sais pas me battre... Je serai inutile lors de votre affrontement dans la Tour du Temps...
souffla Pijako, honteux.
-Je te demande simplement de nous accompagner au fond de la Caverne Saline. Nous aurons besoin de tes aptitudes à déchiffrer les langues anciennes. Il y aura un texte que seul toi pourra nous lire et il nous dira comment appeler Lokhlass.
-D'accord... Je n'ai pas le choix.
La ferveur du groupe commençait à monter. Tous commençaient à s'agiter. Ils savaient qu'ils étaient sur le point de mettre fin à tout ça. Il restait trois jours. C'était une sacrée marge pour rejoindre le lieu du dernier combat et replacer les six Rouages du Temps. Mais ce qui ravit le plus Goupix était le sourire fabuleux de Grimpal au milieu de ses amis. Pour la première fois, il souriait sans arrière pensée, sans se dire qu'il était manipulé, sans se soucier d'un quelconque passé, sans chercher à comprendre qui étaient ces trois pokémons venus du futur. C'est bien le Grimpal qui a percé quelques mois plus tôt... Il a toujours eu l'âme d'un secouriste... C'est ça, son truc à lui. Il ne sera heureux qu'en sauvant le monde auprès de ses amis. Il n'existe que pour accomplir de grandes choses... Ai-je vraiment ma place à ses côtés ?

La Caverne Saline cachait bien son enjeu : elle était d'une longueur normale, les pokémons sauvages n'étaient pas plus forts ou plus agressifs que la moyenne, l'environnement n'était pas hostile. Tout semblait dire qu'il s'agissait d'un Donjon Mystère normal. Une simple promenade de santé pour les trois secouristes expérimentés. En retrait, Goupix, Grimpal et Pijako les regardaient progresser avec admiration. Malgré l'expérience de Pijako, la force de Goupix et la renommée de Grimpal, ils semblaient tout les trois à des années-lumière de leur force. Le passé témoin du futur. La soif de savoir des explorateurs face à la puissance des secouristes. "C'est vraiment quelque chose d'assister à un tel spectacle... Ils sont si forts, tous les trois. On en viendrait presque à se demander si leur force est naturelle... Massko me ferait presque peur. Et Zoroark n'est pas mieux non plus. Et nous savons tous qu'Ectoplasma nous cache une transcendance des plus redoutables. Ces trois là sont vraiment hors du commun. Vous voyez, vous deux, nous avons en notre compagnie la crème de la crème du monde des pokémons. Et malheureusement, ils ont vécu dans le malheur une longue partie de leur vie. C'est ça : ils ont sacrifié leur bonheur et leur avenir dans le but d'assurer les notre. C'est ça, être secouriste." Pijako baissa la tête. Par ces mots, il rendait hommage à ces pokémons si honorables. Il parlait comme s'il faisait face à des morts. Mais dans un sens, et Goupix en avait conscience, c'était exactement ça. Ces trois pokémons avaient perdu leur âme. Ils se battaient dans l'espoir de faire vivre les autres. Peut-on considérer quelqu'un comme vivant lorsque même lui a décidé que sa vie était terminée ? Ils ont tous les trois cédé le relais aux gens qu'ils essaient de sauver. Ils sont... incroyables. Plus Goupix avançait, plus elle repensait à son père. Elle avait cherché vainement pendant quatre ans une raison à l'abandon de son père. Elle n'avait jamais réussi à justifier son acte si bien qu'elle en avait fini par douter de son propre choix. Mais ce jour-là, elle avait compris : elle vivait pour comprendre comment fonctionnait le monde. Et ce jour-là, elle avait la réponse. Certains pokémons, qu'ils soient communs, légendaires ou historiques, vivent pour rendre le monde plus beau à ceux qui essaient simplement de vivre. C'était un idéologie des plus admirable du point de vue de Goupix. Elle y adhérait presque en tout point. Un jour, après mon apprentissage, je vivrai comme eux. Je ferai tout pour rendre le monde plus beau. Mais contrairement à eux, je ne serai pas malheureuse... J'aurais Grimpal à mes côtés. Et grâce à lui, ma tâche n'en sera que plus agréable à accomplir.
Zoroark fut le premier à poser sa patte miraculée sur le sable de la baie du fond de la grotte. Il se retourna vivement pour faire de grands signes à ses camarades qui rappliquèrent aussitôt. Ils avaient enfin trouvé le rivage de la Caverne Saline. Encore plus intéressant, les parois de l'immense salle était recouverts de peintures détaillant un texte méconnu. "Nous avons réussi..." frissonna Goupix, l'émotion lui titillant le visage. Le paysage était magnifique. C'était comme si un autre monde s'était ouvert à eux. Le sable s'étendait sur plusieurs centaines de mètres et les vagues n'étaient pas atténuées par les murs sous-marins de la caverne. Tout laissait croire qu'il s'agissait de l'extérieur au détail près qu'on ne pouvait voir le ciel. Et pour conforter cette idée d'extérieur, le vent semblait même souffler de manière latérale. Une brise en intérieur... Cet endroit est incroyable, songea la rouquine, émerveillée. Pijako leur annonça qu'il allait commencer la lecture des textes mais il fut interrompu : des pokémons sauvages venaient de tomber du plafond. Ils avaient été si discrets que personnes ne les avait entendus avant qu'ils choisissent de se manifester. Une dizaine de pokémons menaçants venaient de les encercler. Ils avaient bien pris soin de séparer Pijako du reste du groupe. I-Impossible ! Leur objectif était clair : les empêcher d'atteindre les Contrées Inexplorées. "Salutations à tous, commença l'un d'entre eux. Je suis Kabutops, leader des pokémons-fossiles. Nous sommes les gardiens de ces ruines. Vous vous en doutez, nous ne pouvons pas laisser n'importe quel pokémon atteindre Dialga. Imaginez ce qui se passerait si un pokémon mal intentionné et puissant arrivait à prendre contact avec notre pauvre pokémon légendaire... Non, vous êtes ici. Vous savez donc que vous pouvez le rejoindre. Donc vous devez mourir. Aucun pokémon ne doit se rendre sur les Contrées Inexplorées... C'est tout. Il n'y a pas d'exception, pas de règle, juste l'interdiction et la mort qui découle de cette dernière. Je ne sais pas qui vous êtes ni quels sont vos objectifs. Tout ce que je peux vous promettre, c'est une mort rapide, digne et respectable. En garde."

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