Chapitre Dix-neuf - Le Mont Glacial
Grimpal prit une grande bouffée d'air pur. Il ouvrit les yeux, s'éveillant sous la neige. Il secoua la tête afin d'éclaircir sa vue et ses idées. Absol et Arcko avait décrété qu'ils en avaient bien trop fait pour une première journée. Ils avaient créé une sorte de crevasse dans laquelle ils s'étaient réfugiés. La neige avait gelé en un rien de temps, leur permettant d'avoir une couverture contre le vent glacial. Il jeta un rapide coup d'œil autour de lui. Roucarnage abritait de ses ailes Evoli et Zorua qui dormaient encore profondément. Ils se saluèrent à voix basse, étonnés d'arriver à s'entendre malgré les rafales de vent qui frappaient la paroi. Les sons résonnaient dans la pseudo-caverne. Encore une fois, Arcko et Absol manquaient à l'appel. Les deux meneurs avaient quitté l'abri, cherchant une issue ou juste de quoi tenir une journée de plus. La présence des trois secouristes n'avaient fait qu'empirer la situation. Absol avait prévu de quoi faire le voyage à trois. Désormais six, ils avaient déjà épuisé toutes leurs ressources. Et les ailes de Roucarnage ne serviraient à rien tant que le blizzard continuera de souffler. Grimpal soupira. Il ferma les yeux pour analyser la situation. Il fut surpris de constater que Roucarnage dégageait moins d'énergie que les deux pokémons endormis. Mais il n'avait rien à proposer à ce dernier pour lui permettre de récupérer. A-t-il dormi au moins ? Je ne me souviens plus de comment s'est hier s'est terminé... songea Grimpal.
Il se leva et ordonna à Roucarnage d'aller dormir. Il le rassura n ajoutant qu'il veillerait sur les deux compère pendant qu'il riait se reposer. Roucarnage voulu protester mais se ravisa, réalisant soudain que le poids qui pesait sur ses ailes s'allégeait enfin. Il devait dormir. Il le savait. Et encore une fois, c'était un ordre donné par son chef et celui-ci ne voulait que son bien. Il ne pouvait pas refuser. Et ne voulait pas inciter le fugitif à plus de courroux car il devait avoir subi beaucoup plus que lui durant ses cinq semaines d'exil. Grimpal remarqua que personnes ici ne se préoccupait réellement de savoir s'ils étaient encore poursuivis. L'idée que des équipes téméraires aient pu tenter la même folie que le petit groupe ne leur avait pas traversé l'esprit. Mais cela paraissait naturel. Seule une équipe telle que celle dirigée par Alakazam pouvait tenter de les poursuivre et je doute qu'elle réussisse à nous rattraper. Nous sommes sur des terres qu'aucune équipe de secours n'a explorées. Nous ne savons pas non plus si la vie hors de Donjons Mystères existe. Cela semble insensé. Quel type d'être vivant pourrait réussir à s'implanter dans un endroit aussi hostile ? Et nous savons très bien que cela n'ira certainement pas mieux en avançant. Sommes-nous définitivement perdus ? Les pensées du chef d'équipe fusaient dans sa tête sans discontinuer, provoquées autant par les événements que par ce qu'il voyait, ou tentait de voir, autour de lui.
Arcko et Absol rentrèrent avant même que les trois pokémons reprennent vie. Grimpal commença à s'inquiéter pour Zorua et Evoli. Cela faisait plus d'une demi-journée qu'ils dormaient. La température du corps d'Evoli ne faisait qu'indiquer le début d'une maladie. Quant à Zorua, lui qui était si réactif et attentif, il ne s'était pas réveillé lors de l'approche du chef et du guide. Mais il y avait plus préoccupant encore : la tempête se déchaînait à nouveau. Ni Absol ni Arcko n'avait réussi à ramener de la nourriture. Cela aurait pu soutenir les malades. Les deux pokémons auraient pu récupérer de leur nuit blanche. Cela faisait deux jours entiers qu'ils n'avaient pas mangé le moindre morceau. Arcko était en train de subir les conséquences de son refus de partager avec Grimpal leur dernière ration. Et cette nuit blanche à jouer les éclaireurs n'avaient pas joué en leur faveur. Absol vacillait à chacque pas. Il n'avait plus que la peau sur les os. Ah... Si Artikodin ne nous avait pas chassé, nous aurions pu anticiper la traversée de ce désert. pensa Absol. Grimpal déglutit en s'apercevant qu'ils ne dégageaient plus aucune force. Il réfléchit quelques instants avant de les rejoindre.
-Je vais prendre les devants pour aujourd'hui, commença-t-il en chuchotant.
-Tu es sûr de pouvoir y arriver ? demanda Absol après avoir jeté un regard interrogateur à Arcko.
-Vous n'êtes plus en état. Je vais vous remplacer. Un peu de repos de vous fera pas de mal. J'aimerais beaucoup sortir de cet interminable désert au complet et ne laisser personne en route.
Absol baissa la tête. Il remercia doucement le fugitif avant d'aller s'installer dans un coin. Arcko et Grimpal s'installèrent contre la paroi, à l'abri du vent.
-Dis Grimpal, promets-moi que tu lui diras, lança doucement Arcko en faisant un signe de tête vers Evoli.
-Comment ça ? fît-il, sentant son sang lui monter à la tête.
-Promets-moi que tu confieras à Evoli tes sentiments envers elle une fois que tout ça sera fini. Je suis sûr qu'on va s'en sortir. Et puis, lorsqu'on aura prouvé que tu es innocent, il faudra bien que tu te changes les idées.
-Mais... Tu sais qu'elle est proche de Zorua, commença-t-il en ayant mis sa gêne de côté, je suis sûr que ça ne peut pas être réciproque.
-Et alors ? Qu'est-ce que ça change ? Tu penses qu'elle pourrait te haïr alors que tu lui aura juste dit qu'elle était la personne qui comptait le plus pour toi ? Tu n'as rien à perdre de toute façon. Ça ne peut que bien se passer.
-Oui. Tu as raison. Et puis c'est ce que je comptais faire de toute façon, lança-t-il sèchement en lui tirant la langue.
Ils éclatèrent d'un rire léger mais maîtrisé. Grimpal se sentit mieux. Pouvoir encore penser à un futur était un luxe et il aurait aimé y avoir pensé lui-même. Comme toujours, son partenaire l'aidait à surmonter cette épreuve, bien qu'en l'occurrence, ses "problèmes" sentimentaux pouvaient sembler bien ridicules. Enfin, peut-être pas totalement ridicules. Grimpal rêvait. Il rêvait de sa vie de secouriste. Il se projetait en avant. A ses côtés, Arcko, toujours fidèle. Contre lui, Evoli, sa tendre et chère. Devant lui, au garde-à-vous, Roucarnage et Zorua, calmes et sérieux pour la première fois de leur vie, attendant des directives. Oui, c'était un fantasme qu'il ne souhaitait pas voir réalisé. Le problème dans cette vision est qu'il n'y avait plus aucun pied d'égalité. Or la devise d'Arcko, à laquelle Grimpal avait immédiatement adhéré, était : chacun son rôle et peu importe l'importance de ce rôle, aucune hiérarchie. Chef, tacticien, combattants, soutiens, intendances. Tous ces rôles que devaient assumer chaque grande équipe, Arcko les imaginait. C'était son rêve à lui. Ils restèrent l'un contre l'autre, à rêver d'un futur ridiculement idéaliste pour se vider l'esprit de l'instant présent. Mais dans chacun de leur rêve, ils virent Absol. Absol était là, à côté de Zorua. Ils savaient pourquoi ils le voyaient. C'est évident. Bien sûr que nous proposerons à Absol de nous rejoindre une fois cette aventure terminée, pensa Arcko.
Ils marchèrent encore deux jours de cette manière. Par chance, ils avaient trouvé de quoi nourrir modestement les deux meneurs. Le blizzard s'était tu, permettant ainsi à la troupe de se revigorer, lui redonnant espoir. Roucarnage volait autour d'eux, prenant visiblement beaucoup de plaisir à réutiliser ses ailes malgré la force requise pour y parvenir. Il était vrai que la faim pesait lourd sur les petits corps mais le voyage était plus plus léger. La température était agréable, ils voyaient loin et savaient où ils allaient. Il n'y avait personne d'autre qu'eux et en observant bien l'environnement, ils devinaient aisément qu'ils se rapprochaient de la fin de cette épreuve. L'herbe commençait à percer la neige. De l'herbe ! De la couleur !en voyant ce retour de la végétation, Grimpal et Zorua furent euphoriques. C'était certainement à eux deux que la couleur manquait le plus. Leur absence avait entamé la ténacité de Grimpal. Quant à Zorua, son don de camouflage était devenu inutilisable au fur et à mesure de l'aventure car il n'avait plus aucune autre image en tête que le blanc des flocons. Il lui était donc impossible de se concentrer et de disparaître. Il s'était senti faible, vulnérable pendant tout ce temps.
Le retour de l'herbe ne fût que la première étape de cette euphorie générale. Roucarnage était revenu en piaillant qu'il avait aperçu du relief, ce qui était ne s'était jamais vu de sa part. Il avait aperçu une chaîne de montagnes avec plus de neige que de glace et même des arbres. La petite escouade s'était élancée à vive allure vers les terres dont avait parlé Roucarnage. C'est Absol qui prît le relais après une heure de course. "C'est le Mont Glacial qu'on voit au loin ! C'est là que devrait se trouver Feunard !" s'écria-t-il sans s'arrêter de courir. Les secouristes et les fugitifs lancèrent un cri de joie, soudés à nouveau cette fois. Ils se précipitèrent en bas de la montagne. Mais Arcko les arrêta sèchement. Il ordonna à tout le monde de profiter de ce dernier moment de répit. Il libéra chacun de ses occupations. Et, avant même que l'assemblée se dissipe, devant les regards ébahis de ses amis, il se roula dans la neige comme un enfant redécouvrant le monde. Cette neige fraîche, légère, fine, différente. Elle n'était pas celle qu'ils avaient traversée, celle qui collait aux pattes et au moral, celle qui était épaisse et lourde. Celle-ci était fine comme du coton. Evoli le rejoignît après avoir compris ce qui l'avait poussé à ce moment de folie pure. Zorua, plus hésitant, avait été forcé par Grimpal qui l'avait poussé dans un petit creux de poudreuse avant de lui sauter dessus. Roucarnage et Absol les regardaient amusés, trop grands, trop expérimentés, trop vieux pour ces enfantillages innocents. Ils préférèrent partir pour se ravitailler, laissant leurs amis profiter gaiement d'un moment de ce moment d'euphorie, oublieux de leurs devoirs et de leurs responsabilités.
Arcko s'éclaircit la gorge avant de reprendre la parole:
-Je disais... commença-t-il, montrant qu'il avait repris son sérieux, Maintenant que nous avons tous pu manger à notre faim et que nous avons pu passer du bon temps, chacun comme il le sentait, rajouta-t-il, gêné, nous allons pouvoir escalader ce dernier obstacle et mettre un terme à cet exil ! Je suis sûr que vous serez d'accord avec moi si je vous dis que ce voyage a été bien trop long à mon goût.
-Evidemment ! lança Evoli.
-On a tous besoin de vous sur la Place Pokémon ! surenchérit Roucarnage.
-Tu sais à quel point j'ai hâte de rentrer, Arcko, fit doucement Grimpal à son acolyte.
-Nous avons tous quelque chose à demander à Feunard. Il faut qu'on y aille, lança Absol à l'assemblée.
-Eh bien je crois que nous sommes prêts ! Allons-y. Nous ne devrions pas avoir trop de problèmes pour escalader cette petite montagne. Vous n'avez qu'à penser que nous escaladons une nouvelle fois le Mont Foudre mais que cette fois, l'endroit est désert.
"En avant !" crièrent-ils à l'unisson. Ils se mirent tous en marche vers le sommet du Mont Glacial.
Ils étaient au niveau du sommet mais aucune galerie débouchait dehors. Ils avaient donc décidé d'explorer de fond en comble les hautes galeries. Ils s'étaient séparés en trois groupes de deux. Les tandems furent rapidement créés, enfin créer est un grand mot. Evidemment, Arcko partît avec Grimpal comme Evoli avait choisi Zorua. Roucarnage et Absol n'avaient jamais leur mot à dire mais cela leur convenait aussi. Les trois équipes examinèrent et fouillèrent chaque recoin de chaque couloir, appelant Feunard de nombreuses fois.
Arcko et Grimpal déboulèrent dans une petite grotte que tapissait une fine couche neige. Un fin rayon de lumière rosâtre provenait d'une faille au plafond. Les murs de glace reflétaient l'intégralité de la pièce une infinité de fois. Mais, même malgré ces innombrables reflets, Grimpal ne réalisait pas ce qu'il voyait en face de lui. Ils s'étaient retenu d'appeler Feunard en entrant dans la pièce: c'était inutile. Sans même détourner le regard, ils appelèrent leurs amis de toute urgence.
"Vous êtes enfin arrivés ? Vous en avez mis du temps, Grimpal et Arcko. Oh! Vous n'êtes pas seuls ?"
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