5. é g o c e n t r i q u e
Depuis l'autre jour, après avoir compris quels étaient mes sentiments envers Harry et après "la mauvaise blague" qu'il m'avait faite, je l'avais complètement ignoré. J'étais vexée, pour ne pas dire désappointée. Il s'était éperdument moqué de moi en me faisant croire qu'il allait m'embrasser. Rien qu'en repensant à l'humiliation qu'il m'avait fait subir, j'avais les larmes aux yeux. C'était comme si j'étais à deux doigts de l'attraper mais que, brusquement, il s'éloignait et la distance grandissait entre nous. J'aimerais juste, pouvoir l'atteindre et lui avouer mes sentiments.
- "Oh non, il a peut-être deviné ce que je ressens pour lui ?"
Voilà ce que j'avais pensé le soir-même. Je m'étais donc résignée à l'ignorer et à faire l'exposé toute seule. Harry n'avait même pas réagi et avait lui aussi fait comme si je n'existais pas.
Même si je refusais de me l'avouer, il me manquait terriblement. Il avait apporté une touche de couleur à ma vie si terne et triste qui avait toujours demeuré en noir et blanc. Je ne cessais de penser à lui et j'étais toujours en train de le chercher du regard partout où j'allais et, dès que je le voyais, je ne pouvais m'empêcher de le fixer ou de le suivre du regard comme une vulgaire voyeuse. Mais, j'étais une vulgaire voyeuse amoureuse, n'oubliez pas.
- "Maman, as-tu besoin d'aide pour le dîner ?" proposai-je en entrant dans la cuisine. Ma mère m'offrit un tendre sourire et hocha positivement la tête. Je m'avançai vers elle et elle me pointa les légumes du doigt. "Tu fais une ratatouille ?" Elle acquiesça une seconde fois.
- "Anzel, est-ce que ça va ? Tu sembles avoir changé ces derniers temps." me dit-elle en langage des signes. Ma génitrice était muette de naissance, elle m'avait toujours parlée en langage des signes et j'avais appris à faire de même au fil des années. J'arrivais à agir normalement avec elle, sans bégayer ou bien baisser les yeux, ce qui était tout à fait normal puisqu'elle était la personne la plus proche de moi.
- "Non, tout va bien, je suis toujours la même, tu sais." J'essayais de la rassurer. Elle défit son tablier de cuisine et s'approcha de moi. Elle attrapa mes joues et les tira avant de les lâcher puis de les claquer. Un petit cri de douleur sortit de ma bouche et elle poussa un petit rire.
- "Tes joues ont rougi, cela me prouve que ma petite fille est amoureuse." Je secouai la tête en pouffant stupidement de rire. Ma mère et moi avions toujours eu cette complicité et j'espérais sincèrement ne jamais la perdre. Elle s'asseya à table et me fit signe de s'asseoir à côté d'elle. "Alors qui est l'heureux élu ?"
- "Il s'appelle Harry, il est nouveau." chuchotai-je et elle ouvrit la bouche en grand. Je soulevai un sourcil interrogateur. "Tu sais qui il est ?"
- "Babeth aime beaucoup parler, elle connaît toutes les rumeurs et toutes les mamans des élèves de ton lycée." Je lâchai un rire en prenant une pomme dans la panière à fruit.
- "C'est vrai que Babeth est bavarde."
- "Elle m'a dit que Harry est un grand et beau garçon qui fait tourner les têtes et qui n'aime pas se mêler aux autres." J'acquiesçai de la tête, en allant laver ma pomme. "Elle m'a aussi racontée qu'Harry est un très bon garçon, il ne traîne pas dans de sales affaires." Je souris en mordillant ma lèvre rêveusement. J'ai choisi quelqu'un de bien. Je reposai les yeux sur ma mère en caressant la peau du fruit. "Bon, aide moi à faire la cuisine, Babeth et son mari viennent dîner ce soir." Elle prit la pomme de mes mains et la reposa là où je l'avais prise. Je poussai un petit râle, regrettant de ne pas avoir croqué dans le fruit plus tôt.
*
La sonnerie retentit et quelques soupirs de soulagement retentirent dans la salle de classe. Je récupérai toutes mes affaires avant de poser mon sac sur mon dos. Les derniers élèves partirent et le professeur sortit de la salle pour aller prendre une pause. Je marchai jusqu'à la porte mais avant que je ne puisse en sortir, une main se plaqua contre le mur, m'empêchant de sortir.
Mes yeux remontèrent jusqu'à son propriétaire et c'était Harry qui s'était dressé devant moi.
- "L-Laisse moi sortir." balbutiai-je, les yeux rivés sur le sol, refusant de lui jeter un regard par peur de fondre comme une guimauve.
- "Regarde moi dans les yeux Angela ou peu importe ton nom." m'ordonna-il sur un ton sec et, un brin apeurée, je relevai doucement la tête vers lui. Mon coeur rata un battement et un nœud se noua dans mon estomac, m'empêchant de respirer correctement. Il était à tomber par terre comme d'habitude et je me rendis compte qu'il m'avait beaucoup plus manqué que je ne le pensais. Je posai ma main sur mon coeur pour essayer de calmer ses battements irréguliers. Mes yeux avaient croisé ses deux perles émeraude qui me rendaient à chaque fois toute chancelante. "Pourquoi m'évites-tu ?"
- "E-Euh... J-Je ne t'évite pas." niai-je en détournant le regard mais il attrapa mon menton et le releva pour que nos visages soient face à face.
- "Ne me mens pas, poupée." C'est exactement ça que j'étais, sa poupée. "Je n'aime pas lorsque tu m'ignores." Il parla froidement, si froidement que mon coeur se sentit blessé par cette aura glacée qui s'émanait de lui. Il n'aimait pas que je l'ignore ?
- "Je n-ne..." Il lâcha brusquement mon menton et je manquai de tomber en remarquant qu'il me tenait sur la pointe des pieds avec.
- "Ne t'avise plus d'éviter mon regard, si je te dis ça c'est juste parce qu'on doit faire cet exposé ensemble donc ne te méprends pas sur mes mots." continua-t-il. Il me fixait avec un air indifférent et je ne pus m'empêcher de le trouver encore plus beau de près. Un beau physique angélique qui cachait un démon égocentrique et si difficile à comprendre. Je soufflai tristement et réussis à ne pas détourner mon regard.
- "Je ne me méprenais pas." maintins-je et un sourire pris peu à peu possession de son visage lorsqu'il remarqua mon assurance. Il s'humecta les lèvres avant d'esquisser un sourire narquois.
- "Sois une bonne et sage fille obéissante comme tu sais si bien le faire." susurra-t-il. La température de mon visage augmenta de quelques degrés, devenant brûlante et chaude.
- "N-Ne dis pas des choses comme ça." expirai-je et il me fit un clin d'oeil avant de s'en aller. Il me faisait tourner en bourrique, c'était une certitude. Mais pourquoi étais-je tombée amoureuse de quelqu'un comme lui ? Les souffrances auraient dû être prévisibles, non ?
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