19. i n c o m p r é h e n s i b l e

- "Mmh, arrête Malory..." rumina Azkan dans son sommeil et en s'accrochant à mon bras, les sourcils froncés. J'étais dans la voiture d'Hakeem, à l'arrière. Harry, m'ayant laissée seule à la soirée, je fus bien obligée de profiter de l'hospitalité de Hakeem. Heureusement qu'Hakeem est un homme tout simplement adorable... Sinon je serais restée seule en boîte de nuit et Dieu seul sait ce qu'il aurait pu m'arriver. Malory, étant venue avec sa voiture, venait juste de partir. Azkan était trop à l'ouest pour rentrer chez lui. Hakeem l'avait donc forcé à rentrer avec lui. Non sans mal car Azkan se débattait sans arrêt en prétendant vouloir rester pour sentir le "parfum de la délivrance". Plus connu sous le nom d'héroïne.
Mes yeux se posèrent sur la tête d'Azkan, posée sur mes genoux. Il était allongé sur les sièges et dormait paisiblement en marmonnant quelques mots incompréhensibles.

- "Désolée Anzel de t'imposer ce junkie mais c'était soit ça soit il insultait Malory jusqu'à s'évanouir." s'excusa Hakeem mais je secouai la tête.

- "Ne t'inquiète pas, ce n'est rien." lui assurai-je avec un petit sourire. "Malory est son amie, alors pourquoi l'aurait-il insultée ?" l'interrogeai-je avec curiosité.

- "Ils ne s'apprécient pas tous les deux, ils se lancent des piques, se cherchent tout le temps et se font tous les deux une sorte de guerre... Il y a une grande rivalité entre ces deux personnages excentriques." m'expliqua-t-il en gardant les yeux sur la route. "Mais au fond je pense qu'ils s'apprécient énormément et qu'ils sont plus que de simples amis." Je vis sa poigne se resserrer autour du volant. Je compris donc que lui aussi, appréciait plus Malory qu'il ne le laissait paraître.

- "Je vois." murmurai-je en observant le paysage à travers la vitre. Je pris une grande inspiration avant de parler. "Hakeem, je peux te poser une question ?" demandai-je à peine audiblement en triturant nerveusement mes doigts. Il me regarda à travers le rétroviseur, intrigué.

- "Une question à propos d'Harry ?" J'hochai la tête de haut en bas en mordillant ma lèvre inférieure. "Je t'écoute." Un court silence prit place, le temps que je parvienne à formuler une phrase correcte.

- "Pourquoi Harry déteste-t-il autant cet homme... Cody ?" Je vis Hakeem froncer fortement les sourcils, semblant irrité. Il s'humecta les lèvres avant de parler.

- "Donc Harry ne t'en a pas parlée..." marmonna-t-il entre ses dents serrées. "À vrai dire, Cody était..." Hakeem s'arrêta de parler et me jeta un rapide coup d'oeil à travers le rétroviseur. Il détourna les yeux et poussa un soupir. "Je ne pense pas que je devrais t'en parler." Il pinça ses lèvres, l'une contre l'autre, débattant intérieurement s'il devait me l'avouer ou non. Était-ce sérieux à ce point-là ? me demandai-je. "Tu sais, Anzel..." Il prit une courte pause. "Tu n'aurais pas dû tomber amoureuse d'Harry." Mon visage se décomposa et je le fixai, abasourdie. Quel rapport Cody avait-il avec ma relation avec Harry ? "Je n'avais pas osé te le dire par peur de gâcher l'ambiance mais je peux maintenant... Tu dois abandonner l'idée de gagner le coeur d'Harry, Harry n'est pas... Il n'est pas fait pour toi." déballa-t-il. "Tu vas souffrir lorsque tu comprendras que tu n'as aucune chance avec lui."

- "Arrête la voiture." ordonnai-je, un brin agressive. Qui était-il pour me parler de notre relation déjà assez ambiguë comme ça ? Oui, il y avait des hauts et des bas mais j'avais depuis longtemps décidé de ne pas abandonner coûte que coûte. Et ce n'était pas ses paroles sans argument qui me feraient changer d'avis.

- "Anzel, ne le prends pas mal, je ne disais pas ça pour t'offenser mais ce que tu dois savoir c'est que..." commença-t-il, désolé. Mais je le coupai sur un ton calme :

- "Arrête cette voiture Hakeem." Il m'obéit en se garant devant un café. Je croisai mes bras essayant de contenir mon énervement. Le moteur s'arrêta enfin et j'enlevai ma ceinture avec hâte avant de sortir en claquant la portière. Je commençai à marcher rapidement sur le trottoir. J'entendis une portière se fermer et les pas d'Hakeem qui se rapprochaient de plus en plus de moi. Il m'attrapa l'avant-bras. Je m'arrêtai de marcher et me tournai pour être en face de lui.

- "Je suis désolé Anzel, je n'ai pas dit ça dans le but de te blesser." Son expression, ses yeux de biches me prouvaient qu'il était sincèrement désolé. Je finis par décroiser mes bras en soufflant, vaincue.

- "Tu ne m'as pas blessée Hakeem. Je suis juste fatiguée qu'on se moque en permanence de mes sentiments. J'aime Harry et je ne peux rien y faire, tu sais. J'ai toujours pensé que l'amour n'était que dans ces stupides contes de fée que l'on me racontait étant enfant. Je n'y croyais pas jusqu'à ce que mes yeux se perdent dans l'intense forêt verte que sont les yeux de Harry Styles." déclarai-je, les larmes aux yeux. "Je sais que mes sentiments ne sont pas réciproques, je le sais mais je veux changer ça, je veux briser la barrière qui séparent nos deux âmes si différentes." avouai-je et ma voix craqua, ce qui fit rouler une larme sur ma joue froide. Hakeem m'observa avec inquiétude avant de fermer les yeux un instant. Il semblait perdu jusqu'à ce qu'il rouvre les yeux et me prenne dans ses bras musclés. Je sanglotai encore plus en tirant inconsciemment son tee-shirt. Il déposa un baiser protecteur sur ma tempe. Une minute dût passer et mes larmes avaient cessé mais nous restâmes comme ça. "Hakeem, est-ce que tu crois au coup de foudre ?" bredouillai-je la tête contre son torse alors qu'il caressait mes cheveux.

- "Maintenant oui." Je relevai ma tête, sourcils froncés et le vis me regarder tendrement. Je donnai un petit coup de poing sur son torse et j'entendis son rire vibrer à travers sa poitrine.

- "Je rigole ~ , détends-toi, tigresse." Je fis mine de bouder en ressortant ma lèvre inférieure mais il releva mon menton de ses doigts. "Relève ta tête princesse, ta couronne va tomber." J'éclatai de rire et il sourit en me regardant.

- "C'est la phrase la plus clichée que j'ai jamais entendue." pouffai-je et il roula des yeux.

On revint à la voiture quelques rires et discussions plus tard. Azkan était toujours endormi tranquillement à l'arrière et je pouvais aller m'asseoir devant, n'étant plus encombrée par le poids de sa tête. Hakeem et moi parlâmes durant tout le trajet, rigolant sur les ronflements d'Azkan, tout en s'amusant et chantant. Nous nous étions rapprochés et c'était une première pour moi, d'avoir un ami de sexe masculin. Nous arrivâmes finalement devant chez moi. Détendue, je descendis de la voiture en compagnie d'Hakeem. Il blaguait sur la coupe de cheveux du videur de la boîte et je l'accompagnais dans son rire. Finalement, arriva le moment de nous dire au revoir. Je m'approchai timidement de lui pour lui faire la bise mais il me tira dans une accolade. Je rigolai bêtement.

- "Tu m'étouffes Hakeem." me plaignis-je mais il resserra l'étreinte. "Tu cherches à me tuer ou quoi ?" Il rit et s'éloigna pour finalement poser ses mains sur mes hanches. Nous étions collés l'un à l'autre et ça ne me déplaisait pas vraiment. Mon sourire euphorique s'évapora et je profitai du moment pour lui reposer ma question de tout à l'heure. "Hakeem... Qui est Cody ? Pourquoi Harry le haït-il autant ?" Hakeem baissa les yeux.

- "Je ne peux pas te répondre Anzel et je m'en excuse." Je soupirai avec déception. "Ce que tu dois savoir pour comprendre ce qui c'est passé avec Cody, c'est qu'Harry n'est pas ce que tu penses qu'il soit... Anzel, Harry est--"

- "Hakeem." entendis-je une voix que je connais très bien prononcer. Sa voix était plus froide que l'hiver et j'en eus peur pendant une seconde.

- "Harry." balbutiai-je en repoussant légèrement Hakeem. Harry était à côté de nous, appuyé contre sa voiture.

- "Il suffit que je m'en aille quelques heures, pour que tu voles ma copine et que tu lui racontes des conneries." gronda-t-il en nous toisant. Ma copine. Ces deux mots résonnaient en écho dans ma tête. Non Anzel, ce n'est ni le moment, ni l'endroit.

- "Mec, pourquoi tu lui as pas dit ? Je croyais pourtant que tu n'étais pas p--"

- "Ferme ta putain de gueule ou sinon j'te jure que je me retiendrai pas d'exploser ta face." menaça Harry en s'approchant. Sa grande taille nous surplombait et, sur le moment, sa carrure était très intimidante. L'expression d'Hakeem s'assombrit. Lui aussi, avançait, ne se sentant absolument pas intimidé par Harry.

- "Arrêtez, vous n'allez pas gâcher une amitié de longue date pour quelque chose d'aussi insignifiant que ça, non ?" soufflai-je en tenant le bras d'Hakeem. Il me regarda un instant avant de soupirer. Je sentais le regard insistant d'Harry sur ma main qui tenait le bras d'Hakeem. Je me mis sur la pointe des pieds et déposai un baiser sur la joue d'Hakeem avant de lui souffler quelques mots discrets à son oreille. Je me retirai doucement de lui. "On se reverra très bientôt." prononçai-je un peu plus fort. Harry me tira par la hanche pour me ramener vers lui. Il ne dit rien et Hakeem démarra sa voiture puis s'en alla. Harry en profita pour lâcher ma hanche et me fixer méchamment.

- "Qu'est-ce que ce connard t'a dit !" explosa-t-il, sa poitrine s'agitant rapidement de haut en bas. Il était énervé, non, il était plutôt fou de rage.

- "Rien ! Mais qu'est-ce qui s'est passé avec ce gars, Cody ? Pourquoi ne pouvais-tu pas m'en parler et pourquoi lui non plus ne pouvait rien me dire ? Nous sommes maintenant en couple Harry, nous sommes censés ne rien nous cacher !" hurlai-je sur le même ton. Harry n'eut pas la réaction à laquelle je m'attendais. Un rire sinistre sortit de sa bouche.

- "Tu n'es même pas ma petite amie Anzel ! Il s'agit juste d'un putain de défi impossible que je t'ai imposé et rien d'autre. Il n'y aura jamais rien entre toi et moi, il n'y aura jamais de "nous" !" cria-t-il en nous pointant chacun notre tour. Je le dévisageai avec stupéfaction. Mes yeux se remplirent de larmes pour la je ne sais combien-tième de fois depuis que je l'ai rencontré. Est-ce qu'Harry avait un coeur ?

- "Alors pourquoi m'avoir présentée à tes amis ? Pourquoi au lieu de rester dos à moi, tu te retournais pour me regarder ? Pourquoi ne m'as-tu pas ignorée ? Pourquoi tous ces baisers ? Pourquoi jouer avec mes émotions sans arrêt ? Pourquoi me donner de l'espoir si c'est pour le piétiner par la suite ? Pourquoi m'haïs-tu à ce point ? Qu'est-ce que j'ai fait de mal pour que tu me traites comme une moins que rien, hein ? Réponds-moi, Harry." Ma voix était si faible que j'eus peur qu'il ne l'entende pas. Qu'il n'entende pas mes sentiments. Harry s'était calmé, il m'épiait la bouche entrouverte. Je n'osai pas le regarder dans les yeux, par peur de craquer et de pleurer. Pleurer, je ne savais faire que ça de toutes façons.

- "Je ne t'haïs pas, Anzel." finit-il par dire et il suffit que j'entende ses mots, pour qu'une larme s'écoule lentement le long de ma joue. Mes yeux se fermèrent et je reniflai. Abandonne Anzel, me criait une partie de mon esprit. Il a dit qu'il ne te détestait pas, c'est un bon début, ne renonce pas ! m'hurlait une autre. Un mal de crâne s'installa, les pensées se mélangeaient dans mon esprit, elles m'embrouillaient.

- "Harry, je ne... Je pense que je vais rentrer, o-on se revoit au lycée." Je ne daignai même pas lui jeter un coup d'oeil avant de déverrouiller la porte de ma maison. Je franchis le seuil et claquai la porte. Je me laissais glisser le long de celle-ci en soupirant. Mon énergie était drainée et il fallait que je lutte pour ne pas m'endormir.

J'apercevais l'heure de ma position, la lumière du salon était encore allumée. Ma mine se renfrognait dans la confusion. Ma mère dormait toujours à cette heure-ci. Je me levai et avançai à pas de loup jusqu'à la fameuse pièce. Je soupirai de soulagement en voyant Maman endormie sur le canapé. Je pris le plaid plié à côté d'elle avant de la couvrir avec. Je déposai un doux baiser sur son front. Elle fronça les sourcils et ses lèvres mouvèrent d'elles-mêmes.

- "Isaac." Aucun son ne sortit mais je reconnus le prénom de mon père qu'elle articula. Cela m'attrista. Maman devait encore souffrir de la mort de mon père. Je mordis ma lèvre inférieure, me sentant inutilement coupable. Si seulement ma mère pouvait trouver l'amour, pour que Papa ne la hante plus. J'éteignis la télévision qui était encore allumée puis la lumière du salon avant de monter les escaliers. J'entrai dans ma chambre, me mis en pyjama, me brossai les dents avant de tomber dans les bras de ce doux Morphée.

Cette nuit-là, j'avais rêvé d'une sorcière qui avait empoisonné une princesse. La princesse fut ensuite sauvée par une fée qui lui donna un traitement pour qu'elle guérisse. Bizarre, il n'y avait pas de prince pour aider la princesse.

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