prologue; story of why hurricanes are named after people.
✩ La silhouette courbée... ✩
T'sais comment j't'ai r'marqué, la première fois ?
On était en pleine heure d'astro-physique, un cours magistral sur la naissance des planètes, et j'crois que j'm'ennuyais beaucoup, parce que j'étais occupé à écrire un nouveau couplet au lieu d'prendre des notes, et l'prof a commencé à parler d'Jupiter qui s'était probablement rapproché du Soleil avant d'migrer vers la périphérie de notre système, puis quelqu'un a lâché un excusez moi Monsieur ? du fond d'l'amphi et tout l'monde s'est retourné.
C'était toi.
J't'avais déjà vu évidemment, difficile de louper son voisin d'en face (surtout si on suit les mêmes cours depuis deux ans), mais j't'avais jamais trop prêté d'attention jusqu'ici.
Le prof s'est tû avant d'lâcher un oui un peu sec, p't-être qu'il a pas aimé être interrompu d'la sorte.
T'as souri poliment avant d'dire qu'la théorie de Jupiter, l'aspirateur du système solaire, était en réalité plutôt discutable.
Son puits gravitationnel lui a pourtant permis d'être la planète recevant le plus fréquemment des impacts cométaires dans tout le système solaire, d'après l'prof.
Oui, mais il est pour autant exagéré d'affirmer qu'elle protège les autres planètes, puisque ledit puits gravitationnel dévie aussi des objets vers les planètes qu'elle serait censée protéger.
On était tous bouche-bée, à écouter votre échange auquel certains ne comprenaient probablement pas grand chose.
T'avais un sourire fier et tu semblais si sûr de toi, installé tout seul dans ton coin.
L'prof a essayé d'te démontrer qu't'avais tort mais sans succès ; ses arguments bateaux l'ont simplement conduit à la conclusion qu'il reverrait ça et nous dirait c'qu'il en est au prochain CM.
Après les cours, j't'ai vu quitter l'amphi si rapidement, qu'une fois dehors à mon tour, t'avais d'jà disparu d'la circulation.
Va savoir pourquoi, j'me suis senti déçu ; p't-être que finalement, ton intervention m'avait donné envie d'te parler un peu, apprendre à t'connaître, toi, l'garçon d'la chambre d'en face.
Pourtant, c'est pas mon genre d'aborder les gens (pas qu'j'sois timide, j'sais juste pas comment m'y prendre ; c'est dur les relations humaines, t'as pas r'marqué ?).
Alors, j't'ai simplement chassé d'mon esprit, et la journée a repris comme si de rien était.
Mais quand j'suis rentré chez moi ce soir-là, quand j'ai mis les clefs dans la serrure, j'ai pas pu m'en empêcher.
J'ai marqué un arrêt et j'me suis tourné vers la porte de ta chambre.
J'ai attendu, sans trop savoir quoi.
J'avais envie d'te r'garder encore une fois.
Mais y avait rien à voir.
Même pas un bruit.
Pas l'moindre signe de vie.
J'étais déçu, ah ça tu peux m'croire !
T'avais piqué ma curiosité, et j'sais pas, j'voulais soudainement en savoir plus sur toi, le gars qui vit juste en face, qui hante le fond des amphis et qui disparaît dès qu'les cours sont finis.
Depuis c'jour-là, j'me suis surpris plusieurs fois à t'observer ; à écouter le moindre passage dans l'couloir pour deviner tes horaires, à m'installer en haut pour mieux t'observer.
C'est un peu flippant dit comme ça, maintenant qu'j'y pense.
J'ai pas osé t'aborder pour autant (trop peur d'déranger, peut-être).
J'sais pas trop si t'as r'marqué mon comportement un peu louche, plusieurs fois j'ai cru qu'le poids d'mon regard allait t'faire réagir, mais c'est comme si t'en avais rien à faire.
Ou p't-être que t'avais vraiment rien capté, qui sait.
J'avais jamais vraiment fait attention jusqu'ici, mais un jour, j'me suis dit que t'étais quand même putain d'magnifique, et ça m'a fait quelque chose, va savoir.
Comme si j'avais eu honte, pendant un bref moment, honte de penser d'la sorte.
Y a pas d'mal à trouver les gens beaux, pourtant.
Et toi, toi putain, qu'est-ce que t'es beau, tu m'fais penser à ces sculptures d'apollons, fasconnées dans le marbre le plus pur, le plus blanc ; t'as les traits si fins, si délicats, j'te l'jure bordel, t'es l'une des personnes les plus belles qu'il m'ait jamais été donné d'croiser dans ma vie.
Puis, t'as des ch'veux sombres qui r'tombent éternellement sur ton front de cette manière pseudo-négligée, ça m'fascine.
Ils ont l'air si lisses, si doux, ça m'donne envie d'passer ma main d'dans, juste pour sentir.
Les miens, ça fait longtemps qu'j'ai abandonné l'idée d'en faire quelque chose.
A force de décolorations, ils ont fini par tellement s'abîmer, maintenant j'me contente juste de plaquer les épis sur mon crâne et dégager mes yeux pour y voir un peu clair.
À un moment, j'me suis demandé si t'étais du genre loup solitaire, ou si t'avais des potes en dehors d'la fac.
C'est vrai, j'te vois toujours tout seul, tout l'temps.
Ça m'intrigue quand même un peu.
Avec une gueule pareille, tu d'vrais avoir des tas d'gens qui t'courent après, réclament ton attention, s'arrachent le moindre de tes regards.
Rien.
J't'ai encore observé pendant plusieurs jours, sans jamais m'faire remarquer (aussi improbable que cela puisse sonner), et finalement, les vacances sont arrivées.
La situation n'a pas bougé d'un pouce, mais ça m'empêchait pas d'continuer d't'admirer de loin.
La plupart des étudiants sont rentrés dans leur famille, laissant la résidence pratiquement vide.
L'étage l'était, en tout cas.
Et toi aussi t'avais l'air absent.
Ça m'a pas vraiment étonné, pour l'nombre de vacances que j'passe ici, j'me souviens pas t'avoir vu ou entendu dans les parages dans c'genre de moments.
Même si j'sors si souvent qu'ç'aurait pu être possible, que j'me dis.
J'ai quand même été déçu.
Pourtant, alors qu'la rentrée approchait doucement, un soir, quelqu'un est venu toquer à ma porte.
T'imagines pas mon étonnement, quand j'ai vu qu'c'était toi.
Et mon inquiétude aussi, quand j't'ai vu les yeux rouges et brillants, comme deux Mars dans la nuit noire, les traits douloureusement tirés dans une expression de panique, de gêne et d'inconfort.
T'ouvres la bouche pour parler mais aucun son n'en sort ; ça casse l'image un peu sexy du gars sûr de lui qu'tu dégageais quand t'as répondu au prof la première fois.
J'te fais rentrer et t'propose un verre d'eau, puis m'installe en face de toi, curieux d'savoir c'qui a bien pu t'mettre dans tous tes états (j'reste quand même silencieux, j'sais pas trop comment gérer la situation honnêtement).
J'ai oublié mes clefs chez mon frère, et y a plus d'train pour faire demi-tour à c'te heure-ci, tu commences avec hésitation ; j'ai nul part où dormir cette nuit et...
Un silence s'abat sur la pièce, et j'continue de scruter ton visage, essayant d'analyser au-delà des mots c'que t'essayes bien de m'dire.
Désolé, j'aurais pas dû, c'était stupide, pardon.
Tu t'lèves brusquement, prêt à r'gagner l'couloir, mais pris d'un élan de je n'sais quoi, je pose ma main sur ton bras (ce qui n'manque pas d'te faire frémir) et t'sers un sourire qui s'veut rassurant.
Tu veux rester dormir ?
T'as pas trop d'autres possibilités en réalité, à part peut-être t'payer l'hôtel, mais pas sûr d'trouver d'la place à une heure pareille.
T'hésites encore un peu, l'air penaud ; j'vois bien qu't'as envie d'dire oui mais qu't'as peur de m'déranger, alors, j't'assure que ça m'va, qu'j'aurais pas proposé sinon, qu'j'ai un matelas gonflable donc pas b'soin d'dormir par terre.
Tu finis par soupirer, résigné, et accepter la proposition (pourtant, j'vois bien qu't'es soulagé d'avoir trouvé un endroit où passer la nuit).
Tu m'remercies d'un sourire qui m'laisse pas indifférent, qui fait manquer à mon cœur un p'tit battement.
Au fait, j'm'appelle Minho.
Jisung.
Tu souris à nouveau.
T'sais quoi, c'est quand j'ai entendu ton prénom pour la première fois qu'j'ai compris ; j'ai un putain d'béguin pour toi.
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