Le Cri du Silence
Comme le lointain frémissement de plumes,
Le frisson d'une aile au murmure du vent,
Comme le chuchotement des feuilles des arbres,
Les palabres et le chant des forêts dans la brume,
Ou, des oiseaux, l'incertain fredonnement,
Comme le lent roulement de l'écume,
La berceuse des vagues, la voix claire de la pluie,
Le tambourinement de ses milliers de gouttes
Qui envoûtent le sable, puis, le laissant surpris,
Lui larguent le parfum des algues d'amertume,
Comme le froissement des cordes d'un violon
Vibrant sous le langage épris de l'archer,
Dans les rues, le ronronnement des voitures,
Face aux devantures, le claquement des talons,
Ou la voix âpre d'un chanteur oublié,
Comme le grincement des trains entrant en gare,
La machine souterraine et ses milliers d'essieux,
Ses rouages crevés sifflant contre l'acier,
Crissant et grimaçant, dont les pièces de jeu
S'entrechoquent, révoltées, sous son regard hagard,
Comme le roi fou des échecs, qui, en un rire,
Abat le tonnerre sur la vie foulée de ses pieds,
Puis, de son doigt vengeur face à l'offence première,
Sourd des prières, fait s'ouvrir les mêlées,
Devenues aveugles pour son cruel délire,
Comme le pli de son sourire carnassier,
Faisant écho au scintillement des armes ;
Nourri, démesuré, par son propre décor,
L'incendie des corps animant d'éternels brasiers
Qui s'enivrent savamment de tout ce vacarme,
Comme le couperet qui tombe
Dans des cratères éclaboussant de leur sang
La montagne indécente des victimes meurtries,
Où gît, inconnu, démembré, un cadavre blanc,
L'esprit déjà loin des détonations des bombes...
Ainsi va le silence que troublent les hommes,
Carcasse écœurante qui évide ses entrailles,
Ou bien sanglot d'enfant assourdi par le monde,
La Joconde muette et son regard d'email
Finit par s'oublier dans les vapeurs d'opium.
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