Hello les amis <3

Poem a 3 mois aujourd'hui ! Merci pour les 19k, c'est un truc de fou. Merci merci merci !

Voici le chapitre 11, j'espère que vous l'aimerez.

Aussi, je voulais vous prévenir que le chapitre 12 sortira le samedi 14 décembre. J'ai un tas de choses à faire pour Paper heart et je croule sous le taff. Les corrections éditoriales me prennent beaucoup de temps et je ne veux rien bâcler, pour vous offrir un livre de ka-li-tey ! Du coup comme je dois rendre mon plan du tome 2 le 9 décembre et que je dois aussi bosser sur mes éditos, je ne pourrai pas vous poster le chapitre 12 la semaine prochaine. Mais promis, après le 9 le rythme d'un chapitre par semaine reprendra. Je ferai tout pour en tout cas.

Je donne tout pour vous <3

Belle lecture, on se retrouve en bas.

***********༄***********

Aimer et haïr sont deux faces d'une même pièce, et parfois, il suffit d'un souffle pour qu'elles se renversent.

Je crois que je déteste Jungkook.

Je le déteste au point où j'aime le détester.

Il y a une certaine forme de satisfaction quand jaillit le feu de la haine, une énergie étrange que je n'arrive pas à expliquer. Comme si le haïr me permettait d'avoir un peu le contrôle sur la situation. Et chaque regard, chaque mot, chaque sourire provocateur, alimente les flammes du brasier.

Jungkook est tout ce que je voudrais éviter.

Il est intense et imprévisible. Il me déstabilise à chaque fois qu'il se rapproche. Et pourtant, les instants passés en sa présence me laissent perplexe, comme si une partie de moi, une partie que je n'avais même pas remarquée, en redemandait.

Je lui en veux de m'atteindre à ce point. Mais au lieu de le repousser, je m'en nourris. Je me laisse piéger, volontairement, comme un insecte attiré par la lumière d'une lampe, tout en sachant qu'elle me brûlera les ailes.

Il a ce pouvoir sur moi.

Un pouvoir qu'il semble ignorer, ou peut-être qu'il s'en moque. C'est ce qui me frustre le plus, je crois. Il se joue de moi, comme un chat joue avec sa proie, avant de la dévorer. Et moi, dans cette danse, je suis pris au piège, incapable de m'en défaire.

Mais peut-être que je n'ai pas envie de m'en défaire.

Peut-être que tout ce que je veux, c'est que ce jeu ne s'arrête jamais.

Parce que dans cette confusion, je me sens vivant, et je trouve enfin un peu de sens à cette vie fade et sans relief. D'une manière ou d'une autre, Jungkook me fait exister. Parce qu'entre nous, il n'y a pas de place pour l'indifférence.

Et l'indifférence, plus que tout, est ce qui me terrifie.

Alors je continue de le détester. Et tant que je peux le haïr, je peux lui donner une place dans ma vie, même si je prétends ne pas le vouloir.

Je suis dans ma chambre, assis au bord du lit. Mes doigts s'agitent nerveusement autour d'un bouton de ma chemise, comme si le simple fait de le manipuler pouvait calmer l'agitation en moi. Ça fait bien dix minutes que je suis censé être prêt, mais je n'ai même pas mis mon pull.

Le silence de la pièce est oppressant. D'habitude, je l'aime, ce silence. C'est mon refuge, ma bulle. Un endroit où je peux m'échapper, loin des regards et des jugements. Mais aujourd'hui, il me semble lourd, suffocant, presque hostile. Il n'est plus un abri mais une cage, et le stress qui tourbillonne en moi me tient captif.

Pourquoi j'ai fait ça ? Pourquoi j'ai invité Jungkook au Chess Coffee ?

Mon cœur bat si fort que j'ai l'impression qu'il cherche à s'échapper de ma poitrine. J'inspire profondément, mais ça ne change rien. Le nœud dans mon estomac est toujours là, bien serré, me rappelant que c'est moi qui ai tendu la perche, moi qui ai invité le chaos dans ma journée.

J'essaie de me convaincre que ce n'est rien. Qu'il ne viendra sûrement pas. Mais une petite voix dans ma tête me murmure le contraire. Et cette possibilité me paralyse autant qu'elle me réjouit.

Je ferme les yeux un instant, espérant que l'obscurité puisse apaiser le tumulte dans ma tête. Mais à la place, je revois son visage. Son sourire. Ses yeux noirs. Ces yeux qui ont le pouvoir de tout voir, même ce que je m'efforce de cacher. Je revois la scène d'hier soir, aussi, et repense à chaque mot qu'il a prononcé, chaque geste qu'il a fait. Et je me rends compte que, depuis qu'il est entré dans ma chambre, il a laissé une empreinte en moi que je n'arrive pas à effacer.

Mes paupières s'ouvrent et mon regard dérive vers le miroir, de l'autre côté de la pièce. Mon reflet me renvoie une image qui me semble presque étrangère. Ma chemise est froissée, mal boutonnée. Mes cheveux sont un peu trop désordonnés. Et mes yeux... Ils ont cette lueur d'inquiétude que je déteste voir.

Je me lève d'un coup. La chair de poule s'étale sur mes bras malgré la chaleur de la pièce. Mes jambes tremblent légèrement, mais je m'oblige à tenir bon. Je marche jusqu'au miroir et ajuste ma chemise d'un geste maladroit. 

Tout doit sembler normal. Tout doit être sous contrôle. 

Même si je me sens comme un bateau qui prend l'eau.

Jungkook. Ce nom résonne dans ma tête comme un écho. Une part de moi espère qu'il viendra. Une autre, plus grande, redoute de le voir franchir la porte du café aujourd'hui.

Je m'appuie sur le rebord de la commode, mes doigts crispés sur le bois froid. Ce n'est pas seulement le revoir qui me terrifie. C'est ce qu'il pourrait dire. Ce qu'il pourrait faire.

Et ce que ça pourrait réveiller en moi.

Je serre les dents, prenant une profonde inspiration. Il faut que je sois fort. Que je fasse semblant. Que je garde mes distances. Oui, c'est ça, que je garde mes distances... Mais alors que cette résolution prend forme, une autre pensée me traverse.

Et si je n'en avais pas envie ?

Mon téléphone vibre sur la table de chevet, brisant le silence lourd de la pièce. J'attrape l'appareil d'un geste rapide, ravi d'avoir une distraction, même temporaire. C'est Hoseok.

Hoseok

Allez, Tae, donne tout aujourd'hui !

Tu vas gagner plein de parties !

Un sourire furtif étire mes lèvres. Hoseok. Toujours là pour encourager, pour insuffler une énergie que je n'ai pas, pour me rappeler que je suis plus fort que mes peurs. Pendant une seconde, je me sens un peu plus léger. Mais le poids dans ma poitrine revient aussitôt.

Je tape sur mon clavier, hésitant sur chaque mot.

Taehyung

J'ai fait une connerie, je crois.

La réponse arrive presque immédiatement, comme s'il attendait mon message.

Hoseok

D'y aller ?

Mais non c'est pas une connerie.

Ça te changera les idées et ça te fera du bien.

En plus y aura Yoongi, il va te mettre à l'aise.

Je lâche un soupir. Si seulement c'était aussi simple. Si seulement Hoseok savait. Mais il ne sait rien. Rien de ce qui s'est passé hier soir, rien de l'ouragan Jungkook.

Taehyung

J'ai invité quelqu'un à venir surtout.

Quelqu'un que je ne suis pas sûr d'avoir envie de voir.

Je fixe l'écran, regardant les trois petits points qui indiquent qu'il est en train d'écrire. Mon pouce tremble légèrement contre le bord de mon téléphone.

Hoseok

Comment ça ?

Taehyung

Trop long à t'expliquer maintenant, mais en gros, j'ai invité un type que je déteste.

Et je ne sais plus quoi faire.

J'espère qu'il ne viendra pas.

Je lâche un rire nerveux, à peine audible. 

Parce que je mens.

Hoseok

Au pire évite le.

Y aura surement du monde dans ce café, tu pourras faire comme si tu ne l'avais pas vu.

Taehyung

Oui, tu as raison.

Mensonge, encore. Parce que je sais que je ne pourrais jamais faire comme si je ne l'avais pas vu. Parce que Jungkook, lorsqu'il apparaît, prend tout l'espace et s'impose sans avoir rien d'autre à faire qu'à exister. Je sais que je ne pourrais pas faire comme si je ne l'avais pas vu, s'il vient. Que je ne pourrais pas l'ignorer.

Parce que quoi qu'il fasse, mon regard est toujours tourné vers lui.

Je pivote à nouveau vers mon miroir.

J'ai des cernes, d'avoir mal dormi. Mon teint est terne, presque maladif. La chemise que j'ai choisie, si soigneusement il y a une heure, me paraît soudain trop serrée, comme si elle m'étouffait. Je passe une main tremblante sur le tissu, mais ça ne change rien.

Pourquoi je l'ai invité, bordel ?

Tout en lui me trouble, me désoriente. Et maintenant, je vais potentiellement me retrouver dans un endroit où je ne pourrai pas le fuir.

Quelle idée de génie, Taehyung.

Je me penche pour attraper mon pull et l'enfiler par-dessus ma chemise. Mes mains tremblent légèrement, mais je fais de mon mieux pour ignorer cette faiblesse. Yoongi ne va pas tarder à arriver. Il faut que je sois prêt. Que je garde la tête froide.

Mais au fond de moi, je sais. Je sais que ce n'est pas Yoongi que je redoute de voir aujourd'hui, même si je me doute qu'il va mal le prendre si son rival se pointe au Chess Coffee.

Ce que je redoute... c'est Jungkook.

***

Le bruit métallique du métro résonne dans le wagon, se mêlant au murmure constant des conversations et au grincement des roues contre les rails. Debout, je me tiens à une barre, oscillant légèrement au rythme des secousses du train. Yoongi est assis sur le siège juste en face de moi, son regard rivé sur les panneaux lumineux qui affichent les stations.

— Ça s'est bien passé, chez ton père, au fait ? je demande pour briser le silence.

Il tourne les yeux vers moi et hausse un sourcil, surpris par la question. Puis il se redresse un peu en posant un coude sur le rebord de la vitre.

— Ouais, ça allait. Si ce n'est que mon frère était là, et rend parfois les choses... bruyantes.

J'attends qu'il continue.

— On a dîné ensemble hier soir. Mon père a fait des efforts, tu vois ? Mais bon, c'est toujours tendu entre eux. Ils ne peuvent pas s'empêcher de s'envoyer des piques, même pour des trucs insignifiants.

— Et... comment tu l'as vécu ?

Il esquisse un sourire froid.

— Mal. Ça me saoule de fou. Quand ils ont commencé à s'engueuler pour l'accident de moto de mon frère, mon père m'a demandé mon avis. J'aurais mieux fait de me taire, ça a empiré les choses.

Je grimace en l'écoutant, parce que j'imagine très bien la scène.

— Désolé, ça n'a pas dû être facile...

Yoongi secoue la tête.

— C'est rien. Je suis habitué. Ce qui compte, c'est qu'ils ont fini par se calmer.

Le métro ralentit brusquement, et je me rattrape à la barre.

— Bon, le tournoi d'échecs, c'est bien à 14h ? me demande Yoongi.

Je hoche la tête, vérifiant l'heure sur mon propre téléphone.

— Oui, c'est ce qu'a dit Hayun en tout cas. On a encore le temps, il n'est même pas 13h.

Il hausse légèrement les épaules.

— Je suis le pire pour retenir des horaires, putain. Jin me l'a dit par message hier en plus, mais j'avais la flemme de vérifier. Il m'a dit aussi qu'il était déjà allé au Chess Coffee et que leur latte matcha était incroyable.

Une vibration dans ma poche interrompt la conversation. Je sors mon téléphone et lis rapidement le message de Hoseok qui me certifie que quoi qu'il arrive, tout va bien se passer. Une chaleur rassurante s'installe en moi à la lecture de ses mots. Yoongi me fixe, curieux.

— Hoseok ? devine-t-il.

Je hoche la tête.

— Comment il va ?

— Bien, je crois. Il me motive pour tout à l'heure.

— Pourquoi ? Tu stresses ?

Si tu savais, Yoongi...

Le métro reprend de la vitesse, et je m'installe sur le siège à côté de mon ami. Pendant un moment, nous restons silencieux, regardant les autres passagers.

Puis Yoongi brise à nouveau le silence.

— Pourquoi tu stresses ?

Il ne lâche pas l'affaire. Mes épaules s'affaissent.

— J'en sais rien, c'est stupide.

Yoongi me sourit tendrement. J'aimerais pouvoir être aussi calme que lui, mais mon pied s'agite nerveusement sous le siège, battant un rythme frénétique que je ne contrôle pas.

— Stresse pas pour ça. C'est qu'une petite compétition amateur, pas les championnats mondiaux, tu sais ?

Je hoche la tête, sans vraiment répondre. Ce n'est pas la compétition qui me stresse. C'est la présence de Jungkook.

Je n'ai pas eu le courage de le dire à Yoongi. Que je l'avais invité, je veux dire. J'ai d'abord pensé que ça n'avait pas d'importance, que Jungkook ne viendrait probablement pas, mais maintenant que l'heure approche, je ne peux m'empêcher d'imaginer le pire scénario ; Jungkook débarquant avec ce sourire suffisant, et créant une ambiance tendue que je ne saurai pas gérer.

— Ça va se passer comment, cette compétition, au fait ? je demande, pour changer de sujet.

— De ce que m'a dit Jin, d'abord on s'installe, on joue pour le fun. Ensuite, ils organisent un tournoi. Des parties en dix minutes, élimination directe. Rien de sérieux, mais ça attire toujours du monde.

— Ça a l'air sympa. Tu y as déjà participé ?

— Jamais. Mais aujourd'hui, je ne pense pas jouer.

— Pourquoi ?

— Pas envie.

Il m'adresse un sourire taquin.

— Sauf si tu me supplies de jouer contre toi. Là... je peux faire un effort.

Je lui pousse l'épaule du plat de la main.

— Plutôt mourir que de te supplier.

— Je suis choqué par tant de rébellion, Tae.

— Gnagnagna.

Cette fois, il rit franchement.

— T'es vraiment un gamin, putain.

— C'est pour ça qu'on s'entend si bien alors.

Il me pousse à son tour.

— Pour revenir sur le tournoi, t'as pas à stresser. Personne va te juger si tu perds. C'est bon enfant.

Je ris faiblement.

S'il savait...

***

Dans la rue, l'air frais du début d'après-midi me frappe, mais ne suffit pas à calmer mes nerfs. Yoongi, lui, marche à mes côtés avec l'assurance de quelqu'un qui ignore tout des enjeux de cette journée.

Quand nous arrivons enfin devant le Chess Coffee, mon cœur s'emballe à nouveau. Les grandes baies vitrées laissent entrevoir l'intérieur, où des plateaux d'échecs, spécialement disposés pour l'événement, ornent les tables. Quelques joueurs s'entraînent, et des spectateurs discutent autour de cafés fumants.

Yoongi ouvre la porte et me laisse entrer le premier. L'ambiance chaleureuse devrait me rassurer, mais tout ce que je ressens, c'est une montée d'adrénaline.

— Tu veux boire quoi ? me demande Yoongi en se dirigeant vers le comptoir.

— Un latte.

— Matcha ?

Je secoue la tête.

— Non, merci, juste un latte normal.

Il passe la commande, me laissant quelques secondes seul pour scanner la pièce.

Pas de Jungkook en vue. Pas encore, du moins.

Ouf.

Mais je sens qu'il va venir. Je le sais.

Et je n'ai aucune idée de comment Yoongi va réagir.

***

Nous sommes assis près de la fenêtre. Le soleil de l'après-midi effleure le bois usé de notre table, créant des ombres complexes sur l'échiquier devant nous.

Yoongi finit sa gorgée de café, repose la tasse et déplace un pion.

— Toujours pas décidé à me supplier ? lance-t-il, un sourire en coin.

— Pourquoi ne pas juste avouer que tu meurs d'envie de jouer ?

— Bon OK t'as gagné, je meurs d'envie de jouer. Je te laisse les blancs ? Ça te permettra de t'échauffer avant que ça débute.

Le jeu commence doucement. Yoongi avance ses pièces avec un calme méthodique, tandis que je me concentre, tentant de lire sa stratégie. Les pions s'éparpillent sur le plateau, comme des soldats sacrifiés pour un plus grand dessein. Je note qu'il protège bien ses cavaliers, mais il néglige légèrement ses fous.

— Tu utilises toujours une ouverture classique à ce que je vois, commente-t-il après un énième coup. Tu suis trop les règles.

— Et toi, tu joues juste au feeling, c'est pour ça que je te bats à chaque fois, je réplique en déplaçant un pion.

Il sourit.

La partie s'intensifie. Je vois une opportunité de piéger sa tour avec un fou bien positionné, mais cela exige de sacrifier un cavalier. Hésitant, je finis par prendre le risque. Yoongi arque un sourcil en remarquant ma tactique.

— Pas mal, dit-il en bougeant sa tour pour contre-attaquer.

Finalement, après quelques mouvements serrés, j'arrive à bloquer son roi.

Échec et mat.

Je lève les yeux vers lui.

— Félicitations, déclare-t-il, bon perdant. Mais la prochaine fois, c'est moi qui gagne.

Yoongi s'interrompt et lève une main pour saluer quelqu'un derrière moi. Je me retourne et aperçois Jin entrer, un grand sourire aux lèvres. Il s'approche de notre table.

— Ah, vous êtes déjà dans le feu de l'action vous deux, lance-t-il en regardant l'échiquier.

— Justement tu tombes bien, j'ai besoin d'un adversaire plus coriace, déclare Yoongi en se levant. Viens, on va voir ce que tu vaux.

Je ne le prends pas mal, compte tenu de ma victoire. Ça me fait même plutôt rire.

— Attention, je ne prends pas les échecs à la légère, plaisante Jin en prenant place à la table d'à côté, face à Yoongi.

Je les regarde commencer leur partie. Le ton est léger, mais compétitif. Jin parle beaucoup, faisant des blagues à chaque coup, tandis que Yoongi garde son calme, concentré sur le plateau.

Pendant qu'ils s'affrontent, je me rends compte que je devrais trouver quelqu'un d'autre pour continuer à jouer, moi aussi. Histoire de me faire un peu la main dans le cas où Jungkook déciderait de venir...

Mon regard parcourt la salle. Plusieurs tables sont déjà occupées, mais une personne près du comptoir me fait signe en souriant.

Je me lève lentement, les mains moites, et m'approche.

— Vous voulez jouer ? je demande, la voix un peu hésitante.

— On peut se tutoyer, tu sais ? J'ai cru voir que tu cherchais quelqu'un à affronter. Je m'appelle Hakyeon, et toi ? me répond mon nouvel adversaire, âgé probablement d'une trentaine d'années.

— Taehyung. Kim Taehyung.

— Enchanté.

J'incline la tête respectueusement et m'assois, ajustant nerveusement les pièces sur l'échiquier. Le jeu commence. Il joue de manière agressive, avançant ses pions rapidement pour contrôler le centre du plateau. Mon cœur bat fort, mais je reste concentré.

Je décide de temporiser, en jouant défensivement et en observant ses mouvements. Il tente un piège avec sa dame, mais je parviens à anticiper son coup, plaçant mon cavalier en bonne position pour menacer son roi.

— Oh, intéressant, commente-t-il avec un sourire, reculant sa dame pour se protéger.

Je prends confiance au fur et à mesure que le temps passe, utilisant mes tours pour encercler son roi. Il essaie de contre-attaquer, mais il est trop tard. Avec un coup précis de mon fou, je le mets en échec et mat.

— C'était très bien joué, admet-il, impressionné.

— Merci...

Je jette un coup d'œil vers Yoongi et Jin, toujours absorbés dans leur propre partie, et je me détends enfin.

Peut-être que cette journée ne sera pas aussi stressante que je l'avais imaginé.

***

Le Chess Coffee commence à se remplir, et un coup d'oeil sur mon téléphone m'indique qu'il est bientôt 14h. Le bruit ambiant s'intensifie. Les rires, les discussions animées, et le claquement régulier des pièces contre les échiquiers créent une atmosphère presque festive. Je termine mon café, laissant mes doigts jouer nerveusement avec la tasse vide, quand une présence familière capte mon attention.

Jungkook vient d'entrer.

Mon cœur rate un battement. Je jette un coup d'œil furtif vers Yoongi, assis en face de moi. Comme prévu, son expression se durcit immédiatement. Il fixe Jungkook avec une agressivité palpable, et ses épaules se crispent.

Jungkook ne semble pas nous remarquer – ou il fait semblant. Toujours est-il qu'il s'installe dans un coin de la pièce, engageant une partie avec un inconnu. Je le regarde à la dérobée, mes yeux revenant sans cesse vers lui malgré moi. Il rit doucement en jouant, arborant cet air détendu et sûr de lui que je commence à reconnaître.

— Putain qu'est ce qu'il fout là celui-là, lâche Yoongi, le ton brusque C'est sûrement Hayun qui lui a dit. Je savais qu'elle le préviendrait.

Mon estomac se noue.

Et immédiatement, je me sens coupable.

— Hayun n'a rien fait. C'est... c'est moi qui l'ai... en quelque sorte... invité.

Ses yeux se tournent lentement vers moi, et son regard est si perçant qui me traverse comme une lame aiguisée.

— Invité ? Tu as invité Jungkook ? Et tu pensais me le dire quand, au juste ?

Je n'ai pas de réponse. La honte monte en moi, et je détourne les yeux, fixant ma tasse comme si elle détenait une solution à ce malaise.

Yoongi soupire, visiblement agacé, mais il n'insiste pas. Pendant un moment, il observe Jungkook en silence, comme s'il évaluait s'il devait aller lui parler ou non. Puis il se détourne, clairement décidé à ne pas créer de scène.

La partie de Jungkook se termine. Il serre la main de son adversaire, échange quelques mots, puis il brasse la salle du regard et d'un pas lent, se dirige vers nous. Mon souffle se coupe. Yoongi, lui, se redresse, les mâchoires serrées.

— Yoongi hyung, toujours aussi tendu, à ce que je vois, lance Jungkook avec un sourire.

— Et toi, toujours aussi insupportable.

— Les retrouvailles chaleureuses, ce sera pour une autre fois, j'imagine.

Jungkook tourne les yeux vers moi. Je peine à déglutir.

— Salut, Taehyung.

Bordel. Pourquoi sa voix s'est faite plus douce en prononçant mon prénom ?

Pourquoi faut-il toujours qu'il me surprenne ?

— Salut, je murmure.

— Qu'est-ce que tu veux, Jungkook ? intervient Yoongi, sur la défensive.

— J'ai entendu dire qu'on jouait aux échecs ici. Alors je suis venu. Un souci avec ça ?

— Oh arrête, tu savais très bien qu'on serait là. Taehyung m'a tout avoué.

Je me ratatine sur ma chaise en espérant disparaître. Jungkook lance un regard vers moi et arque un sourcil.

— Ah il a fait ça ?

Je remarque seulement maintenant qu'il n'a rien dit. Que Jungkook n'a pas dit que c'était moi qui lui avait dit de venir. Qu'il a fait passer ça pour du hasard... 

Tentait-il de me protéger ? 

— Oui, et on a pas envie de te parler, alors laisse nous profiter.

— « On » ?

Jungkook ne m'a pas quitté des yeux et attend que je réagisse. Mais je suis incapable de prononcer le moindre mot. Je suis tétanisé.

— Ouais, « on ». Taehyung et moi, on a pas envie de te parler.

— Ça tombe bien, je ne suis pas là pour faire la conversation, mais pour affronter des adversaires à ma taille.

Yoongi fronce les sourcils. Jungkook reprend : 

— Du coup, Taehyung, ça te dirait une petite partie ?

Il désigne une table libre un peu plus loin, d'un geste nonchalant.

— Il est pas intéressé.

— Avec tout le respect que je te dois, Yoongi, ce n'est pas à toi que je parle, réplique Jungkook, son sourire s'effaçant légèrement.

Il me regarde à nouveau, ses yeux sombres ancrés dans les miens.

— Alors ? Tu veux bien ?

— Euh... je...

— Yoongi, ramène-toi faut que tu goûtes au matcha, c'est une tuerie !

La voix de Jin s'est élevée à quelques mètres de nous seulement, et mon meilleur ami serre les doigts autour de sa tasse. Je vois bien qu'il est tiraillé, mais rapidement je lui fais signe qu'il peut y aller, et à contrecoeur, il se lève et s'en va en grognant quelque chose d'inaudible, non sans adresser un dernier regard menaçant en direction de Jungkook. 

— Tu ne m'as toujours pas répondu. Tu acceptes ?

Je hoche la tête. Semblant satisfait, il s'installe à la place de Yoongi, face à moi, et pousse la tasse vide de mon meilleur ami sur le côté. 

— Je me disais, ça pourrait être marrant de pimenter un peu le jeu, cette fois.

Je plisse les paupières.

— Pimenter le jeu ?

— Un gage. Le perdant fait ce que le gagnant lui demande.

Mon estomac se tord. Un gage ? Je n'ai jamais aimé ce genre de truc, où les enjeux dépassent le simple plaisir de jouer. Mais il y a quelque chose dans son regard, un mélange d'insolence et de sincérité qui me donne envie de relever le défi.

— C'est... c'est d'accord, je murmure.

Mon cœur bat à toute vitesse

Yoongi me fixe au loin derrière sa tasse de matcha, les lèvres pincées. Il semble bouillonner de colère.

— Tu as déjà joué pour un gage avant aujourd'hui ?

— Pas vraiment...

— On va voir si la pression te motive ou te paralyse, alors.

Je déglutis avec difficulté.

— Je te laisse commencer, j'annonce en prenant les pions noirs.

Jungkook ne rétorque rien et ajuste ses pièces avec soin, comme s'il s'apprêtait à entrer dans une arène. Moi, je me concentre sur ma respiration, essayant d'ignorer la tension qui rend mes épaules trop raides.

Il déplace son premier pion. Je fais de même.

Jungkook continue avec son cavalier, attaquant déjà mon pion central. Son jeu est offensif dès le départ, et je sens la pression s'installer. Je décide de contrer en développant mon cavalier pour me défendre.

— Intéressant, déclare-t-il à voix basse en jouant son coup. Tu te contente d'égaliser, tu n'essaies pas de dominer.

Son commentaire pique quelque chose en moi. Je place un pion pour renforcer ma position. Il avance un deuxième pion, déclenchant une série d'échanges rapides au centre. Pion contre pion, cavalier contre cavalier. Nos pièces disparaissent dans un ballet calculé, mais il parvient à conserver une légère avance sur moi.

— Tu ne prends pas beaucoup de risques, remarque-t-il en avançant son fou pour attaquer une de mes cases faibles.

Je résiste à l'envie de répondre et place mon propre fou, bloquant son attaque.

Son jeu est fluide, calculé, mais aussi provocateur. Chaque coup semble porter un message. Jungkook n'est pas juste en train de jouer ; il cherche à me désarçonner, à lire mes intentions. Et moi, je lutte en silence pour ne pas me faire avoir.

J'ai déjà perdu trop de fois...

— Concernant ce qui s'est passé hier, dans ta chambre...

Je relève vivement la tête pour le fixer, oubliant un instant le jeu en cours.

À quoi fait-il allusion exactement ?

À ma façon de tomber sur lui comme un idiot ? À mon envie de le faire sortir ?

À la façon qu'il a eu de fixer ma bouche...?

— Tu as de très jolies lèvres, Taehyung.

Je manque de m'étouffer. Il tente de me déstabiliser, c'est sûr. De me faire oublier le jeu. Et ça marche. Mes joues deviennent si chaudes que j'ai l'impression que le Chess Coffee prend feu, et la partie d'échecs est désormais le cadet de mes soucis. Tout ce à quoi je pense, c'est à placer mes paumes sur mon visage pour me cacher. Mais Jungkook me sonde, et voit tout. 

Il ne sourit pas cette fois.

Un silence pesant s'installe durant lequel j'ai plusieurs fois envie de me cacher sous la table tant je meurs de honte, mais la voix de Jungkook me ramène au réel.

— C'est à toi de jouer.

— Oh... oui, euh... pardon.

Il faut que je me reprenne. Il ne pensait pas ce qu'il a dit. Il ne le pensait pas. Il tente juste de m'intimider pour gagner. Et je ne dois pas me laisser faire.

Je fronce les sourcils, me racle la gorge et me remets en selle. Hors de question de laisser Jungkook l'emporter cette fois. 

J'utilise une ouverture dans son jeu pour développer ma stratégie, avançant ma dame pour connecter mes tours. Il sourit légèrement, comme s'il voyait clair dans mon plan.

— Tu sais que je peux contrer ça, dit-il en déplaçant son cavalier, menaçant de m'enfermer dans une attaque combinée.

— Peut-être, mais ça ne veut pas dire que tu y arriveras.

Je me surprends moi-même par ma propre audace.

Il hausse un sourcil, son sourire s'étirant un peu plus. Je sens son regard fixé sur moi, plus pesant que jamais. Il avance un pion, préparant une attaque.

Je décide de rétorquer avec ma tour, et commence à exercer une pression sur son roi. Il recule sa dame, dans un mouvement défensif inattendu. 

Est-ce une erreur de ma part ? 

Ou me tend-il un piège ?

Les minutes passent, et la tension monte. Jungkook est silencieux, concentré, mais je remarque un changement subtil dans son attitude. Ses mouvements, auparavant si agressifs, deviennent légèrement plus passifs.

Ça me donne une chance.

Je déplace ma tour, menaçant sa dame.

— Pas mal, murmure-t-il en reculant légèrement sur sa chaise, comme pour évaluer la situation.

Je sens que j'ai l'avantage, mais je ne peux pas me permettre de me relâcher. Il avance une pièce, tentant de détourner mon attention vers l'autre flanc. Je décide d'ignorer cette distraction et de pousser mon attaque au centre.

Finalement, je vois l'ouverture. Je la vois. Ma chance est là ! Avec un mouvement calculé, j'avance ma dame, menaçant son roi tout en protégeant mon fou.

— Échec et mat, dis-je, presque incrédule.

J'ai réussi...

J'ai battu Jungkook. Je n'en reviens pas.

Il reste immobile un instant, ses yeux passant de l'échiquier à moi.

— Tu as gagné, prononce-t-il d'un ton calme, presque admiratif.

Mais quelque chose me gêne. Son dernier coup était mauvais.

Jungkook s'est trompé. Il aurait pu gagner. 

Il aurait dû gagner.

Est-ce que...

— Tu m'as laissé gagner... ?

— Peut-être. Ou peut-être pas. À toi de décider ce que tu crois.

Son sourire s'élargit, tandis que son dos se décolle de la chaise et qu'il pose ses coudes sur le table, s'approchant de moi.

Et comme une confidence, comme s'il n'avait attendu que ça, il croise les doigts et incline la tête sur le côté, sans se départir de son sourire en coin.

— Bien, déclare-t-il dans un murmure grave. Maintenant, il est temps de parler de mon gage.

***********༄***********

AHHHH j'ai adoré écrire ce chapitre !!!

Et le gage ! Vous avez une petite idée de ce que Taehyung va lui demander ? 

Aussi, vous pensez que Jungkook l'a laissé gagner ? Ou pas ? :p

Dites-moi tout, qu'avez vous pensé du chapitre 11 ? 

Je vois qu'il y a de plus en plus de théories, concernant le frère de Yoongi notamment, et sur l'identité de Noctem (il nous manque ce petit, bientôt il revient ne vous en faites pas - je sais que bcp d'entre vous l'adorent). N'arrêtez jamais de me les envoyer, que ce soit sur discord, en DM insta ou en vocal. Vraiment, je suis fan <3

Vous n'imaginez pas comme un commentaire, un petit message ou un simple vote peuvent rendre la vie d'un auteur plus belle. Alors merci pour tout. <3

Je vous dis à dans deux semaines pour la suite !

Love you guys <3