La reine solitaire

Cette reine là se nomme Eloïne. Si elle semble au premier abord fort ressemblante à la précédente, vous verrez très vite que ce n'est pas le cas.

Là-bas dans ce palais sombre sans rien aux alentours, là-bas entre ces murs noirs et froids, là-bas se trouvait une femme.

Dans sa main, elle tenait un sceptre.

De ce sceptre émanaient des ondes négatives.

Dans son cœur, elle sentait la peine.

De son cœur émanait la peur d'être rejetée.

Eloïne se tenait assise sur un trône de pierre à contempler le mur en face d'elle. Elle y avait fait de nombreux dessins. Certains beaux, d'autres non. Certaines vraisemblables, d'autre incroyables.

Parmi ces dessins, il y en avait un qu'elle affectionnait particulièrement. Sur ce dessin elle était avec des gens. Sur ce dessin elle souriait avec les autres, elle était lumineuse, ils étaient heureux. Sur ce dessin était représenté son rêve fou, son rêve improbable, son rêve incroyable.

Eloïne pouvait passer des jours à le regarder dans l'espoir de se sentir mieux mais ce n'était pas le cas.

Quand elle le regardait, la colère montait en elle, brûlante et instable. Mais elle ne voulait pas l'arrêter. Elle la laissait monter, monter jusqu'à ce qu'elle ne soit plus que haine. Quand elle l'était, elle laisser exploser son ressentiment. Elle saisissaient la torche qui brillait non loin d'elle et la jetait sur le tableau.

Hélas, cela n'apaisait pas son courroux car elle sentait les larmes lui piquer les yeux. Elle était bien souvent incapable de les retenir et elle les laissait couler sur ses joues en silence. Oh elle aurait aimé pouvoir dire qu'elle ignorait la source de cette peine. Mais cela lui était impossible. Elle savait très bien pourquoi elle pleurait et pourquoi elle pleurerait encore longtemps. Elle était seule, sans amis, sans famille avec pour seule compagnie les murs de pierre, froids, lugubres et sombres. Avec pour seul royaume sa solitude.

Elle aurait tout donné pour que le dessin soit vrai, pour qu'il devienne un jour sa vie, son avenir. Mais... elle savait que c'était impossible. Elle était entre les parois de son palais. Il y avait une raison à cela et s'était sans doute la raison pour laquelle elle était seule. Il brûlait en elle une flamme intarissable. Une flamme qui embrasait même les plus petites émotions, les plus petites peines, les plus petites colères, les plus petites joies. Rien n'échappait à ce feu intérieur. Et elle avait donc des réactions démesurées, dangereuses. Des réactions qui faisaient qu'elle serait toujours seule. Car qui voudrait rester avec une femme comme elle ?

Elle fixa le tableau pendant qu'il devenait cendre. Mais comme dans les légendes, il reviendrait. Ce tableau, ce rêve, était comme le phœnix. Il renaissait de ses cendres pour mieux la torturer.

Elle ne savait dire si cela lui plaisait ou lui déplaisait.

Elle aimait rêver. C'était beau de rêver. C'était doux de rêver. Ça l'aidait à oublier sa condition.

Alors Eloïne se laissait aller à ses pensées en pianotant les rebords de son trône. Elle fixait son sceptre comme s'il était une lune. Dans ce sceptre, il y avait toute la magie d'Eloïne. Mais elle ne savait dire quel genre de magie c'était. Bienfaisante, malfaisante, doucereuse, déchirante, apaisante ou exaltante ? Mais peu lui important au final. Car ce qui faisait la magie de cette magie c'était le fait qu'on ne puisse pas la qualifier.

Alors elle oubliait un peu sa mélancolie et se sentait mieux. Elle inspirait profondément. Mais cela n'allait bien que pendant quelques temps très rares. Car la solitude se faisait vite ressentir.

Alors elle descendait vers la porte de son palais sur la montagne dans le mince espoir qu'un voyageur se soit égarer et qu'il veuille bien accepter son hospitalité. Mais... jamais il n'y avait de voyageur. Et quand bien même il y en aurait, elle savait qu'ils n'auraient pas accepté de la suivre dans son château noir et sombre.

Et elle ne pouvait pas sortir de ce palais. Il était le seul lieu, malgré son manque d'hospitalité, où elle se sentait bien, en sécurité. C'était le seul lieu qui était véritablement à elle. Sa seule véritable gloire.

Alors elle remontait dans sa salle du trône. Elle soupirait en tentant de se convaincre que ce n'était pas si mal d'être seule. Elle pouvait faire ce qu'elle voulait, quand elle voulait, où elle voulait. Personne n'était là pour juger ses sautes d'humeur.

Mais bien vite, elle se remettait à peindre. Un autre tableau plein de rêves impossibles.

Un autre tableau qu'elle brûlerait.

Mais elle ne perdait pas espoir, un jour elle irait mieux. Un jour, elle accepterait sa vie et serait heureuse. Elle n'avait tout de même pas le pire des vies. Elle avait de quoi manger, elle avait un toit et elle avait un royaume, bien qu'elle soit la seule à le voir.

Elle traça le premier trait de sa nouvelle peinture.

Une fin heureuse, voilà ce qu'elle allait peindre pour ce sentir mieux.

Pas la peine de se torturer en désirant l'impossible. 

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