Chapitre 4

"Smalltown boy" de Bronski Beat

Alexandre

Il lâche sa prise sur mon bras qui me fait mal et me jette violemment au sol. Sa chambre est légèrement éclairée par des bougies, donnant une ambiance angoissante à la pièce.

Je sais de quoi il est capable et j'ai terriblement peur de ce qu'il va me subir. Je me recroqueville au sol mais il s'agenouille à côté de moi et me susurre à l'oreille d'une voix mielleuse :

Tu vas adorer ce que je vais te faire, mon enfant.

Mon corps se met à trembler de peur et je le vois qui s'approche d'un meuble de sa chambre. Il tire un des tiroirs et en sort un fouet. Avec un regard des plus effrayants, il lève son bras qui tient le fouet et me frappe au visage avec...

Je me réveille en sursaut, de la sueur perlant sur mon visage, ma chemise trempée. Mes cauchemars me réveillent presque chaque nuit et je n'arrive souvent pas à me rendormir après. Je n'en peux plus de ce passé qui fait de ma vie un enfer.

Je me lève de mon lit et me rend dans la salle de bain de la maison dans laquelle je vis. J'ouvre le robinet en laiton et m'asperge le visage d'eau. En relevant ma tête, je me regarde dans le miroir accroché au-dessus du lavabo en faïence. Je ressemble à un monstre avec ma longue cicatrice sur mon visage. La plupart des personnes que je vois pour la première fois me regardent souvent avec un air effrayé ou plein de pitié, sauf Angélia de Morosier

Quand elle a plongé son regard dans le mien, j'ai été totalement subjugué par sa beauté et ses yeux où aucune pitié ni frayeur ne s'y reflétait, comme si je ne lui faisais pas peur...

Elle ressemble à un ange avec ses longs cheveux blonds et bouclés lâchés en cascade sur ses épaules. Son visage est l'illustration même de l'innocence avec ses grands yeux bleus et sa peau couleur ivoire.

Je n'avais jamais vu une femme aussi belle qu'elle, mais je ne pouvais pas l'approcher. Je n'en avais pas le droit. Mon frère Arthur avait eu raison de l'éloigner de moi, j'allais l'abîmer avec mon horrible passé qui me suivait comme mon ombre.

Je donnerai toutefois tout pour la revoir, elle et sa beauté angélique.

Conscient que je n'arriverai pas à me rendormir et le soleil commençant à se lever, je décide d'aller faire un tour dans un endroit qui m'est très cher et le seul où je me sens à ma place.

***

Arrivé devant l'Auberge de Madame Barry, je descends de mon cheval et l'attache à une des barrières devant l'établissement.

L'Auberge de Madame Barry est unique en son genre. La vieille femme a un cœur en or et accueille dans son établissement de nombreuses femmes et leurs enfants qui vivent dans la misère. Elle leur donne à manger et à boire ainsi qu'un toit gratuitement.

La première fois que j'y ai mis les pieds dans cet endroit, c'était pour fuir. Le visage et le corps tuméfiés et en sang, j'avais couru à travers les bois et m'étais retrouvé devant cette maison. J'avais eu à peine la force de toquer avant de m'effondrer au sol sous le poids de la douleur. Madame Barry m'avait alors recueilli et m'avait soigné.

J'étais extrêmement reconnaissant d'avoir rencontré cette femme et pour la remercier de sa gentillesse ce soir-là, je me rendais souvent dans son auberge pour, à mon tour, aider ces personnes dans le besoin.

J'ouvre la porte d'entrée de l'établissement et suis tout de suite accueilli chaleureusement par la voix de la maîtresse de maison :

— Alexandre, je suis si contente de vous voir !

— Moi aussi Madame.

— Je vous ai déjà dit d'arrêter de m'appeler Madame, appelez moi Marie. Sinon, il y a beaucoup de monde aujourd'hui, votre aide ne sera pas de trop Alexandre.

C'est ce que j'apprécie grandement avec elle, elle ne prête pas attention aux bonnes mœurs de notre société et ne passe pas par quatre chemins pour dire ce qu'elle souhaite. Cela me change de ma famille qui ne cherche que les bonnes convenances, jusqu'à avoir honte de leur propre fils...

Habitué à l'aider, je n'attends pas et me dirige vers la pièce principale de l'auberge où des femmes habillées de haillons attendent d'être servies en nourriture. Je donne les bols remplis de soupe à chaque personne dans l'auberge.

— Monzieur Alexandre, z'adore votre zicatrice vous zavez, vous ressemblez à un zevalier, me dit une voix enfantine.

— Merci Emile, et est-ce que tu savais que toi, tu ressemblais à un pirate avec ton cache œil, lui répondis-je.

Il me fait un sourire édenté. Emile a six ans et n'a pas une vie des plus faciles. Madame Barry la retrouvait devant sa porte il y a deux ans. D'après ce que nous a dit le jeune garçon, ses parents l'ont abandonné car ils ne supportaient pas que leur fils puisse être aveugle d'un œil.

Etonnement, l'histoire d'Emile fait écho à la mienne et depuis maintenant deux ans, nous avons noué une sorte d'amitié tous les deux.

Après avoir passé toute la matinée dans l'Auberge de Madame Barry à aider ces pauvres gens, je repars à cheval. N'ayant pas envie de rentrer chez moi, je décide d'aller me rafraîchir dans la petite rivière qui coule dans les bois. Ce petit coin de nature est souvent paisible et calme en début de printemps. Je peux donc m'y baigner sans risque que quelqu'un voit mon corps lacéré.

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