No Tears Going Round

Sur cette page, ma plume parle des larmes qui ne coulent pas.

" Because I can't cry
At the thought
I can't cry
At what I'd lost
I can't cry
At the notion our oceans are running dry
There ain't no tears going round "
— Jordan Merrick

J'ai rêvé que je pleurais, sans plus pouvoir m'arrêter. Ma vision était flouée par un épais rideau de larmes. L'eau salée dévalait en cascade sur le rocher lisse de mes joues et le flot qui m'habite se déversait enfin, me libérant de l'océan agité de mon tumulte intérieur.

Mais lorsque je me suis réveillée, mon visage était sec. Comme d'ordinaire, aucune vague n'est parvenue à atteindre le rivage de mes cils. Pas même une goutte d'eau salée.

Pourtant, la tempête de mes pensées gronde encore et encore. À l'horizon, le ciel tonne toujours, mais il n'y a jamais de pluie pour s'abattre ni d'éclair pour jaillir. Mon orage demeure silencieux, à la fois inaudible et invisible même aux yeux des marins qui y naviguent depuis le commencement.

La vérité, c'est qu'en dehors de mon monde onirique, je crois que j'ai perdu ma capacité à ouvrir les écluses. Je ne me souviens même de la dernière fois que des perles salines ont évacué mes yeux impassibles, emportant avec elles une partie de ma grisaille.

Peut-être qu'à force de se heurter à des vents toujours plus violents, le navire de mes émotions agitées a appris à mettre les voiles dès qu'un risque de naufrage vient compromettre sa traversée. À ne plus laisser d'eau passer par-dessus bord, même lorsque l'une de ses figures de proue lève l'ancre.

Néanmoins, je ressens tout. Mon cœur de bois s'écrase à chaque départ sur le quai, ma mémoire se rappelle le paysage de chaque île rencontrée et ma nostalgie me ramène sur la croix rouge de chaque trésor perdu, même celui d'un pirate que je n'ai guère revu en sept ans.

Quoi qu'il en soit, mes larmes ne parviennent plus à ruisseler depuis longtemps. Tout ce qui coule, désormais, c'est l'encre lorsque je m'enferme dans ma cabine pour rédiger mes mémoires, pour lancer des bouteilles à la mer qui ne seront peut-être jamais retrouvées.

Les blessures que j'ai héritées de mes combats saignent sur le papier blanc, en formant des lettres noires riches en métaphores et avares de sens. Les mots se posent sur les maux lorsque les bandages ne les guérissent pas, lorsque le temps ne leur suffit pas.

Parfois, à défaut de m'écrier, j'écris et, à défaut d'être entendue, je suis lue.

Quelques fois, même, j'ai un infime espoir que mes messages sans destinataire se rendent par eux-mêmes à bon port, guidés par le courant de ma plume.

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© 2024 MAHNZA

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