Le temps d'une vie...
La tête dans l'oreiller, Romane prit soudain conscience que l'on tambourinait à la porte. S'habillant à la hâte, elle ouvrit et se retrouva face au concierge de l'immeuble accompagné d'une jeune femme, un bouquet à la main.
— Dis donc vous êtes sourde ! Lui asséna sèchement l'homme bougon.
Pour toute réponse, la locataire soupira avant que celui-ci tourne les talons aussitôt.
— Mademoiselle Saint-Clair, prononça alors l'inconnue avec un grand sourire, ce bouquet est pour vous, lui dit-elle alors, en lui tendant les fleurs. Je vous souhaite une belle journée !
— Merci, belle journée à vous aussi, lui rendit Romane avant que celle-ci ne redescende les marches.
Ce qui l'interpella tout de suite, c'est que le bouquet était composé de ses fleurs préférées, des orchidées, la réalisation exotique ne laissait pas de doute sur l'expéditeur... Liam.
Celui-ci l'avait laissée au petit matin après des heures passées dans ses bras, pour rejoindre son hôtel. Romane avait mis un peu de temps à se rendormir, trop exaltée par les événements depuis la soirée. Une petite enveloppe était placée dans le bouquet, elle pris connaissance du contenu de la carte écrite de la belle écriture de Liam :
« Darling,
Merci pour cette nuit inoubliable, des fleurs magnifiques pour une femme qui l'est tout autant...
Je t'embrasse tendrement.
Liam ».
L'évocation de leur nuit d'amour lui fit revenir des images très osées à sa mémoire, le rouge lui monta aux joues instantanément. Son cœur battit un peu plus rapidement aussi en pensant aux yeux bleus de son désormais amant. D'humeur légère et particulièrement radieuse, elle se prépara pour la rencontre tant attendue entre Rose et Flora. Elle eut l'idée de remercier Liam pour les fleurs mais elle réalisa qu'elle n'avait pas son numéro de portable.
Bien que le rendez-vous soit prévu à quatorze heure, elle choisit de se rendre avant au centre spécialisé pour s'entretenir avec Justine sur la semaine passée avec Rose, comme à son habitude.
— Bonjour mademoiselle Saint-Clair, l'accueillit l'infirmière avenante, prête pour ce grand moment ?
— Oui, impatiente, bien-sûr... et un peu inquiète aussi de la réaction de ma mère, révéla la jeune femme.
— Oui, c'est compréhensible, personne ne peut le dire à l'avance, concéda-t-elle, puis Justine continua :
—Pour les malades atteints d'Alzheimer, la mémoire antérograde est atteinte, c'est à dire qu'ils perdent la capacité d'enregistrer de nouvelles informations.
— Oui, on me l'a expliqué, répondit Romane incrédule, ne voyant pas où l'infirmière voulait en venir au début. Vous voulez dire que dans quelques jours, elle aura tout oublié de cette rencontre ?
— C'est possible, mais je veux aussi dire qu'en revanche les personnes atteintes de la maladie conservent leurs souvenirs de jeunesse.
— Mais elle n'a pas de souvenir de Flora, enfin elle ne m'en a jamais parlé... objecta Romane.
— Non, elle n'a pas de souvenir conscient mais j'ai fait des recherches sur mon temps libre, avoua-t-elle, un peu gênée, afin d'anticiper la situation, précisa-telle, et il y a de nombreux témoignages de jumeaux qui ont été séparés sans avoir connaissance de l'existence l'autre.
— Et alors ? Demanda Romane intriguée.
— Et alors, ils souffraient du syndrome du « jumeau perdu » qui se caractérise par un sentiment de solitude et d'absence inexpliquée. Ce malaise avait aussi été mis en évidence par la célèbre psychanalyste Françoise Dolto. Elle a livré le récit d'un petit garçon que l'on pensait souffrant d'une maladie psychiatrique, il dessinait sa mère avec des couteaux, du sang et parlait constamment de mort.
— Quel est le rapport avec les jumeaux séparés ?
— Le rapport est qu'en questionnant la mère de l'enfant, celle-ci a révélé avoir fait une fausse couche du jumeaux de ce petit garçon pendant la grossesse... Après une discussion ouverte avec l'enfant concernant ce qu'il était advenu du second bébé, le garçonnet n'a plus fait de dessins sanglants, ni parlé de la mort.
— Vous voulez dire que les jumeaux ont une mémoire de leur vie intra-utérine ? c'est ça ?questionna-t-elle perplexe.
— Oui, c'est bien ce que je vous explique, la mémoire ne commence pas à la naissance et bien qu'elles n'aient peut-être pas passé beaucoup de temps après, elles ont une forme de conscience innée de l'autre...
— Oui, je comprends où vous voulez en venir et je vous remercie vraiment pour votre implication, vous êtes vraiment très investie dans votre métier, la loua la jeune femme.
— Je le suis même trop...reconnut-elle, ma vie ne tourne qu'autour de mon métier, je prends trop les choses à cœur me reproche-t-on... conclut-elle mal à l'aise.
— Vous faites un métier remarquable, chez vous c'est une vocation, c'est évident, la félicita-t-elle.
— Merci, mais je dois vous annoncer que je quitte le centre temporairement, j'ai demandé un congé sabbatique, lâcha-t-elle ensuite.
— Je vois, répondit Romane mesurant l'urgence de trouver une solution rapide pour sa mère, surtout si Justine qui était au petit soin pour Rose partait. Une idée lui vint mais à cet instant, elle aperçut Flora et Liam se diriger vers elles.
— Accepteriez-vous de déjeuner avec moi prochainement ? j'ai une proposition à vous faire, demanda Romane.
Justine répondit positivement, intriguée.
— Pouvons nous en reparler après la rencontre des sœurs ?
— Oui pas de soucis.
Flora arrivée à la hauteur de Justine fit son effet sur la soignante subjuguée par la ressemblance parfaite de celle-ci avec Rose. Elles ne remarquèrent pas les regards langoureux que s'échangèrent Liam et Romane. L'homme prit la main de la jeune femme pour attarder ses lèvres sur la peau de celle-ci.
Bientôt le spécialiste de la maladie rencontré lors du dernier rendez-vous arriva. Il invita le petit groupe à le suivre dans son bureau afin de leur expliquer le déroulement des événements qui allaient suivre.
Après s'être présenté aux personnes qu'il rencontrait pour la première fois, le médecin indiqua qu'il parlait très bien l'anglais et s'attarda sur l'état actuel de santé de Rose dans la langue de Shakespeare.
— Nous allons nous rendre dans une pièce équipée d'une vitre sans tain ,annonça-t-il ensuite, elle donne sur une chambre identique à celle de madame Saint-Clair qui y est installée depuis ce matin afin de lui éviter tout stress.
L'assemblée se leva, Flora saisit la main de Romane pour la serrer, l'émotion était palpable et la jeune femme lui caressa le dos en signe de soutien.
On y était, encore quelques pas et Flora allait revoir Rose, soixante-douze ans après leur séparation...
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Voilà des réponses se profilent.
Comment Rose va-t-elle réagir ?
L'idylle naissante entre Liam et Romane, passera-t-elle longtemps inaperçue ?
La suite au prochainement ;)
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Luce
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