Chapitre 17 - Les vestiaires du stade de France (Tom)


J'attrape la main de Léon sans lui demander son accord et le traîne derrière moi. S'il est gêné, il n'en manifeste rien et me laisse l'entraîner. Je crois que Noah a compris qu'il y avait quelque chose entre lui et moi. Je n'ai même pas eu à en parler à mon coéquipier. Lorsque nous attendions tout à l'heure, avant d'entrer dans le stade de France, il a posé sa main sur mon épaule et m'a dit :

— J'espère qu'il te rendra plus heureux que Dustin.

J'ai froncé les sourcils et un sourire a étiré le coin de ses lèvres. Je l'ai alors pris dans mes bras pour le remercier.

— Tu es un coéquipier en or.

— N'en fais pas trop quand même ! a-t-il rétorqué en souriant. Il est reste français.

Français ou pas, cela m'importe peu. Léon Marchand me plaît et je lui plais, c'est tout ce qui compte.

Il est magnifique ce soir, dans son costume. Lorsque son visage est apparu sur les écrans, que j'ai compris qu'il avait été désigné pour porter la flamme et venir l'éteindre, j'ai ressenti une grande joie pour lui. J'étais porte-drapeau cette année, je sais ce que c'est que d'être désigné. C'est un tel honneur, une telle fierté. Je suis content qu'il ait pu le vivre.

J'ai profité de cette dernière journée pour faire ma valise, crocheter des étuis à médaille et me reposer. Je ne suis pas retourné plonger. Jane a dit qu'on ferait un point lors de mon retour à Londres, concernant la suite de ma carrière. Elle a compris que je comptais arrêter, mais je pense qu'elle a besoin que je lui annonce officiellement.

Mais pour l'heure, la seule chose qui compte, c'est Léon.

Nous traversons la foule de sportifs agglutinés, ce qui n'est pas une mince affaire. Léon se fait aborder par tout le monde, les gens le félicitent, d'autres lui tapent l'épaule. Au moins, personne ne fait attention à moi. Je ne sais même pas s'ils se sont aperçus que nos doigts étaient noués.

Quand enfin, nous parvenons dans l'un des couloirs et que nous nous enfonçons dans l'antre du stade de France, avant d'arriver devant plusieurs vestiaires, le silence devient presque rassurant. Après les hurlements, la joie, les cris d'euphorie, cela fait du bien de retrouver du calme. Je cherche du regard une porte ouverte, mais Léon la trouve avant moi. Il pousse la première, elle s'ouvre, je la referme d'un coup de pied et il me tire à l'intérieur avant de me plaquer contre l'un des casiers.

— Tu m'as manqué, soupire-t-il.

Ses lèvres trouvent automatiquement les miennes, son corps se colle contre le mien. Je me sens fiévreux. Plein de désir. Mais j'ai conscience de l'endroit où nous nous trouvons et du jour que nous sommes. Nous faire surprendre ici serait une bien mauvaise idée, aussi, je tente de calmer ses ardeurs. Ce n'est pas chose aisée. J'ai envie de bien plus que de ses baisers. J'ai envie de sentir son corps contre le mien. De le découvrir autrement qu'en maillot de bain, depuis les gradins. De sentir ses muscles rouler sous ma peau et mes doigts.

— Ce costume te va vraiment bien, assuré-je entre deux baisers.

— Toi aussi, tu es beau, Tom.

Ses mots sont hésitants, tout timide. Je crois qu'il n'a pas l'habitude. Je le repousse légèrement. Ses joues sont rouge vif, ses cheveux blonds, pourtant si bien coiffés, partent en bataille. Je tente d'y remettre de l'ordre en m'excusant. Léon m'arrête en attrapant mes poignets, ses yeux bleus fixent les miens avec intensité.

— Je ne veux pas que notre histoire s'arrête là.

Mon cœur s'emballe, je crois qu'il va exploser. Moi non plus, je n'ai pas envie qu'elle s'arrête ici, dans ce vestiaire, dans ce stade, cette nuit.

— Tu pourrais venir à Londres ? proposé-je.

Après tout, ma maison n'est pas encore vendue. Le temps que je rentre, j'imagine que Dustin m'aura volé tous mes meubles, mais j'aurais de toute façon besoin de m'en racheter. Naïvement, j'imagine Léon arriver à l'aéroport de Heathrow, et moi l'emmener faire les magasins pour me meubler. Je commence à penser couple, c'est très mauvais. On se connaît à peine. On s'est embrassé hier.

« C'est trop tôt, Thomas. Calme-toi ».

— C'est vrai, chuchote Léon à mon oreille. Ou tu pourrais venir à Toulouse.

Je hoche la tête. Je n'ai jamais été dans le sud de la France, mais l'idée me plaît bien. J'ai eu l'occasion d'échanger avec quelques rugbymans qui ne m'en ont dit que du bien.

— Pourquoi pas.

Une autre idée me traverse l'esprit.

— Sinon, on pourrait aussi revenir ici, à Paris ? proposé-je. Je ne sais pas quand tu repars aux Etats-Unis, mais j'aimerais bien assister à quelques épreuves paralympiques.

— Tu penses à quoi ?

— L'aviron, avoué-je aussitôt.

J'adore l'aviron, mais je n'ai pas eu l'occasion de voir ces épreuves cette année. J'étais encore à Londres la première semaine, je ne suis arrivé que le mercredi, et je devais m'entraîner pour mon épreuve en duo avec Noah.

— Ou la boccia ? Il paraît que c'est sympa à voir. Ou l'équitation ! On est fan de chevaux en Angleterre. Quoi que tu préfères peut-être une épreuve de natation ? Il y a les courses adaptées, je ne sais pas quand elles ont lieu, mais...

Léon me fait taire d'un baiser. Je le lui rends avec trop d'empressement. Lui qui était si timide et si calme se montre maintenant plutôt entreprenant et j'avoue que cela ne me laisse pas indifférent. J'aime quand un homme prend les devants.

— Ça me plairait bien, avoue-t-il.

Pourtant, il se fige soudainement, les mains de part et d'autre de mon corps. Nos lèvres ne sont qu'à quelques centimètres l'une de l'autre.

— Enfin... Je ne sais pas si...

Il cherche ses mots. Avant même qu'il ne le dise, je me doute de ce qui le perturbe.

— Tu ne sais pas si tu veux t'afficher avec moi, j'ai compris.

— Ce n'est pas ça, Tom. C'est juste...

— Ce n'est pas un reproche.

Jamais je ne le forcerai à dire quoi que ce soit, surtout s'il n'est pas prêt. S'il préfère que l'on vive caché si cela le rassure. Peu m'importe, tant que je peux le revoir. Je ne dis pas que cela me conviendra toujours, mais nous ne sommes qu'au début de notre relation, alors je n'ai pas l'intention de lui mettre la pression. D'autant que moi, je n'ai pas encore réglé tout ce qui concerne mon ex. Me mettre officiellement en couple avec Léon Marchand et nous afficher l'un avec l'autre serait un peu déplacé.

— On peut y aller en tant qu'ami, tu sais ? proposé-je. Une sorte de coopération franco-britannique.

— Les anglais et les français se détestent par nature ! me rappelle Léon en souriant.

— Pff ! N'importe quoi. Encore une histoire de Guerre de Cent Ans, c'est ça ? Vous n'avez toujours pas évolué dans votre pays.

Léon me donne une petite tape sur la joue. J'en profite pour récupérer sa main et l'embrasser. Ensuite, nous nous asseyons l'un à côté de l'autre sur un banc. Je garde sa main serrée dans la mienne et pose ma tête sur son épaule. Il sent toujours aussi bon.

— J'ai aussi envie de te revoir, à Londres, Toulouse, Paris, même aux Etats-Unis, peu m'importe, avoué-je. Et on prendra le temps qu'il faudra. Je ne suis pas pressé.

Je relève mon visage vers lui, gagner par l'espoir qu'il dise oui.

Il vient cueillir un nouveau baiser.

— Et puis, je dois toujours t'apprendre à tricoter, rappelé-je.

— Tu m'as déjà montré, rétorque Léon.

— Tu parles. T'as tenu l'aiguille trois minutes avant d'abandonner. Je n'appelle pas cela une performance sportive, moi.

Léon secoue la tête. Je le trouve trop craquant. Aussi, sans pouvoir m'en empêcher, je me redresse et revient (encore) l'embrasser. Je crois que je pourrais faire cela durant des heures. Ses mains viennent prendre en coupe mon visage. Il accentue mon baiser, je presse mon corps contre le sien.

Et c'est alors que la porte s'ouvre... 

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