Ace ouvrit brusquement les yeux lorsque le bruit strident du réveil matin déchira ses tympans. Il se redressa sur son lit, encore à moitié endormi. Il soupira, se frottant les yeux pour chasser les dernières traces de sommeil. Il était déjà quatre heures et demie du matin, et il devait être au travail à cinq heures et trente minutes précises. Il jeta un coup d'œil à l'horloge numérique rouge sur sa table de chevet, puis se leva et alla à la salle de bain.

La journée allait être longue, comme d'habitude. Ace travaillait dans une usine de nourriture, et était chargé de préparer les cartons de livraison de rations pour le quartier numéro 12, le sien.

Après avoir pris une douche rapide, Ace descendit dans la cuisine pour prendre son petit-déjeuner. Ses deux frères, Luffy et Sabo, étaient déjà assis à table en train de manger des céréales. Ace leur adressa un bref salut et prit une tasse de café. Son grand-père Garp était assis dans un fauteuil immaculé près de la fenêtre, en train de lire le journal. Il était à la retraite depuis longtemps et était maintenant en charge de s'occuper de la maison et de ses petits-enfants.

"Nous sommes lundi, aujourd'hui, Ace ?, demanda Garp en levant les yeux de son journal.

_Oui, Grand-père, répondit Ace en avalant une gorgée de café brûlant."

Le vieil homme soupira.

"Le jour de repos passe si vite... Tu dois y être dans trois quarts d'heure, alors ne traîne pas, dit Garp en souriant."

Ace acquiesça, termina rapidement sa tasse de café et arrangea son uniforme et ses cheveux devant le miroir du salon. Une fois prêt, il s'installa dans le canapé blanc, en face de son aïeul.

La maison d'Ace était une structure monochrome, blanche et froide. Tout était immaculé et net, comme si personne n'avait jamais vécu là. Le canapé était simple, comme tous les autres meubles, d'ailleurs, et sans fioritures, reflétant l'approche fonctionnelle de la maison. Les murs étaient nus, sans décorations, ce qui donnait une impression de vide qui était, aux yeux d'Ace, agréable. Après tout, c'était tout ce qu'il avait toujours connu, alors c'était rassurant, c'était familier.

La seule chose qui habillait la pièce était ce cadre photo posé sur l'étagère murale, où la famille posait solennellement devant le grand monument de la cité. Ils avaient tous une posture droite et affichaient tous les quatre cette même expression neutre.

Ace aimait cette photo. C'était une photo officielle, mais ils étaient tous réunis.

Il fixa les murs vides devant lui. Le jeune homme savait que leur programme quotidien était très strict, et que toute forme de distraction était strictement interdite. La maison était conçue pour maintenir un environnement stérile et efficace, tout était blanc, même les vêtements qu'ils portaient. Il n'y avait rien pour distraire leur esprit. À part le journal quotidien, l'écran plat qui passait toujours les mêmes émission du gouvernement et les quelques livres contant la glorieuse histoire de la cité, rien à lire, rien à voir, jamais rien de nouveau. Mais ça plaisait à Ace. Il aimait son quotidien, et la nouveauté était une chose qui le mettait souvent mal à l'aise.

L'horloge du salon sonna cinq heures du matin. Ace se leva, puis prit un verre d'eau et se dirigea vers le comptoir où se trouvaient les médicaments qu'il devait prendre chaque jour. Ava, l'intelligence artificielle de la maison, détecta sa présence et annonça d'une voix robotique : "Bonjour Ace, il est temps de prendre votre pillule quotidienne."

Ace prit le comprimé, rapidement suivit du reste de sa famille. Ava annonça d'ailleurs le même discours à chaque membre qui, tous les trois, formaient une file derrière lui.

Un lot par mois et par personne. Une pilule le matin, et une le soir. Toujours dans le même ordre :

Ace, Sabo, Luffy, puis Garp.

La dose n'était pas la même pour tout le monde. Cela se calculait, disait-on, en fonction de la morphologie, du poids, du groupe sanguin et du système immunitaire ; des examens étaient effectués mensuellement pour s'assurer que le dosage reste correct ; alors il fallait absolument que chacun prenne la pillule qui provenait du bon lot :

1,5 grammes pour Ace, la boîte bleue.
1,4 grammes pour Sabo, la boîte jaune.
1 grammes tout pile pour Luffy, la boîte rouge.
Et enfin 1,9 grammes pour Garp, la boîte verte.

Des grammes de quoi ? Ça, c'était un mystère. Mais Ace savait qu'il ne fallait pas manquer une dose. C'était pour leur bien. Le gouvernement les protégeait de la maladie qui avait ravagé la planète, quatre cent ans auparavant. Ils étaient les descendants des seuls survivants de la catastrophe, et il fallait absolument conserver l'identité humaine.

Cela rappela d'ailleurs à Ace qu'ils avaient effectués leurs tests la veille. Par automatisme, il se frotta le bras, là où on lui avait fait une prise de sang. Les prochains lots de traitement arrivaient dans deux jours : ce mercredi. Ace nota dans un coin de sa tête qu'il fallait qu'il rappelle à son grand-père d'aller les chercher dans la boîte aux lettres mercredi matin à quatre heures et quarante cinq minutes, pour ne pas les oublier.

La journée de tout le monde commençait à la même heure. Ace, du haut de ses vingt ans, était très fier de son travail, car c'était une profession utile. Mais il était encore plus fier de celle de Sabo. Son jumeau, lui, avait été affecté au maintien de l'ordre. C'était une fonction honorable. Il lui tardait de connaître le futur travail de son petit frère. Comme il allait prendre ses dix-sept ans dans deux mois, il allait bientôt être affecté à sa fonction.

Mais, tant qu'il avait seize ans, il devait encore aller à l'école pour s'instruire sur la vie en tant que citoyen. Les tests allaient bientôt avoir lieu, et toute la famille était impatiente de connaître la future voie du petit dernier.

Quand l'horloge indiqua cinq heures et quart, Ace et ses frères se dirigèrent vers la porte d'entrée, qui s'ouvrit automatiquement à leur approche. Ils saluèrent le retraité et se séparèrent après l'intersection du douzième quartier pour remplir leurs obligations de citoyens. Luffy partit à droite pour rejoindre l'école et Sabo à gauche, pour rejoindre le poste.

Ace continua tout droit, le long de la rue grise et uniforme, saluant les voisins qui sortaient de chez eux pour aller travailler.

"Je te souhaite une belle journée de travail, Nami, dit le garçon poliment.

_Je te souhaite une belle journée de travail, Ace, répondit sa voisine."

Dehors, la rue était tout aussi stérile que la maison, avec des bâtiments monochromes alignés sur les deux côtés. Il n'y avait pas d'autre verdure que ces arbres dont les branches étaient strictement taillées en cubes. Pas de bruit, pas de vie. Au bout du chemin de béton se dressait le bâtiment où travaillait Ace. C'était un grand édifice en verre et en acier, avec une façade lisse et froide. Dans ce bâtiment coexistaient les professions dites "utiles".

Il y avait d'autres bâtiments de travail dans la cité, mais Ace ne passait presque jamais devant.

Par exemple, son jumeau exerçait ses fonctions dans le bâtiment des professions dites "honorables".

Son cadet, lui, se rendait tous les jours dans le bâtiment des professions dites "instructives", l'école numéro 2, où exerçaient les citoyens professeurs. Là bas, on formait les jeunes à la vie en société. L'école numéro 2 regroupait les élèves de son quartier et de dix autres.

Il y avait également le bâtiment des professions "justes", où se trouvaient les avocats et les juges, ou le bâtiment des professions "loyales", où se trouvaient les membres du gouvernement. La cité comportait d'ailleurs beaucoup d'autres structures qui accueillaient d'autres fonctions toutes aussi importantes les une que les autres.

Ace entra dans l'édifice des professions utiles, prêt à remplir ses devoirs de citoyen.

Lui devait se diriger vers l'ascenseur, pour rejoindre son étage. Les mots "Division des Rations", "Service des naissances", "Registres des citoyens", et les noms d'autres "professions utiles" étaient gravés en lettres majuscules au dessus de l'ascenseur numéro trois.

Il savait que Marco, médecin au service des naissances, allait prendre l'ascenseur avec lui, comme tous les jours depuis qu'Ace avait été affecté à l'usine, il y avait bientôt trois ans. Leurs discussions étaient simples, mais ils trouvaient tous les deux qu'il était fort agréable de se parler. Ace et Marco s'entendaient bien. Leur relation de "collègues" était sur la bonne voie pour évoluer en relation "d'amis", ce qui faisait très plaisir à Ace.

Et quand Marco arriva justement à sa hauteur, ils se saluèrent brièvement et entrèrent ensemble dans la cage d'ascenseur. Aujourd'hui ne faisait pas exception, et ils se mirent à parler alors que qu'ils montaient vers les étages supérieurs.

"Salut, Marco, dit Ace d'une voix neutre.

_Salut, Ace, répondit Marco de la même façon

_Comment ça va ?

_Je vais bien. Et toi, comment ça va ?

_Je vais bien."

Le silence régna dans l'ascenseur pendant un long moment avant que les portes ne s'ouvrent sur le cinquième étage, où se trouvait la Division des Rations. Ace descendit à son étage et salua son collègue :

"Bonne journée, Marco.

_Bonne journée, Ace."

Ace sourit lorsque les portes de l'ascenseur se refermèrent.

Oui, il était définitivement sur la bonne voie pour devenir l'ami de Marco.