🌸 xiv.
Le lendemain à 15 heures, Peony attendait devant l'immeuble de Peter, stressée comme jamais. Allait-il accepter de lui laisser une seconde chance ?
Ce ne fut que lorsqu'elle commença à perdre espoir, aux alentours de 15 heures 15, que Peter décida de pointer le bout de son nez. Elle fut soulagée de le voir. Il s'avança vers elle, le visage fermé. Ils restèrent un moment à se regarder sans rien dire.
— Tu... Tu voulais me parler, je crois ?
— ... Ou- Ouais. Mais avant, je t'emmène quelque part. Tu veux bien me suivre ?
— Où tu veux aller ? demanda Peter, sourcils froncés.
— T- Tu verras. C'est pas très loin, il faut juste prendre le bus. C'est à trois stations.
Peter afficha un air incertain.
— Je t'en supplie, dit Peony. Viens.
Le jeune homme hésita encore un instant avant d'accepter. Peony parut vraiment soulagée. Elle l'amena jusqu'à l'arrêt de bus. Ils ne tardèrent pas à monter dedans. Durant le trajet, Peony essayait d'engager des conversations mais Peter ne semblait pas opérationnel. Elle n'abandonna pas pour autant et tenta de montrer un semblant d'enthousiasme. Elle était heureuse de le retrouver.
Peony prévint le jeune homme lorsqu'ils arrivèrent à destination. Peter reconnut l'endroit et se figea.
— Peter ?
— Pourquoi tu m'as amené ici ?
— ... Je sais que ça va te faire du bien, Pete. Tu en as besoin. Fais-moi confiance...
Elle prit sa main.
— Fais-moi confiance, répéta-t-elle en murmurant.
Peter tourna ses yeux humides vers elle et hocha la tête, les lèvres pincées.
Ils pénétrèrent dans le cimetière main dans la main. Peter marchait en traînant des pieds. Peony affichait son éternel sourire figé sur son joli visage.
— Je suis sûre que ta visite va lui faire plaisir, dit-elle à Peter pour l'encourager.
Il haussa les épaules.
Ils arrivèrent devant la tombe de Ben quelques instants plus tard. Peter resta silencieux. Les larmes lui montèrent bientôt aux yeux, mais il se fit force pour ne pas les laisser couler. Peony, remarquant le malaise de Peter, s'éclaircit la gorge.
— Hm, euh, bonjour monsieur Ben !
Peter leva les yeux vers elle, surpris.
— J'espère que tout va bien pour vous, là-haut, reprit la jeune fille. Ici, tout va très bien aussi. Peter excelle en cours, mais ça vous devez déjà vous en douter. C'est vraiment un garçon super, vous avez raison d'être fier de lui. Il est vraiment très courageux. Il m'impressionne, vous savez. C'est rare qu'un jeune de notre âge accomplisse autant de choses. Mais, vous devez déjà savoir tout ça, je n'ai peut-être pas besoin de le répéter. Je dois bien combler le silence qu'il impose !
Elle ricana doucement.
— Enfin, j'espère que ça vous fait plaisir qu'il soit là. Et n'ayez aucune crainte, je veille sur lui moi aussi. Enfin, j'ai été la plus grande des idiotes ces derniers temps mais dès maintenant, je ne lâche plus. Vous pouvez me faire confiance.
Elle se tut un moment.
— Bon. Je vais vous laisser, tous les deux. Il faut que j'aille rendre visite à ma mère. Elle s'appelle Valerie, peut-être l'avez-vous déjà croisé ? Je suis sûre que vous vous entendriez bien. Je vous dit au revoir, monsieur Ben. À bientôt !
Lorsqu'elle eut fini, elle se tourna vers Peter. Il ne l'avait pas lâché du regard pendant toute sa tirade.
— Tu dois avoir des centaines de choses à lui dire, fit-elle en posant une main sur sa joue. Alors n'hésite pas. Il aimerait beaucoup t'écouter, j'en suis certaine.
Peter hocha la tête. Peony prit sa main, effectua une pression réconfortante dessus, lui embrassa la joue et tourna les talons pour aller rejoindre la tombe de sa mère.
— Bonjour, Maman. J'espère que tu vas bien, toi aussi. Tu te rappelles de Peter, le garçon dont je t'ai parlé il y a quelques mois ? Il est avec moi, aujourd'hui. Il est allé voir son oncle Ben. J'espère qu'il réussira à lui dire ce qu'il a sur le cœur...
Elle se retourna et chercha Peter des yeux. Ce dernier remuait les lèvres doucement.
— Apparemment, on est sur la bonne voie.
Peony sourit. Elle lâcha un léger soupir et reporta à nouveau son attention vers la tombe de sa mère.
— Tu nous manques toujours, ici. Mais ton souvenir nous donne énormément de force. La fleuristerie marche très bien. Quant à l'école, je dirais que ça va mieux. Heureusement, j'ai trouvé des gens sur qui m'appuyer. Je t'ai déjà parlé de Ned et Peter, Maman, ce sont eux mes amis. Ils sont très présents pour moi. À propos de Peter...
Elle se retourna pour jeter un coup d'œil vers lui. Il était toujours devant la tombe de son oncle, mais semblait avoir fini de parler.
— Je crois que je l'aime... plus que ce que ce j'aurai pensé. Et ça me fiche la trouille... J'ai été une parfaite idiote, ces derniers jours. Au lieu d'affronter mes sentiments et de tout lui avouer, je me suis éloignée de lui. Et maintenant, je le regrette terriblement... Si tu savais...
Elle marqua une pause.
— J'aurais tellement aimé que tu sois là, reprit-elle avec la voix tremblante. Que tu me conseilles... Mais je vais faire comme tu m'as toujours dit : suivre mon cœur. On va voir ce que ça va donner, plaisanta-t-elle en haussant les épaules.
Peter s'approcha d'elle.
— Je pense qu'on va bientôt y aller. Je reviendrais te voir bientôt, je te le promets. Je t'aime, Maman.
Peter vint se placer à côté d'elle. Elle se tourna vers lui et découvrit qu'il avait les yeux rouges et bouffis.
— Tu as réussi à tout lui dire ? lui demanda-t-elle d'une voix douce.
— Pas tout. Mais une bonne partie, oui. Grâce à toi.
— À moi ? Oh, non non non. Ça, Peter, tu l'as fait tout seul.
— Mouais... Je n'aurais jamais osé si tu n'avais pas été là, pas loin.
Pour une fois, Peony n'eut rien à répondre. Elle se contenta de sourire.
— On rentre ? proposa Peter.
Peony hocha la tête, essayant de chasser les larmes qui perlaient au coin de ses yeux. Peter le remarqua et fronça les sourcils. Depuis qu'il la connaissait, il n'avait jamais vu Peony pleurer.
La jeune fille essuya d'un revers de main ses yeux avant que les larmes ne coulent sur ses joues. Peter, ému, s'approcha.
— Hey... Ça va ?
— Oui, assura Peony. Excuse-moi, je déteste pleurer devant quelqu'un.
Peter esquissa un sourire, plongeant ses yeux dans ceux de la jeune fille. Ils brillaient d'une lueur profondément triste, mais malgré tout un sourire éclairait son visage. Peter attira timidement son amie dans ses bras. Ils s'enlaçèrent silencieusement. Peony mit fin à l'étreinte quelques longues secondes plus tard.
— Je croyais que tu voulais rentrer ? fit-elle.
— Oui, allons-y.
Ils quittèrent le cimetière en marchant côte à côte, si proche que leurs épaules se frôlaient à chaque pas. Tous deux avaient besoin de sentir la présence rassurante de l'autre, d'avoir un point d'ancrage auquel s'accrocher désespérément. Même s'il n'était pas très démonstratif, il leur suffisait amplement.
Ils ne remontèrent pas dans un bus. Ils marchèrent une trentaine de minutes pour regagner leur rue tranquille. Peony proposa à Peter d'aller se poser dans le parc. Il accepta sans hésitation, cette fois. Ils s'assirent sur un banc à la peinture écaillée.
Peony savait que c'était le moment de parler. Mais elle n'y arrivait pas. Elle avait peur de la réaction de Peter.
L'amour rendait paranoïaque.
Au bout de quelques minutes de silence, la jeune fille se redressa et se risqua à prendre la parole.
— Je... Il faut que je rentre, Peter.
Le garçon leva les yeux vers elle, profondément déçu.
— Maintenant ?
Peony hocha la tête.
— Ok... soupira Peter. Ok. Je te raccompagne.
— C'est gentil, répondit la jeune fille avec un léger sourire.
Ils se levèrent alors et quittèrent le parc. Peony garda la tête basse, honteuse. Elle n'arrivait pas à lui dire ce qu'elle avait sur le cœur, elle n'arrivait à rien.
Elle rentra chez elle après avoir salué Peter et alla s'allonger sur son lit. Elle plongea dans ses pensées quelques longues minutes. Elle ressentait une grande tristesse, elle avait l'impression d'avoir raté quelque chose.
Raté, mais pas encore perdu.
Sur un coup de tête, Peony se releva d'un bond. Elle alla remettre ses chaussures, sa veste en cuir, et quitta l'appartement. Elle passa devant son père qui la fixa, interloqué.
— J'ai oublié quelque chose, Papa, je reviens vite ! lança-t-elle en sortant dans la rue.
Elle n'attendit pas la réponse de son père et se mit à courir comme une folle, un immense sourire aux lèvres.
Tout n'est pas perdu, se répéta-t-elle dans sa tête tandis qu'elle courait.
Elle arriva devant l'immeuble de Peter et s'apprêta à appuyer sur le bouton correspondant à son appartement, mais par chance une voisine des Parker sortit à ce moment-là. Peony la remercia grandement et pénétra dans le hall de l'immeuble. Elle grimpa les escaliers quatre à quatre et s'arrêta devant la porte des Parker. Elle toqua trois coups.
May vint lui ouvrir et prit un air surpris.
— Peony ? Mais qu'est-ce que tu...
— Bonjour May, je suis désolée de vous déranger... Je peux entrer ? Je n'en aurais pas pour longtemps.
— Bien sûr ma chérie, entre, répondit May, un peu prise au dépourvu.
— Merci infiniment ! s'exclama Peony, reconnaissante.
Elle fila à grands pas vers la chambre de Peter. Ce dernier était allongé sur son lit, un casque audio vissé dans les oreilles. Lorsque Peony débarqua en trombe dans sa chambre, il se leva d'un bond et retira ses écouteurs.
— Peony ? Q- Qu'est-ce que tu fais là ?
— Peter, je suis sincèrement désolée pour ce que j'ai fait ces derniers jours. Enfin, plutôt pour ce que je n'ai pas fait. Je n'ai vraiment aucune excuse pour t'avoir abandonné comme ça, je ne suis qu'une amie ingrate... J'espère que tu réussiras à me pardonner. Je veux juste que tu saches que ce n'était pas dans le but de te faire du mal, c'était juste que... J'avais besoin de prendre du recul sur tout, il me fallait du temps pour faire le point sur ce que je ressens et je n'y serais pas arrivée avec toi dans les parages. Parce qu'en réalité, Peter, je crois que... tu comptes beaucoup pour moi. Et ça me fait peur, parce qu'avec ta condition il est possible que tout arrive, et je ne veux pas me retrouver seule du jour au lendemain, je ne veux pas que tu disparaisse... je ne veux pas te perdre... Ce serait la pire chose qui puisse arriver, parce que... j'ai besoin de toi. Tu me fais me sentir bien. Et la vérité c'est que j'essaie de trouver d'autres mots pour te le dire depuis le début, mais je n'y arrive pas alors on va aller droit au but : j'ai des sentiments pour toi, Peter Parker.
Elle avait prononcé cette dernière phrase d'une voix presque inaudible.
Elle marqua une pause, guettant la réaction de Peter. Comme elle ne vint pas, elle soupira et reprit :
— Je sais qu'on ne se connaît depuis quelques mois, et ça peut te paraître vraiment bizarre mais je suis sûre de moi. Crois-moi, ça me fait bizarre à moi aussi mais... je n'en sais rien, avec toi tout est plus simple. Je suis heureuse comme je ne l'ai jamais été depuis la mort de ma mère. Et je suis sincèrement désolée de tout te déballer comme ça, mais je risquais d'exploser si ça ne sortait pas. Ne m'en veux pas, par pitié, ne m'en veux pas... Je comprendrais que ce ne soit pas réciproque, que tu ne veuilles plus me parler, mais dans ce cas dis-le moi maintenant.
Peony reprit son souffle. Peter la fixa, les yeux écarquillés. Il resta silencieux quelques instants, qui parurent des heures à Peony qui se rongeait les sangs en attendant une réponse. Au final, Peter répondit :
— Tu... Tu es vraiment sûre de toi ?
— Sûre et certaine. Je ne serais certainement pas là si ce n'était pas le cas.
Peter hocha la tête.
— Waouh, c'est dingue... souffla-t-il.
— Quoi ? questionna Peony, inquiète.
— Ça ne m'était jamais arrivé avant. Qu'on me dise tout ça. Tu es la première à me faire une déclaration comme ça.
Peony haussa timidement les épaules.
— Il faut une première fois à tout. C'est aussi la première fois que j'en fais une...
— Alors restons dans le thème, et inaugurons mon premier baiser, tu veux ?
Peter avait murmuré ça d'un ton tellement timide que Peony eut du mal à comprendre.
— Comment ça ? demanda-t-elle.
— Je te mentirais si je te disais que tes sentiments ne sont pas réciproques, avoua Peter avec un rictus gêné.
Peony mit du temps à assimiler la phrase.
— Tu... Tu ne te moques pas de moi ?
— J'aurais des raisons de le faire ?
— J'en sais rien... Après ce que je t'ai fais, tu-
— Non, non, P, arrête-toi là. Je ne t'en veux plus. C'est passé, maintenant. N'en parlons plus.
La jeune fille hocha la tête.
— Mais... Mais alors, t- tu es sérieux ?
— Faut croire, répondit Peter avec un haussement d'épaules. Ça ne date pas d'hier, tu sais. Je crois que j'ai commencé à ressentir quelque chose la première fois que je t'ai vu à la fleuristerie, quand tu es sortie dehors. Tu étais magnifique, sous le soleil. Tes yeux brillaient. Tu pétillais. Tu étais naturelle, et tellement belle...
Peony le fixa un instant, les sourcils légèrement relevés et la bouche entrouverte.
— Aussi belle que les fleurs que tu cueillais, ajouta le jeune homme en un murmure.
Peony ne sut quoi répondre. Elle avait énormément de choses à dire mais aucun mot ne franchissait ses lèvres. Alors pour toute réponse, elle posa ses mains de part et d'autre du visage de Peter et l'embrassa doucement. Peter répondit immédiatement au baiser en posant ses mains sur les hanches de la jeune fille. Ils ne se séparèrent que lorsque le souffle leur manqua et se fixèrent un instant, yeux dans les yeux.
« Tout le monde a une seule et unique âme sœur. Et quand on a de la chance, on la rencontre. Et quand c'est fait, quand on est frappé au cœur, il n'y a plus personne qui compte. » - Michael Connelly
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