III
Habituellement, lors de ces jours de congés, Wheein restait souvent enfermée chez elle, à lire. Elle allait parfois, quand il faisait beau, s'étaler sur l'herbe d'un parc, à l'ombre clairsemée d'un arbre. Elle admirait alors le feuillage de ce dernier onduler grâce au vent et le ciel qu'elle pouvait apercevoir entre les feuilles de temps à autre - oasis d'azur au milieu d'un océan de jade -. Elle entendait la rumeur du parc, les cris des enfants qui jouaient un peu plus loin, les rires des personnes qui discutaient sur un banc. Ces moments étaient paisibles et privilégiés, et elle se disait fréquemment qu'elle ne voudrait les partager qu'avec Taehyung.
Taehyung, d'ailleurs, cette personne étrange, venait de lui donner rendez-vous. Elle ne savait pas quoi en penser, ni comment l'interpréter. Il lui avait juste demandé son aide, en restant évasif sur le sujet. Elle poussa un soupir, réajustant son chapeau. Il y avait beaucoup trop de soleil aujourd'hui. Une chaleur de plomb régnait sur la ville et attendre sans se mettre à l'ombre ne l'aidait pas d'un pouce. Étrangement, ça ne l'étonnait pas du tout qu'il soit en retard. Ça correspondait à son caractère.
Elle jeta un regard dans la boutique devant laquelle il lui avait donné rendez-vous, un magasin vendant des instruments et des partitions. Encore une fois, quelque chose de très prévisible. Peut-être comptait-il simplement se rendre ici, et elle s'était fait tout un film. C'était même fort possible.
Le son d'une moto s'approchant vint taquiner ses tympans, et elle su instantanément qu'il s'agissait de lui. Elle savait depuis un moment le mode de déplacement favori du jeune homme, vu que c'était celui qu'il utilisait pour venir au travail. Wheein suivit des yeux le deux-roues, le cœur battant plus fort à mesure qu'il s'approchait d'elle. Elle n'arrivait toujours pas à réaliser ce qui se passait : elle allait passer un moment avec lui, seuls, hors du travail. Même alors qu'il garait l'engin non loin d'elle, retirant son casque avant de lui faire un de ses sourires chaleureux, elle ne se rendait pas totalement compte de sa situation. Avait-elle une quelconque chance avec lui ?
Elle l'avait toujours observé de loin, s'étant habitué à son amour platonique. Elle s'en contentait jusqu'ici, mais à le voir si près d'elle, si beau, ses yeux sombres légèrement plissés à cause du soleil, sa peau hâlée semblant le refléter, ses cheveux que la transpiration avait collés contre son front... elle se demandait comment elle allait pouvoir s'en passer à présent. Serait-elle capable de revenir à sa position reculée maintenant qu'elle avait l'impression d'être à deux doigts de le toucher ? Elle avait la sensation qu'un retour en arrière était impossible, pour elle du moins, que son cœur n'allait pas s'arrêter de battre plus follement pour lui.
La main du garçon vint effleurer sa joue, cognant maladroitement sur le bord de son grand chapeau en maille.
« Tu as l'air d'avoir chaud, je ne t'ai pas trop fait attendre ? »
Sa voix grave et suave était douce, s'infiltrant dans ses oreilles, lui arrachant un frisson dans le creux du dos. Elle se rependit dans son corps, le nourrissant d'une émotion étrange qui la retournait.
« Non, je viens d'arriver. »
C'était faux, elle devait attendre depuis une bonne demi-heure, mais ses rougeurs n'étaient pas seulement dues au soleil d'été. Il n'était qu'une excuse pour cacher ses sentiments bien trop forts pour qu'elle puisse à présent les contenir. Ils la submergeaient tels une vague indomptable. Une houle qui revenait toujours plus puissante sur elle, la renversant et manquant de l'emporter à chaque nouvel assaut, si elle n'avait pas déjà été arrachée à la terre et transportée au fond des eaux.
« Tu t'y connais un peu en musique, pas vrai ? »
Sa question la surprit. Comment avait-il pu deviner ? Yongsun l'ignorait, elles n'en avaient jamais vraiment parlé. Elle avait fait du piano dans sa jeunesse, ses parents avaient insisté pour qu'elle apprenne , mais si ça ne lui plaisait pas plus que ça. À présent, elle regrettait de ne pas avoir plus porté attention à ses leçons, elle aurait pu partager ça avec lui. Il lui avait fait aimer la musique qui avait été une telle contrainte dans sa vie. Voyant son air interrogatif, il lui sourit de nouveau :
« Tu sais jouer du piano. Quand je joue, tu fais les notes sur ton plateau. »
Le faisait-elle ?
« Vraiment ?
- Oui, tout le temps. »
Elle pensait être celle qui observait, la seule à faire attention aux détails, mais il avait remarqué quelque chose qu'elle ignorait d'elle-même. Son cœur se serra dans sa poitrine alors qu'elle se rappelait les paroles de sa meilleure amie : « il y a bien quelqu'un qu'il regarde lorsqu'il ne joue pas ». Hier, elle avait croisé son regard maintes fois lorsque ses doigts avaient quitté son instrument, aujourd'hui, il lui disait la regarder pendant qu'il jouait. Alors qu'elle le croyait dans son monde, hors d'atteinte, il l'observait au point de remarquer qu'elle mimait les morceaux sur son plateau.
« Je ne fais plus de piano depuis des années, expliqua-t-elle comme pour s'excuser, de peur qu'il ait remarqué des erreurs, elle en faisait probablement. Mes parents me l'ont imposé, mais je suppose que j'aimais ça.
- Je pense que tu te débrouillerais toujours très bien si tu essayais, Wheein.
- C'est pour ça que tu m'as dit de venir ici ? »
Elle se tourna légèrement vers la boutique, on pouvait apercevoir un piano au centre de la pièce, à travers la vitrine. Taehyung secoua la tête.
« Non, je voulais te demander conseil sur des morceaux. Tu connais bien ce bar, alors je me suis dit que tu arriverais à trouver ceux qui collent le mieux à l'ambiance. Et tu me semblais t'y connaître un peu.
- C'était risqué, qu'aurais-tu fait si je ne pouvais lire une partition ? se moqua-t-elle gentiment.
- J'aurais joué pendant des heures et agacé le gérant, peut-être ? »
Elle ria, gênée, presque rassurée de ne pas avoir eut à vivre ce moment. Lui jouant pour elle uniquement, elle n'était peut-être pas prête.
« Allons-y. »
_
« Que penses-tu de celui-ci ? »
Elle lui tendit la partition qu'elle venait de prendre sur le comptoir. Le gérant leur en avait sorti un bon nombre lorsqu'ils avaient expliqué ce qu'ils cherchaient, et sans regarder le temps passer, ils les regardaient les unes après les autres. Taehyung jeta un œil concentré sur le papier, chantonnant les notes à voix basses, ses doigts tapotant la page sans qu'il ne s'en empêche. Elle s'amusait de cette habitude, ne se lassant pas de lui proposer un morceau pour le voir de nouveau le faire.
« Ça me semble bien. »
Il posa la partition sur la petite pile qu'il avait commencé à faire, il n'y en avait que quatre pour l'instant, il était assez difficile de trouver quelque chose de bien, finalement. Wheein comprenait pourquoi il avait eut besoin d'aide : on ne pouvait pas jouer n'importe quoi, il fallait que ce soit gai, mais pas trop pour que les clients puissent continuer leur conversation, ça ne pouvait pas être trop fort pour que l'émotion ne gagne pas la salle. Du brio, mais pas trop. De la splendeur, mais pas trop. Sauf sur les chansons qu'il jouait avec la chanteuse, mais ceux-là, Wheein savait déjà qu'ils venaient les sélectionner tous les deux. Elle était touchée du fait qu'il lui demande conseil sur son répertoire personnel.
« Je vais essayer celui-ci. »
La nouvelle feuille qu'il avait prise sur le comptoir en main, il se dirigea vers le piano. Perdue, elle ne le lâcha pas des yeux alors qu'il s'y installait. Depuis tout à l'heure, il n'avait pas eu besoin de jouer, pourquoi avait-il soudainement besoin d'essayer un morceau ? Il ne s'agissait pas d'un de ceux qu'ils avaient déjà regardé.
Dès les premières notes, la mélodie familière la heurta. Elle se revit dans la maison familiale, un jour de printemps. La brise légère entrait dans le salon, faisant se soulever gracieusement les rideaux. On entendait les rires de ses parents assis sur le divan. Ses doigts parcouraient les touches noires et blanches du piano majestueux, et elle levait les yeux pour croiser le regard brillant de sa grand-mère, qui, dansant avec son grand-père, entonnait amoureusement les paroles de la mélodie. D'un geste habile, il la faisait tourner, la serrant contre lui alors qu'il se mettait à chanter avec elle. Cette chanson bannie depuis des années, sortie de sa mémoire, oubliée pour mieux être retrouvée par la suite.
Sans s'en rendre compte, elle s'était approchée du piano, en avait effleuré le bois laqué, les yeux plein de larmes, puis elle avait fredonné la tendre mélodie, sa voix entrecoupées de sanglots entre la plénitude et la tristesse. Taehyung s'arrêta soudainement de jouer, sûrement à cause de son émotion plus que visible, et elle s'essuya rapidement les yeux, honteuse.
« Je vais bien, l'arrêta-t-elle avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit. C'est juste cette chanson. Je ne l'avais pas entendue depuis très longtemps. »
Elle s'avança à côté de lui, il ne la quittait pas des yeux. Évidement, elle ne remarqua pas la manière dont il la regardait. Admiration, inquiétude, et peut-être autre chose.
« Je peux ? Demanda Wheein, les yeux rivés sur les touches de l'instrument. »
Comme prise d'une folie passagère, elle s'assit à ses côtés sur le banc alors qu'il s'était décalé pour lui laisser une place. Ses mains vinrent se poser sur les touches, les notes lui revenant sans qu'elle ait besoin de regarder la partition.
« C'est différent quand tu la joues, plus triste, remarqua le jeune homme dont les yeux étaient à présent perdus sur les pages.
- C'était la chanson de mes grands-parents, dit-elle en s'arrêtant de jouer. Ils la chantaient tout le temps, je la jouais pour eux. Ils se sont rencontrés sur ce morceau, ajouta-t-elle. Romantique, pas vrai ? »
Elle eut un rire mélancolique, levant la main pour caresser le papier.
« Cette chanson était une source de bonheur pour tout le monde, mais quand mon grand-père est mort, on ne l'a plus jamais jouée. Ça m'a rendue nostalgique. »
Surtout parce qu'il l'avait jouée avec entrain, comme elle le faisait à l'époque. Une chanson d'amour, à la fois émouvante et joyeuse, qui faisait papillonner le ventre. Elle avait bien repensé à ses grands-parents en l'entendant, mais ce n'était pas seulement ça. Wheein avait eu l'impression déchirante qu'il la jouait pour quelqu'un, lui offrait, lui déclarait un bonheur inavoué, et comme il n'y avait qu'elle de présente à cet instant, elle n'avait pas pu s'empêcher de penser que c'était pour elle. Elle s'était imaginé qu'il pouvait l'aimer, elle ne cessait d'y penser depuis qu'ils s'étaient retrouvés. L'espoir et la peur la rongeaient, mais cette sensation d'avoir une chance, même infime, elle ne s'en débarrasserait pour rien au monde.
_
Le crépuscule tombait progressivement, le ciel auparavant bleuté prenant des teintes multicolores. Bleu, violet, rouge, rose, orange, un arc-en-ciel de lueurs accompagnait les derniers rayons du soleil. Le moteur de la moto qui la ramenait chez elle vrombissait, cassant avec le calme du début de soirée. Le vent battait follement le visage de la jeune femme, l'air encore tiède s'insinuant sur sa peau, la caressant sans aucune délicatesse avant de la laisser. Elle cligna des yeux, sentant des larmes se former dans ses yeux, l'air les asséchant violemment, puis, sans réfléchir plus que de raison, elle les ferma en nichant sa tête conte l'épaule de Taehyung, inspirant son odeur pour la première fois.
Il avait ce genre parfum indescriptible, à la fois épicé et doux, fort et délicat, sucré et boisé. C'était exactement ce qu'elle s'était toujours imaginée, un effluve mêlé de centaines de sens, un mélange innommable , mais familier, un ensemble discordant, mais pourtant cohérent, à la fois persistant et immuable, à l'instar du caractère du jeune homme.
L'après-midi avait été fantastique. Après avoir passé pas mal de temps dans la boutique de musique, Taehyung lui avait proposé de boire un verre. Ils s'étaient installés à une terrasse, et ils avaient parlé, longuement, de tout et de rien, de la vie, des gens, d'eux, aussi. Elle s'était livrée à lui, lui avait dévoilé son manque de confiance, sa fragilité, son besoin constant d'être entouré de personnes fortes et rassurantes, et donc d'avoir des relations stables et fondée sur une confiance mutuelle ; et lorsque Taehyung lui avait dit qu'il ressentait la même chose, son cœur s'était tant emballé que les bulles de son soda faisaient pales figures devant les tourbillons d'émotions qui parcouraient son ventre.
Il était un voyageur, éphémère. Il ne savait pas s'arrêter à un endroit, pas parce qu'il aimait vraiment se déplacer, mais comme il cherchait encore le bon moment, la bonne voie, celle où il choisirait de rester. Il savait qu'il ne resterait plus longtemps, et elle l'avait senti. Taehyung allait partir pour le meilleur. Cette pensée aurait dû lui briser le cœur alors qu'elle sentait cette complicité s'installer entre eux, Wheein aurait dû fondre en larmes à l'idée que son amour finirait par s'en aller, mais elle avait réalisé que ce compte à rebours n'était pas matière à se morfondre, mais bien à profiter de chaque instant à ses côtés.
Elle n'hésiterait plus à présent. Elle allait tout miser dans cette romance, quitte à s'en rompre les membres. Elle était prête à subir cette déception si elle donnait tout, bien pires seraient les regrets de ne pas avoir assez fait. « J'essaie juste de vivre pleinement », avait-il dit, et elle comptait bien prendre exemple sur lui.
Elle resserra son emprise autour de sa taille. Elle n'avait pas envie que ça cesse, elle n'avait pas envie d'arriver chez elle, que cette moto s'arrête, de rompre cet instant magique. Est-ce que ça ne pourrait pas durer pour toujours ? Que le temps autour d'eux cesse, que le monde reste à jamais fixé sur ce crépuscule, cette moto les transportant inlassablement à travers les rues. Mais, les belles choses ne durent pas, c'est bien connu. Rapidement, ses yeux entrouverts pour laisser le moins possible de vent y entrer, son visage toujours caché contre l'épaule de Taehyung, elle reconnut la rue où elle habitait. Trop court, beaucoup trop.
Se sentant soudainement triste, elle lui indiqua la façade de son immeuble, se retenant de se serrer encore plus contre lui et de le supplier de l'emmener, peu importait où, l'emmener juste ailleurs, pour qu'elle puisse prolonger ce moment avec lui. Elle voulait que ce rêve ne s'arrête jamais.
La moto s'arrêta, et ils restèrent un court instant silencieux et immobile, alors que le moteur continuait de vibrer. Wheein le lâcha à regret avant de descendre du deux-roues, se décalant sur le côté pour lui faire face. Elle retira le casque qu'elle portait sur la tête avant de lui tendre.
« Merci de m'avoir ramené. »
Il hocha la tête, récupérant son casque pour le ranger d'un geste habile sous le siège. Ses yeux s'ancrèrent dans les siens, insondables.
« Quand retournes-tu au travail ?
- Après-demain.
- D'accord, acquiesça-t-il. Repose-toi.
- Oui, j'y compte bien. »
Il lui fit un de ces sourires discrets , mais chaleureux et cette expression lui donna la force nécessaire pour prononcer les mots qu'elle avait envie de lui dire depuis le début de cet après-midi.
« Taehyung, l'appela-t-elle alors qu'il avait détourné le regard.
- Oui ?
- Merci pour aujourd'hui, déclara-t-elle. Je suis heureuse d'avoir pu apprendre à te connaître un peu. »
Il resta silencieux quelques secondes avant de lui sourire de nouveau :
« Moi aussi, Wheein. »
Puis, aussi discret qu'un songe, aussi rapide qu'une étoile filante, les doigts des pianistes virent effleurer sa joue. Aussi silencieux qu'une brise d'été, il se redressa et s'approcha d'elle. Aussi légères qu'une plume, il posa ses lèvres sur les siennes. Ce fut si bref que Wheein n'eut pas le temps de réaliser qu'il s'était déjà éloigné, les joues rougissantes.
« On se voit au bar. »
La moto démarra, le bruit du moteur explosant dans la ruelle silencieuse en ce début de soirée, et se bruit assourdissant faisait parfaitement écho aux battements frénétiques du cœur de Wheein, et à la tempête qui la ravageait de l'intérieur.
-
Wheein se laissa glisser dans son bain, lâchant un soupir de satisfaction en sentant ses muscles se détendre sous l'effet de la chaleur. Ça avait été son premier réflexe en entrant chez elle, se faire couler un bain brûlant et se préparer un thé. Elle porta la tasse à ses lèvres, appréciant l'arôme prononcé en fermant les yeux, le contact de la porcelaine tiède éveilla ses sens, lui rappelant celui des lèvres de Taehyung un peu plus tôt.
Il l'avait embrassé. Un baiser bref et hésitant, comme s'il avait eut peur de la blesser, qu'elle disparaisse. La scène lui remontant à l'esprit, elle sentit à nouveau son cœur s'affoler, une chaleur se rependant dans son corps. Taehyung l'avait embrassé, et bien qu'elle ne comprenne pas complètement le sens de ce geste, elle était plongée dans un état de plénitude extrême.
Depuis combien de temps la voyait-il comme ça ? Depuis combien de temps l'observait-il secrètement sans qu'elle ne s'en rende compte ? Depuis combien de temps savait-il qu'elle le regardait dès qu'elle le pouvait ? Depuis combien de temps celui qu'elle aimait et pensait hors d'atteinte était-il plus accessible qu'elle l'imaginait dans ses rêves les plus fous ? Elle pouvait tout aussi bien être endormie, plongée dans un sommeil profond où elle imaginait tous les évènements de cette journée, mais peut-être même ceux d'avant. Tout semblait pourtant si réel, tellement réel que son cœur refusait de se calmer. Il l'avait embrassé, et ce n'était pas un rêve.
Qu'étaient-ils à présent ? L'aimait-il ? On ne pouvait plus parler d'amitié, mais ils n'étaient de toute façon dans aucune relation stable, qu'elle soit amicale ou non. Taehyung ne se construisait pas de relations, il restait toujours distant. Il évitait soigneusement les attaches pour pouvoir partir sans souffrir et sans blesser. Mais alors, qu'était-elle ? Elle qui l'aimait, elle pour qui il avait montré de l'affection malgré tout. Wheein était à la fois son obstacle et sa délivrance. Elle était celle qui l'empêcherait de partir, mais aussi celle qui allait lui permettre de rester. Elle espérait, au plus profond d'elle, l'avoir touché, lui avoir donné une raison de poser ses valises. Elle voulait être pour lui cette personne qui lui donnait l'attache dont il avait besoin.
La sonnerie du téléphone fixe résonna dans l'appartement, et elle se leva de la baignoire en s'entourant dans un peignoir. Elle décrocha le combiné, laissant l'obscurité ambiante tamiser la pièce, la lumière venue de la rue étant amplement suffisante.
« Allo ? »
La voix de sa mère lui répondit et un mauvais pressentiment s'empara d'elle. Ce fut comme si l'horizon qui venait d'apparaitre devant elle venait de rétrécir jusqu'à presque disparaître, lui laissant une sensation d'oppressèrent. Le problème avec la liberté : c'était une addiction terrible, à peine on l'effleurait qu'on voulait la garder à tout jamais, s'y accrocher avec désespoir. Wheein aimerait être plus libre que le vent, pouvoir s'envoler loin de tout comme un oiseau, ne pas avoir d'attaches, juste vivre au jour le jour. Au fond, elle voudrait juste être aussi libre que Taehyung.
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