Chapitre 8 - Déclaration de guerre

Moi présidente, j'autoriserais les pauses déjeuners de trois heures, les week-ends de trois jours, parce que personne n'aime le lundi et parce que le lundi sert toujours d'excuse : "J'ai dû amener mon gosse à l'école", "Y'a du monde sur la route, tout le monde revient du week-end", "Ma voiture n'a pas servie du week-end donc le temps qu'elle chauffe"...Mon cul oui !

Moi présidente, je ferais du monde entrepreneurial et salarial...Un paradis sur terre !

En attendant, je suis juste patronne par intérim et c'est presque comme si je gouvernais tout un empire en fait.

"- Je sais qu'Olivier vous a confié les rênes Philippine, mais vous avez une heure du retard !

- Désolée j'emmenais le petit à l'école ! Ah non pardon..."

J'attrape Timéo qui traîne derrière moi par le bras et l'attire.

"- C'est vrai que le mien sait déjà s'essuyer les fesses convenablement et colorier à l'intérieur des traits. Maintenant poussez-vous les pouffes, j'ai des dossiers à traiter."

Première chose que je fais en passant la porte du bureau d'Olivier est de jeter mon sac à main sur le sofa, poser mon thermos de café près de l'ordinateur et me diriger vers l'imposante baie vitrée de son bureau donnant une vue plus que splendide sur l'ensemble de la ville.

Je suis jalouse. Je veux la même fenêtre.

"- Bon, maintenant que t'es la patronne, tu vas faire quoi ?"

Petit sourire en coin tandis que Timéo s'installe à côté de mon sac à main. J'appuie sur le bouton du téléphone et appelle le premier bureau de la première secrétaire du coin.

"- Oui madame Tagliani ?

- C'est quoi votre nom déjà ?

- Juliette madame...Je peux faire quelque chose pour vous ?

- Viens dans mon bureau Roméo, faut qu'on cause."

Le cadet des Joyeau me dévisage, curieux et certainement soucieux de ce que j'allais faire de ma semaine de pouvoir.

Hé, Dieu a créé le monde en 6 jours....Philippine va exploser les records de vente en 3.

"- Alors, vous allez amener les dossiers que je vais vous noter sur ce bout de papier. Ensuite, vous allez montrer à Timéo ici présent comment la boîte fonctionne. Une fois que ça sera fait, vous allez appeler Monsieur Pao pour lui dire que je souhaite prendre rendez-vous avec lui. Notez mon rendez-vous quelque part sur votre large front pour que je ne puisse pas oublier. Vous me servirez de bloc-note humain. Ensuite, vous direz à Marion de la compta de venir me voir.

- C'est Manon...

- M'en fou, c'est presque pareil. On ne va pas se battre pour deux lettres, hein. Allez on se remue le popotin. À quoi ça sert de porter des faux talons aiguilles si ce n'est pas pour les user sur le tapis un peu, hein ?

- Dois-je vous prévenir quand Monsieur Joyeau arrive à bon port ?"

C'est vrai. Le saint patron. Je l'avais presque oublié le temps de cinq minutes. C'est fou comme le pouvoir vous monte vite à la tête.

"- Si Monsieur appelle, dites-lui que je suis en rendez-vous.

- Mais vous n'avez rien sur votre agenda aujourd'hui.

- Mentez-lui !!! Inventez-moi un rendez-vous chez le podologue s'il le faut ! Je m'en fiche."

Bon, ok. Peut-être que je suis légèrement fâchée qu'Olivier soit parti tôt ce matin sans même me prévenir, en me laissant juste un mot sur la table de chevet : "Je reviendrais vite, promis." En plus, son cœur était mal dessiné. Il a quel âge pour ne pas savoir dessiner un cœur correctement ? Ce n'est pourtant pas compliqué !

"- Je te trouve bien agressive ce matin...

- Crois-moi, je ne fais que retrouver mes habitudes. Ces secrétaires se sont longuement foutues de ma gueule dans le dos d'Olivier, il est temps de les faire payer...À ma manière."

Et puis il n'est jamais plus délicieux que d'entendre une secrétaire se plaindre dans les toilettes sur l'horrible façon dont elle est traitée malgré toutes ses années d'ancienneté dans la boîte.

"- Bon va bosser microbe que je ne t'ai plus dans les pattes. C'est pas la halte-garderie ici.

- Bien chef !"

Timéo disparaît et me voilà seule, les pieds sur le bureau d'Olivier.

"- Et je vais même me mettre complètement à l'aise tiens et faire de ce territoire, le mien!"

Je ne me prive pas pour péter sur son fauteuil préféré en pouffant seule dans mon coin.

Mais le problème c'est que j'ai très vite fait le tour de son bureau et il n'y a aucun dossier suspect qui traîne, ni rien. Ses tiroirs sont impeccablement bien rangés contrairement à ce que j'aurai imaginé et il n'y a même pas la moindre trace d'un objet personnel d'ailleurs.

"- Bon, je m'ennuie. C'est l'heure de la récré."

Clairement, je n'ai rien fait de la matinée à part errer dans le bureau d'Olivier à la recherche d'un dossier compromettant. Sauf qu'il n'y avait rien.

Tant pis. Je vais décharger ma frustration sur les secrétaires.

"- Non, mais ça y est, l'autre elle s'installe deux minutes au bureau d'Olivier et elle se croit tout permis !

- Vous avez vu la façon dont elle nous a regardés ce matin ?

- Carrément, elle se la joue un peu trop."

Ah. Du bavardage de pouffes. Ça va m'occuper dix secondes jusqu'au moment où l'une d'entre elles s'apercevra que j'écoute à la porte.

Allez...

Non ? Pas une ? Quelle déception.

Faut vraiment tout faire soi-même dans cette boutique c'est dingue !

"- Vous savez mesdames, la méchanceté est la caractéristique principale des personnes souffrant d'infériorité, se sentant obligées de salir toutes personnes, pouvant potentiellement paraître plus brillante à leurs yeux. J'ai lu ça dans un article quelque part.

- Vous savez que l'on peut porter plainte contre vous ?

- Et pour quel motif ? Ma patronne me fait travailler deux heures dans la journée et m'empêche de faire ma manucure tranquillement ? Sachez qu'en l'absence d'Olivier, j'ai les pleins pouvoirs et qui dit "pleins pouvoirs" dit que je peux facilement vous remplacer. Vous n'êtes guère indispensable. Un peu comme la salade dans le sandwich. On est content lorsqu'elle est là, mais même absente, ça ne nous gêne pas plus que ça.

- Depuis le début, vous nous traitez avec dédain et vous nous prenez de haut ! Nous faisons grève !

- C'est mignon. Au fait, selon la législation en vigueur, il faut déposer un préavis auparavant ! Allez, les minons, bossez un peu. Il serait dommage qu'en l'absence de Gru vous n'ayez rien fait, n'est-ce pas ?

- Je...Je démissionne !"

Quelque part, j'ai l'impression d'avoir déjà vécu cette scène, mais avec des rôles inversés.

Ah oui. C'est vrai.

"- Pour démissionner c'est pareil Caramel.

- C'est Carmelia !

- Il faut d'abord écrire un petit bout de papier. Je suis déjà passée par là. Bon, quand vous aurez fini votre "Tea Party" de pacotille, vous retournerez travailler. Les clients attendent et des bons de commande sont à faire.

- Dictateur !

- Petite leçon d'histoire mesdames : Durant la Rome Antique, le "dictateur" était la personne à qui le Sénat confiait volontairement tous les pouvoirs dans l'espoir que cette personne redresse le pays. Voyez Olivier comme le Sénat et moi...Je suis votre sauveuse !"

Décidément, ces femmes m'étonneront toujours, je me demande comment Olivier les engage. Au physique ? Elles ont certainement dû avoir leur diplôme dans un Kinder Surprise.

"- Madame !

- Quoi Roméo ?

- Vous avez quelqu'un qui vous demande au téléphone.

- Oh ?"

Olivier ? ll regrette d'être partie comme un gros lâche ? Il a intérêt à s'excuser celui-là.

"- Coucou Philippine !"

Rien qu'au son de la voix, mes poils se redressent. Je reconnaîtrais cette voix stridente et nasillarde entre mille.

"- Judith...Que me vaut se déplaisir que d'entendre ta voix me perçant les tympans ?

- En fait, je te faisais juste un coucou depuis l'aéroport.*

- Oh ? Tu pars enfin loin du monde ? Il était temps !

- Non ! Je me rends aux Philippines actuellement et devine quoi ? Je n'y vais pas seule ! Si ce n'est pas merveilleux !! Le hasard fait bien les choses.

- Passe-le-moi.

- Quoi ? Holala la ligne coupe, je t'entends mal.

- J'ai dit : passe-le-moi.

- Allô ? C'est tellement dur d'avoir une conversation.

- Ne joue pas à l'idiote, ça ne prend pas avec moi Judith. Qu'est-ce que tu fais avec Olivier ?

- Je te l'ai dit Philippine, cette victoire est la mienne. Dommage pour toi. Mais je reconnais que tu as été une adversaire honorable."

Je vais le tuer.

Non.

Je ne vais pas le tuer.

Je vais le découper lentement et...

"- Bon, sur ce, je te laisse !"

Ne t'énerve pas, c'est mauvais pour la tension. Ne t'énerve pas. Ne craque pas. Tu es plus forte.

"- Judith ?

- Hmm quoi encore ? Je dois y aller, tu vas me faire rater mon vol !

- Tu sais quoi ? Tu peux lui faire ce que tu veux, je m'en fiche. J'ai eu une bonne éducation et on m'a toujours appris à partager mes vieux jouets. Enfin, c'est vrai que tu n'es pas joueuse toi...Par contre, t'as souvent faim, non ? Je te laisse mes restes volontiers. Tu me voir ce qui te reste à grignoter sur le nonoss...Chienne."

"Oh ! Philippine ! Pas de gros mots on avait dit !"

Pardon. C'est vrai. Retenue et self contrôle.

"- Tu es tellement facile à avoir ma pauvre Philippine."

Cette rouquine ne paie rien pour attendre.

"- Juliette !!!!"

Il est hors de question que....

"- Oui ?

- Réserve-moi le premier vol en direction des Philippines !"

Timéo entre dans mon bureau, les bras croisés, petit sourire en coin. Ce même sourire satisfait que son frère porte si souvent.

"- Qu'est-ce que tu vas faire ?

- Je vais commettre un double meurtre."

Respire Philippine. Tu vaux mieux que ça. Tu as été plus forte à ce petit jeu que cette femme. Tu peux le faire !

"- Je savais qu'en ce moment je me relâchais, que je devenais molle du genou.

- Je t'avais prévenu. Tu ne peux pas baisser ta garde.

- Il est temps que je rappelle certaines choses à ton frère.

- Comme quoi ?

- Pour commencer, comment je m'appelle ?"

Philippine.

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