Chapitre 55 - Mettre les points sur les i
Avec la fin des vacances d'hiver et la préparation au mariage de mes parents, j'ai volontairement mis Gaston de côté. Je ne voulais pas y penser, ni même lui parler. J'ai ignoré la majorité de ses messages, de ses pokes sur les réseaux sociaux et de ses appels. En fait, je n'ai pas encore décidé de ce que je ferais de lui. Je veux dire, on parle de Gaston March et contrairement à la grande majorité des garçons de mon âge, il est encore à des années-lumière avant de pouvoir prétendre à quelque chose.
Assise par terre, entre deux rayons à la librairie, je passe le temps quand soudain, je vois deux mèches rousses me tombant devant les yeux.
"- Tu comptes m'ignorer combien de temps ?
- Oh ? Qui me parle ? Serais-je Jeanne d'Arc ? Entendrais-je des voix ou seulement le bourdonnement agaçant d'une mouche à merde ?
- Tu veux vraiment la jouer comme ça Acacia ?"
Je suis le genre de personne à partir du principe que si je ne vois pas les gens, alors ils ne me voient pas non plus.
"- Tu sais, il faut vraiment qu'on parle.
- Ma maman m'a toujours dit : "Ne parle pas aux abrutis, ça les instruis".
- En suis-je un ?
- Pour quelqu'un qui embrasse la première fille du coin, je pense oui.
- Qui a dit que tu étais la première fille du coin ?"
Très bien, il gagne.
S'il y a bien une chose que je déteste le plus au monde, c'est que l'on m'interrompt dans ma lecture. Je referme donc violemment le livre et me redresse en attrapant mon sac pour lui faire face.
"- Écoute Gaston, je ne sais pas exactement ce que tu attends de moi, mais ça ne marche pas, d'accord ? Lâche l'affaire !
- Je veux juste qu'on discute de ce qu'il s'est passé à la montagne.
- Il ne s'est rien passé, ok ? Rien !"
Il me retient par le bras tandis que quelques vendeurs commencent à nous regarder d'un drôle d'œil.
"- Si tu ne lâches pas mon bras immédiatement, je crie à l'agression.
- Laisse-moi juste 5 minutes...Je t'en prie ! Je sais que j'ai été idiot, mais je veux vraiment me faire pardonner. Je n'aurai pas dû t'embrasser ni...Enfin...
- T'es venu pour ça ? Pour t'excuser de m'avoir allégrement volé mon premier baiser ?
- Pourquoi t'es si à cheval sur ça, d'ailleurs ? Y'a que dans les histoires d'amour que c'est si "sacré" !
- Justement Gaston ! J'ai envie d'en vivre une ! Tu comprends ? J'ai envie de laisser mon cœur s'emballer. J'ai envie de ressentir tout un tas de choses. J'ai envie de rougir à la première occasion !
- Je ne comprends pas.
- Et tu ne comprendras sans doute jamais. Maintenant, lâche-moi."
Dis-moi Gaston quand as-tu eu le regard aussi triste ? Comme si quelque chose à l'intérieur de toi s'était brisé. Comme si ta flamme intérieure venait de s'éteindre.
Dis-moi Gaston quand as-tu réalisé ?
"- Comment tu me vois ? Je suis à quoi pour toi ? À tes yeux...
- Un ami...
- Juste ça ? Un ami ?
- Tu veux qu'on soit quoi d'autre ? Super-méga-copains ?
- Laisse tomber. Écoute, ce soir on fait une soirée dans un bar du coin, je te donne l'adresse, tu n'as qu'à venir.
- Tu crois sérieusement que mes parents vont me laisser sortir ? À croire que tu ne les connais pas.
- Parce que ça t'a déjà arrêté auparavant ? Je t'attendrais. Si tu viens, on discutera. Si tu ne viens pas, je saurais alors à quoi m'en tenir."
Parce que tu crois vraiment que je vais venir ? Mon pauvre Gaston.
"- Acacia ! Tu viens mettre la table, s'il te plaît ?
- J'arrive !"
En rentrant, je suis restée longtemps allongée en repassant dans ma tête ma discussion avec Gaston. Devais-je y aller ? Lui expliquer clairement et simplement que ce n'était pas possible ? Non. Je ne lui devais aucune explication. Pourquoi ferais-je l'effort d'y aller d'abord ? Ce n'est pas comme s'il avait fait quoique ce soit pour moi. Depuis qu'on est enfants je l'aide, je le protège et le méprise.
Alors pourquoi est-ce que je me sens aussi coupable au fond ? Comment l'être humain peut-être aussi versatile ?
Ah ! Je le déteste de me faire ressentir tout ça.
"- Au fait, ce soir, ton père et moi nous allons au restaurant. On rentrera tard alors tu auras l'appart' pour toi toute seule. Ah, juste...Tu pourras t'occuper de la litière de Bora ? Je n'ai pas eu le temps de le faire aujourd'hui.
- D'accord...
- Tu me parais bien raplapla, un problème?
- Non, non..Tu sais ce que c'est, la reprise des cours, les devoirs, l'ambiance lycéenne quoi."
En fait, j'ai Gaston en tête et je me déteste pour penser à lui en ce moment précis alors que je suis censée profiter de mes lasagnes.
Sors de ma tête, sors de ma tête, sors de ma tête.
Je dois y aller. Je dois lui dire. C'est mieux pour nous deux. Moi ça me soulagera d'un poids sur le cœur et lui, il pourra s'occuper d'autres choses.
De quelqu'un d'autre.
De Laurie ?
"- Ça JAMAIS !!!!!
- Acacia ?"
Oups. L'espace d'un instant, j'ai oublié l'existence de mes parents.
"- Vous partez à quelle heure ?
- Vers 19h.
- Hmm...d'accord."
C'est décidé. Ce soir, j'y vais.
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