꧁ 𝐏𝐫𝐨𝐥𝐨𝐠𝐮𝐞 ꧂
Nous étions prêts. Trente ans. Trente ans de notre vie, à chercher un moyen de fuir ce maudit manoir. Nous avions eu le temps de vieillir ... Notre jeunesse nous avait été volée. Arrachée. Nous avions la cinquantaine à présent, et notre beauté d'antan avait disparue. Mon frère, Jasper, le supportait encore moins que moi. Il fallait dire qu'il avait été bel homme : une peau douce, de courts cheveux noirs et soyeux, de grand yeux bruns clairs... Mais il ne lui restait plus rien. Il était ridé et ses cheveux étaient blancs, à présent. Je lui ressemblais, comme à deux gouttes d'eau. Mais le temps ne m'avait pas autant attaquée.
Jasper enviait Anna. Elle était magnifique et ressemblait beaucoup à sa mère, Mélanie. Il ne l'avait jamais appréciée, disant que c'était à cause d'elle que nous étions enfermés ici. Mais moi, je n'étais pas du même avis que lui. Je l'aimais et l'avais toujours considéré comme ma propre fille. De plus, elle portait mon nom, car sa mère voulait me rendre hommage; nous nous entendions très bien, Mélanie et moi.
Anna était grande à présent, et il fallait qu'elle sorte d'ici. Il fallait la garder saine et sauve. C'était la dernière de la lignée des Ravenswood. Et " l'hôte " voulait sa mort. Car la bohémienne avait prédit la venue d'un descendant qui lui causerait sa perte.
Cet " hôte ", était ce qui restait de Henry Ravenswood. Il nous hantait jour après jour, nuit après nuit, nous fatiguant, nous usant et nous tuant à petit feu. Et à chaque fois, il réduisait à néant nos plans pour sortir du manoir. Mais cette fois-ci était la bonne. Rien ne pourrait nous arrêter, car, nous avions enfin trouvé un bon moyen de le distraire pendant que nous prenions la fuite.
Nous allions tout bonnement bruler la demeure. Jasper devait recouvrir le sol de la salle de bal d'alcool, et exploser à terre une lampe à huile allumée tandis que je m'enfuirais avec Anna par la fenêtre la plus haute, à l'aide d'une corde. Il ne restait plus qu'à ce qu'il fonce à l'entrée, pour s'en aller, lui aussi. L'intention d'Henry serait détournée grâce au feu et nous serions déjà bien loin.
J'aidais Anna à emballer quelques affaires qu'elle allait emporter avec elle. Deux trois vêtements, un livre, et son album photo. Celui-ci contenait toutes les photos de sa famille qu'elle avait trouvé dans le manoir. Elle n'en avait qu'une de son père. Et elle était floue. Elle l'a décrochée de la page la regarda et la pressa contre son cœur. Je lui pris son épaule, et lui chuchotait :
- Tu arriveras, je t'assure, à retrouver qui il était. En attendant, je voudrais...
Je me relevais et me dirigeais vers une grande armoire en bois. J'en sortais une longue et volumineuses robe blanche. Je me retournais vers Anna.
- Que tu prennes ça.
Anna souriait, tandis qu'une larme perlait sur sa joue.
- Oui, je prends la responsabilité, de la garder à jamais. De générations en générations.
C'était la robe de mariée de sa mère. Je me rappelais le jour, où j'aidais Mélanie à l'enfiler avant son mariage. Elle était en larmes d'avoir perdu ses parents la veille. Mais j'essayais de la réconforter, lui disant que tout se passerait bien à présent.
Anna l'avait porté une fois, et elle était magnifique, elle lui allait comme un gant. Mais, elle avait dû l'enlever car Henry n'avait guère apprécié la voir dans cette tenue. Il l'avait fait flotter dans l'air et fait tourner dans tous les sens en hurlant :
" TU NE SERAS JAMAIS ELLE ! "
Elle ne l'avait plus jamais remise. Et ce que je n'avais pas compris, c'était qu'Henry avait martyrisé sa fille, pendant sa grossesse au manoir, et c'était ce qui l'avait épuisée et tuée l'or de son accouchement. Alors, comment pouvait-il reprocher à sa petite fille de ne pas être Mélanie, puisqu' il lui voulait du mal ? C'était l'un des secrets qui entourait la famille Ravenswood. J'en connaissais quelques-uns . Entre autre le fait qu'Henry n'était pas né aussi immonde et cruel. Il l'était devenu avec le temps. Mais je n'en connaissais pas la raison.
Après avoir plié la robe soigneusement, et l'avoir rangée dans un valise spécialement conçue pour elle, Anna s'allongeât une dernière fois sur son grand lit moelleux. Une nouvelle fois, quelques larmes se perdirent le long de son visage.
- J'ai passé toute mon enfance ici. Les trente premières années de ma vie. Et, je vais quitter ce manoir brutalement, sans plus jamais le revoir.
Je m'approchais du lit, m'allongeant à côté d'elle.
- Tu sais, ce n'est pas la première fois que nous tentons de partir, et tu n'avais jamais réagis comme ça, auparavant, lui fis-je remarquer tout bas.
-Je sais, mais, les dernières fois, je n'étais pas certaine que nous y arriverons... Là, je sais que je vais partir pour de bon...
- Et, comment peux-tu être sûre, que notre plan va fonctionner ?
Elle hésita quelques secondes, puis lâcha enfin :
- C'est Leota qui me l'a dit. Elle m'a prédit que, je sortirais cette fois-ci , et que je finirais par mourir, un jour...
Je soupirais. La plupart du temps, quand Leota, la voyante, la bohémienne, prédisait quelque chose, cette chose se passait bel et bien.
- Ne l'écoutes pas. Tu vas vivre ta vie, dans la joie, très loin d'ici, et de cet enfer.
Je l'attrapais par les poignets, la forçant à me regarder.
- Tu vivras loin d'ici. Loin d'ici je t'assure.
Je l'ai pris dans mes bras, puis ai continué les bagages. J'avais beaucoup de peine pour cette pauvre enfant. Elle allait mourir. C'était ce qu'avait prédit la voyante. De toute manière tout le monde finissais par mourir. Mais, je pensais à quelque chose : nous étions partis du principe qu'Anna était la descendante. Mais, s'agissait-il bien d'elle, car, nous n'avions pas eu plus d'informations sur ce sujet. Peut-être que le descendant en question serait l'un de ses enfants, voir petits enfants, etc.
- Fais des enfants, lui dis-je soudain. Ils faut que tu ais des enfants.
- Pourquoi ?
Elle semblait surprise.
- Pour ta survie, lui répondis-je.
Elle me regarda avec des yeux ronds et balbutia :
- Si j'ai l'occasion ... Peut-être...
La fin de journée fut longue. Tout le monde attendait avec impatience le moment de partir. Jasper tournait en rond, vérifiant toute les deux minutes s'il avait bien tout préparé pour faire bruler le manoir. Le moment venu, je montais avec Anna au plus haut étage, valises aux mains. Je défonçais la porte dans le grenier qui donnait sur le petit bureau d'Henry où se trouvait la fenêtre par laquelle nous allions descendre. J'accrochais solidement la corde à la poignée qu'on fit claquer violemment la porte. J'entendais des cartons dégringoler derrière celle-ci. Nous ne pourrions plus sortir. Je la jetais par la fenêtre, et balança les bagages dans l'arbre en bas.
- Vas-y ! Descend en première !
Anna se posta devant la fenêtre et respira un grand coup. Elle attrapa la corde et se hissa en dehors. Elle glissa, jusqu'en bas, dans un cri de douleur. Je me penchais, pour voir ce qu'il se passait, et Anna, devant le manoir, regarda ses mains : elle avait de grandes brûlures. Je n'y avais pas pensé.
À mon tour, j'aggripais la corde. Je passais une jambe dans le vide, puis une autre. Puis, je glissais. La douleur sur mes paumes fut horrible. Je n'ai pas crié, j'ai simplement fermé les yeux, attendant que ça passe.
Une fois arrivée au sol, je sentais déjà le feu dans le manoir. Je courrais vers l'arbre pour récupérer nos affaires. Je tendais le bras, afin de récupérer la petite valise contenant la robe. Mais celui-ci n'avait pas résisté : une branche l'avait empalé, faisant un gros trou dans celle-ci. Je sortais la robe, laissant sur le sol le contenant iréutilisable. Je l'ai tendue à bout de bras, elle n'avait aucune égratignure.
- Mets la, ordonnais-je à Anna.
- Mais non je ne peux pas ... Je n'ai pas le droit...
- Mets-la, répétais-je
Elle prit la robe, et l'enfila par-dessus ses vêtements. Elle était sa mère, contrairement à ce que disait Henry.
J'avais récupéré la moitié des bagages, tandis qu'Anna portait l'autre. Je m'inquiétait car Jasper n'était toujours pas sorti du manoir. Mais, elle et moi allions déjà prendre de l'avance, car, je savais que mon frère allait s'en sortir.
Nous descendions les nombreuses marches, puis passions le portail lorsque la porte du manoir s'ouvrit violemment. C'était Jasper. Nous étions sauvés. Mais, le feu pourpre et or derrière lui se métamorphosa en fumée verte claire qui volait dans l'air. Mon frère fut propulsé en arrière, contre le mur. Et, je fus aussi attirée par une force invisible jusque dans le manoir.
- Cours Anna ! Cours ! Hurlais-je à pleins poumons.
Elle lâchait toutes les affaires, et doubla de vitesse. Mais, elle aussi, une force l'attira. Mais, cette force la trainait par terre, grâce à son collier. Elle le remarqua, et tira dessus de toutes ses forces pour l'arracher, ce qui se passa, dans une giclure de sang qu'il lui avait été infligé. La robe en était un peu souillée.
Très réactive, elle se jeta, tête la première, dans la River Of The Far West, qui entourait la Big Thunder Mountain. Elle savait que le Phantom ne pouvait plus rien faire, lorsqu'elle était immergée.
Jasper, était fou de rage, collé au mur, à mes côtés. Henry avait fait son apparition et se tenait devant nous, un grand sourire aux lèvres.
- Que pensiez-vous faire ? Ricanait-il.
Il passa sa main dans mes cheveux, puis regarda Japser.
- Le temps ne vous a pas épargné, chers amis...
- La faute à qui ? Cria mon frère
Il marqua une pose avant de reprendre :
- Je voudrais conclure un marché. Je vous promets de vous libérer et de vous rendre le temps perdu, qui vous a attaqué ici, en vous rendant éternel. Mais en échange, vous me promettez de tuer... le descendant.
Le visage de Jasper s'illumina.
- Or de question ! Hurlais-je
- Mais enfin ... Immortel ... Tu entends... Juste à se salir les mains une fois et nous serions immortels... chuchota Jasper
- Non, pas immortels, juste éternels. Tant qu'il ne vous arrivera rien de grave vous vivrez, dans le cas contraire, vous mourez, ajouta Henry, toujours souriant.
Je regardais mon frère dans les yeux. Je ne voulais pas accepter ce marché. Mais, il en décida autrement.
- Nous acceptons avec plaisir !
Henry nous relâchait alors, lorsque l'épaisse fumée verte nous entourait. Je ressentais des picotements dans tout mon corps, ils n'étaient pas douloureux, mais juste gênants.
La fumée se dissipa et je me tournais vers mon frère. J'eu une vision d'horreur. Son corps était en putréfaction , des lambeaux de peau tombaient de tous les côtés de son corps. Je regardais mes mains. Horribles. Mortes.
Le Phantom observait nos réactions, satisfait.
- Qu'avez-vous fait ! Je ne serais plus jamais beau ! Beuglait Jasper.
- Oh ! Je n'avais pas précisé ? Vous serez éternels, certes, mais, la nuit, ou lorsque vous franchirez les portes de ma demeure, vous ressemblerez à des cadavres ambulants !
Puis, il rigola, d'un rire sadique qui lui était propre. Mon frère, tombait à genoux sur le sol, en pleurant. Nous nous étions fait avoir. Nous nous étions encore fait avoir par le Phantom. Nous nous étions une fois de plus, fait avoir par Phantom Manor.
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