꧁ 𝐂𝐡𝐚𝐧𝐠𝐞́𝐞 ꧂

Comme à mon habitude, à minuit pile, je montais à la fenêtre la plus haute du manoir. Je regardais ce petit village miteux qu'était Thunder Mesa. Il me répugnait au plus au point, constitué uniquement de personnes simples d'esprit, et qui ne s'inquiétaient même pas de savoir ce que devenait le manoir et ses habitants. Ils n'en avaient rien à faire de savoir si j'étais toujours en vie ou non. Moi-même je ne le savais pas, car j'avais beaucoup changé. Je n'étais plus la même. J'étais mauvaise. 

Je descendais les escaliers et me dirigeait vers une pièce en particulier. Une pièce circulaire avec une table en son milieu. Ma fille, où plutôt sa tête, coincée dans une boule de cristal , flottait dans les airs. Dans un des coins de la pièce, une grande statue commémorait notre défunte Mme. Leota, qui m'avait beaucoup aidée. Mais pas assez pour me sortir de cette horreur. La boule se tourna, pour arriver face à moi. 

- Maman... Je me sens si seule... 

Ses cheveux étaient roses, sa peau blanchie. Elle avait de grandes cernes autour de ses yeux, et aujourd'hui, elle avait 20 ans. Sauf qu'elle avait conservé l'apparence qu'elle avait, lorsque Henry l'avait transformée. La pauvre apparence d'une petite fille. 

- Bon anniversaire, Sarah. Dis-je, sans émotions. 

Il y eu un petit blanc, avant qu'elle ne demande : 

- Nous allons fêter mon anniversaire ou...

- Ton anniversaire ? Criais-je en lui coupant la parole, nous n'allons pas fêter ton anniversaire ! Tu as désormais 20 ans ! Tu te rends compte ! Si nous fêtions ta venue, ça voudrait dire que nous fêteront aussi les 10 ans de ton existence coincée dans ce manoir ! 

Elle semblait gênée, et triste. Je m'apprêtais à partir, lorsqu'elle rajouta : 

- Peux-tu au moins m'emmener avec toi, ailleurs que dans cette pièce, dans laquelle je suis enfermée depuis le jour ... le jour où ... nous l'avons perdu... 

Je me figeais. Chaque allusion à Jason me faisait du mal. J'avais perdu mon fils, à cause d'Henry. Je soupirais, en allant prendre dans mes mains la grosse boule de cristal. 

Assise sur un vieux fauteuil de velours rouge, un vieux grimoire sur les jambes, je lisais. Je lisais à n'en plus pouvoir depuis 10 années, espérant trouver une formule, une incantation, qui me permettrait de faire revenir mon fils, et libérer ma fille. Tourner les pages, une par une était devenu automatique. Les mots étaient devenus mes amis, et se mélengaient dans ma tête au fur et à mesure que je finissais les livres. 

Ma fille, me regardait inquiète, calée contre un coussin sur le canapé en face de moi. Je la regardais à mon tour et chuchotais : 

- Je te sortirai de là, promis.

Elle sourit et lâcha : 

- Parole de Ravenswood ? 

Je la regardais étonnée, et eu un sourire en coin, tandis qu'une larme coulait le long de ma joue.

- Parole de Ravenswood. Conclus-je.

Oui. C'était bien ça, j'étais devenue une Ravenswood. Froide et hautaine. Méchante et sombre. Tout mon univers avait été détruit. Tout à l'intérieur de moi avait été rongé par le désespoir et la mélancolie. Je n'avais plus rien à voir avec mon passé, outre le fait que j'aimais mes enfants à mourir. Et je voulais vraiment les retrouver, même si parfois j'étais dure avec Sarah. 

Quelques heures plus tard, je prenais mon petit déjeuné - je ne dormais plus - toujours en compagnie de ma fille. La pièce dans laquelle nous nous trouvions était 5 fois trop grande juste pour nous deux. Une grande table rectangulaire, napée de dentelle. Plusieurs chaises en bois, et couverts, attendaient toujours d'êtres utilisés. De grandes fenêtres et des rideaux blancs. Mais ce que je préférais dans cette pièce était l'imposante orgue. Je me levais, et me traina jusqu'à celle-ci. Je me suis assise sur la petite banquette et j'ai commencé à jouer. J'avais eu le temps d'apprendre ... L'air me faisait beaucoup penser à ce que Mélanie chantait, lorsque je l'entendais. Mélanie, c'était la seule, à pouvoir comprendre ce que je ressentais. Elle avait perdu sa famille, son fiancé, ainsi que son enfant, puisqu'elle est morte en accouchant. 

Je m'arrêtais soudain de jouer de l'orgue. J'étais très fatiguée, à cause de toutes ces nuits blanches.

- Je vais me coucher. Lançais-je à Sarah. Je suis beaucoup trop usée.

- À cette heure-ci ? Il n'est que sept heures du matin ! 

Je la transperçait du regard.

- Tu peux me ramener à ma pièce ? Me demanda-t-elle.

Je levais les yeux au ciel en lui disant : 

- Tu sais voler, non ? 

Elle soupira, pris une mine de chien battu, s'envola, puis pris la direction de la pièce de spiritisme. 

Allongée dans mon lit, je regardais tout autour de moi. J'avais choisi la chambre où Mélanie s'était volatilisée. La chambre avec le grand cadre de mes ancêtres. Henry, et sa femme, Martha, enceinte. Je tournais la tête, pour le voir, avec le peu de lumière que produisait la bougie. Il était aussi grand que le mur. 

Je me hissais hors du lit, n'arrivant pas à trouver le sommeil. Je me suis appuyée contre la coiffeuse, relevant la tête pour me regarder. Je voyais une femme blonde, cheveux tirés en arrière en un chignon. Son maquillage noir avait coulé, à cause des nombreuses larmes lâchées quelques heures plus tôt. De grandes cernes trônaient en dessous de ses yeux, devenus sombres avec le temps. Je me suis relevée, et me suis dirigée vers l'armoire dans l'optique de choisir des vêtements pour aller me doucher. La garde-robe était sombre. Noir, rouge, violet. Pas plus. Nous pouvions y trouver des chemises, des robes en satin, ou encore des ensembles en sky. J'ai un peu farfouillé au fond, espérant retomber sur ma chemise noire simple. Mais au lieu de la trouver, je suis retombée sur un tee-shirt appartenant à Jason. Effondrée, je me suis assise lentement par terre, tête contre le mur, mon regard retombant encore une fois sur ce maudit tableau. Je le scrutais sous tous ses angles : de la peinture qui s'écaillait, aux couleurs utilisées. Du bois du cadre, à la date gravée dedans. La date ? 

Je me relevais brusquement et collais mon visage à deux centimètres des chiffres inscrits. 1835. Je me tapais le front. Comment ne m'en étais-je jamais rendu compte ? Martha n'était pas enceinte de Mélanie ! Celle-ci était née en 1838 ! Martha avait eu un autre enfant ! Je m'affalais sur mon lit, réfléchissant. Jamais je n'avais vu de photos montrant la famille avec un autre enfant que Mélanie. Je n'avais jamais rien lu à ce sujet. Pourtant... Il semblait bien que Mélanie avait eu une grande sœur ou grand frère.

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