Dans Ton Ombre Pour Toujours... - Mélanie

Une fois de plus, je me retrouvais à dire au revoir à deux êtres chers. L'une qui m'aimait vraiment, même si elle avait l'habitude de le cacher, l'autre totalement malade et possessif, qui avait provoqué mon mal-être.

J'étais plantée là, depuis une demi-heure, devant les tombes de mes parents. La cérémonie d'enterrement était terminée et avait été très douloureuse. Mais mains jointes dans mon dos, mes mèches rebelles dans le vent et les yeux fermés, j'ai repassé dans ma tête la liste des morts et sacrifiés pour moi et à cause de mon père.

" Barry Claude, Sawyer Bottom, Leota, Capitaine Romwan D. Falls, Ignatius Knight, Martha Ravenswood ".

Devais-je aussi compter tous les autres écrasés de Thunder Mesa ? La moitié de la population du village avait succombé au tremblement de terre. Simple catastrophe naturelle ? Certains racontaient que c'était l'œuvre de l'oiseau tonnerre, et que la prophétie s'était donc réalisée.

Jake m'a rejoint, m'a attrapé par la taille et a posé sa tête sur l'une de mes épaules. Fort heureusement, il avait été épargné. Après s'être disputé avec mon père, il s'était simplement rendu au Cowboy Cookout Barbecue pour prendre un verre. Lorsque le tremblement de terre a commencé, il s'était protégé sous une table. Un morceau du toit du restaurant s'était effondré.

Certains volets du manoir pendaient à présent. Mais c'était le seul dégât notable sur le manoir, à part la grande faille qui traversait tout le cimetière et qui en avait défoncé le portail. Thunder Mesa, elle, avait été touchée de plein fouet. En effet, bon nombre de bâtiments étaient abimés voir détruits. Mais les travaux avaient commencé, et tout le monde y donnait la main à la pâte.

— Jake, ai-je chuchoté, promet-moi que nous allons vite nous marier et partir d'ici. Je veux quitter cet endroit.

— Attendons encore quelques jours, que tout rentre dans l'ordre, m'a-t-il expliqué, et nous nous marierons, et partirons le jour d'après.

— D'accord, ai-je acquiescé, faisons ça.

Nous sommes partis, laissant le cimetière de la famille derrière nous. Avant de rentrer, nous avons fait un petit tour dans celui public, et avons marché en silence entre les tombes. C'était notre façon de rendre hommage aux morts.

— La moitié de la population, ai-je soufflé, te rends-tu compte ? Femmes, Hommes, Enfants... Même la faune a été touchée...

— Je sais Mélanie, a-t-il répondu, c'est horrible...

— Jake, ai-je soufflé, n'attendons pas. Nous n'avons qu'à nous marier dans notre coin et partir. Partons même maintenant, et nous nous marierons ailleurs.

Il m'a pris dans les bras. Il sentait bon, j'adorais son odeur.

— Respectons les dernières volontés de ta mère. Je pense qu'elle aurait voulu que tu te maries ici. Attendons juste une semaine, comme ça, nous pourrons tout organiser par la même occasion. De plus, les anciens de Thunder Mesa t'ont vu grandir, je suis sûr qu'il voudront assister à ce grand événement.

Cette perspective ne me plaisait pas. Je ne savais pas pourquoi, mais même si mon père était mort, même si nous étions libres de faire ce que nous voulions à présent, je sentais que quelque chose de mauvais allait se produire. Mais j'allais l'écouter, car c'était vrai que Thunder Mesa avait besoin d'un événement heureux pour remonter la pente.

— D'accord. Faisons ça.


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Cette semaine à été vraiment très longue. Je m'étais attelée aux préparatifs de mon mariage chaque jour, avec l'aide d'Anna et de Jasper. Jake s'occupait de commander la nourriture et de distribuer la nourriture. J'ai sorti du placard la belle robe blanche de ma grand-mère. Elle était à couper le souffle. Aujourd'hui était un jour spécial car Jake avait commandé un tableau de moi en robe de mariage à un peintre. J'avais fait coudre un joli voile en tulle blanche surmonté de jolied fleurs en tissus. J'ai enfilé le tout et je me suis regardée dans le miroir. Ma mère en aurait eu le souffle coupé. Le mien l'était en tout cas.

— Vous êtes très jolie Mélanie, m'a complimenté Anna.

Ne perdant pas plus de temps, j'ai attrapé le bouquet de fleurs posé sur ma table, et je suis allée dans le grand hall où m'attendait l'artiste.

— Prenez place s'il vous plait, m'a-t-il indiqué.

Une chaise rouge et or avait été placée au milieu, je me suis mise debout derrière, et d'une main je m'y suis appuyée, et de l'autre j'ai tenu mon bouquet.

— Parfait.

Il m'a peint assez vite, et le résultat était assez satisfaisant. Jake nous a rejoint et a mis une tape dans le dos au peintre en signe de reconnaissance.

— Très beau, s'est-il écrié, je le verrais bien...

Il a attrapé délicatement le tableau sous les protestations de l'artiste lui criant qu'il n'était pas encore sec. Il a traversé le hall, pour se rendre devant le mur du couloir ouvert. Il l'a échangée avec une toile jusqu'à présent accrochée.

— ... ici, a-t-il achevé. Comme ça, tout le monde sera forcé de découvrir le beau visage de Mélanie en entrant ! Il faudra juste lui rajouter un cadre.

Le peintre a bougonné quelque chose, puis a récupéré sa somme due et replié son chevalet.

— Tu ne le trouves pas magnifique, m'a demandé Jake en revenant vers moi.

— Il est bien fait, en dire qu'il est magnifique serait un peu narcissique, lui ai-je fait remarquer.

— Eh bien moi je le trouve splendide !

Il s'est rapproché de moi et m'a embrassé.

— Car tu es splendide, a-t-il conclu.


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Le matin de mon mariage, j'ai vérifié avec Jake que tout était prêt pour la cérémonie et pour la fête qui suivrait. Le pâtissier a ramené l'énorme pièce montée que nous avions choisi ensemble. Elle était vraiment très haute.

Les employés s'étaient attelé à dresser la table, installant l'argenterie et la vaisselle que nous avions depuis des générations pour les grandes occasions.

— Mélanie, a crié une voix derrière moi, venez ! Vous ne devez pas être là ! Vous devriez déjà commencer à vous préparer !

Anna accourait vers moi, une brosse dans les mains.

Je me suis assise devant ma coiffeuse, et Anna a commencé à me brosser les cheuveux.

— Alors, avez-vous hâte, m'a-t-elle demandé toute emoustillée.

— Bien-sûr, ai-je répondu tout sourire, et j'attends aussi avec impatience le moment où je vais m'enfuir de cette ville.

— Oui je comprends, a-t-elle dit. Vous ne supportez plus de vivre dans une ville où des rumeurs ont sali la réputation de votre père...

— Ce ne sont pas que des rumeurs, Anna. Je ne supporte plus non plus devoir rester ici et repenser à ces horribles morts. Devoir porter sur mon dos les lourds secrets et abominations de mon père. Je ne supporte plus de savoir que mon père trompait ma mère...

De quoi bien remuer le couteau dans la plaie.

— Oh...

— Dites Anna, l'ai-je appelée, qu'allez-vous devenir, Jasper et vous, après que nous ayons quitté Thunder Mesa ?

— Nous allons rester ici, a-t-elle supposé, nous occuper du manoir, pour ne pas le laisser à l'abandon. Vous viendrez nous rendre visite de temps en temps, n'est-ce pas ? Le manoir restera toujours votre héritage.

Je n'avais pas pensé à ça à vrai dire. Qu'adviendrait-il du manoir ? Les activités de la Big Thunder Mountain avaient déjà étés momentanément stoppées et plusieurs dizaines de chômeurs était à déplorer. Et si Thunder Mesa n'avait d'autre avenir que de tomber dans l'oubli peu à peu ? Allais-je être obligée de venir ici de temps à autre pour veiller au bon entretien de la demeure, moi qui ne voulait plus mettre les pieds ici ? Il ne représentait plus rien pour moi. C'était le manoir d'un monstre sanguinaire. Plus le mien.

— Très certainement, ai-je menti, oui.

Anna m'a réalisé une coiffure assez jolie, rabatant en de jolies ondulations mes mèches de devant, et laissant mes bouclettes rousses déferle le long de mes épaules. Après avoir enfilé ma robe, elle m'a un peu sublimée avec du maquillage, puis m'a accroché pour finir le voile aux fleurs. Je n'ai pas oublié mon pendentif que j'ai accroché autour de mon cou.

Même si j'avais hâte de me marier avec Jake que j'aimais de tout mon cœur, les événements passés gâchaient ma joie. Je n'étais pas aussi heureuse le jour de mon mariage que ce que j'avais pu l'imaginer.

En me jetant un dernier coup d'œil dans le miroir, j'ai murmuré :

— Mère aurait été tellement heureuse... Elle me manque...

Une petite larme s'est échappée en fermant les yeux, avant qu'Anna accourt avec un mouchoir l'essuyer pour ne pas faire couler le maquillage.

— Miss Ravenswood, c'est le moment, m'a-t-elle gentillement rappellé.

Elle m'a emmené jusque dans l'entrée. J'entendais le brouhaha du monde dehors - nous avions prévu toute la cérémonie dans le jardin et avions donc installé des rangées de bancs pour les invités.

Jasper est arrivé et m'a tenu la main en me souriant. Puisque je n'avais plus de père pour m'accompagner, je l'avais choisi. La musique a commencé, l'orchestre jouait à merveille. Rien qu'en l'entendant, tous mes ennuis se sont envolés. J'allais vivre l'un des moments les plus importants de ma vie. Alors je me suis avancé, au bras de Japser. Je suis sortie du manoir, j'ai fait deux pas, et la douce musique s'est arrêtée. J'ai tourné la tête vers les musiciens, que se passait-il ? Je vu les gens se rapprocher pour murmurer, les gens regarder partout autour d'eux.

— Où est-il, s'est exclamé Japser, il devrait être là !

C'est alors que j'ai remarqué l'absence de mon fiancé. Jake aurait du se trouver juste en face de moi, à côté du nouveau maire de la ville, à l'autre bout du petit chemin que formait les pétales de rose au sol.

— Il est peut-être en retard, ai-je émit, attendons le quelques minutes...

Jasper m'a laissé, et a couru au manoir pour tenter de le retrouver.


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J'étais plantée là, devant tout le monde, mon bouquet à la main, à attendre un fiancé qui ne viendrait jamais sous le soleil assommant d'une après d'été.

Je commençait à angoisser, à me demander si Jake n'avait pas fait semblant de m'aimer pendant tout ce temps, où s'il lui était arrivé malheur.

Jasper est apparu dans l'entrée du manoir tibutant et m'a regardé, avec les yeux remplis de larmes. Il a pointé quelque chose derrière lui, avant de tomber dans les pommes. Anna a accouru vers lui, s'accroupissant à côté de lui. J'ai lâché mon bouquet, j'ai remonté ma robe et j'ai couru voir ce que Japser avait désigné.

Une fois à l'intérieur du manoir, les portes se sont refermées toute seules, et un rire s'est élevé dans l'air. Son rire.

Je suis entrée dans la pièce d'après, et les tableaux que mon père avait accroché s'étendaient pour laisser apparaître les circonstances de la mort de mes prétendants. Les murs s'étiraient encore et encore. Et Jake était là. Pendu par une corde accrochée au plein au milieu du plafond qui montait sans s'arrêter.

J'ai hurlé. Mon père avait encore réussi son coup. Mon père n'était plus vivant, mais il était toujours là. Son âme était toujours là.

— POURQUOI PÈRE ? POURQUOI ?

En m'entendant crier, il a rit deux fois plus fort.

J'ai regardé encore une fois Jake. Je l'avais aimé autant que j'avais aimé Sawyer. Je pensais qu'après la mort de mon père, nous n'aurions plus jamais aucun problème, que rien ne pourrait se mettre entre lui et moi. Je m'étais trompée. Il m'avait aimé et en avait payé le prix.

J'ai couru jusqu'à la salle de bal, mais je me suis arrêtée surprise. Lamélodie que j'avais composée pour Sawyer était jouée à l'orgue et des vingtaines de personnes pâles flottant dans l'air dansaient autour de la table, à laquelle d'autres, semblables aux valseurs, buvaient du champagne et mangeaient du gâteau.

— Des fantômes, ai-je crié effrayée.

J'ai couru de l'autre côté, empruntant le couloir au papier peint violet. Celui-ci s'était transformé et affichait d'horribles monstres. Leurs yeux s'illuminaient lorsque je passais devant eux.

Je me suis arrêtée devant une porte ouverte, qui laissait voir un spectacle horrible à l'intérieur de la pièce. Une tête de femme aux cheveux bleus coincée dans une boule de cristal volait au dessus d'une grande table ronde.

— Bon sang, ai-je dit totalement déboussolée.

La créature s'est retournée vers moi et s'est exclamée :

— Mélanie ! Vous rappelez-vous de moi ? Je suis Mme. Leota ! Ne vous inquiétez pas, j'ai eu une vision. Quelqu'un viendra nous sauver. Un descendant des Ravenswood.

J'ai hurlé et je me suis enfuie le plus vite possible. Mon voile voilait derrière-moi, et je me suis prise les pieds dans ma robe juste devant le piano, qui jouait tout seul. Je me suis remise debout et j'ai couru le plus vite possible, jusque dans ma pièce préférée - celle où se trouvait la grosse coiffeuse où j'aimais m'asseoir. Le miroir ressemblait plus que jamais à une tête de mort.

Je me suis effondrée devant, pleurant toutes les larmes de mon corps dans mon petit mouchoir blanc. J'entendais encore l'esprit de mon père s'égosiller à rire. Je me suis regardé dans le miroir. Quand aurais-je le droit à une vie heureuse ? Plus jamais sans doute.

Soudainement, j'ai eu la nausée. Je me suis retenue de rendre mon repas à plusieurs reprises. Était-ce sous le coup des émotions, ou bien... Non, ce ne pouvait pas être possible ! Quoi que je n'avais pas saigné ce mois-ci. Non. Pas dans ces conditions. Pas ici !

Je me suis levée et je me suis mise de profil au miroir. 

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