Chapitre 9

Vendredi 7 décembre 2017, 15h39.

On sonna à la porte alors que Charlie était seul avec Ellie dans la maison. Toute sa famille était rentrée à leur hôtel ou maison, ses parents réglaient des papiers pour l'enterrement de Nolan et Julian était parti se trouver quelque chose à mettre pour l'enterrement. Zac avait dit à ses enfants qu'ils pouvaient rester à la maison plutôt qu'aller en cours -ce que faisait Charlie depuis vendredi dernier. Ça tapa plus fort à la porte, ramenant la jeune fille a la réalité. Elle se leva, jeta un coup d'œil vers Ellie qui dessinait et alla ouvrit. Nina, Mary, Steven et David se tenaient sur le pas de la porte, Charlie avait oublié qu'ils devaient venir. Elle les laissa entrer, ils s'installèrent dans le salon. Les questions démarrèrent et Charlie répondit en parlant le moins possible. C'étaient ses meilleurs amis mais actuellement, elle rêvait de calme et de solitude. Non, elle aimerait bien passer du temps avec Léo. Quand son frère arriva avec ses parents, Charlie s'enfuit dans sa chambre. Elle entendit néanmoins son père dire :

Vous restez dîner ?

Alors que la porte se referma, elle se précipita sur son bureau et chercha le petit papier sur lequel était noté le numéro de téléphone de Léo. Charlene le retrouva après cinq bonnes minutes de recherche, elle composa le numéro et attendit patiemment qu'il décroche.

Salut Charlie, fit la voix grave de Léo.

Comment tu as su que c'était moi ?

Parce que j'étais certain que tu allais m'appeler, tu ne peux déjà plus te passer de moi.

Léo, l'avertit-elle, amusée.

Je blaguais, je dis juste ça à chaque personne qui m'appelle avec un numéro que je ne connais pas.

Sérieusement, ria Charlie. Tu en as eu beaucoup ?

Pas mal, oui.

Des filles à qui tu as donné ton numéro après les avoir pris en stop et avoir bu un café avec ?

Mmh mmh, ouais, acquiesça Léo. Mais aucune ne t'arrive à la cheville.

Tu me rassures.

Non pour être sérieux, la première fois c'était M.J. qui avait changé de téléphone et la deuxième fois était la bonne puisque c'était toi. Tu m'appelais pour quoi ?

Elle entendit du bruit derrière lui, c'était des voix : ça discutait et riait. Charlie pensa un instant qu'elle avait peut-être interrompu quelque chose.

Je te dérange ?

Non non, ne t'inquiète pas.

D'accord. Dis ?

Elle laissa trainer sa phrase.

Mmh ?

Ça te dit qu'on se voit ce soir ?

C'est un rencard que tu me propose ?

Non ! Tu vois des rencards partout toi, c'est pas possible ! C'était juste histoire qu'on passe un peu de temps ensemble.

Je suis partant.

C'est vrai ?

Ouaip.

Bon alors, je te dis une heure du matin devant le lycée ? Tu sais où il est ?

Oui. A tout à l'heure.

Charlie sourit en rangeant son téléphone dans sa poche puis elle descendit rejoindre ses amis et sa famille. Aucun membre de la bande dit quoi ce soit sur les absences de Charlie en cours depuis une semaine. Steven tentait de faire rire tout le monde mais Julian et sa sœur étaient comme dans un autre monde. En fait pour eux, les discussions étaient comme une télévision qu'on allumait juste pour avoir un bruit de fond.

Samedi 8 décembre 2017, 00h56.

Ça commençait à être une habitude : sortir en douce le soir. Charlie venait de refermer la porte arrière de la maison et d'enfourcher le vélo de sa mère quand une lumière s'alluma dans la cuisine. La jeune fille se cacha derrière un buisson et jeta un coup d'œil : son père était sorti dans le jardin arrière et fumait une cigarette. Charlie ouvrit grand les yeux, son père avait arrêté de fumer à la naissance d'Ellie.

Depuis cinq ans, il faisait partie de ceux qui rouspétaient quand quelqu'un de son entourage se mettait à fumer. Téo -qui fumait depuis deux ans- lui avait dit qu'il n'avait pas à dire quoi que ce soit puisqu'il était un ancien fumeur.

Zac s'assit sur les marches devant la porte arrière et observa le jardin. Grognant doucement, Charlie s'installa plus confortablement pour attendre qu'il finisse. Elle sortit son téléphone et jeta un coup d'œil à l'heure : 00h58. Finalement, après cinq minutes, Zac rentra à l'intérieur. Charlie attendit que la lumière de la cuisine s'éteigne pour se mettre en route pour le lycée. Elle était en retard. Un pick-up rouge était garé sur le parking désert, Léo était appuyé dessus. La jeune fille descendit de son vélo et sourit au garçon.

Désolée d'être en retard, murmura-t-elle.

Tu es juste en retard de dix minutes, pas de quoi t'en vouloir.

J'aime pas les gens en retard.

Mmh.

Léo attrapa son vélo en souriant, le mit à l'arrière du pick-up puis ouvrit la portière pour laisser entrer Charlene. Le trajet se fit silencieux en dehors des indications de la jeune fille. Elle l'avait amené de l'autre côté du lac, la rive plus éloignée de la ville. Par conséquent, ils avaient dû faire quelques minutes de route en plus que s'ils avaient été du côté des hangars et de la rive où tout le monde allait pour se baigner ou faire des fêtes. Charlie descendit du Pick up et regarda le lac qui s'étendait devant elle, Léo la rejoignit. Dans cette partie de la forêt, on pouvait rouler jusqu'au lac ce qui fait que Charlie et Léo étaient assis sur l'arrière du pick-up, leurs jambes pendaient dans le "vide".

On est où là ?

On est de l'autre côté de Redfish Lake. Presque personne ne vient ici, c'est plus loin et plus...

Charlie chercha ses mots, Léo tourna sa tête vers elle et l'aida.

Plus sauvage ?

Uhm, ouais, approuva Charlie. Tu es déjà venu au lac depuis que tu habites à Nampa ?

Non.

De l'autre côté, sur la rive d'en face, il y a des hangars. Mon père en a un, il y construit son bateau depuis des années dès qu'il a du temps libre. Il nous avait promis à mes frères et moi qu'on traverserait le lac sur « Jenna » un jour, raconta Charlie. Il l'a nommé en l'honneur de ma mère.

Elle tourna la tête vers Léo qui la regardait déjà, ce dernier lui sourit tendrement.

Tu as quel âge ?

J'ai vingt ans, lui répondit-il. Pourquoi ?

Juste pour savoir. Tu sais que j'en ai que dix-sept ?

Et alors ?

Non, rien.

Léo s'allongea et Charlie l'imita. Seulement, elle se cogna sur son vélo. Le jeune homme ria légèrement en l'attirant plus proche de lui pour qu'elle puisse s'allonger. Ils contemplèrent le ciel. Il y avait tant d'étoiles. On aurait dit une célébration, comme une fête organisée par la galaxie après que les humains soient enfin partis se coucher.

Nolan aimait accompagné sa sœur regarder les étoiles et Charlie pensa : Nolan ne verra plus ça. Il ne passera jamais son permis -il n'avait pas jugé utile de passer son permis dès qu'il avait eu seize ans contrairement à ses triplés. Il n'ira plus boire de coups avec la bande. Il ne votera pas non plus. Nolan ne fera rien de tout ça. À cause de ce qu'ils lui ont infligé.

Tu es vraiment jolie quand tu es perdue dans tes pensées.

Léo la sortit de ses pensées, elle se tourna complètement vers lui et mit son bras sous sa tête pour être plus à l'aise. Ils se fixèrent avant que Charlie ouvre la bouche pour faire part à Léo de ses pensées.

Comment je vais survire sans lui ? Comment font les autres ? Des gens meurent, tout le temps. Tous les jours. Toutes les heures. En fait, le monde entier est rempli de famille fixant du regard des lits dans lesquels plus personne ne dort, des chaussures que plus personne n'utilise. De familles qui ont désormais plus à acheter telle boîte de céréales, telle marque de shampoing. Partout des gens font la queue au cinéma, achètent des rideaux ou promènent leur chien alors que dedans, ils ont le cœur en miettes. Pendant des années. Pendant le reste de leur vie. Je crois pas que le temps guérisse quoi que ce soit, se confia Charlie. Si je guéris, c'est pas la preuve que j'ai accepté un monde sans lui ?

Elle attendit que Léo lui réponde, ce qu'il fit après avoir assimilé tous ces mots.

Non, ça voudra dire que tu t'y fais. Tu n'acceptes pas un monde sans lui mais tu survis.

Mais, murmura Charlie comme si elle allait dire un secret. Je n'ai jamais vécu sans lui. C'est une partie de moi que j'ai perdu, une des deux meilleurs.

Il faut laisser faire le temps, lui répondit, de la même façon, Léo. Il n'y a que de cette façon que tu iras mieux.

Il lui caressa la joue puis se pencha, Charlie ferma les yeux en croyant qu'il allait l'embrasser mais il déposa un léger baiser sur son front.

Allez viens, je te ramène. 

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publiée en : octobre 2018
corrigée en : mai 2021

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