Chapitre 49
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Lundi 25 mars 2018, 5h13.
Zac et Léo avaient alterné leur place derrière le volant et avaient conduit toute la nuit pour arriver à Plummer, une petite ville qui se situait à environ sept heures de Nampa. Les deux hommes avaient fait des messes basses durant tout le trajet afin que Charlie ne les entende pas. Ce qui ne servait à rien puisque celle-ci était partie dans un sommeil profond dès la deuxième heure. Elle venait de se réveiller quelques minutes plus tôt.
Il était désormais un peu plus de cinq heures du matin et ils avaient rendez-vous à six heures trente au New Life Center.
‒ Combien de temps devons-nous encore conduire ? Demanda Léo alors qu'il resserrait sa prise sur le volant.
Charlie suivit du regard le panneau de bienvenue de Plummer puis referma ses yeux.
‒ Le centre est à trente minutes de la ville, entre deux montagnes.
‒ Oh, on a le temps. On a encore plus d'une heure devant nous.
‒ Oui, on va s'arrêter prendre un petit déjeuner. Je vais te guider.
Le jeune homme suivit les instructions de Zac et finit par se garer sur le parking du seul diner ouvert si tôt dans cette petite ville. Une fois que le contact fut coupé, les deux hommes se retournèrent vers la banquette arrière et observèrent Charlene qui sentait leurs yeux sur elle.
‒ Charlene ?
Lentement, pour faire croire qu'elle se réveillait à peine, la jeune fille papillonna des paupières et bailla.
‒ Hé, tu as bien dormi ?
‒ Mmh mmh. Où est-ce qu'on est ?
‒ À Plummer, près du centre, répondit son père.
‒ Tu as faim ? Ajouta son petit ami.
‒ Un peu, mentit-elle.
‒ Bien, on va aller manger un bout.
Ils lui laissèrent un instant pour émerger puis ils l'entraînèrent à l'intérieur d'un diner dont la décoration était un mélange de moderne et d'ancien. Elle commanda des œufs brouillés avec du bacon mais elle grignota plus qu'elle ne mangea. Son ventre était trop noué et elle avait des nausées. Cependant elle devait se forcer parce que Zac et Léo la surveillaient et s'échangeaient des coups d'œil dès qu'elle jouait un peu avec sa nourriture.
Une demi-heure plus tard, il fut temps de se remettre en route et ils remontèrent dans la voiture. Après un moment, ils durent emprunter une petite route de graviers blancs qui traversait une forêt. Au bout de celle-ci se trouvait une grande maison au milieu d'une clairière et, un peu plus loin, un deuxième bâtiment entièrement en bois. Le tout semblait être très bien entretenue et, de ce que Charlie voyait par les fenêtres, c'était déjà animé.
Penchée entre les deux sièges avant, l'adolescente admira l'endroit avec la bouche-bée.
‒ Bah merde alors ! S'exclama-t-elle, stupéfaite. Si je m'attendais à ça.
Zac ralentit l'allure jusqu'à stopper la voiture jusqu'à quelques mètres de la porte d'entrée.
‒ C'est un bel endroit, confirma-t-il en coupant le contact.
Un homme sortit du bâtiment avec entrain. Il semblait avoir une trentaine d'années et son visage n'était pas inconnu à Charlie : c'était Mikey Bexley, l'homme qui était venu chez elle plusieurs jours auparavant. Léo sortit de la voiture, vient ouvrir la portière à sa petite amie et l'aida à sortir du véhicule tandis que l'éducateur s'arrêtait devant eux.
‒ Bonjour à tous les trois, bienvenue au New Life Center, les accueilli-t-il. Charlene, est-ce que tu te souviens de moi ?
Distraitement, la jeune fille hocha la tête alors qu'elle regardait tout autour d'elle. Cet endroit était magnifique et, si elle n'était pas ici pour une cure de désintoxication, elle apprécierait vraiment d'y passer quelques temps.
‒ Bien, rentrons à l'intérieur, reprit l'éducateur.
Tandis que Léo allait attraper le sac de voyage de sa petite amie dans le coffre de la voiture, Mikey l'arrêta d'un geste de la main.
‒ Chacun porte ses propres bagages, on n'est pas à l'hôtel ici.
‒ Mais, elle est en béquilles, répondit Léo, incertain.
‒ Et alors ?
Sans attendre sa réponse, l'homme récupéra le sac, se tourna vers Charlie et lui tendit en la fixant dans les yeux. Ne détachant pas son regard du sien, elle tient ses béquilles d'une main, se pencha légèrement et enroula les doigts de sa main libre autour de la lanière de son sac.
‒ Allez, entrons à l'intérieur.
L'éducateur se détourna et marcha vers la porte d'entrée. Comme elle put, Charlene cala sur son épaule, arrangea sa prise sur ses béquilles et le suivit à l'intérieur du bâtiment. Léo et Zac échangèrent un regard avant de se mettre en marche à leur tour. Une fois la porte d'entrée passée, ils arrivèrent devant un comptoir d'accueil circulair derrière lequel une femme dodue était installée.
‒ Charlene, je te présente Donna. C'est elle qui gère les entrées et les sorties de l'établissement ainsi que les plannings de la semaine pour chaque groupe. Si tu as besoin d'informations ou si tu as des questions, tu peux venir la voir, la renseigna-t-il en s'accoudant sur le comptoir. Donna, voici monsieur Clark, sa fille Charlene qui va intégrer le centre et le petit ami de cette dernière, Léo.
La quarantenaire se leva de son fauteuil et tendit sa main vers eux avec un grand sourire.
‒ Bienvenue au New Life Center !
Zac et Léo lui serrèrent la main et la remercièrent tandis que l'adolescente tentait d'amorcer un léger sourire -elle était quasi sûre que ça ressemblait plus à une grimace. Donna lissa sa jupe et se rassît sur son siège en cuir le faisant couiner sous son poids.
‒ Monsieur Clark, j'aurais besoin que vous signiez ce papier.
Toujours en souriant, la femme posa une feuille et un stylo sur le comptoir et lui pointa le bas de la page. Zac se pencha dessus, lut rapidement bougeant ses lèvres en silence et signa à l'endroit indiqué puis le rendit à Donna.
‒ Merci.
Le père de famille recula d'un pas avec un sourire et se mit au même niveau que sa fille. L'éducateur Bexley joint ses mains devant son torse et se tourna vers Zac et Léo.
‒ Bien, messieurs, il est temps pour vous de partir et de dire au revoir à Charlene. Elle est entre de bonnes mains ici, nous allons bien prendre soin d'elle.
‒ Déjà ? J'aurais pensé qu'on aurait fait une visite de l'endroit.
‒ Non, nous ne faisons pas ça avec la famille des pensionnaires. Après tout, ce n'est pas vous qui vivrez ici pendant quelques temps, n'est-ce pas ?
‒ Oui mais... on vient d'arriver et je veux m'assurer que ma fille est bien installée-
‒ C'est bon papa, le coupa celle-ci. Vous pouvez partir, je vais m'en sortir toute seule.
‒ Tu es sûre ?
‒ Certaine.
‒ Bon, d'accord, soupira l'homme. Si tu le dis.
Cédant, il vient prendre sa fille dans ses bras et la serra contre lui pendant une bonne minute puis il s'éloigna afin de laisser la place à Léo. Ce dernier entourna la taille de sa meilleure amie de ses bras et déposa un tendre baiser sur sa tempe.
‒ Prends soin de toi, lui murmura-t-il contre sa peau.
Charlie aurait aimé que leurs au revoir durent plus longtemps mais l'éducateur semblait convaincu qu'il était temps pour sa famille de s'en aller et il les raccompagna à leur voiture. Pendant qu'elle l'attendait, l'adolescente observa autour d'elle.
Derrière l'accueil, il y avait un escalier qui se séparait en deux et donnait sur deux couloirs à l'étage. Au rez-de-chaussée, sur la droite, une ouverture donnait sur un espèce de salon qui possédait plusieurs canapés. À gauche, un couloir distribuait différentes portes.
Quand Mikey revient après un moment, il entraîna Charlene vers l'ouverture et la fit entrer dans ce qu'il appela la salle commune. En plus des canapés, il y avait quelques tables puis, une nouvelle ouverture qui donnait sur une grande salle à manger.
‒ Voici la salle commune, présenta-t-il en traversant le salon. Tu pourras y avoir accès pendant tes temps libres. Ici, se trouve la salle à manger et, ouverte sur celle-ci, la cuisine.
De nombreux adolescents s'activaient dans la pièce et la rangeaient en s'entraidant. Certains d'entre eux la regardèrent mais la plupart l'ignorèrent. L'éducateur lui fit retraversait le grand hall et la dirigea dans le long couloir.
‒ Derrière ses portes se trouvent différentes pièces : l'infirmerie, les bureaux de chacun des éducateurs, des salles de réunions...
L'homme déverrouilla une des portes, l'ouvrit en grand et demanda à Charlie de poser son sac de voyage sur une table dans le coin de la pièce. L'éducateur referma la porte puis vient ouvrir le sac et fouilla à l'intérieur.
‒ Oh, qu'est-ce que vous faites ?!
‒ Une vérification.
Rapidement, il ressortit sa trousse de toilette, la vida entièrement sur la table et attrapa son miroir de poche qu'il mit dans un petit bac en plastique.
‒ Ah, je vois : on retire le miroir ! Au cas où je veuille m'entailler les poignets.
L'éducateur attrapa son rasoir, son fils dentaire et son recourbe-cils qu'il rangea dans le bac.
‒ Un recourbe-cils... Qu'est-ce que je pourrais faire avec ça ? Me recourber la langue à mort ?
Un rictus au coin des lèvres, l'homme attrapa le bac, déverrouilla un placard et le place à l'intérieur avec cinq autres identiques avant de le reverrouiller. Il rassembla ensuite les affaires de toilettes de Charlie dans sa trousse et la remit à l'intérieur du sac.
‒ Toutes tes affaires te seront remises lors de ton départ du centre.
‒ Sans blague, rétorqua-t-elle avec sarcasme. C'était logique. À moins que vous fassiez secrètement une collection de recourbe-cils.
Roulant des yeux, Mikey indiqua à l'adolescente de récupérer son sac et de le suivre à l'étage. Lentement, à cause des béquilles, ils montèrent les escaliers et prirent le couloir de gauche pour rejoindre le dortoir des filles comme le lui apprit l'éducateur. Ils dépassèrent plusieurs portes avant que ce dernier ne toque à l'une d'entre elles et ne l'ouvre après avoir entendu un faible « entrez ».
‒ Voilà ta chambre Charlene, tu es responsable de sa propreté.
L'endroit était plutôt petit et comprenait deux lits individuels, deux tables de chevets et deux commodes. Tous les meubles étaient identiques et assez simplistes. Une jeune fille était en train plier du linge avec soin.
‒ Bonjour Gwen.
‒ Oh bonjour Mikey ! S'exclama-t-elle sans lever ses yeux de son travail.
‒ Je te présente ta nouvelle camarade de chambre, Charlene. Tu veux bien l'aider à s'installer s'il te plait ?
‒ Bien sûr !
Ladite « Gwen » rangea sa pile de vêtement dans une commode puis s'avança vers Charlie et la serra dans ses bras. Choquée, la brune ne bougea pas d'un pouce jusqu'à ce que sa nouvelle colocataire s'éloigne d'elle d'un ou deux pas.
‒ Je suis ravie de te rencontrer Charlene !
‒ Uhm, c'est juste Charlie en fait.
‒ D'accord !
Sans lui demander son accord, elle arracha presque son sac de voyage de son épaule -manquant de la faire trébucher- et alla le poser sur le deuxième lit de la pièce.
‒ J'ai encore un peu de temps devant moi, est-ce que tu veux que je range tes affaires pour toi ?
‒ Euh, non c'est bon, répondit Charlie, incertaine quant à la façon dont elle devait agir avec cette fille pleine d'entrain. Je peux le faire toute seule.
‒ Bien les filles, reprit Mikey avant que Gwen ne puisse parler. Je vois que vous vous entendez bien alors je ne vais pas m'attarder plus longtemps. Gwen, on se retrouve en bas dans vingt minutes.
‒ Oui Mikey.
Souriant une dernière fois aux deux adolescentes, il sortit de la chambre et referma la porte derrière lui tandis que Charlie allait s'asseoir sur ce qui semblait être son nouveau lit. Elle posa ses béquilles sur le sol et essuya ses mains moites sur le tissu de son pantalon ample. Gwen s'assit sur son propre lit face à elle et joua avec un fil de son pull permettant à la brune de voir son vernis dépareillé rose et jaune.
‒ Tu viens de loin ? Questionna la jeune fille.
‒ Nampa.
‒ Oh, tu as voyagé de nuit alors ?
‒ Oui.
‒ Dans ce cas-là, tu devrais te reposer un peu, conseilla-t-elle. Ton planning est sûrement déjà prêt mais Donna a dû te laisser quelques heures de repos pour ton arrivée. Je viendrais te réveiller pour le repas du midi.
‒ Ah. Merci.
Après s'être débarrassée de sa chaussure et d'avoir déposé son sac sur le sol, Charlene s'allongea dans une bonne position sur le matelas. Ses muscles courbaturés lui causèrent quelques douleurs mais elle les ignora au mieux afin de se laisser sombrer dans les ténèbres.
Aujourd'hui commençait sa nouvelle vie.
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Média : Charlie
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