Chapitre 28
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Dimanche 27 janvier 2018, 9h07.
Lentement pour ne pas être aveuglé par la lumière du soleil, Charlie ouvrit ses paupières et s'étira de tout son long. Son attelle buta contre quelque chose et cela lui fit froncer les sourcils, elle mit plusieurs secondes avant de se rappeler qu'elle était chez Léo. La veille, alors que le barbecue hivernal des Hilton n'était pas encore fini, elle s'était traînée dans le lit de son petit ami et s'était endormie immédiatement. Le jeune homme avait sûrement fini par la rejoindre quand tout le monde était reparti.
Charlene se redressa en position assise et, du regard, elle chercha une bouteille d'eau pour soulager sa bouche pâteuse. N'en trouvant pas, elle décida de se rendre à la salle de bain. Elle se leva du lit, attrapa les vêtements propres qu'elle avait fourré dans son sac à dos et sortit de la chambre pour se rendre dans la salle de bain juste en face. Elle verrouilla la porte derrière elle, posa ses affaires, fit couler l'eau dans le lavabo et se pencha pour boire goulument. Une fois la sensation de bouche sèche apaisée, elle se redressa et essuya sa bouche avec la manche de son haut de pyjama. Elle fixa son reflet fatigué pendant plusieurs minutes puis elle se déshabilla et actionna l'eau après qu'elle se soit mise sous le pommeau de douche. Charlie profita de l'eau chaude un petit moment, détendit ses muscles et se savonna énergiquement dans l'espoir d'effacer la fatigue qui rendait son corps mou.
Après s'être rincé, elle coupa l'eau, sortit de la douche, se sécha avec une serviette moelleuse, enfila ses vêtements propres et se brossa les dents. Elle rassembla ses cheveux en une queue de cheval et regarda une nouvelle fois son reflet pour s'assurer qu'elle avait une meilleure mine. L'adolescente récupéra ses affaires sales, les plia et déverrouilla la porte de la salle de bain pour sortir. Elle se rendit dans la chambre de son petit ami, fourra ses vêtements dans son sac à dos puis, elle jeta un coup d'œil vers le lit pour s'assurer que Léo était encore endormi. Le plus silencieusement possible, elle fouilla dans son sac à la recherche de sa petite boîte métallique qu'elle avait rempli d'ecstasy la veille avant de partir de chez elle. Elle mit la main dessus et s'apprêtait à l'extraire de son sac quand elle entendit du mouvement dans le lit derrière et la fit se figer.
‒ Mmh, salut Charlie, marmonna Léo de sa voix rauque du matin.
Détachant lentement ses doigts de la boîte au fond de son sac, Charlene prit un instant pour se ressaisir puis elle se retourna avec un sourire.
‒ Hé, salut toi.
Son regard se reposa sur le jeune homme qui était allongé de manière détendue dans son lit, les mains derrière sa tête. Il la regardait alors qu'un sourire plein de tendresse étirait ses lèvres. Charlie se déplaça jusqu'au lit, s'y assit et se tourna pour être face à Léo en gardant ses pieds encrés au sol. Ce dernier amena une main au dos de sa petite amie et dessina des cercles apaisants.
‒ Tu as bien dormi, bébé ? Questionna-t-il. Tu avais l'air épuisé hier.
‒ C'était une longue semaine, répondit Charlie en jouant distraitement avec le bas du t-shirt du brun. Mais, j'ai vraiment passé une bonne nuit ici, ça a fait du bien.
‒ Tant mieux alors, je suis content. Est-ce que tu t'en vas déjà ?
‒ Non, non, je me suis juste habillée pour être un peu plus présentable au petit déjeuner. Tu te lèves ?
Léo hocha la tête, s'assit sur son lit et embrassa la joue de Charlie avant de sortir de son lit. Il attrapa des vêtements dans un placard dont les portes étaient laissées ouvertes et disparut dans la salle de bain tandis que Charlie en profita pour aller prendre un ecstasy. Quelques minutes plus tard, il revient dans la chambre habillée d'un jogging gris et d'un t-shirt vert émeraude et s'approcha de la brune qui l'attendait assise sur son lit. S'appuyant d'une main sur le matelas du lit, Léo se pencha vers elle et l'embrassa avec des mouvements lents et doux. Il se recula légèrement pour lui sourire mais Charlie ne le laissa pas faire, elle leva sa main et la pressa sur la nuque pour qu'il se penche de nouveau. Ils partagèrent plusieurs baisers avant qu'elle ne le laisse s'éloigner.
Léo se redressa avec un sourire niais, attrapa la main de sa petite amie dans la sienne et entremêla leurs doigts. Il la tira jusqu'à ce qu'elle soit debout sur ses pieds et l'entraîna à sa suite dans le couloir. Ils le traversèrent et atterrirent dans le salon où étaient déjà Holly, Léna et la meilleure amie de cette dernière, Alison. Les deux jeunes filles étaient assises sur le canapé et Alison lisait à voix haute un livre. Holly Hilton, quant à elle, était en train de préparer des pancakes dans la cuisine ouverte.
‒ Bonjour vous deux, les accueillit-elle avec enthousiasme. J'espère que vous avez faim ! J'ai préparé beaucoup de chose pour ce matin. Du bacon, des œufs brouillés, des gaufres, des pancakes, des toasts avec de la confiture et de la pâte à tartiner, des cupcakes qui restaient d'hier, des-
Elle fut coupée dans son énumération par la porte d'entrée qui s'ouvrit brusquement et laissa apparaître MJ et Kara.
‒ C'est bon, on a trouvé du sirop d'érable ! S'exclama le jeune homme en brandissant la petite bouteille comme un trésor.
‒ Parfait ! Merci MJ.
La femme éteignit le feu et posa le dernier pancake sur la pile déjà prête dans l'assiette.
‒ Bon, c'est prêt ! Installez-vous à table et servez-vous !
‒ Génial ! Je meurs de faim, s'exclama Léna en descendant du canapé.
‒ Tout a l'air très bon, madame Hilton.
Le petit déjeuner se déroula dans la bonne humeur et dans les rires. La main de Léo ne quitta pas la cuisse de sa petite amie de tout le repas et rassura Charlie par sa présence.
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Mardi 29 janvier 2018, 7h34.
Comme pour chaque mardi matin, l'équipe de basketball était réunie à l'intérieur du gymnase de leur lycée et s'entraînait. Charlie, qui se trouvait d'habitude dans les gradins, était restée dans la jeep de Julian pour ne pas se retrouver face aux coéquipiers de ce dernier et à leurs regards remplis de peine et de compassion. Ainsi donc, l'adolescente s'était installée derrière le volant, un magazine posé dessus, et avait allumé le chauffage pour rester au chaud. Il s'était remis à neige à l'aube et la température extérieur avait chuté.
La portière passagère s'ouvrit et laissa entrer une brise glacée tandis qu'une personne prenait place aux côtés de Charlie qui frissonnait. David claqua la portière une fois assis et frotta ses mains entre elles dans l'espoir de les réchauffer.
‒ Bordel, il fait super froid aujourd'hui !
Charlene le regarda ébouriffer ses cheveux pour retirer des flocons de neige puis elle se retourna face à son magazine.
‒ Mmh, fredonna-t-elle distraitement. Dis-moi, est-ce que tu connais le nom d'un « félin d'Amérique du sud » en... Un, deux, trois, quatre, cinq, six... En six lettres. Et qui commence par un « O » ?
David arrêta tout mouvement, dirigea son regard vers elle et haussa un sourcil.
‒ Attends, tu es sérieuse avec tes mots fléchés là ? Taquina-t-il. C'est un truc pour les vieux ça.
‒ Je vais travailler mon cerveau.
‒ Tu fais travailler ton cerveau, répéta David en haussant son deuxième sourcil, amusé. En me demandant la réponse ?
Détachant son regard de son magazine, Charlie planta ses yeux chocolat dans ceux de son ami.
‒ Dis-le-moi tout de suite si tu ne connais pas la réponse David, je ne te jugerais pas mais, s'il te plaît, ne critique pas mes activités. Les mots fléchés me détendent. Ils me permettent de penser à autre chose qu'à l'agression qu'on a subi avec Nolan ce soir-là, qu'aux trois connards qui s'en sont pris à nous ou encore qu'au décès de mon triplé... J'ai tellement de chose en tête : ma mère qui s'est barrée, mon père qui est devenue une véritable loque humaine, ma petite sœur dont je dois m'occuper qui n'a que cinq ans et qui ne comprends pas tout ce qui se passe autour d'elle, énuméra Charlie. Les mots fléchés m'aident à oublier tout ça, à me déconnecter pendant quelques minutes. Et c'est vraiment ce dont j'ai besoin avant que mon cerveau n'explose. Juste quelques minutes sans me demander ce que je vais bien pouvoir préparer à manger le soir, sans me demander non plus dans quel état je vais retrouver mon père, ni si ma mère compte revenir à la maison un jour. Un instant pour ne pas me demander comment je vais réussir à continuer de vivre sans Nolan à mes côtés, sans cette si grosse partie de moi, surement la meilleure... Alors... Si ça, indiqua-t-elle en secouant le magazine et en reprenant sa respiration qu'elle avait retenue depuis le début de sa tirade. Si ça... Si les mots fléchés peuvent m'aider à me faire sentir mieux, même si c'est seulement pour quelques minutes, alors je serais prête à en faire chaque jour. Pendant des heures. Quitte à passer pour une vieille fille le reste de ma vie.
Après un moment de silence, le fauteuil en cuir de la voiture couina tandis que David se dandinait maladroitement.
‒ Ocelot.
‒ Uhm ? Quoi ?
‒ Eh bien, tu as demandé un « félin d'Amérique du sud » en six lettres et qui commence par un « O ». C'est un « ocelot ».
‒ Oh mais oui, bien sûr ! Pourquoi est-ce que je n'y ai pas pensé plus tôt ?!
Charlie ajusta sa prise sur son crayon et vérifia que le mot rentrait bien dans les cases.
‒ C'est le bon mot, confirma-t-elle.
La brune écrivit le mot et sourit en constatant qu'il l'aidait à en trouver un autre. En attendant que l'entraînement de l'équipe de basketball se finisse, les deux amis se lancèrent pour faire toute la page des mots fléchés. David ne tenta pas de poser des questions à Charlie sur ce qu'elle avait dit. Il savait qu'elle ne lui répondrait pas et ne voulait pas l'y forcer. Après tout, il avait l'habitude son meilleur ami était comme ça. Les caractères de Nolan et Charlie étaient très semblables tandis que celui de Julian se démarquait. Finalement, l'alarme du téléphone de Charlie sonna et indiqua donc que c'étaitl'heure d'aller en cours.
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Mercredi 30 janvier 2018, 22h03.
Aujourd'hui était un jour spécial, Mary fêtait ses dix-huit ans. Habituellement quand c'était l'anniversaire de quelqu'un, la bande se rejoignait sur le parking du lycée à midi et sortait au restaurant. Cependant, cette année, Charlie avait séché les cours et s'était donc contenter de passer un coup de téléphone distrait dans la matinée. Elle espérait que Mary ne s'était pas rendue compte qu'elle était complètement stone.
L'adolescente s'était levée aux alentours de sept heures quand Boone et Lucy s'étaient pointés en bas de chez elle et avaient sonnés à la porte jusqu'à ce que Julian vienne ouvrir, énervé. Les trois amis s'étaient ensuite enfermés dans le bureau au rez-de-chaussée sous le nez du basketteur et snifèrent plusieurs lignes de cocaïne. Ils ne ressortirent de la pièce qu'une dizaine de minutes plus tard quand la porte d'entrée claqua, signalant que Julian était parti pour le lycée, et coururent jusque dans les bois au fond du jardin.
C'était désormais le soir et Charlie venait de rentrer chez elle après avoir passé la journée dehors avec Lucy et Boone. Elle se traîna dans le salon et s'affala à plat ventre sur le canapé pour somnoler un peu.
‒ Charlie ? L'appela-t-on, tout proche. Tu dors ?
Grommelant de fatigue, l'adolescente souleva une paupière et son regard tomba immédiatement sur sa petite sœur. Cette dernière se tenait à quelques centimètres à peine du visage de Charlie et la jaugeait du regard, sa peluche licorne serrée contre son flanc.
‒ Tu es déjà rentrée de l'école Ellie ? Questionna-t-elle en se redressant.
Elle s'assit sur le canapé et essuya la bave qui avait coulé sur sa joue avec la manche de son pull avant de bailler à s'en décrocher la mâchoire. Elle frotta ensuite son visage pour essayer d'éloigner l'épuisement.
‒ Il est vingt-deux heures trente, Charlie.
‒ Oh, souffla-t-elle, stupéfaite. Alors, va au lit mon chaton.
‒ Mais-
‒ Allez, la coupa sa sœur aînée. Brosse-toi les dents et retourne te coucher.
La fillette la regarda quelques secondes puis elle se détourna et monta à l'étage. De son côté, Charlie se rendit dans la cuisine jusqu'au frigo dans l'espoir de prendre un truc à grignoter et s'arrêta net quand elle vit le post-it orange collé dessus. Elle se pencha et lit ce qui y était inscrit : « Je suis sorti avec Mary. Des restes de poulet et de pâtes dans le frigo. Faites attention à vous. Julian ». L'adolescente réalisa qu'Ellie n'avait pas mangé, c'était sûrement ce que la petite fille avait tenté de lui dire.
Horrifiée d'avoir pu oublier de nourrir sa petite sœur, Charlie s'empressa de monter à l'étage et se rendit dans la chambre d'Ellen qui était plongée dans le noir. Elle tendit sa main, alluma la lumière et s'approcha du lit où la fillette était allongée, enfouie sous sa couverture. Elle s'accroupit au côté du lit.
‒ Ellie, chérie, appela-t-elle en l'aidant à se redresser. Allez, réveille-toi.
‒ On va manger ?
‒ Oui. Je suis désolée, j'avais la tête ailleurs Ellie.
Cette dernière lui pardonna bien vite quand une assiette de nourriture fut placée devant elle.
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Vendredi 1 février 2018, 17h58.
Les mains sur ses hanches, Charlie se tenait debout sur le trottoir en face de sa maison et la fixait avec les sourcils froncés. La façade blanche se fondait avec la blancheur de la neige qui tombait violemment sur la ville, ça ne lui convenait pas. Une brise fraiche fit voler ses cheveux et Charlie frissonna, elle n'était habillée que d'un léger gilet.
‒ Uhm, euh... Charlie ?
Dans un sursaut, l'adolescente cligna des yeux et se retourna vers la personne qui l'avait appelé. Léo se tenait derrière elle et la regardait, une lueur inquiète dans son regard.
‒ Qu'est-ce que tu fais dehors par ce temps froid bébé ?
‒ Cette façade de maison est bien trop fade.
‒ Quoi ? Fit-il, perdu. Quelle façade ? Celle de ta maison ?
‒ Oui. Il faut que je la repeigne, décida-t-elle brusquement. Avec du bleu. Ou bien du vert.
Pinçant ses lèvres en une fine ligne, le jeune homme posa ses mains sur les épaules humides de sa petite amie et l'attira contre son torse.
‒ Peut-être une autre fois, rétorqua Léo. Tu n'es pas assez couverte Charlie, et tu trembles. Il faut que tu rentres te mettre au chaud, d'accord ?
Distraitement, alors que son regard se redirigeait vers la façade, Charlene hocha la tête et se laissa entraîner à l'intérieur. Léo la fit s'asseoir sur le canapé du salon, l'enveloppa dans un plaid chaud et alla à la cuisine pour lui préparer un café. La jeune fille glissa ses mollets sous ses fesses, se pelotonna dans le plaid et ferma ses yeux en écoutant les bruits que faisaient Léo dans la pièce d'à côté. Quelques minutes plus tard, il revient dans le salon, s'assit à ses côtés et lui tendit un café qu'elle but rapidement avant de reposer la tasse sur la table basse. Le brun la prit dans ses bras, la laissa blottir sa tête dans son cou et déposa un baiser sur son front froid.
‒ Tu as l'air épuisé bébé. Fais une petite sieste, je vais rester avec toi.
‒ Oui, d'accord.
Charlie referma ses yeux, frotta légèrement son nez à la peau chaude de son petit ami et embrassa son cou. Très vite, elle s'endormit profondément en se sentant en sécurité.
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Samedi 2 février 2018, 15h36.
Plus tôt dans la journée, Julian avait invité toute la bande à venir regarder un film chez eux, ainsi donc ils étaient tous réunis dans le salon devant « Le monde de Narnia ». Charlene avait la tête posée sur les genoux de Nina tandis que celle-ci passait ses doigts dans ses cheveux en de douces caresses. Ses pieds étaient sur les cuisses de Mary qui avait enroulé ses chevilles de ses mains. David était avachi sur un des fauteuils alors que les deux autres garçons -Julian et Steven- étaient allongés sur une couverture au sol.
Charlie ne se préoccupait pas du film, son attention était entièrement tournée vers Nolan. À l'instar de son meilleur ami, le jeune homme était étendu dans le deuxième fauteuil. Il tenait un grand bol de pop-corns caramélisés dans ses mains et regardait le film. Leurs regards s'accrochèrent l'un à l'autre et Nolan lui sourit.
‒ Je t'aime, murmura-t-il.
Je t'aime mon frère, répondit Charlie dans sa tête.
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Média : Nina
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