Seize.

Eliel tirait la tronche comme un enfant de cinq ans. S'il y avait eu possibilité de rapprochement durant la soirée, Loan venait de tout foutre en l'air, car Hisae s'était enfuit dès que son frère était rentré.

Les revoilà donc autour de la table, en train de manger le crumble que leur avait préparé sa mère dans un silence religieux. Plus personne ne parlait et le brun se demandait si les quatre adultes ne s'étaient pas un peu crêpés le chignon ? Sa mère semblait crispée et celle de Loan souriait sans raison, de manière forcée tandis que les hommes restaient impassibles.

Il posa son coude sur la table et appuya sa tête contre la paume de sa main. Il avait à la fois envie que les invités partent, et d'un autre, restent pour qu'il puisse passer un peu plus de temps avec Hisae. Sa seule présence lui faisait du bien, même s'il devait prendre énormément sur lui pour ne pas lui sauter dessus. Quand son blond le regarda, il lui offrit un petit sourire discret. Il était heureux malgré la frustration, car il savait que ça n'allait pas durer.

Que lui avait-il fait ? Depuis quand pensait-il à lui de cette manière ? Au fond, il savait pertinemment que son amour pour Hisae n'était pas anodin, qu'il était bien plus puissant qu'il ne l'imaginait ou s'avouait. Maintenant que la bombe était lâchée, il ne pouvait plus s'arrêter.

Les deux mères se mirent à bavarder sur le crumble et toute la table repartit dans des conversations, comme si elles venaient de briser la glace. Une heure à peine plus tard, les parents de son meilleur ami décidèrent qu'il était temps qu'ils rentrent chez eux. Eliel était déçu, il aurait voulu qu'ils restent toute la nuit, enfin, pas le père. D'ailleurs, celui-ci s'approcha justement de lui en lui présentant sa main. Il prit sur lui pour ne pas la serrer trop fort.

— Hum... Est-ce qu'il serait possible que... Que tu reviennes donner des cours à Hisae ?

Cette fois, il ne put se retenir et offrit un sourire vainqueur et prétentieux à son père, qui lui était gêné. Eliel pouvait voir à quel point cette demande lui écorchait la gorge, mais il devait reconnaître que son père était prêt à tout pour que son fils réussisse dans ses études et il trouvait ça honorable.

— Je sais pas trop, après tout ce que vous m'avez dit...Feint-il.

— S'il te plait. Je m'excuse si je t'ai blessé, mais tu dois comprendre que mes enfants, c'est tout pour moi alors si tu nuis à l'un d'eux, je n'aurais aucun scrupule à te faire partir, répondit son père déterminé.

— Je comprends, mais vous avez été très loin dans vos propos en rejetant la faute sur moi. J'accepte d'aider Hisae, mais à une condition.

— Laquelle ?

— Je préfère travailler chez moi, donc il viendra ici et vous me laisserez le voir autant de fois qu'il aura besoin. Je veux tout simplement que vous soulevez cette interdiction de nous voir.

Il sembla réfléchir, posant sa main derrière sa nuque. Sa femme vint se mettre à côté, intéressée par leur conversation.

— Très bien, finit-il par soupirer.

Ils scellèrent leur nouveau pacte en se serrant la main, les yeux dans les yeux. Eliel se sentait fier, comme s'il venait de remporter une importante bataille, même si c'était grâce à Hisae. Il avait au moins le mérite d'avoir renégocier les « termes du contrats ».

— Que se passe-t-il ? demanda la mère alors que tout le monde s'approcha d'eux, intrigués.

— J'ai l'autorisation de votre mari pour revoir... Aider Hisae dans ses études.

— Vraiment ? questionna-t-elle les yeux écarquillées, mais brillant de joie.

Le père de Loan hocha la tête, faisant sourire grandement sa femme. Elle n'ajouta rien et ils partirent avec bonne humeur. Eliel serra simplement la main de son blond pour lui dire au revoir, mais il tint sa main plus longtemps que les autres et lui offrit un petit sourire tendre. Il jeta un œil à leurs parents qui étaient dans l'entrée, discutant encore et ne faisant absolument pas attention à eux, alors il s'approcha de lui et rapidement, embrassa ses cheveux à défaut de ses lèvres.

— A bientôt crevette.

— Ouais.

Son meilleur ami lui fit une accolade amicale et ils repartirent enfin chez eux. Eliel soupira, ce fut une soirée éprouvante où ses hormones criaient famine sans être rassasiées. Cette famille allait le rendre dingue à force.

Il monta à l'étage pour voir son petit frère avant d'aller se coucher, mort par sa grosse journée à la fac. Ses yeux commençaient déjà à lui piquer, il retira ses vêtements, ne laissant que son boxer et fila sous la couverture, la remontant jusqu'à son menton. Il remua quelques secondes pour réchauffer son lit. Il avait un sourire niais collé aux lèvres en pensant à Hisae et à son « embrasse-moi Eliel ». Il se remémorait sa voix profonde en cet instant et son expression si adorable. Il semblait perdu par le désir qu'il ressentait. Comme si le blond l'avait entendu, son téléphone vibra. Il se risqua à sortir une main dans le froid ambiant de la pièce pour s'en emparer.

Hisae : Il t'a dit quoi exactement mon père ?

Si son sourire était niais jusque là, cette fois-ci, il avait décuplé et lui mangeait tout le visage.

Eliel : Coucou mon bébé, oui ça va toujours, c'était une super soirée effectivement et moi aussi je crevais d'envie de te serrer dans mes bras... Et plus encore. Bonne nuit à toi aussi <3

Le blond avait, pour ainsi dire, aucun tact. Mais cela le faisait plus sourire que se vexer. Il le connaissait depuis sept ans maintenant, il avait eu largement le temps de s'y habituer.

Hisae : Comme si j'allais te dire des trucs aussi chiants.

Eliel : Séduis-moi.

Hisae : Pourquoi je ferais ça ?

Le brun tapa son téléphone contre son front. Pourquoi fallait-il qu'il aime un handicapé des relations humaines ?

Eliel : Parce que tu m'aimes.

Hisae : Et alors ?

Son cœur se remplit de joie, il ne démentait pas le fait qu'il l'aimait ! Il avait encore plus envie de l'embrasser, maintenant... Comme si tout son désir réapparaissait juste avec cette phrase.

Eliel : Tu m'aimes ?

Hisae : Bonne nuit.

Il sourit. Il posa son téléphone sur sa table de chevet et ferma les yeux, imaginant que sa crevette soit à côté de lui, ou même au dessus, encore mieux, en dessous ! C'est sur cette bonne note qu'il commença à s'endormir. Cependant, son interlocuteur n'était pas de cet avis et envoya un autre message. Il ronchonna mais récupéra tout de même son téléphone.

Hisae : Parle-moi. Je suis pas fatigué.

Les sourcils froncés et la rétine sensible devant la lumière de son écran, il tenta de répondre.

Eliel : Tu aimes quand je te parle ?

Hisae : Peut-être.

Eliel : T'as pas des amis avec qui discuter ?

Hisae : Si, mais je veux te parler à toi. Et te faire chier aussi, comme t'es fatigué.

Le brun se mit à rire, quel emmerdeur !

Eliel : Je te punirais quand on se verra. Comment tu sais que je suis fatigué ?

Hisae : Wow, je tremble de peur. Tout à l'heure, tu avais de petits yeux et tu clignais souvent des paupières.

Eliel : La jeunesse d'aujourd'hui... Observateur dîtes-moi.

Hisae : Le petit vieux a parlé. T'emballe pas, je me faisais juste chier et tu étais à côté.

Eliel : L'excuse bidon.

Il verrouilla son téléphone, se promettant de lui répondre le lendemain. Mais quand il sentit son smartphone vibrer une nouvelle fois, il ne put s'y résoudre.

Hisae : J'arrête pas de penser à toi...

Son corps s'enflamma directement et il se releva en position assise, regardant fixement l'écran. Plus les jours passaient et plus son blondinet l'étonnait. Mais il adorait ça ! Sur un pure coup de tête, il se leva et remit ses vêtements, fourrant son téléphone dans sa poche arrière de jean. Il descendit doucement les escaliers pour ne réveiller personne, embarqua ses clés de voiture et un blouson puis partit dehors.

Il roula doucement et en faisant attention, ses yeux lui piquaient et il savait que son corps réclamait une bonne nuit de sommeil, mais il avait atteint son quota maximum de frustration. Son message l'avait trop chamboulé pour qu'il ne réponde simplement par message ou qu'il puisse dormir tranquille.

Il se gara un peu plus loin dans sa rue et fit le chemin restant à pieds. Il passa au dessus du portail sans difficulté et arriva rapidement en dessous de la chambre du lycéen. Il hésita à lui lancer des pierres sur sa fenêtre, comme dans les films, mais il s'en abstint en se disant qu'il allait réveiller toute la maison ou briser la vitre. Il sortit donc son téléphone de sa poche. Ah les temps modernes, bien plus efficaces ! 

Eliel : Tu fais quoi ?

Hisae : Je me prends des vents.

Il sourit face à sa réponse. Oh non, il ne va pas se prendre de vent.

Eliel : Regarde par ta fenêtre, Roméo est là <3

Il entendit le verrou de sa fenêtre avant que celle-ci ne s'ouvre et laisse apparaître Hisae, les cheveux en bataille, juste vêtu d'un bas de pyjama et surtout, un petit sourire discret ornait ses jolies lèvres.

Oh oui, Eliel venait d'atteindre ses limites. 

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