Quatre.

Eliel vagabondait dans les rues, les mains en sang, la capuche sur la tête et une énième cigarette à la bouche. Il s'était fait plus de la moitié de son paquet en quelques heures à peine. Ses phalanges étaient extrêmement douloureuses, mais son esprit était tellement ailleurs que celui-ci diminuait la gravité de son état. Ses nerfs à vifs, il avait frappé trois types qui l'avaient cherché en sortant d'une boîte de nuit, s'acharnant et se défoulant sur eux, rejetant toute la frustration, la colère et la peine qu'il ressentait en lui. Il avait même balancé son téléphone contre un mur, l'écrasant par la suite. Un téléphone tout neuf...

Malgré son défoulement, il ressentait encore une profonde haine en lui qu'il n'arrivait à faire partir. Il se sentait vidé de tout... Chaque fois qu'il revoyait son torse marqué, qu'il repensait à ses mots, une terrible envie de frapper et de vomir lui prenait aux tripes. Comment... Comment avaient-ils pu faire ça à Hisae ? Comment avaient pu faire ça à un enfant ? Quand il s'imagina la torture qu'il avait subi, il posa une main sur le mur le plus proche et il rejeta tout ce qu'il avait mangé et bu dans la journée, vidant son estomac et brûlant sa gorge. Il était en train de se rendre littéralement malade. Il savait qu'Hisae allait bien désormais, mais il ne pouvait s'empêcher d'imaginer les évènements, d'imaginer sa douleur, sa peur, sa crainte immense que ces monstres reviennent le chercher... Quand il y pensa, il s'essuya la bouche d'un revers de main et s'écroula au sol, juste à côté de son vomis. Il finit sa clope et en reprit une autre de suite après.

Quelques minutes, ou heures, plus tard, il se releva difficilement, ses membres le tiraillaient et il reprit le chemin inverse. Il avait besoin de le voir, de le sentir contre lui, de sentir son odeur emplir ses narines. Il avait besoin de lui. Il tituba en marchant, comme s'il avait bu, et rejoint tant bien que mal la maison de son meilleur ami, qui devait actuellement le détester, mais il s'en fichait, il ne pensait qu'à son petit frère. Il s'était enfui comme un lâche, les laissant tout les deux dans la merde, Loan en sang et Hisae dans le rejet. Est-ce qu'il avait pensé qu'il le rejetait en partant ? Les larmes lui montèrent rien qu'en l'imaginant.

Il regarda sur sa montre qui indiquait deux heures du matin. Tant pis, il toqua à sa porte, mais en constatant que personne ne daignait lui ouvrir, il tambourina comme un fou, prêt à tout pour qu'on lui ouvre. Enfin, il entendit une clé entrer dans une serrure et la poignée tourner, pour s'ouvrir sur sa mère en peignoir et décoiffée. Elle sembla surprise en le voyant, et toute gênée, elle dit :

— E...Eliel, je crois pas que c'est une bonne idée, tu devrais rentrer chez toi...

Elle observa son teint maladif et ajouta :

— Je vais appeler ton père pour qu'il vienne te chercher, tu n'as pas l'air bien.

Elle allait partir chercher son téléphone mais Eliel la coupa dans son action.

— Non, je vous en supplie, laissez moi voir Hisae, s'il vous plait, j'ai besoin de le voir, prononça-t-il en murmurant, ayant cassé sa voix.

— Tu....

— Laisse chérie, je vais le raccompagner, annonça son père, les clés de sa voiture en main et son blouson déjà sur le dos.

— S'il vous plait, je vous en prie, je m'excuse, j'ai paniqué comprenez moi...

Mais personne ne l'écouta, son mari l'embrassa rapidement et il dirigea vers lui, l'expression fermée et prêt à le repousser loin de chez lui, loin de sa famille. C'est là qu'il se rendit compte qu'il avait sacrément merdé avec son meilleur ami, il n'avait pas vraiment prit le temps d'en réfléchir, trop obnubilé par son petit frère. Il aurait du parler au lieu de frapper, mais Loan le connaissait, il savait très bien qu'il faisait aller ses poings avant d'ouvrir la bouche, il avait perdu le contrôle de lui-même. Ils devaient le comprendre ! Eux aussi auraient réagi aussi violemment en voyant une personne qu'ils aimaient plus que tout amochée et marquée par une violence certaine !

— Je vous en supplie...

— Laissez le le voir, s'éleva une voix derrière les parents.

Tous se retournèrent et Eliel put constater les dégâts de sa colère sur son meilleur pote. Il avait un énorme bleu sur sa pommette droite et sa lèvre était légèrement fendue sur le coin de sa bouche, il devinait d'autres dommages au niveau de son ventre, car il grimaça quand il s'approcha d'eux.

— Pardon ? Enfin Loan, il t'a... commença sa mère.

— Je sais, mais c'est Eliel, c'est pas la première fois qu'on se met sur la gueule et je le comprends, j'aurais réagi aussi violemment que lui si je n'avais pas eu d'explications avant. Il faut le comprendre, ses actes sont pour moi en partie justifiés, ça aurait très bien pu être nous qui avons infligé... Ces horreurs sur le corps d'Hisa. Il a paniqué, il a frappé point. Ça montre juste un peu plus son attachement à lui, alors laissez le le voir, vous savez comme moi qu'Hisae en a aussi besoin, lâcha Loan en regardant ses parents successivement.

Ils se regardèrent tout les deux, comme s'ils réfléchissaient en même temps et son père se décala pour enfin laisser entrer Eliel. Mais avant qu'il ne puisse grimper dans la chambre du blond, son poignet fut attraper par une main ferme qui le serra fort.

— Je te préviens, si tu fais quoique ce soit à mon fils... Je te tue de mes propres mains, que tu sois le fils de mes amis ou non, c'est compris ? gronda son père avec autorité.

— Je vous promets que je ne ferais rien.

— J'oubliais, il a fait une crise de panique en te voyant partir, donc s'il ne veut pas te voir, tu pars sur le champs.

Cela lui donna l'impression d'un couteau en plein cœur... Alors comme ça, il l'avait réellement mal pris ? Il se détestait. Il hocha la tête et son père le lâcha enfin, il ne prit même pas la peine de s'excuser auprès de Loan, il le ferait plus tard, là il ne souhaitait qu'être à ses côtés pour le moment, rien d'autre. Il grimpa les marches quatre à quatre, manquant de se rétamer, il poussa doucement la porte de sa chambre, entrant à l'intérieur avec la crainte de se faire rejeter, qu'il ne veuille plus jamais le voir. Il s'approcha à pas de loup vers son lit, sa chambre était plongée dans le noir mais la faible luminosité dû à la lune laissait entrevoir un corps sous l'épaisse couverture. Il la souleva doucement et se glissa à l'intérieur avec son blouson et ses chaussures encore sur lui. Il prit juste la peine d'enlever sa capuche. Il se colla immédiatement à son corps en enroulant ses bras autour, plongeant son visage dans son cou, prenant une grande inspiration. Aussitôt, il le sentit se crisper contre lui. Il en eut un pincement au cœur, mais ça ne l'empêcha pas pour venir embrasser son épaule dénudée tendrement.

— Eliel... murmura faiblement Hisae.

Il se laissa faire durant quelques secondes avant de se retourner et de le repousser, ses paumés à plat contre son torse.

— Hisae je...

— Tu pues, va te laver, annonça-t-il de but en blanc, surprenant le brun.

— Tu veux bien que je reste ? demanda le plus vieux d'une petite voix.

— Seulement si tu te laves.

Il ressentit un énorme soulagement, il ne le rejetait pas. Il se leva en même temps que le plus petit et le suivit jusqu'à la salle de bain, le regardant allumer l'eau. Quand il se tourna vers lui, ses yeux descendirent sur ses mains en sang et il en écarquilla les yeux. Il s'approcha et prit ses doigts dans les siens, observant l'ampleur des dégâts.

— Qu'est-ce que t'as fait ? Et ton visage, t'as bu ? le questionna-t-il.

Eliel secoua la tête négativement. Il voulut l'enlacer mais le blond le stoppa une nouvelle fois en soupirant.

— Laves toi, je reviens avec ce qu'il faut.

Il le regarda ouvrir la porte et la refermer, le laissant seul. Il enleva difficilement ses vêtements, grimaçant chaque fois que ses phalanges heurtaient ses habits ou sa peau. Il se mit sous l'eau et prit une bouteille au hasard, il ne regarda même pas si c'était du shampoing ou du gel douche et en versa dans ses cheveux puis sur ses doigts, il frotta son corps rapidement et rinça aussitôt. Il n'avait jamais été aussi vite pour prendre sa douche. Quand Hisae revint, il avait déjà éteint l'eau et enroulé une serviette autour de lui. Le blond fut surpris mais lui tendit un caleçon propre et une brosse à dents avec du dentifrice dessus. Il la mit dans sa bouche d'une main et de l'autre, enfila le boxer. Il se rinça ensuite la bouche avec de l'eau et Hisae le fit s'asseoir sur la cuvette des toilettes, ayant à ses côtés du désinfectant et des pincements ainsi que des bandages. Il s'occupa très bien de lui et Eliel le fixait, il n'arrivait pas à détacher son regard de lui, il constata aussi que les joues du blond avaient rougi, ce qui le rendait encore plus adorable... Jusqu'à ce qu'il se souvienne des monstruosités qu'on lui avait infligé. Il serra les poings, même si ça lui faisait un mal de chien.

— Eliel fais pas ça, tu vas continuer à faire couler ton sang sinon, le gronda Hisae.

Eliel se détendit et le blond se releva, inspectant ses cheveux encore trempés. Il attrapa une serviette et entreprit de les essuyer lui-même. Puis, il lui prit la main et les reconduit dans sa chambre. A peine passé le pas de la porte qu'Eliel le tira à lui et le serra fort contre son corps, plongeant son nez dans ses cheveux. Hisae soupira, mais cette fois, ce n'était pas d'agacement mais plutôt de... Soulagement ?

— Allons dans le lit, j'suis fatigué.

Le brun s'exécuta et le laissa entrer le premier dans son lit, le regardant se mettre dos à lui. Il vint à son tour sous les couvertures, mais au lieu de le coller, il appuya sur son épaule pour qu'il se retrouve allongé sur le dos et grimpa sur lui, à quatre patte au dessus.

— Qu'est-ce que tu fais ? murmura Hisae la voix fatiguée.

Eliel releva son marcel jusqu'à son cou et s'abaissa sur son ventre.

— Non Eliel... protesta-t-il sans réelle volonté, sentant son souffle chaud se répercuter sur sa peau et provoquant une lignée de frissons sur celle-ci.

Mais il ne l'écouta pas et déposa ses lèvres sur son nombril, y laissant un baiser papillon. Il sentit le ventre du blond se creuser et continua sa chemin, embrassant sa peau partout où il le pouvait, remontant jusque dans son cou. Offrant une trainée de baisers sur ses marques.

— Qu'est-ce que tu fais ?

— Je veux te faire du bien, annonça-t-il enfin. Demandes moi tout ce que tu veux Hisae et je le ferais.

Il reprit ses baisers dans son cou et descendit une nouvelle fois, embrassant ses nombreuses cicatrices. Il entendit un petit gémissement du blond. Deux mains vinrent se poser sur ses joues et sa tête fut remontée à hauteur de la sienne.

— Je veux que tu arrêtes de fumer, lança-t-il.

— Je... Non ça je peux pas...

Surtout en apprenant ce qu'il venait de découvrir plus tôt dans la soirée. Il avait besoin de sa drogue, ça avait le don de l'apaiser ne serait-ce qu'un peu. Sinon, il savait qu'il serait capable de tuer quelqu'un.

— Alors tu ne veux pas me faire du bien. Tu as déjà réussi à arrêter une fois, tu seras le faire une deuxième fois, s'il te plait...

Eliel posa son front contre son torse nu, soupirant.

— Je vais essayer, lui promit-il.

Sa voix le faisait souffrir, ses cordes vocales ayant étaient martyrisées. Il savait que le lendemain, il ne pourrait plus prononcer un mot.

— Bien.

Il ramena une nouvelle fois son visage en face du sien, même s'ils ne pouvaient pas se voir.

— Tu es à moi Eliel, prononça-t-il solennellement.

Eliel embrassa sa joue plusieurs fois et se mit sur le côté, le tirant dans ses bras avec possessivité. Ils finirent par s'endormir lové l'un contre l'autre.







Je croyais que ça allait être un petit chapitre, mais finalement, il fait un peu plus de 2000 mots, comme quoi, j'ai pas vu le temps passer en l'écrivant x) 

Aussi, je me suis rendue compte que j'avais oublié de prévenir que cette histoire est moins légère que mon autre short story avec Aloys et Vahé, donc je m'excuse pour ceux qui ont lu en pensant retrouver le même atmosphère et qui n'aime pas le registre plus sombre !  

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